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Racistes, vénaux, sexistes? Les sites de rencontre sur la sellette…

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Il est aujourd’hui de bon ton de critiquer les sites ou applications de rencontre : prétextes à se faire offrir un dîner, à choisir des partenaires sexuels trop ou pas assez exotiques, Tinder et ses concurrents auraient tous les vices. Attention, la police des braguettes patrouille…


Si vous croyez que les sites de rencontres ne servent qu’à trouver l’amour ou à se faire culbuter, détrompez-vous. Sarah, une étudiante britannique, a avoué au site féminin australien Whimn profiter de l’application Tinder pour se nourrir à l’œil. Rouée, la célibataire dîne mais ne couche pas ! L’idée lui est venue après avoir accepté un rendez-vous avec un homme au physique décevant. « Dan avait l’air d’avoir dix ans de plus que sur ses photos et il était plus petit que moi », se justifie la jeune fille. Buvant pour oublier, Sarah a accepté de se faire payer l’addition. Depuis, elle s’est sustenté à l’œil une bonne quarantaine de fois en deux ans : « Je ne ressens pas une once de culpabilité je ne fais rien d’illégal, et si un jour je rencontre l’amour sur Tinder, je partagerai l’addition. » Comme quoi, la galanterie a survécu… chez ses chevaliers servants.

Cherche asiatique soumise

Profondément inégalitaires, le plus souvent au détriment des hommes, les sites de rencontres sont une terre de mission prisée des croisés antiracistes. D’après un article de Slate, la discrimination y serait monnaie courante sous des formes classiques « Pas de femmes noires ni de mères célibataires » et plus inattendues : « la fétichisation des personnes racisées ». Les amateurs de femmes asiatiques réputées soumises ou d’hommes africains connus pour la « taille de leur âme » se le tiendront pour dit. La police des braguettes veille…

L’antiracisme se mord la queue

Jusque dans les colonnes du Monde, où la chroniqueuse Maïa Mazaurette s’est fendue d’un long article pour nous expliquer que les Blancs n’ont qu’une idée en tête : épingler une orientale lascive ou un étalon noir à leur tableau de chasse. Si la xénophilie est aussi blâmable que la xénophobie, on finira tous le doigt sur la couture du pantalon…

Libérons nous du féminisme !

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Ruby Namdar, un grand écrivain israélien est né


Avec son premier roman La Maison de ruines, Ruby Namdar met en scène un juif new-yorkais en proie à la crise du milieu de vie. Rendant hommage à Roth, Bellow et Singer, son auteur imprégné de mystique juive et soufie nous entraîne sur les territoires perdus du sacré. 


Ruby Namdar a la main lente. Son brillant premier roman, récompensé en Israël par le prestigieux Sapir Prize, l’équivalent de notre Goncourt, coule paresseusement comme l’Hudson River, que le héros principal, Andrew Cohen, contemple chaque jour depuis sa fenêtre. L’action de La Maison de ruines se déroule à New-York, à quelques mois de l’apocalypse du 9 septembre 2011. Cohen a tout en commun, dirait-on, avec les personnages qui peuplent les romans de Philippe Roth ou de Saul Bellow : la sophistication d’un intellectuel juif chargé de cours de culture comparée à l’université de New York, la vanité, les snobismes gastronomiques, une vie familiale éclatée par un divorce et toute la confiance en soi nécessaire à un homme aux alentours du demi-siècle pour entamer une relation sentimentale avec une femme qui pourrait être sa fille.

« J’aime la friction entre ce que notre cerveau contrôle et le subconscient d’où nous n’avons pas réussi à chasser le mot péché »

Mais Andrew Cohen n’est ni Zuckerman ni Herzog, pas plus que Namdar n’est Roth ou Bellow. Certes, les obsessions du romancier israélien, installé à New-York depuis bientôt vingt ans, se rapprochent de celles de tous les grands écrivains juifs de la côte Est. Ainsi dans La Maison de ruines, il s’empare de la question de l’acculturation des intellectuels juifs coupés de leurs racines spirituelles, de leur rapport à la tradition, à la religion, du poids de l’Histoire et de l’héritage, et, enfin, de la psychologie masculine avec sa hantise de l’impuissance et du vieillissement. Seulement, la finale dégringolade d’Andrew Cohen relève moins de la « mid-life crisis » ou même de la crise existentielle, que d’une détresse métaphysique, sinon mystique. Et c’est là que Namdar rejoint Singer, non mécontent qu’on lui impute cette filiation. « Mon livre rend à sa façon hommage à Roth, Bellow, Oznik, Malamoud… Mais Singer restera mon maître incontestable, avec sa manière spécifique de glisser le surnaturel dans la vie quotidienne de ses personnages, son recours aux métaphores bibliques, son humour et son goût pour le grotesque », confie-t-il.

Jovial, enthousiaste, chaleureux, Ruby Namdar possède en outre ce talent délicieux de vous entraîner vers les territoires perdus de la grande littérature où, jadis, on cultivait les passions ontologiques en rapport avec ce quelque chose que l’on appelle l’ « essence de l’être », tout comme avec les questionnements sur le Bien et le Mal, la morale, ses fléchissements. Il lui suffit d’une impulsion, d’un signe de votre sensibilité au sujet. Quand vous lui faites une remarque à propos du mot « péché », qu’il avait employé dans son texte publié par The New York Times, il saisit la balle au vol. « Dire ‘péché’ est devenu subversif, provocateur, inconvenable, je le sais… Or, j’aime la friction entre ce que notre cerveau contrôle et le subconscient d’où nous n’avons pas réussi à chasser le mot ‘péché’, où il a sa place. Nous vivons une époque qui n’aime même plus le mot ‘âme’. Pourtant je le préfère mille fois à tous ces ‘psyché’, ‘ego’, ‘souffle vital’. Et je préfère le mot ‘religion’ au mot ‘spiritualité’, susceptible d’évacuer le moindre conflit en nous, d’apaiser le moindre inconfort. » L’homme a grandi à Jérusalem, au sein d’une famille juive originaire d’Iran. Ceci explique probablement sa distance, gentiment moqueuse, face à l’aspiration laïque qui habite la littérature israélienne contemporaine. « Mon travail n’est pas représentatif de la scène littéraire en Israël. Il y a une certaine proximité avec Amos Oz, rien de plus. Les écrivains vivent à Tel-Aviv, le Babel séculier, profane, amusant aussi, mais éloigné de mes préoccupations », tranche-t-il, avant de sauter à pieds joints dans une savoureuse digression sur les poètes soufis, qu’en son temps il a traduit du persan vers l’hébreu. Qu’est-ce qu’un péché, donc, à notre époque, dans notre monde ? La question semble avoir heurté Ruby Namdar, qui délaisse soudain la petite cuillère dans une tasse à café désormais vide : « Allons ! Qu’on le veuille ou pas, nous sommes des créatures morales et savons, au fond, reconnaître un péché. Les fondamentalismes, quels qu’ils soient – islamistes, chrétiens, juifs –, se nourrissent précisément de cet effacement de toute référence religieuse de notre âme collective. »

« Nous ne croyons plus que nous sommes sacrés ! »

Impossible d’y échapper, bien que nous soyons sensibilisés au fait qu’il est malpoli de juger notre prochain. Reste que si Andrew Cohen est en proie à des visions dantesques de sa ville en ruines et voit sa vie en miettes, à croire qu’elle n’a jamais été rien d’autre que du pain rassis, c’est qu’il a péché. Cohen avait péché. Et son péché n’est autre que l’orgueil que nous tous, modernes et affranchis des culpabilités néfastes à notre développement personnel, cultivons à l’envi.

Nous nous suffisons. Tant qu’un minuscule accident de parcours ne nous contraint pas à examiner les abysses de notre propre existence. Dans le cas du professeur Cohen, il s’agit d’une promotion qui lui file sous le nez au dernier moment, de surcroît au profit d’une ancienne étudiante ou, peut-être, de l’essoufflement de sa liaison avec la jeune Ann Lee, voire des deux. L’immense mérite de Ruby Namdar, c’est de dépasser l’individuel pour atteindre l’universel – définition même de la littérature. Ce qui est arrivé à Cohen, peut arriver à n’importe lequel d’entre nous, peu importe la tradition ou la religion dont il est issu. Où, alors, chercher secours ? Chez un psy, vu que l’édifice religieux que l’on honore de notre présence à l’occasion des grandes fêtes ne paraît pas trop sérieux, à l’instar de la synagogue dans laquelle Cohen faisait de rares apparitions : « Anshei Shalom, la synagogue qu’il fréquentait, était particulièrement progressiste, pour ne pas dire avant-gardiste. À l’exception de quelques versets choisis pour leur valeur poétique par les rédacteurs du New Holiday Prayer Book, presque tout le service se déroulait en anglais. […] En recherche constante d’adaptation, Anshei Shalom incarnait à la perfection le désir d’égalité, le multiculturalisme, l’humanisme et la politique de gauche libérale qui flottaient dans l’air du temps. » En 1964, lors d’un concert à Montréal, Leonard Cohen a poussé un cri d’illuminé : « Il y a une terrible vérité qu’aucun écrivain juif d’aujourd’hui n’a envie d’examiner. Cette vérité est que nous ne croyons plus que nous sommes sacrés ! » Ruby Namdar relève le défi consistant à prouver que nous nous trompons. Avec succès.

Ruby Namdar, La Maison de ruines, Belfond, 2018, 23 euros.

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Bolsonaro, dernier « facho » avant la fin du monde?

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Fait n°1

Selon le WWF, entre 1970 et 2014, les populations de vertébrés sauvages ont chuté de 60 % au niveau mondial. La dégringolade est encore plus marquée dans les zones tropicales.

Fait n°2

L’élection de Jair Bolsonaro achève, si besoin était, de prouver à quel point la démocratie représentative à l’époque du capitalisme assisté par les réseaux sociaux et les fake news est le régime qui évite aux lobbys patronaux ultralibéraux accompagnés par des militaires d’avoir recours aux blindés, comme au Chili en 1973, pour mener leur politique. La démocratie version années 2010, ce sont  les pigeons qui votent pour l’ouverture de la chasse.

Fait n°3 :

Que les Brésiliens jouent à la roulette russe avec leurs libertés, c’est leur droit. Après tout, se laisser convaincre par plus riche que soi que Bolsonaro apportera la sécurité, ça ne concerne que celui qui le fait. Tout le monde peut choisir de débrancher son cerveau et de perdre sa conscience de classe. On remarquera cependant que le Nordeste et l’Etat de Bahia, plein de vrais pauvres, très pauvres, ont, eux au moins,  compris qu’ils allaient prendre cher.

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Ils ont voté Haddad à 70% et plus. Ils ont même compris que le Parti des travailleurs (PT), si l’on oublie le storytelling des réseaux sociaux ultraréacs, des milieux patronaux court-termistes et autres néoconservateurs, des paranoïaques du métissage, très présents chez nous aussi,  que le PT, donc, les a sortis de la misère. Et, pour ce faire, dans un pays avec des dizaines de partis à l’Assemblée nationale, a dû arroser des micro-alliés pour parvenir à mener à bien leurs projets éducatifs et sociaux.

Le PT a corrompu, beaucoup plus qu’il n’a été corrompu, et pour la bonne cause. On ne peut pas en dire autant de Temer qui a pustché parlementairement Dilma, la « durona », torturée en son temps par les grandes admirations de Bolsonaro

Fait n°4

Il est à mettre en rapport avec le fait n°1 : Bolsonaro veut fondre le ministère de l’Agriculture et de l’Environnement : bref, il veut laisser ses copains de l’agrobizenesse en finir avec l’Amazonie, le poumon vert de l’humanité que Lula et Dilma avaient réussi à préserver, ou tout au moins s’étaient efforcés d’y limiter la casse écologique.

Si je relie le fait n°4 au fait n°1, c’est là le vrai drame, à portée universelle, de l’élection de l’aphasique galonné. On sait tous (tout en ne voulant pas le savoir, dans une démarche typique du déni de ceux atteints d’une maladie incurable) que l’effondrement est imminent. Tous, à part une ultraminorité climatosceptique de ravis de la crèche marchande qui « n’y croient pas », soit parce qu’ils sont vieux, sans enfants et n’en ont plus rien à faire du monde après eux, soit parce qu’ils sont complotistes et qu’ils confondent le GIEC et les Illuminati.

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Le drame de l’élection de Bolsonaro, ce n’est même pas qu’il soit facho, c’est qu’il va accélérer encore, en détruisant l’Amazonie, notre arrivée dans l’apocalypse. A ce titre, il est bien de notre temps, celui de la déraison définitive. Ce que remarquait déjà Guy Debord, le Vieux de la Montagne, dans ses Commentaires de 1988: « La pollution des océans et la destruction des forêts équatoriales menacent le renouvellement de l’oxygène de la Terre (…) Le spectacle conclut seulement que c’est sans importance. Il ne veut discuter que sur les dates et les doses. Et en ceci seulement, il parvient à rassurer ; ce qu’un esprit pré-spectaculaire aurait tenu pour impossible. (…) Il est assurément dommage que la société humaine rencontre de si brûlants problèmes au moment où il est devenu matériellement impossible de faire entendre la moindre objection au discours marchand. »

Trois mesures pour mettre fin à l’immigration illégale

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Une tribune du think tank, Le Millénaire, qui travaille à la refondation du projet politique des Républicains.


L’immigration est un sujet trop essentiel pour ne pas le traiter de manière factuelle, sans hystérie et sans caricature. Le dernier remaniement, avec l’abaissement protocolaire du ministre de l’Intérieur de la 2ème à la 11ème place, démontre pourtant qu’il ne s’agit pas d’une priorité pour Emmanuel Macron, alors même que les questions d’immigration et de sécurité sont redevenues dans les derniers sondages les premières préoccupations des Français.

La France et, plus largement, l’Union européenne (UE) sont mises à l’épreuve d’une pression migratoire sans précédent. L’UE chiffre le nombre de migrants arrivés entre 2015 et 2017 sur son territoire, et qui ne peuvent prétendre à l’asile, à 1,5 million. En France, le nombre de demandeurs d’asile a augmenté de 17% pour la seule année 2017, dépassant ainsi la barre des 100 000. En parallèle, la primo-délivrance des titres de séjour bondit de 13,7 % en 2017, avec 262 000 titres de séjour délivrés, ce qui peut s’expliquer notamment par une forte augmentation des premiers titres de réfugiés et bénéficiaires de la protection subsidiaire (35 825 titres, +56,5% par rapport à 2016). A l’inverse, le nombre d’étrangers reconduits est de 26 000 pour 2017, et le nombre de mesures d’éloignement exécutées était de 18% en 2016. 75 587 étrangers sont donc restés sur notre territoire malgré la mesure d’éloignement prononcée à leur encontre.

A cet égard, force est de constater que les dispositions de la loi asile et immigration votée en août sont totalement insuffisantes. Les ténors de La République en marche ont beau claironner leur « fermeté », nous nous demandons où elle se trouve au milieu de dispositions favorables aux migrants (notamment l’augmentation de la durée de titre de séjour des bénéficiaires de la protection subsidiaire), de mesures proprement hallucinantes (comme l’octroi automatique de l’asile aux frères et sœurs des mineurs réfugiés) et de mesures essentiellement techniques et procédurales (la réduction du délai de traitement de l’asile). Quant à l’augmentation de la durée de séjour en Centre de rétention administrative, l’extension des pouvoirs d’investigation ou le raccourcissement des délais de dépôt des demandes… ce ne sont, très honnêtement, que des rustines sur une jambe de bois. En effet, ces dispositions n’interviennent qu’a posteriori, une fois que le migrant illégal est déjà sur notre territoire. Or, tant qu’il sera possible d’y pénétrer illégalement, et de commencer à s’y installer, l’immigration illégale ne fera que croître, et les morts en mer sur le chemin de l’UE également.

Pour faire face à un enjeu migratoire d’une ampleur sans précédent, ne sont donc à la hauteur ni les ajustements paramétriques et normatifs votés par la majorité, ni l’immigration zéro dont rêve le Front national. En effet, le zéro immigration (y compris qualifiée) nous serait extrêmement dommageable économiquement, et romprait avec notre ADN de pays accueillant envers les étrangers partageant nos valeurs républicaines.

Au contraire, nous estimons nécessaire rien de moins qu’une révolution copernicienne en matière migratoire, traduite dans les faits par une action ferme et résolue aux niveaux nationaux et européens.

La priorité absolue doit être la lutte sans merci contre l’immigration illégale. Il est urgent de rétablir le délit de séjour irrégulier en France, supprimé sans explication par le quinquennat précédent. De même, le respect de nos lois est un principe non négociable : le placement en centre de rétention administrative des étrangers en situation irrégulière, puis leur expulsion, doit redevenir la règle et non l’exception. Malgré ce que nous dit le gouvernement, ce n’est pas du tout sa priorité, et cela le sera encore moins avec M. Castaner à l’Intérieur : l’allongement de la durée maximale de rétention et l’augmentation du taux d’occupation (qui avoisine les 100%) n’ont pas été pris en compte dans le budget 2018. Le budget des Centres de rétention administrative est de 45,8 millions d’euros pour 2018 alors que le budget exécuté en 2016 était de 61,3 millions d’euros pour le placement en rétention de 44 086 personnes. Comment veut-on exécuter cette politique si l’on n’y alloue même pas les moyens budgétaires nécessaires ?

Cependant, la simple application des lois existantes est loin de suffire. Nous devons changer de paradigme. Au lieu de continuer à favoriser l’immigration illégale (en n’expulsant pas les clandestins et en continuant d’offrir des services comme l’Aide médicale d’Etat) au détriment de l’immigration légale (qui nécessite de faire des queues scandaleuses dans nos préfectures pour l’obtention de titres de séjour légal), nous devons faire l’inverse. Trois mesures s’imposent.

Premièrement, les demandeurs d’asile provenant de pays dits « sûrs », comme l’Albanie, ne doivent plus pouvoir déposer leur demande d’asile dans notre pays, mais dans leur pays, au consulat français le plus proche de chez eux. De la même manière, nous devons installer des centres offshore de traitement des demandes d’asile, non seulement dans les camps de réfugiés du Haut Commissariat aux Réfugiés de l’ONU, mais aussi et surtout dans les pays d’origine et de transit, de telle sorte que les migrants, d’où qu’ils viennent, n’aient pas besoin de poser le pied sur le territoire européen pour y déposer leur demande d’asile : il ne doit plus y avoir d’excuse à l’entrée de manière illégale sur notre territoire. Les migrants entrant illégalement dans l’UE par bateau ou voie terrestre pourront alors être interceptés et transférés vers ces centres offshore.

Deuxièmement, nous devons nous doter d’un système de gestion de l’immigration légale à la fois simple, efficace, et surtout fiable, à l’instar de l’ensemble des pays développés ayant une politique migratoire où la loi est appliquée. En effet, nous devons bien mieux distinguer entre immigration légale et illégale. Pour cela, il est impératif de créer enfin un véritable statut de résident, avec des cartes de résident à la durée de validité égale à la durée du contrat de travail (ou des études) de l’étranger. De même, il convient de créer un statut de résident permanent, qui pourra être octroyé aux étrangers les plus qualifiés (ex : expatriés de multinationales, scientifiques ou artistes reconnus), qui dispensera l’étranger de devoir renouveler sans cesse son titre de séjour et lui évitera la tentation de demander la nationalité pour de simples questions de droit au séjour. Ce système, amplement prouvé dans des pays comme le Canada ou le Japon, permettra de désengorger les préfectures de manière drastique et permettra à ces dernières de se focaliser sur la répression de l’immigration illégale.

Enfin, nous devons pouvoir éloigner l’intégralité des étrangers en situation irrégulière. En effet, tous les efforts investis dans les politiques des visas, des frontières et de l’asile sont réduits à néant si les déboutés et les migrants ayant  pénétré illégalement sur notre territoire ne sont qu’une petite minorité à être éloignés. Il n’y a pas de gestion possible de l’immigration sans politique de retour efficace pour les illégaux. Le problème est bien connu : les pays d’origine de l’immigration ne délivrent pas suffisamment de laissez-passer consulaires, documents aujourd’hui indispensables à l’éloignement. Face à ce problème ancien, la vieille solution du conditionnement de l’aide au développement de la France à cette délivrance de documents ne sera jamais qu’une solution partielle et peu applicable. Nous devons donc aussi signer des accords avec des pays tiers afin que tous les clandestins ressortissants de pays récalcitrants à leur retour puissent être acheminés vers des centres de rétention construits dans le pays tiers, sur le modèle de l’Australie avec le camp de rétention à Nauru. C’est une solution gagnant-gagnant pour la France (le migrant illégal est expulsé) et pour le pays tiers (le centre de rétention fournit de l’emploi et est assorti d’aides financières), et qui permet de court-circuiter l’assentiment du pays dont l’étranger est ressortissant. De plus, l’éloignement se fait vers un endroit où le migrant sera en parfaite sûreté, nous protégeant ainsi des décisions idéologiques de la CEDH. Cette politique étant fortement dissuasive (comme démontré par l’Australie, première à avoir appliqué cette politique, où le nombre de traversées illégales, et donc le nombre de morts en mer, ont largement baissé), l’effort budgétaire (certes conséquent) ne sera que temporaire, car une fois le système en place, plus personne ne cherchera à venir illégalement sur notre territoire.

Ces trois mesures mettront un terme définitif à l’immigration illégale tout en permettant toujours un accueil des véritables réfugiés (et ce dans de bien meilleures conditions qu’aujourd’hui), et faciliteront grandement la vie des étrangers résidant légalement en France, leur permettant ainsi de mieux s’intégrer.

Oui, l’islam a joué un rôle dans la guerre d’Algérie

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Les historiens, algériens ou non, ne se bousculent pas pour aborder le sujet. La guerre d’Algérie a pourtant bien eu une dimension religieuse.


Il avait fallu que l’Algérie mit fin au monopartisme, avec la nouvelle Constitution de 1989, pour que l’islamisme devienne visible. Très vite agressivement totalitaire, il préféra la plonger dans une effroyable guerre civile qui fit plus de 200 000 morts selon le président de la République lui-même. En Algérie et plus encore ailleurs, beaucoup s’étonnèrent : mais d’où sortaient donc ces centaines de milliers de barbus en gandoura blanche bien décidés à imposer leur nouvel ordre, d’abord aux femmes et aux intellectuels, et ensuite au reste, par la carotte, le bâton et enfin par la kalachnikov ?!

Pas l’islamisme, l’islam

Les premières réponses furent du registre de la paresse de la pensée. C’était la faute, bien sûr, de l’Iran qui voulait exporter sa révolution khomeyniste. C’était la faute des « Afghans » (plus de 3000 jeunes algériens ayant combattu les Soviétiques dans les années 80 venaient d’en revenir…) ; la faute enfin des Frères musulmans qu’on appelait familièrement « les frérots » : en arabisant totalement son système d’éducation, l’Algérie avait dû importer des milliers d’enseignants, pourchassés dans leurs pays par les nasséristes et les baathistes pour leur activisme islamiste (Egyptiens, Irakiens, Syriens, etc.). Comme il est fréquent dans le monde arabo-musulman, la faute c’est toujours celle des autres. Le mal vient toujours d’ailleurs.

Depuis, des chercheurs algériens ont certes rectifié cette idée en évoquant l’origine religieuse de la violence durant la guerre d’Algérie. Mais ils n’en ont jamais fait l’objet d’une étude spécifique. Ni Mohamed Harbi, pourtant le plus contestataire des historiens algériens de cette période, ni les autres grands historiens français spécialistes de cette période, Guy Pervillé et Gilbert Meynier. Personne n’avait osé mettre les pieds dans le plat, tant la question est tabou, et démontrer que déjà la guerre d’Algérie (1954-1962) avait eu une « dimension » religieuse.

A lire aussi: La guerre d’indépendance a rendu impossible la rupture entre la France et l’Algérie

Ce mérite revient à Roger Vétillard, fortement encouragé d’ailleurs par Gilbert Meynier dans cette délicate entreprise. Peut-être parce que cet ancien médecin spécialiste qui a attendu la retraite pour se lancer dans l’étude de la guerre d’Algérie a su profiter de cette liberté de n’être pas historien de profession. Ce qui en retour lui faisait obligation de redoubler de scrupules quant aux sources et à leur traitement. Fort de son savoir médical, il va, tel le sémiologue, aller du symptôme (discours, prises de positions, programmes, etc.) vers la matrice, celle dont il ne faudrait pas montrer le sein, l’islam. Pas l’islamisme, non, simplement l’islam, qui imprègne conscience et inconscient, paroles, gestes et actes. Or  la société algérienne, profondément islamisée depuis 16 siècles est naturellement sculptée par les concepts-clés de la doctrine, et notamment par celui qui règle le rapport à l’autre, le djihad. Il reviendra aux dirigeants nationalistes de l’ALN-FLN, y compris ceux connus pour être des « laïcs », de puiser sans vergogne dans ce fonds sans fond, que ce soit par volonté de manipuler facilement les collectifs ou par opportunisme politique.

L’ennemi est « l’infidèle », la guerre est un « djihad »

Ne dit-on pas « moudjahid », alors que le mot arabe pour « combattant » existe ? « Fidaï » (« fidayine » au pluriel), qui évoque le « sacrifice », pour désigner le terroriste (celui qui en tuant y compris des civils est chargé de provoquer de la terreur) et « chahid » (au pluriel « chouhada ») pour le combattant tué, mais dont la signification littérale est « martyr » (de la religion)…

Des preuves, Roger Vétillard va en convoquer 45. Pas une de moins ! « Précises et vérifiables », comme insiste l’auteur. La déclaration d’indépendance du 1er Novembre 1954 a pour but un Etat souverain, mais « dans le cadre des principes islamiques ». On se jure fidélité sur le Coran. On coupe le nez des déviants pris en flagrant délit. L’homosexuel est puni de la peine de mort, quel que soit son grade (le chef militaire Bachir Chihani en fera l’expérience). L’égorgement n’est pas un acte sauvage pour le combattant, puisque sanctifié par l’islam[tooltips content= »« Je suis venu à vous par l’égorgement, a dit Allah » (Abu Ya’La, hadith n° 7285) »]1[/tooltips]. L’ennemi est « l’infidèle », la guerre est un « djihad ». On la mène au cri d’ « Allahou akbar » (Allah est le plus grand). Et ceux qui la font sont des « frères » (« khawa », c’est-à-dire des frères… musulmans). Dans les zones qu’il contrôle, le FLN remplace la juridiction française laïque par la charia.

« L’islam a été le ciment qui nous permit de sceller notre union »

Un des grands dirigeants de la lutte armée, et particulièrement du massacre du 20 août 1955 dans l’est-algérien, Lakhdar Ben Tobbal, avoue dans ses mémoires avoir fait la guerre aux non-musulmans : « Bons ou mauvais, je ne faisais pas de différence ». Un autre dirigeant, Si Abdallah, témoigne : « Nous n’arrivions pas dans une mechta en soldats révolutionnaires mais en combattants de la foi et il est certain que l’islam a été le ciment qui nous permit de sceller notre union… » Même un des dirigeants souvent présenté comme le Saint Just laïque de la révolution et qui sera assassiné par les siens, le Kabyle Abane Ramdane, ne dérogera jamais à l’idéologie dominante qui se veut « arabo-musulmane », et à ce titre signera un texte contre « les berbéristes », destiné à la Fédération de France du FLN. Quant à l’autre chef kabyle, le Colonel Amirouche, très peu savent qu’il adhéra à l’Association des Oulémas (d’où sortiront plus tard les cadres de l’islamisme), qu’il défendit la langue arabe contre le berbère, qu’il s’opposa radicalement aux « berbéristes » (nationalistes qui ne voulaient pas d’une Algérie fondée sur des critères ethniques ou religieux) et qu’il imposa les prières quotidiennes à ses subordonnés dans les maquis.

Aussi, le résultat d’une telle orientation pouvait-il être autre que celui qui s’imposa au moment de l’indépendance et que révéla clairement le président du Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA), Ben Khedda, trente ans plus tard dans ses mémoires : « En refusant notamment la nationalité algérienne automatique pour un million d’Européens, nous avions prévenu le danger d’une Algérie bicéphale »[tooltips content= »La fin de la guerre d’Algérie, Casbah Ed. 1998″]2[/tooltips] ? Les accords d’Evian du 18 mars 1962 (qui ne furent jamais ratifiés par l’organe suprême du congrès de Tripoli) se refusaient à considérer les non-musulmans comme des Algériens. Diktat imposé par le FLN à la France, en échange de l’autorisation à exploiter le pétrole durant 10 ans. Les non-musulmans ne pouvaient devenir Algériens qu’en en faisant la demande, souvent refusée à des militants de la cause indépendantiste.

L’effacement des non-musulmans

Dans le très officiel Mémorial des Martyrs d’Alger, aucun nom de combattants non-musulmans ne figure. Bien plus, à Ténès on débaptisera la rue Ghenassia en rue de Palestine : cet infirmier juif avait pourtant préféré mourir que fuir l’encerclement de l’armée française, afin de rester près de ses blessés. En 1962, le million de chrétiens et de juifs n’eut d’autre choix que de quitter précipitamment ce qu’ils considéraient comme leur pays. Et pour ceux qui, malgré tout, continuaient à espérer pouvoir rester, on commandita l’assassinat du musicien juif Raymond Leyris, le 22 Juin 1961, puis une année plus tard le massacre de centaines de non-musulmans à Oran, le 5 Juillet 1962, méfait à ce jour non-revendiqué par ses auteurs, et à propos duquel aucun historien algérien n’a encore osé entreprendre une recherche, comme on peut s’en douter.

Des preuves de « la dimension religieuse de la guerre d’Algérie », on pourrait encore en trouver de très nombreuses. Ce qui ne manque pas d’étonner, c’est plutôt le refus des élites algériennes comme européennes d’admettre l’évidence. Et si cela pouvait se comprendre durant la guerre d’indépendance, de leur point de vue (ne pas affaiblir « la révolution »), que dire aujourd’hui, 56 ans plus tard ? Ne serait-ce pas parce que cette stratégie de l’aveuglement rend encore quelques services aux élites dhimmisées en cette époque où les violences de l’islamisme, confinées jusque-là aux pays musulmans, sont en train, depuis plus de deux décennies, de s’exporter, notamment en Europe ?

A lire aussi: Et le FLN instaura une Algérie arabo-musulmane

Le livre de Roger Vétillard, qu’aurait aussi bien pu écrire La Palice, est donc une nouvelle invitation à ôter ses œillères et à nommer les choses telles qu’elles sont et non telles qu’on souhaiterait les voir. La lecture d’un monde en plein remodelage y gagnerait en lucidité.

Je lui ferai néanmoins une objection : pourquoi avoir repris la thèse de Mohammed Harbi qui attribue aux « ruraux » la responsabilité de l’imprégnation de la religiosité dans le combat libérateur ? Thèse doublement contredite par le fait que l’Association des Oulémas, d’où émergèrent de nombreux dirigeants, fut toujours dirigée par des citadins, à commencer par Ben Badis, et surtout par le fait que la société algérienne profonde, paysanne, resta fidèle à l’islam confrérique[tooltips content= »L’anthropologue algérienne Fanny Colonna, disparue en 2014, a consacré l’essentiel de son travail à ce sujet, notamment dans Versets de l’invincibilité, 1995, Presses de Sciences Po. »]3[/tooltips], et ce malgré la stigmatisation et les attaques des nationalistes et de l’Association des Oulémas avant l’indépendance, et des islamistes du FIS-GIA dans les années 90, pour tenter de s’imposer comme unique représentant dans le champ du religieux. Sans succès jusqu’à aujourd’hui. Et à tel point que Bouteflika, changeant le fusil d’épaule, fut contraint de s’en faire des alliés…

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La France, victime de la décadence médiatique

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Une tribune de Sophie de Menthon.


Tous coupables de cette décadence médiatique que nous encourageons en mordant à l’hameçon ? A moins que ce ne soit le modèle économique de la presse à bout de souffle ? Ou encore la faute d’une paresse intellectuelle entretenue ? Mais la réalité est bien là, nous ingurgitons en boucle une bouillie médiatique indigente qui nous conditionne. Un embrigadement volontaire qui nous soumet à une sorte d’influence sans issue, le syndrome de Stockholm !

Quand le scoop tue l’info

Trop nombreuses, les chaînes d’info en continu sont astreintes à une compétition permanente au mépris absolu de la qualité et de l’objectivité qui nécessitent un peu de temps et d’investigation. Presse écrite ou audiovisuel, on n’a plus les moyens de mener des enquêtes sérieuses. Quant à la radio, les jeunes de moins de 25 ans ne l’écoutent pas. Nos parents attendaient les « nouvelles », on nous a conditionné à attendre les scoops.

Nous ne choisissons plus nos vecteurs d’information, nous zappons inlassablement. Saluons toutefois les bonnes émissions… Mais comment supportons-nous de regarder indéfiniment ces malheureux reporters postés, qui attendent inlassablement un micro à la main qu’il se passe quelque chose quelque part, meublant de propos insipides mais haletants de longues heures creuses. L’envoyé spécial qui nous annonce qu’il n’a rien à dire mais qu’il va le dire. Le micro qui se tend aux victimes des inondations en leur demandant (sic) « …et vous espérez que les pluies vont être moins abondantes ? » Ou encore guettant l’annonce du nouveau gouvernement qui ne vient pas, et qui enfin arrive… par dépêche AFP ! Ce qui nous a offert récemment le spectacle hilarant du messager posté devant Matignon ou l’Elysée, micro au poing, consultant son portable pour y trouver la composition du gouvernement.

La télé vit avec l’espoir de la « breaking news » qui permet de stopper n’importe quelle émission pour faire semblant d’être les premiers informés et donner le sentiment que c’est important et que tout s’arrête : suspense ! Pour que le téléspectateur ne s’ennuie pas pendant les informations ou les débats (ce qu’on peut comprendre), on lui met en sous-titre d’autres infos qui n’ont rien à voir avec le sujet traité, évitant ainsi réflexion et concentration ; en même temps, il peut vérifier sur les réseaux sociaux s’il n’y a pas une « fake news » qui traîne.

La recherche du feuilleton

Les sujets qui font la « une » avec matraquage systématique ont heureusement une durée de vie assez limitée, comme par exemple la sortie du CD posthume de Johnny Hallyday faisant l’objet d’émissions d’autant plus spéciales que personne n’avait pu écouter encore les chansons. Mais on nous expliquait comment le secret avait été bien gardé avec les mêmes précautions que s’il s’agissait d’un engin nucléaire, reportage prolongé tard dans la nuit jusqu’à 1h du matin pour guetter les fans qui seraient les premiers dans les points de vente ouverts à minuit… et toujours le même reporter micro au point dans une rue déserte auquel on demande : « Est ce que la foule se presse déjà devant la boutique ? »

Les engouements médiatiques auxquels il est impossible d’échapper sont créés de toute pièce par le phénomène de répétition et la psalmodiation crescendo qu’il faut alimenter sans cesse par un nouveau détail essentiel.

A lire aussi: Immigration: les médias nous mènent en bateau

Le feuilleton est un objectif rêvé, comme celui concernant Benalla auquel on finit par s’attacher, chouette un rebondissement : le certificat des victimes tabassées serait un faux de l’aveu du médecin qui l’a produit. Après la sortie du disque de Johnny Hallyday on devrait repartir sur l’héritage, les droits et le procès entre les enfants et la veuve. Mélenchon vient de nous offrir un entracte avec la rixe de sa perquisition, sa liaison supposée, et, oh ! bonheur, il en a rajouté en insultant l’accent… d’une journaliste ! Comme c’est la presse qui porte plainte on en a pour un bout de temps, sans compter l’ineffable proposition de loi factice sur la stigmatisation des accents : la « glottophobie » dont on ignorait tous l’existence. En plus, voila qui pourrait relancer l’affaire Zemmour ?

Tout cela est bien rodé : scoop, internet, presse, commentateurs télé, gros-titre, presse people, reprise de la presse people, hurlements de l’opposition et on recommence.

Les médias sont l’actualité

Les hallalis sont monnaie courante, s’acharnant sur l’ennemi public numéro 1 de l’instant qu’on abandonne à terre quasi mort ; si on l’a calomnié (la « fake news » n’est pas autre chose que la calomnie) deux ou trois lignes et quelques brèves feront l’affaire pour ajuster le tir ou démentir. De toute façon, il ne sera jamais blanchi…

Ce qui est grave, c’est la manipulation des esprits et l’impossibilité de s’exprimer avec nuance et de remettre les choses à leur juste place, l’indignation fait vendre et nous achetons. Le nombre croissant de mots interdits, les soupçons permanents de stigmatisation, de racisme, d’intolérance, etc. font partie du prêt-à-penser généralisé et fournissent les occasions de s’indigner. Seuls les medias seraient politiquement corrects !

Nos sondages eux-mêmes finissent par être le reflet de ce dont on nous gave. Les medias ont décidé d’avoir pitié des retraités ? Pourquoi pas, mais alors impossible d’expliquer quoi que ce soit, l’émotionnel prime et défile sur les ondes des victimes qui nous font part de leurs déboires et de l’amputation de leur maigre revenu.

La vraie question qui se pose est aujourd’hui de savoir si ces medias que nous suivons en schizophrènes, malgré la désapprobation générale qui se manifeste à leur encontre, vont finir par faire échouer la réforme de la France ? La descente aux enfers du président de la République est-elle réellement le résultat de sa politique ou de ce que les medias ont décidé d’en retenir ?

Les politiques puisent dans ce déferlement de scandales de quoi étoffer leur position d’opposants impuissants. Ils n’en sortent pas grandis et les Français ne sont pas dupes. Toutefois, à force de se contenter de l’écume des choses et de trucider nos rois en les choisissant comme boucs-émissaires, nous courons au naufrage politique intellectuel et social du pays.

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Jeunesse de droite: le grand replacement


L’hégémonie de la gauche dans la jeunesse française est révolue. La droite intellectuelle ne rase plus les murs et conquiert même les plateaux télévisés. Mais cette embellie doit davantage à la crise de notre société multiculturelle qu’au travail idéologique mené par quelques jeunes plumes au conservatisme parfois trop dogmatique.


Jadis, le monde était simple : les jeunes votaient à gauche, militaient à gauche, pensaient à gauche. Moralement discrédité à la Libération, le camp conservateur pliait l’échine devant une gauche qui s’arrogeait le monopole du cœur et de la vérité. Sartre pouvait exciter la haine de classe en accusant à tort un notaire de meurtre, Mitterrand dépasser l’entendement en promettant de sortir du capitalisme en cent jours, SOS Racisme fasciser quiconque questionnait la société multiculturelle, les jeunes générations acquiesçaient.

Or, voilà qu’après une longue éclipse, quelques francs-tireurs conservateurs creusent le sillon tracé par leurs aînés et franchissent les portes des médias. Zemmour et Buisson ayant ouvert la voie, Mathieu Bock-Côté, Eugénie Bastié (Le Figaro, Limite), François-Xavier Bellamy courent les plateaux télévisés, des revues comme Éléments sortent de la marginalité, des instituts de formation catholiques, identitaires libéraux ou un peu de tout cela à la fois émergent. Le tout est encouragé par la nouvelle mission métapolitique – gagner la bataille des idées – que s’assigne la jeune garde conservatrice, dont la coqueluche se nomme Marion Maréchal, et la base hésite entre un vote LR ou FN.

Quand la droite bat le pavé…

Aussi fluctuants soient ses contours, reste un mouvement de fond, que le brillant trentenaire Alexandre de Vitry pointe dans son pamphlet Sous les pavés, la droite : la jeune droite conservatrice ne craint plus de s’affirmer comme telle, de se doter d’une idéologie et de repenser son rapport au libéralisme. Ce n’est pas la première fois qu’émerge une jeunesse de droite revendiquant haut et fort cette étiquette. Le 30 mai 1968, les jeunesses gaullistes étaient sorties du bois pour soutenir le Général contre la « chienlit » des lanceurs de pavé. Tout en s’inscrivant dans cette lignée, les jeunes sarkozystes du début des années 2000 assumaient un rapport décomplexé à l’argent et à la réussite sociale qui les distinguait des caciques chiraquiens. Quelques années plus tard, poussée par l’offensive sociétale du quinquennat Hollande, une génération de jeunes catholiques conservateurs se soulève contre le mariage pour tous. Cette dernière vague investit le domaine des idées et porte un projet politique de transformation de la société.

Pour Alexandre de Vitry, c’est là que le bât blesse : la droite trahit sa nature pragmatique à force de battre le pavé et de forger une idéologie cohérente, sûre d’elle-même et dominatrice. Cette quête du Grand Soir conservateur ignore toute la complexité du réel, les invariants de la nature humaine et les pesanteurs du monde. Ici, entre en jeu la littérature, laquelle rappelle à l’homme son devoir d’humilité. En prétendant faire table rase du réel qui lui déplaît (liberté sexuelle, homoparentalité, droit à l’avortement…), une certaine droite suridéologisée rejoint les errements démiurgiques d’une gauche que l’idée de rupture obsède depuis la Révolution française. De sorte qu’un 10 mai 1981 conservateur pourrait bien être suivi de lendemains qui déchantent rappelant le tournant de la rigueur de 1983.

Conservateurs de souches

Parlons franc. Si sa défense paradoxale du droit à la contradiction et sa critique du pavlovisme antilibéral font l’effet d’un grand bol d’air, le réquisitoire ad hominem que dresse Vitry frôle parfois l’antifascisme policier, dont une certaine gauche est si friande. Mais à tout péché miséricorde. Grâces lui soient rendues, ainsi qu’à Eugénie Bastié, pour avoir engagé un dialogue fécond dans nos colonnes.

Cette jeunesse intellectuelle hostile aux mots d’ordre de 68 n’a pas surgi tout armée du crâne de Jupiter. Dans l’opinion, une vague générationnelle s’y reconnaît. « La jeunesse est à l’image de la société française : très divisée et diverse. 25 % des jeunes ont voté Mélenchon, mais toute une frange qui vit de plain-pied dans la société multiculturelle est en attente de valeurs d’ordre », indique le politologue et directeur d’études de l’IFOP Jérôme Fourquet. De l’avis quasi général, à droite, l’insécurité culturelle engendrée par une immigration massive inassimilée explique à la fois l’importance du vote FN et le repli identitaire de nombreux catholiques, de plus en plus opposés au pape François. N’en déplaise aux antiracistes professionnels, beaucoup des jeunes adversaires du multiculturalisme partisans d’une immigration limitée, sinon de la remigration, ont des origines exotiques. Français de plusieurs souches, ils désarçonnent le camp d’en face, à l’image de l’avocat libertaire Nicolas Gardères : « Le véritable renouveau de la droite n’est pas dans les idées, il est dans l’incarnation. Son discours est de plus en plus porté dans le champ politico-médiatique par les femmes comme les porte-parole de la Manif pour tous, des homosexuels (Philippot) et des hommes appartenant à des minorités religieuses (Zemmour). »

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Vu de gauche, l’itinéraire d’un Édouard Chanot, journaliste-chroniqueur sur la chaîne russe Radio Sputnik, paraît incompréhensible, tant il défie les a priori. Ce trentenaire franco-philippin met à l’actif de la droite culturelle deux grandes victoires sémantiques, remportées notamment sur le front de la lutte contrer l’islamisme : « La désignation de l’ennemi et la reconnaissance de facto du “grand remplacement”. » L’expression forgée par Renaud Camus fait florès dans les médias, même pour la dénoncer, quoique Chanot préfère parler de « grande balkanisation », persuadé que notre société se communautarise à mesure que les flux migratoires progressent. La reconnaissance de cet état de fait n’est sans doute pas entièrement imputable aux intellectuels qui confirment ce diagnostic aisément observable au quotidien. « Ce ne sont pas les idées qui dominent le monde, mais les circonstances », glisse l’ancien étudiant d’Assas, successivement militant UNI, auditeur de l’Institut de formation politique (IFP), membre des cercles conservateurs américains, puis élève de l’Institut Iliade, fondé après le suicide de l’essayiste néo-païen Dominique Venner, figure de la droite radicale identitaire. Un cursus honorum qui résume les tours et détours de sa quête de sens. « Mes amitiés avec cette mouvance étonnent toujours, mais j’ai beaucoup lu le philosophe Léo Strauss qui prône le retour aux Anciens », explique Chanot. Et sur le marché de l’identité, l’Institut Iliade « pour la longue mémoire européenne » offre une formation clé en main autour de la tradition, des mythes hors d’âge et autres expressions d’une identité charnelle résolument völkisch.

« Le discours de la gauche se heurte aujourd’hui à la réalité »

À la confluence de la mouvance identitaire, de l’antilibéralisme et du conservatisme, François Bousquet, 50 ans, rédacteur en chef d’Éléments et gérant de La Nouvelle Librairie, se réjouit de voir la tectonique des plaques intellectuelles bouger. « Difficile de nier qu’il y a un renouveau intellectuel du conservatisme qui profite plus à la droite qu’à la gauche, autrement affectée par la crise de l’idéologie du progrès », diagnostique-t-il. Pour s’en convaincre, il suffit de jeter un œil sur les couvertures d’Éléments, publication de la Nouvelle Droite devenue un magazine qui a pignon sur rue : les intellectuels de gauche, Onfray, Gauchet, Julliard, Guilluy, s’y bousculent presque ! Sur fond d’antilibéralisme, le magazine aux éditos signés Alain de Benoist redistribue les cartes du jeu idéologique. Pour la philosophe analyste du discours politique et des idéologies Nathalie Krikorian, « on assiste aujourd’hui à une forme de décomposition des idéologies, en particulier à gauche. La seule chose qui a permis à la gauche française de survivre, dans son aberration révolutionnariste et égalitariste, c’est son discours immigrationniste et différentialiste des années 1980. Mais il se heurte aujourd’hui à la réalité. » Les idées circulent tant et si bien d’un bout à l’autre du champ intellectuel que le droit à la différence, popularisé par la Nouvelle Droite, a été repris par l’antiracisme mitterrandien. C’est au nom de ce même droit que François Bousquet revendique aujourd’hui un éloge de la frontière contre « la montée de l’indifférenciation, de sociétés indifférenciées suite à un lissage universel ».

Pour autant, cette jeune garde conservatrice est loin d’occuper tout l’espace à droite où cette vague antilibérale suscite quelques étranglements. Avec Alexandre de Vitry, de jeunes libéraux moquent la Sainte Trinité de l’antiprogressisme, formée par Michéa, Guilluy et Orwell. Au côté de Benjamin Demeslay, le rédacteur en chef de L’Incorrect, Gabriel Robin, 33 ans, prépare pour début 2019 la sortie du Non du peuple, un essai explicitement dirigé contre le conservatisme antilibéral. Robin dénonce le nouveau prêt-à-penser des légions de la Manif pour tous, dont le gros livre rouge est La Cause du peuple, de Patrick Buisson : « Dans l’imaginaire de la droite française des années 2000 et 2010, la France périphérique tient la place du tiers-monde pour la gauche post-68. Pour Buisson, la Manif pour tous sera pour la “France de Johnny” ce que les bolcheviks furent aux damnés de la Terre, une élite régénérée portant sur ses épaules un peuple méprisé. » La droite quart-mondiste existe, tout le monde l’a rencontrée en librairie. Pour Robin, Buisson fantasme avec style et brio un peuple paré de toutes les vertus conservatrices. Tout comme, sur le flanc gauche, Michéa associe un peu trop mécaniquement aux gens ordinaires la common decency orwellienne. Faut-il avoir oublié Céline pour croire que la pauvreté rend vertueux…

Cherchez le peuple

Paradoxalement, la jeune droite libérale cède à la vieille tentation maurrassienne de calquer ses schémas idéologiques sur les attentes du « pays réel ». Ainsi, toutes les études d’opinion confirment une montée des valeurs consuméristes et individualistes dans la jeunesse française, d’ailleurs majoritairement partisane du mariage et de l’adoption homosexuels, aux antipodes de la Manif pour tous. Quant à la France périphérique, si bien décrite par le géographe Christophe Guilluy, ses habitants rêvent moins d’une nouvelle chouannerie que d’un libéralisme tempéré par des frontières. « Le Français moyen assimile le libéralisme au fait de payer moins d’impôts, de travailler plus pour gagner plus, ou d’entreprendre sans être trop entravé. C’est d’ailleurs une des raisons du succès de Nicolas Sarkozy en 2007 », analyse Gabriel Robin. Cela ne signifie pas, tant s’en faut, que le peuple des campagnes et des pavillons ne s’intéresse qu’à l’argent. Nombre de Français périphériques céderaient volontiers aux sirènes d’un « populisme patrimonial » (Dominique Reynié) à même de préserver leur mode de vie, s’il existait.

Le décalage entre la France concrète et la vision qu’en ont certains intellectuels conservateurs s’explique peut-être aussi par un biais sociologique. Dans ce qui reste de France catholique bourgeoise, des soixante-huitards au carré, enfants gâtés de la démocratie et de la révolution sexuelle, exercent un droit d’inventaire légitime, mais parfois inconséquent, sur notre société libérale. Ainsi, « aucune doctrine n’est moins comprise que le libéralisme, en France », regrette le philosophe Raphaël Enthoven : « Ce n’est pas la liberté du renard dans le poulailler. Rien n’est pire, aux yeux d’un libéral, qu’un individualisme échevelé, qui se satisfait de la guerre de chacun contre chacun. Un libéralisme bien compris suppose l’égalité des chances (sans laquelle la concurrence est faussée) et le respect de la loi (qui est la même pour tous) », poursuit ce républicain de gauche. Là se trouve l’une des clés de la convergence entre antilibéraux des deux rives qui s’exprime dans les colonnes d’Éléments ou de Limite. En faisant indistinctement feu sur le libéralisme, l’individualisme et le multiculturalisme, ces théoriciens ressuscitent des formes sophistiquées de communautarisme, fût-il socialiste ou chrétien. « Les uns veulent remettre le maître d’école au centre du village, les autres le curé », en sourit Gabriel Robin.

C’est dans ce tourbillon idéologique qu’Emmanuel Macron a bâti sa victoire à la dernière présidentielle. Renvoyant dans les cordes droite et gauche, Jupiter a coiffé sur le poteau tous ceux qui pensaient l’enjeu identitaire incontournable. Les intellectuels conservateurs sont donc encore loin de réunir derrière eux un bloc majoritaire. C’est à partir de ce constat que Marion Maréchal a créé l’Institut de sciences sociales, économiques et politiques pour former les cadres conservateurs de demain. À l’université, l’hégémonie de la gauche, moribonde ou contestée ailleurs, est toujours écrasante. Le sorbonnard et professeur certifié Lucien Rabouille, 24 ans, constate : « En termes de masse critique, on est écrasé. Il y a des phalanges de sociologues et d’historiens Insoumis », du Collège de France à la plus modeste fac de province. Un peu comme Alexandre de Vitry, il estime que la droite intellectuelle fait fausse route en se piquant d’idéologie : « Il faudrait laisser la prétention de l’objectivité à la gauche. On n’est pas armés pour se battre sur ce terrain. » Certes, mais pourquoi renoncer au combat politique alors que tant de défis se posent à la société ? Dans son dialogue avec Vitry, Eugénie Bastié entend tenir les deux bouts de la chaîne. Littéraires et politiques pourraient s’accorder sur la reconnaissance d’ « une forme d’incomplétude, de modestie face à l’histoire, de refus de l’utopie » qui ne dispense pas la droite d’avoir des idées politiques. Aux nouveaux hussards de relever le gant !

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Antispécisme, l’hérésie cathare au temps des grands abattoirs

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L’antispécisme est un millénarisme. Et ce n’est pas un hasard s’il apparaît aujourd’hui…


« Si la souffrance de la gazelle importe, il y a un problème de solidarité avec la gazelle. Le lion va, au cours de sa vie, tuer des centaines de gazelles. Est-ce qu’il est juste de laisser le lion faire cela ? Soulever ce problème et répondre que : ‘Oui, on devrait dans l’idéal changer la nature (…) dans la mesure du possible’, c’est la seule réponse qui soit crédible et qui permette de montrer que nous prenons réellement au sérieux la question de la souffrance des animaux. » Ces propos sont de David Olivier, coauteur de La révolution antispéciste et cofondateur des Cahiers antispécistes. Dans la même vidéo, circulant sur les réseaux sociaux, il explique que l’on doit garder les chats à l’intérieur pour les empêcher de chasser, estimant qu’il faut mettre en balance les désirs du chat, et ceux des souris qui « ont une fin atroce entre les griffes du chat ».

L’extrême naïveté, la puérilité absolue de cette vision poussent évidemment à un haussement de sourcil ou d’épaules. Mais pour l’historien, il est assez fascinant de voir resurgir un utopisme aussi radical à une époque et dans des sociétés si différentes de celles qui virent jadis émerger ce genre de discours.

La faim des temps

En lisant ces lignes, le lecteur un peu instruit aura sans doute songé, sans nécessairement connaître la référence exacte, à Isaïe 65, 24 : « Le loup et l’agneau paîtront ensemble, Le lion, comme le bœuf, mangera de la paille, Et le serpent aura la poussière pour nourriture. Il ne se fera ni tort ni dommage Sur toute ma montagne sainte, Dit l’Eternel ». Ce texte biblique est un texte eschatologique, qui décrit la Jérusalem céleste. Ce genre de texte a toujours été interprété comme désignant exclusivement le monde d’après la fin du monde, le Royaume céleste ; par conséquent, tout en étant l’objet de l’espérance des croyants, les choses décrites représentaient également une liste de tout ce qui demeurerait jusqu’à la fin des temps, et qu’il était par conséquent illusoire d’espérer changer ici-bas.

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On peut penser que le caractère très répandu de ce type de croyance ne relève pas seulement d’une sorte de puérilité de l’esprit humain, qui se plairait à imaginer un monde sans aucun problème, mais aussi d’une sagesse traditionnelle dissuadant les membres de la société de gaspiller leur énergie, voire de mettre ladite société en péril, en poursuivant des chimères. Les exhortations du Christ sur le fait que les anges de Dieu se chargeront de séparer le bon grain de l’ivraie au Jugement dernier, mais que les hommes ne doivent pas chercher à faire eux-mêmes cette justice absolue, relèvent du même registre.

Le catharisme, l’antispécisme des origines

Or, on assiste précisément, avec ce discours végan et antispéciste radical, à une réémergence d’une forme de millénarisme, cette posture religieuse qui consiste à vouloir hâter la fin des temps, et amener dans notre monde terrestre le monde tel qu’il ne saurait être qu’après l’avènement du royaume divin, et ce au moyen de pratiques sacrificielles extrêmes, qui prennent généralement deux formes : l’ascèse extrême et/ou le massacre des « méchants ». On retrouve aujourd’hui dans l’antispécisme ces deux mamelles du millénarisme : il y a d’une part le régime végan toujours plus exigeant et d’autre part le terrorisme contre les fauteurs du mal qu’il s’agit d’éradiquer.

L’Eglise catholique a toujours condamné le millénarisme (canon 676 du Catéchisme), rangeant notamment sous cette catégorie le « messianisme sécularisé », le communisme au XXe siècle, mais avant cela de nombreuses occurrences historiques avaient pu être observées, des Taborites de Bohême aux Anabaptistes de Munster, toujours à l’origine de nombreux massacres. Mais il est intéressant de noter que l’une des occurrences qui évoquent le plus nos actuels antispécistes sont les fameux cathares du XIIIe siècle, dont la doctrine prônait un respect absolu de toute vie et par conséquent un régime alimentaire exclusivement végétarien – plus encore, certains pratiquaient l’endura, une privation totale de nourriture conduisant à une mort supposée bienheureuse. Par ailleurs, les cathares rejetaient la propriété privée, ce qui est bien souvent le cas de nos antispécistes et végans, souvent proches de l’extrême gauche quand il s’agit de politique. Plus encore, les cathares condamnaient la sexualité et bannissaient la procréation, ce que certains écologistes radicaux tiennent aujourd’hui pour un moyen de « sauver la planète ».

L’homme, un animal comme un autre

Nos antispécistes arrivent à aller plus loin que les cathares sur un point : en abaissant l’homme au niveau des autres animaux – ou en hissant les autres animaux à l’égal de l’homme, comme on voudra. C’est que dans une société déchristianisée, l’idée de Dieu, et d’un homme fait à son image et donc distinct des autres êtres vivants, s’efface naturellement. En écoutant les prêches antispécistes, on pense au curé d’Ars : « Laissez une paroisse vingt ans sans prêtre : on y adorera les bêtes ».

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Aujourd’hui comme hier, ces chimères sont souvent dangereuses pour la santé, pour certains de leurs membres, et pour tous les autres, auxquels ils auraient la tentation d’imposer leur vision par la violence. On peut par ailleurs penser que, si leur excentricité et leur activisme attirent l’attention des journalistes, leurs idées n’iront jamais très au-delà d’une proportion infime de la population, comme du temps des cathares d’ailleurs : ce genre de vie et d’idées radicales, utopistes, ne sont jamais faites que pour une très petite quantité d’exaltés.

Une (dangereuse) réponse aux excès de notre époque

Ce qui ne signifie pas pour autant qu’il ne faut pas prendre cette éruption antispéciste au sérieux, comme symptôme d’un mal frappant nos sociétés. Repensons aux cathares : ce n’est pas un hasard si ce courant radicalement antimatérialiste s’est manifesté à l’époque de ce qu’on appelle la théocratie pontificale, l’apogée du pouvoir de l’institution ecclésiastique en Europe médiévale, où le clergé était très riche et sa direction encombrée de préoccupations politiques et matérielles. Aujourd’hui, la poussée antispéciste est sans nul doute à mettre en lien avec l’extrême industrialisation de l’élevage animal, et avec une exploitation du vivant qui, pour n’être pas illégitime, est souvent faite dans des conditions indignes.

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Aussi bien se souviendra-t-on que, outre le catharisme, le XIIIe siècle vit également apparaître les ordres mendiants, et notamment celui de saint François d’Assises, qui prôna tout à la fois une pauvreté toute christique et une amitié pour toutes les bêtes, frères et sœurs dans la Création ; c’est sur la base de cet héritage que tous les papes depuis plus d’un siècle ont encouragé la protection et le respect des animaux.

Une réponse équivalente aux questions qui suscitent les crispations antispécistes reste peut-être à inventer.

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Il est pas frais mon saumon (d’élevage) ?

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L’élevage industriel de saumon est un massacre écologique, alimentaire et sanitaire. Horreur, malheur !


S’agissait-il d’un pur concours de circonstances ? Toujours est-il que je n’avais jamais tant entendu parler du saumon d’élevage qu’en ce jour, déjà lointain, de fin d’été.

L’élevage détruit des régions entières

Tout a commencé dès potron-minet, avec la lecture d’un article du Monde Diplomatique de septembre, intitulé « Saumon, du mets de luxe au fléau écologique ». Cela s’est poursuivi en début de soirée avec un autre, celui que j’ai croisé en épluchant le Libé de ce même lundi : « Au Chili, 700 saumons se font la malle, leur proprio sur le grill. » Dans le premier, j’ai découvert que, juste derrière la Norvège, le Chili était actuellement le plus gros producteur au monde de salmonidés, alors même que, il y a moins d’un siècle, il fallait se lever d’aussi bonne heure que moi pour croiser un poisson de ce type aux abords des côtes chiliennes. Dans le second, j’ai appris que 690 000 saumons d’élevage s’étaient échappés de ce qui ressemble à un camp de concentration aquatique, ce qui n’était pas sans augurer de méchantes retombées environnementales.

Est-ce moi qui aie un problème ? En tout cas, j’ai du mal à comprendre : 1/ pourquoi le Chili s’est lancé à corps perdu dans ce type de « production », avec l’appui de politiciens et d’institutions en cheville avec les industriels du secteur ; 2/ pourquoi des hommes a priori doués de raison ont ainsi pris le risque de saccager un peu plus une partie de notre planète, déjà mal en point, malgré les dénégations du Donald et l’inertie générale des gouvernements actuellement en place.

Des chairs cocktails de molécules toxiques

Certes, « ça » – l’élevage industriel – rapporte de l’argent. Mais à bien y regarder, ça n’en rapporte qu’à peu de gens en fait : les propriétaires des moyens de production ; ceux qui en ont déjà sous le matelas souvent : les riches. Certes, cela crée, paraît-il, des dizaines de milliers d’emplois, directs et indirects. Mais ce sont surtout de mauvais emplois, peu rémunérateurs, qui ne permettent pas à ceux qui les exercent de vivre décemment. Surtout, cela vaut-il le coup de détruire des régions entières, jusque-là préservées de fléaux écologiques, réputées pour leur beauté et la qualité de leurs eaux ? A la limite, les saumons « produits » seraient bons, tant au niveau gustatif que sanitaire, on pourrait peut-être trouver au moins une raison de continuer. Sauf que… ils ne le sont pas. En effet, ils sont saturés d’antibiotiques, administrés massivement pour lutter contre les maladies que favorise la promiscuité dans laquelle se trouvent autant de poissons concentrés en un même lieu. Leur chair, gorgée de pesticides déversés pour lutter contre le « pou du saumon », est un cocktail de molécules toxiques, voire létales pour tout organisme humain qui en absorberait régulièrement.

En résumé, exceptés quelques-uns, toujours les mêmes ou peu s’en faut, cet élevage industriel ne profite à personne, et certainement pas à des saumons au mieux appréhendés comme des biens à disposition de cet homme encouragé par la tradition cartésienne à se rendre « maître et possesseur de la nature ». En réalité, cette façon de « faire du poisson » est un bel exemple de désastre à exécution successive, comme il existe des contrats du même nom. Sauf qu’ici, on chercherait en vain une quelconque forme d’accord préalable entre plusieurs parties. Il n’y a eu qu’une volonté unilatérale, celle manifestée par des rapaces ayant flairé la bonne affaire, qui s’est imposée sans débat, presque subrepticement.

Arrêtons les frais !

A présent que ses conséquences se font cruellement sentir, des voix pourraient s’élever afin d’arrêter là les frais. Ce n’est pourtant pas ce qu’il advient. Au lieu de cela, le saccage continue. Et ce n’est certainement pas demain la veille que les destinataires de cette « nourriture » songeront à s’insurger contre le scandale consistant à exiger de l’argent, donc du temps de travail pour la plupart d’entre nous, afin de l’obtenir.

Sommes-nous donc à ce point idiots ? N’avons-nous donc rien dans la caboche ? Est-il possible que pas un ne se rende compte qu’il y a quelque chose de fondamentalement pourri dans toute cette histoire ?

Certes, des groupes de pêcheurs chiliens, depuis le début, se montrent hostiles et râlent. On ne prendra même pas trop de risques à supputer que les cliques de « consomm’acteurs » hantant les « Croc Nature », « Biocoop » et autres échoppes huilessentialisées à mort, dans la mesure où l’ingestion de tels poiscailles menace de leur fiche la diarrhée ou de nuire à leur « capital santé », boycottent déjà scrupuleusement ces produits, aussi « haram » pour eux que peut l’être un bout de jambon pour un musulman. Mais à part eux, qui tout cela interpelle-t-il vraiment ? Un, deux, peut-être trois couillons comme moi ?

Si tel est le cas, on n’a pas fini d’en bouffer, de la merde. Et nos jours sur cette planète sont d’ores et déjà comptés. Car quand on chie là où l’on mange…

Violences: l’école n’est que le reflet de la société

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Les violences dont sont victimes profs et élèves à l’école ne sont pas le fait de l’école, mais celui d’une société qui transpire la brutalité.


Dans le domaine éducatif, chacun sait qu’il faut s’y prendre le plus tôt possible, et avec une ferme autorité, pour ancrer dans l’esprit et les pratiques des enfants les habitudes et les réflexes les plus sains et les plus indispensables à la vie commune – familiale, amicale, sociale. Qu’il faille dans le même mouvement respecter la nature singulière de chaque enfant, et ne rien faire qui puisse entraver son adaptation au monde nouveau qui l’attend, est une évidence morale, même si pour les adultes la synthèse relève d’une quasi aporie. Ce défi devient crucial lorsque les enfants prennent le dessus sur les adultes, mais le principe reste déterminant. C’est pourquoi, de toute la profondeur de sa compréhension, Hannah Arendt pouvait porter, dans Reflections on Little Rock, ces jugements objectifs, tranchés et assez cruels :

« L’éducation progressiste, […] en abolissant l’autorité des adultes, nie implicitement leur responsabilité à l’égard du monde dans lequel ils ont fait naître leurs enfants, et refuse le devoir de les guider dans ce monde. »

Et dans La Crise de la culture :

« Avec la conception et la naissance, les parents n’ont pas seulement donné la vie à leurs enfants ; ils les ont en même temps introduits dans un monde. En les éduquant, ils assument la responsabilité de la vie et du développement de l’enfant, mais aussi celle de la continuité du monde. Ces deux responsabilités ne coïncident aucunement et peuvent même entrer en conflit. En un certain sens, cette responsabilité du développement de l’enfant va contre le monde : l’enfant a besoin d’être tout particulièrement protégé et soigné pour éviter que le monde puisse le détruire. Mais ce monde aussi a besoin d’une protection qui l’empêche d’être dévasté et détruit par la vague des nouveaux venus qui déferle sur lui à chaque nouvelle génération. » « L’école n’est en aucune façon le monde », mais « l’institution qui s’intercale entre le monde et le domaine privé que constitue le foyer pour permettre la transition entre la famille et le monde ». « Vis-à-vis des jeunes, les éducateurs font figure de représentants d’un monde dont […] ils doivent assumer la responsabilité, même si, secrètement ou ouvertement, ils le souhaitent différent de ce qu’il est. Cette responsabilité n’est pas imposée arbitrairement aux éducateurs ; elle est implicite du fait que les jeunes sont introduits par les adultes dans un monde en perpétuel changement. Qui refuse d’assumer cette responsabilité du monde ne devrait ni avoir d’enfant, ni avoir le droit de prendre part à leur éducation. »

L’école crève de ses lâchetés…

Durant les quarante-deux années qu’a duré ma carrière professionnelle, j’ai exercé successivement les fonctions de professeur de lettres, de proviseur de cités scolaires, d’inspecteur général, de conseiller de ministre. J’ai beaucoup publié, notamment sur la pratique éthique et professionnelle du chef d’établissement scolaire. J’ai donc eu l’occasion de témoigner de la qualité, de l’écoute et du courage de belles personnalités de notre système éducatif, auxquelles je dois beaucoup, – mais surtout qui ont permis à notre école de résister aux coups de boutoir et aux lâchetés qui ont jalonné son existence, et qui hypothèquent lourdement son avenir. Il s’agit, en particulier, de la dévalorisation et du désinvestissement de la pratique des sanctions, sinon même des obstacles fréquemment mis à leur application par la hiérarchie supérieure, « pour des raisons politiques », comme on me l’a souvent signifié, parfois de façon risible.

Je n’en fournirai ici que deux brèves illustrations, concernant la conduite inadmissible, en l’occurrence, d’adultes en charge d’élèves (l’équivalent se retrouve naturellement quant au comportement d’élèves dans les textes et structures officiels, comme dans les instructions circonstancielles émanant des autorités supérieures).

L’intendant d’un des lycées que j’ai dirigés, homme d’une haute valeur professionnelle et morale, excédé par l’incompétence, la mauvaise volonté et le comportement asocial d’un personnel pourtant essentiel à la bonne marche de son service, rédige à son sujet un rapport parfaitement objectif et circonstancié. Il le signe. J’y ajoute, manuscrite, la mention suivante : « En accord total avec l’ensemble des termes de ce rapport », je contresigne le document et l’adresse à mon supérieur hiérarchique. Ce dernier, quelques jours plus tard, me joint au téléphone et me pose immédiatement la question suivante : « Dites-moi : il est comment, votre intendant ? »

Je résume le deuxième épisode. Pour me faire enfin céder à sa demande de suppression d’un rapport très sévère que j’avais rédigé sur un personnel « protégé » par sa fonction syndicale, mon supérieur hiérarchique me convoque toutes affaires cessantes dans son bureau. Devant mon refus d’obtempérer à son injonction répétée, et faute d’arguments recevables, il me lance tout à coup : « Je sais que vous êtes un proviseur reconnu, mais on me dit que les résultats de votre lycée sont en baisse ! » (ce qui, en l’occurrence, n’était pas le cas)

…qui sont celles de la société

Ce type de comportement, assez induré, peut en partie expliquer l’état de déréliction croissante où se trouve notre système éducatif, quant à son niveau de qualité et de réussite : les comparaisons internationales en fournissent, chaque année davantage, une preuve indiscutable. Mais c’est aussi le cas des questions de sécurité, morale comme physique, et de discipline : la comptabilité officielle des incidents journaliers, par hypothèse incomplète, en atteste amplement. – Et cependant, le fond de la question n’est plus du tout celui-là.

En réalité, dans la période si troublée et désaxée que nous connaissons aujourd’hui, il est proprement impossible, impensable même, que notre école puisse se rétablir par elle-même : cette crise s’inscrit dans un contexte bien plus large. J’aimerais pouvoir dire qu’il y suffirait que n’y soient nommés que des responsables académiques et départementaux, mais d’abord nationaux, hyper déterminés à la redresser, dotés du courage et de l’énergie nécessaires, et surtout soutenus par leur ministre. Ce n’est hélas plus du tout la question ! En effet, l’Education nationale, aujourd’hui, ne constitue plus un domaine séparé, comme par miracle, du reste de la communauté nationale, et de toutes les autres responsabilités de l’Etat ! Si elle l’a jamais été, l’école n’est plus ce lieu quasi sacré, où n’entrent ni les disputes ni la violence de la vie sociale et politique : chaque jour qui passe montre désormais, sur quasiment tous les plans, y compris les plus triviaux, que notre vie sociale et politique et la réalité de notre institution scolaire sont étroitement imbriquées. Et que donc leur destinée même sera conjointe, dans notre pays, pour le pire ou pour le meilleur.

De ce fait fondamental découle une évidence aveuglante. La priorité politique absolue est que l’Etat, sous toutes ses formes et par toutes ses forces, se fasse enfin respecter, sur la totalité des territoires de notre pays, dans tous les domaines de la vie civile et sociale, et y assure l’ordre républicain et la sécurité, matrices de toutes les libertés publiques et privées. Pour nos dirigeants, faire mine d’essayer, ou même essayer loyalement de rétablir, dans la seule éducation, l’ordre et la sécurité nécessaires aux études, comme si cela pouvait s’effectuer indépendamment de ses autres fonctions régaliennes, s’avèrera pour l’école comme pour le pays tout entier d’une parfaite et coûteuse inutilité – temps et énergie gaspillés en pure perte, voire pire. Tant que des voitures seront brûlées sur un terrain vague ou sur un parking en banlieue, que de modestes habitants des cités seront forcés pour rentrer chez eux de montrer patte blanche à des trafiquants de stupéfiants, que la police, les pompiers ou des soignants ne pourront pas pénétrer en sécurité dans ces zones perdues de la République, que le voile féminin intégral sera de facto toléré sur certaines parties du territoire, il serait absolument inutile, et parfaitement ridicule, vaste et vain gaspillage des deniers de l’Etat, comme de la confiance des citoyens dans les pouvoirs publics, que l’Etat tente, fût-ce à grands frais, de remettre notre école sur la bonne voie : ce serait cataplasme sur jambe de bois.

« L’effondrement de l’autorité n’est-elle pas la vraie et seule crise de civilisation ? »

Sur ce champ crucial, déterminant, je veux citer ces propos de Raymond Aron, comme si souvent d’une clairvoyance et d’une honnêteté intellectuelle hors de pair. Ils pourraient s’appliquer à la très grave situation où se trouvent actuellement la France et notre pauvre Europe :

« Si des pères, des maîtres, des supérieurs hiérarchiques, des prêtres n’inspirent plus de respect, il ne subsiste que la puissance nue ou l’anarchie. »[tooltips content= »Études politiques, 1972, cité par Mathieu Bock-Côté, Raymond Aron, notre contemporain, revue Arguments, 2013. »]1[/tooltips]

« L’effondrement de l’autorité n’est-elle pas la vraie et seule crise de civilisation ? »[tooltips content= »Plaidoyer pour l’Europe décadente,1977. »]2[/tooltips]

Et peut-être surtout ce dur constat, si actuel :

« Pendant ces années de décadence[tooltips content= »Il s’agit ici des années 1930. »]3[/tooltips], […] quel gouvernement pouvait sortir de la compétition entre des partis qui se perdaient dans des intrigues parlementaires et qui refusaient d’ouvrir les yeux ? Baisse de la natalité, baisse de la production, effondrement de la volonté nationale : il m’est arrivé par instants de penser, peut-être de dire tout haut : s’il faut un régime autoritaire pour sauver la France, soit, acceptons-le tout en le détestant. »[tooltips content= »Mémoires. Cité par Jean-Louis Crémieux-Brilhac, Les Français de l’an 40. »]4[/tooltips]

Pour qu’un esprit tel que Raymond Aron, si affectivement et intellectuellement attaché aux libertés publiques et privées, en vienne à se résoudre, certes douloureusement, à leur réduction, il fallait que la menace fût exceptionnellement grave et imminente. Et elle l’était ! C’est à nous aujourd’hui qu’il incombe de prendre la mesure des dangers que traversent la France et l’Europe, pour les affronter, avec la lucidité, la détermination et les moyens nécessaires.

Plaidoyer pour l'Europe décadente

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Racistes, vénaux, sexistes? Les sites de rencontre sur la sellette…

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tinder racisme slate feminisme
Sipa. Numéro de reportage : SIPAUSA31449810_000002.

Il est aujourd’hui de bon ton de critiquer les sites ou applications de rencontre : prétextes à se faire offrir un dîner, à choisir des partenaires sexuels trop ou pas assez exotiques, Tinder et ses concurrents auraient tous les vices. Attention, la police des braguettes patrouille…


Si vous croyez que les sites de rencontres ne servent qu’à trouver l’amour ou à se faire culbuter, détrompez-vous. Sarah, une étudiante britannique, a avoué au site féminin australien Whimn profiter de l’application Tinder pour se nourrir à l’œil. Rouée, la célibataire dîne mais ne couche pas ! L’idée lui est venue après avoir accepté un rendez-vous avec un homme au physique décevant. « Dan avait l’air d’avoir dix ans de plus que sur ses photos et il était plus petit que moi », se justifie la jeune fille. Buvant pour oublier, Sarah a accepté de se faire payer l’addition. Depuis, elle s’est sustenté à l’œil une bonne quarantaine de fois en deux ans : « Je ne ressens pas une once de culpabilité je ne fais rien d’illégal, et si un jour je rencontre l’amour sur Tinder, je partagerai l’addition. » Comme quoi, la galanterie a survécu… chez ses chevaliers servants.

Cherche asiatique soumise

Profondément inégalitaires, le plus souvent au détriment des hommes, les sites de rencontres sont une terre de mission prisée des croisés antiracistes. D’après un article de Slate, la discrimination y serait monnaie courante sous des formes classiques « Pas de femmes noires ni de mères célibataires » et plus inattendues : « la fétichisation des personnes racisées ». Les amateurs de femmes asiatiques réputées soumises ou d’hommes africains connus pour la « taille de leur âme » se le tiendront pour dit. La police des braguettes veille…

L’antiracisme se mord la queue

Jusque dans les colonnes du Monde, où la chroniqueuse Maïa Mazaurette s’est fendue d’un long article pour nous expliquer que les Blancs n’ont qu’une idée en tête : épingler une orientale lascive ou un étalon noir à leur tableau de chasse. Si la xénophilie est aussi blâmable que la xénophobie, on finira tous le doigt sur la couture du pantalon…

Libérons nous du féminisme !

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Ruby Namdar, un grand écrivain israélien est né

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Ruby Namdar ©Philippe Matsas/Opale

Avec son premier roman La Maison de ruines, Ruby Namdar met en scène un juif new-yorkais en proie à la crise du milieu de vie. Rendant hommage à Roth, Bellow et Singer, son auteur imprégné de mystique juive et soufie nous entraîne sur les territoires perdus du sacré. 


Ruby Namdar a la main lente. Son brillant premier roman, récompensé en Israël par le prestigieux Sapir Prize, l’équivalent de notre Goncourt, coule paresseusement comme l’Hudson River, que le héros principal, Andrew Cohen, contemple chaque jour depuis sa fenêtre. L’action de La Maison de ruines se déroule à New-York, à quelques mois de l’apocalypse du 9 septembre 2011. Cohen a tout en commun, dirait-on, avec les personnages qui peuplent les romans de Philippe Roth ou de Saul Bellow : la sophistication d’un intellectuel juif chargé de cours de culture comparée à l’université de New York, la vanité, les snobismes gastronomiques, une vie familiale éclatée par un divorce et toute la confiance en soi nécessaire à un homme aux alentours du demi-siècle pour entamer une relation sentimentale avec une femme qui pourrait être sa fille.

« J’aime la friction entre ce que notre cerveau contrôle et le subconscient d’où nous n’avons pas réussi à chasser le mot péché »

Mais Andrew Cohen n’est ni Zuckerman ni Herzog, pas plus que Namdar n’est Roth ou Bellow. Certes, les obsessions du romancier israélien, installé à New-York depuis bientôt vingt ans, se rapprochent de celles de tous les grands écrivains juifs de la côte Est. Ainsi dans La Maison de ruines, il s’empare de la question de l’acculturation des intellectuels juifs coupés de leurs racines spirituelles, de leur rapport à la tradition, à la religion, du poids de l’Histoire et de l’héritage, et, enfin, de la psychologie masculine avec sa hantise de l’impuissance et du vieillissement. Seulement, la finale dégringolade d’Andrew Cohen relève moins de la « mid-life crisis » ou même de la crise existentielle, que d’une détresse métaphysique, sinon mystique. Et c’est là que Namdar rejoint Singer, non mécontent qu’on lui impute cette filiation. « Mon livre rend à sa façon hommage à Roth, Bellow, Oznik, Malamoud… Mais Singer restera mon maître incontestable, avec sa manière spécifique de glisser le surnaturel dans la vie quotidienne de ses personnages, son recours aux métaphores bibliques, son humour et son goût pour le grotesque », confie-t-il.

Jovial, enthousiaste, chaleureux, Ruby Namdar possède en outre ce talent délicieux de vous entraîner vers les territoires perdus de la grande littérature où, jadis, on cultivait les passions ontologiques en rapport avec ce quelque chose que l’on appelle l’ « essence de l’être », tout comme avec les questionnements sur le Bien et le Mal, la morale, ses fléchissements. Il lui suffit d’une impulsion, d’un signe de votre sensibilité au sujet. Quand vous lui faites une remarque à propos du mot « péché », qu’il avait employé dans son texte publié par The New York Times, il saisit la balle au vol. « Dire ‘péché’ est devenu subversif, provocateur, inconvenable, je le sais… Or, j’aime la friction entre ce que notre cerveau contrôle et le subconscient d’où nous n’avons pas réussi à chasser le mot ‘péché’, où il a sa place. Nous vivons une époque qui n’aime même plus le mot ‘âme’. Pourtant je le préfère mille fois à tous ces ‘psyché’, ‘ego’, ‘souffle vital’. Et je préfère le mot ‘religion’ au mot ‘spiritualité’, susceptible d’évacuer le moindre conflit en nous, d’apaiser le moindre inconfort. » L’homme a grandi à Jérusalem, au sein d’une famille juive originaire d’Iran. Ceci explique probablement sa distance, gentiment moqueuse, face à l’aspiration laïque qui habite la littérature israélienne contemporaine. « Mon travail n’est pas représentatif de la scène littéraire en Israël. Il y a une certaine proximité avec Amos Oz, rien de plus. Les écrivains vivent à Tel-Aviv, le Babel séculier, profane, amusant aussi, mais éloigné de mes préoccupations », tranche-t-il, avant de sauter à pieds joints dans une savoureuse digression sur les poètes soufis, qu’en son temps il a traduit du persan vers l’hébreu. Qu’est-ce qu’un péché, donc, à notre époque, dans notre monde ? La question semble avoir heurté Ruby Namdar, qui délaisse soudain la petite cuillère dans une tasse à café désormais vide : « Allons ! Qu’on le veuille ou pas, nous sommes des créatures morales et savons, au fond, reconnaître un péché. Les fondamentalismes, quels qu’ils soient – islamistes, chrétiens, juifs –, se nourrissent précisément de cet effacement de toute référence religieuse de notre âme collective. »

« Nous ne croyons plus que nous sommes sacrés ! »

Impossible d’y échapper, bien que nous soyons sensibilisés au fait qu’il est malpoli de juger notre prochain. Reste que si Andrew Cohen est en proie à des visions dantesques de sa ville en ruines et voit sa vie en miettes, à croire qu’elle n’a jamais été rien d’autre que du pain rassis, c’est qu’il a péché. Cohen avait péché. Et son péché n’est autre que l’orgueil que nous tous, modernes et affranchis des culpabilités néfastes à notre développement personnel, cultivons à l’envi.

Nous nous suffisons. Tant qu’un minuscule accident de parcours ne nous contraint pas à examiner les abysses de notre propre existence. Dans le cas du professeur Cohen, il s’agit d’une promotion qui lui file sous le nez au dernier moment, de surcroît au profit d’une ancienne étudiante ou, peut-être, de l’essoufflement de sa liaison avec la jeune Ann Lee, voire des deux. L’immense mérite de Ruby Namdar, c’est de dépasser l’individuel pour atteindre l’universel – définition même de la littérature. Ce qui est arrivé à Cohen, peut arriver à n’importe lequel d’entre nous, peu importe la tradition ou la religion dont il est issu. Où, alors, chercher secours ? Chez un psy, vu que l’édifice religieux que l’on honore de notre présence à l’occasion des grandes fêtes ne paraît pas trop sérieux, à l’instar de la synagogue dans laquelle Cohen faisait de rares apparitions : « Anshei Shalom, la synagogue qu’il fréquentait, était particulièrement progressiste, pour ne pas dire avant-gardiste. À l’exception de quelques versets choisis pour leur valeur poétique par les rédacteurs du New Holiday Prayer Book, presque tout le service se déroulait en anglais. […] En recherche constante d’adaptation, Anshei Shalom incarnait à la perfection le désir d’égalité, le multiculturalisme, l’humanisme et la politique de gauche libérale qui flottaient dans l’air du temps. » En 1964, lors d’un concert à Montréal, Leonard Cohen a poussé un cri d’illuminé : « Il y a une terrible vérité qu’aucun écrivain juif d’aujourd’hui n’a envie d’examiner. Cette vérité est que nous ne croyons plus que nous sommes sacrés ! » Ruby Namdar relève le défi consistant à prouver que nous nous trompons. Avec succès.

Ruby Namdar, La Maison de ruines, Belfond, 2018, 23 euros.

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Bolsonaro, dernier « facho » avant la fin du monde?

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Jair Bolsonaro en conférence de presse, 25 octobre 2018. SIPA. 00881721_000003

Fait n°1

Selon le WWF, entre 1970 et 2014, les populations de vertébrés sauvages ont chuté de 60 % au niveau mondial. La dégringolade est encore plus marquée dans les zones tropicales.

Fait n°2

L’élection de Jair Bolsonaro achève, si besoin était, de prouver à quel point la démocratie représentative à l’époque du capitalisme assisté par les réseaux sociaux et les fake news est le régime qui évite aux lobbys patronaux ultralibéraux accompagnés par des militaires d’avoir recours aux blindés, comme au Chili en 1973, pour mener leur politique. La démocratie version années 2010, ce sont  les pigeons qui votent pour l’ouverture de la chasse.

Fait n°3 :

Que les Brésiliens jouent à la roulette russe avec leurs libertés, c’est leur droit. Après tout, se laisser convaincre par plus riche que soi que Bolsonaro apportera la sécurité, ça ne concerne que celui qui le fait. Tout le monde peut choisir de débrancher son cerveau et de perdre sa conscience de classe. On remarquera cependant que le Nordeste et l’Etat de Bahia, plein de vrais pauvres, très pauvres, ont, eux au moins,  compris qu’ils allaient prendre cher.

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Ils ont voté Haddad à 70% et plus. Ils ont même compris que le Parti des travailleurs (PT), si l’on oublie le storytelling des réseaux sociaux ultraréacs, des milieux patronaux court-termistes et autres néoconservateurs, des paranoïaques du métissage, très présents chez nous aussi,  que le PT, donc, les a sortis de la misère. Et, pour ce faire, dans un pays avec des dizaines de partis à l’Assemblée nationale, a dû arroser des micro-alliés pour parvenir à mener à bien leurs projets éducatifs et sociaux.

Le PT a corrompu, beaucoup plus qu’il n’a été corrompu, et pour la bonne cause. On ne peut pas en dire autant de Temer qui a pustché parlementairement Dilma, la « durona », torturée en son temps par les grandes admirations de Bolsonaro

Fait n°4

Il est à mettre en rapport avec le fait n°1 : Bolsonaro veut fondre le ministère de l’Agriculture et de l’Environnement : bref, il veut laisser ses copains de l’agrobizenesse en finir avec l’Amazonie, le poumon vert de l’humanité que Lula et Dilma avaient réussi à préserver, ou tout au moins s’étaient efforcés d’y limiter la casse écologique.

Si je relie le fait n°4 au fait n°1, c’est là le vrai drame, à portée universelle, de l’élection de l’aphasique galonné. On sait tous (tout en ne voulant pas le savoir, dans une démarche typique du déni de ceux atteints d’une maladie incurable) que l’effondrement est imminent. Tous, à part une ultraminorité climatosceptique de ravis de la crèche marchande qui « n’y croient pas », soit parce qu’ils sont vieux, sans enfants et n’en ont plus rien à faire du monde après eux, soit parce qu’ils sont complotistes et qu’ils confondent le GIEC et les Illuminati.

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Le drame de l’élection de Bolsonaro, ce n’est même pas qu’il soit facho, c’est qu’il va accélérer encore, en détruisant l’Amazonie, notre arrivée dans l’apocalypse. A ce titre, il est bien de notre temps, celui de la déraison définitive. Ce que remarquait déjà Guy Debord, le Vieux de la Montagne, dans ses Commentaires de 1988: « La pollution des océans et la destruction des forêts équatoriales menacent le renouvellement de l’oxygène de la Terre (…) Le spectacle conclut seulement que c’est sans importance. Il ne veut discuter que sur les dates et les doses. Et en ceci seulement, il parvient à rassurer ; ce qu’un esprit pré-spectaculaire aurait tenu pour impossible. (…) Il est assurément dommage que la société humaine rencontre de si brûlants problèmes au moment où il est devenu matériellement impossible de faire entendre la moindre objection au discours marchand. »

Trois mesures pour mettre fin à l’immigration illégale

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Des hommes sont contrôlés à la frontière franco-italienne, octobre 2018. SIPA. AP22261755_000002

Une tribune du think tank, Le Millénaire, qui travaille à la refondation du projet politique des Républicains.


L’immigration est un sujet trop essentiel pour ne pas le traiter de manière factuelle, sans hystérie et sans caricature. Le dernier remaniement, avec l’abaissement protocolaire du ministre de l’Intérieur de la 2ème à la 11ème place, démontre pourtant qu’il ne s’agit pas d’une priorité pour Emmanuel Macron, alors même que les questions d’immigration et de sécurité sont redevenues dans les derniers sondages les premières préoccupations des Français.

La France et, plus largement, l’Union européenne (UE) sont mises à l’épreuve d’une pression migratoire sans précédent. L’UE chiffre le nombre de migrants arrivés entre 2015 et 2017 sur son territoire, et qui ne peuvent prétendre à l’asile, à 1,5 million. En France, le nombre de demandeurs d’asile a augmenté de 17% pour la seule année 2017, dépassant ainsi la barre des 100 000. En parallèle, la primo-délivrance des titres de séjour bondit de 13,7 % en 2017, avec 262 000 titres de séjour délivrés, ce qui peut s’expliquer notamment par une forte augmentation des premiers titres de réfugiés et bénéficiaires de la protection subsidiaire (35 825 titres, +56,5% par rapport à 2016). A l’inverse, le nombre d’étrangers reconduits est de 26 000 pour 2017, et le nombre de mesures d’éloignement exécutées était de 18% en 2016. 75 587 étrangers sont donc restés sur notre territoire malgré la mesure d’éloignement prononcée à leur encontre.

A cet égard, force est de constater que les dispositions de la loi asile et immigration votée en août sont totalement insuffisantes. Les ténors de La République en marche ont beau claironner leur « fermeté », nous nous demandons où elle se trouve au milieu de dispositions favorables aux migrants (notamment l’augmentation de la durée de titre de séjour des bénéficiaires de la protection subsidiaire), de mesures proprement hallucinantes (comme l’octroi automatique de l’asile aux frères et sœurs des mineurs réfugiés) et de mesures essentiellement techniques et procédurales (la réduction du délai de traitement de l’asile). Quant à l’augmentation de la durée de séjour en Centre de rétention administrative, l’extension des pouvoirs d’investigation ou le raccourcissement des délais de dépôt des demandes… ce ne sont, très honnêtement, que des rustines sur une jambe de bois. En effet, ces dispositions n’interviennent qu’a posteriori, une fois que le migrant illégal est déjà sur notre territoire. Or, tant qu’il sera possible d’y pénétrer illégalement, et de commencer à s’y installer, l’immigration illégale ne fera que croître, et les morts en mer sur le chemin de l’UE également.

Pour faire face à un enjeu migratoire d’une ampleur sans précédent, ne sont donc à la hauteur ni les ajustements paramétriques et normatifs votés par la majorité, ni l’immigration zéro dont rêve le Front national. En effet, le zéro immigration (y compris qualifiée) nous serait extrêmement dommageable économiquement, et romprait avec notre ADN de pays accueillant envers les étrangers partageant nos valeurs républicaines.

Au contraire, nous estimons nécessaire rien de moins qu’une révolution copernicienne en matière migratoire, traduite dans les faits par une action ferme et résolue aux niveaux nationaux et européens.

La priorité absolue doit être la lutte sans merci contre l’immigration illégale. Il est urgent de rétablir le délit de séjour irrégulier en France, supprimé sans explication par le quinquennat précédent. De même, le respect de nos lois est un principe non négociable : le placement en centre de rétention administrative des étrangers en situation irrégulière, puis leur expulsion, doit redevenir la règle et non l’exception. Malgré ce que nous dit le gouvernement, ce n’est pas du tout sa priorité, et cela le sera encore moins avec M. Castaner à l’Intérieur : l’allongement de la durée maximale de rétention et l’augmentation du taux d’occupation (qui avoisine les 100%) n’ont pas été pris en compte dans le budget 2018. Le budget des Centres de rétention administrative est de 45,8 millions d’euros pour 2018 alors que le budget exécuté en 2016 était de 61,3 millions d’euros pour le placement en rétention de 44 086 personnes. Comment veut-on exécuter cette politique si l’on n’y alloue même pas les moyens budgétaires nécessaires ?

Cependant, la simple application des lois existantes est loin de suffire. Nous devons changer de paradigme. Au lieu de continuer à favoriser l’immigration illégale (en n’expulsant pas les clandestins et en continuant d’offrir des services comme l’Aide médicale d’Etat) au détriment de l’immigration légale (qui nécessite de faire des queues scandaleuses dans nos préfectures pour l’obtention de titres de séjour légal), nous devons faire l’inverse. Trois mesures s’imposent.

Premièrement, les demandeurs d’asile provenant de pays dits « sûrs », comme l’Albanie, ne doivent plus pouvoir déposer leur demande d’asile dans notre pays, mais dans leur pays, au consulat français le plus proche de chez eux. De la même manière, nous devons installer des centres offshore de traitement des demandes d’asile, non seulement dans les camps de réfugiés du Haut Commissariat aux Réfugiés de l’ONU, mais aussi et surtout dans les pays d’origine et de transit, de telle sorte que les migrants, d’où qu’ils viennent, n’aient pas besoin de poser le pied sur le territoire européen pour y déposer leur demande d’asile : il ne doit plus y avoir d’excuse à l’entrée de manière illégale sur notre territoire. Les migrants entrant illégalement dans l’UE par bateau ou voie terrestre pourront alors être interceptés et transférés vers ces centres offshore.

Deuxièmement, nous devons nous doter d’un système de gestion de l’immigration légale à la fois simple, efficace, et surtout fiable, à l’instar de l’ensemble des pays développés ayant une politique migratoire où la loi est appliquée. En effet, nous devons bien mieux distinguer entre immigration légale et illégale. Pour cela, il est impératif de créer enfin un véritable statut de résident, avec des cartes de résident à la durée de validité égale à la durée du contrat de travail (ou des études) de l’étranger. De même, il convient de créer un statut de résident permanent, qui pourra être octroyé aux étrangers les plus qualifiés (ex : expatriés de multinationales, scientifiques ou artistes reconnus), qui dispensera l’étranger de devoir renouveler sans cesse son titre de séjour et lui évitera la tentation de demander la nationalité pour de simples questions de droit au séjour. Ce système, amplement prouvé dans des pays comme le Canada ou le Japon, permettra de désengorger les préfectures de manière drastique et permettra à ces dernières de se focaliser sur la répression de l’immigration illégale.

Enfin, nous devons pouvoir éloigner l’intégralité des étrangers en situation irrégulière. En effet, tous les efforts investis dans les politiques des visas, des frontières et de l’asile sont réduits à néant si les déboutés et les migrants ayant  pénétré illégalement sur notre territoire ne sont qu’une petite minorité à être éloignés. Il n’y a pas de gestion possible de l’immigration sans politique de retour efficace pour les illégaux. Le problème est bien connu : les pays d’origine de l’immigration ne délivrent pas suffisamment de laissez-passer consulaires, documents aujourd’hui indispensables à l’éloignement. Face à ce problème ancien, la vieille solution du conditionnement de l’aide au développement de la France à cette délivrance de documents ne sera jamais qu’une solution partielle et peu applicable. Nous devons donc aussi signer des accords avec des pays tiers afin que tous les clandestins ressortissants de pays récalcitrants à leur retour puissent être acheminés vers des centres de rétention construits dans le pays tiers, sur le modèle de l’Australie avec le camp de rétention à Nauru. C’est une solution gagnant-gagnant pour la France (le migrant illégal est expulsé) et pour le pays tiers (le centre de rétention fournit de l’emploi et est assorti d’aides financières), et qui permet de court-circuiter l’assentiment du pays dont l’étranger est ressortissant. De plus, l’éloignement se fait vers un endroit où le migrant sera en parfaite sûreté, nous protégeant ainsi des décisions idéologiques de la CEDH. Cette politique étant fortement dissuasive (comme démontré par l’Australie, première à avoir appliqué cette politique, où le nombre de traversées illégales, et donc le nombre de morts en mer, ont largement baissé), l’effort budgétaire (certes conséquent) ne sera que temporaire, car une fois le système en place, plus personne ne cherchera à venir illégalement sur notre territoire.

Ces trois mesures mettront un terme définitif à l’immigration illégale tout en permettant toujours un accueil des véritables réfugiés (et ce dans de bien meilleures conditions qu’aujourd’hui), et faciliteront grandement la vie des étrangers résidant légalement en France, leur permettant ainsi de mieux s’intégrer.

Oui, l’islam a joué un rôle dans la guerre d’Algérie

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Manifestations du 1er novembre 1961 dans les rues d'Alger. SIPA. 00418369_000007

Les historiens, algériens ou non, ne se bousculent pas pour aborder le sujet. La guerre d’Algérie a pourtant bien eu une dimension religieuse.


Il avait fallu que l’Algérie mit fin au monopartisme, avec la nouvelle Constitution de 1989, pour que l’islamisme devienne visible. Très vite agressivement totalitaire, il préféra la plonger dans une effroyable guerre civile qui fit plus de 200 000 morts selon le président de la République lui-même. En Algérie et plus encore ailleurs, beaucoup s’étonnèrent : mais d’où sortaient donc ces centaines de milliers de barbus en gandoura blanche bien décidés à imposer leur nouvel ordre, d’abord aux femmes et aux intellectuels, et ensuite au reste, par la carotte, le bâton et enfin par la kalachnikov ?!

Pas l’islamisme, l’islam

Les premières réponses furent du registre de la paresse de la pensée. C’était la faute, bien sûr, de l’Iran qui voulait exporter sa révolution khomeyniste. C’était la faute des « Afghans » (plus de 3000 jeunes algériens ayant combattu les Soviétiques dans les années 80 venaient d’en revenir…) ; la faute enfin des Frères musulmans qu’on appelait familièrement « les frérots » : en arabisant totalement son système d’éducation, l’Algérie avait dû importer des milliers d’enseignants, pourchassés dans leurs pays par les nasséristes et les baathistes pour leur activisme islamiste (Egyptiens, Irakiens, Syriens, etc.). Comme il est fréquent dans le monde arabo-musulman, la faute c’est toujours celle des autres. Le mal vient toujours d’ailleurs.

Depuis, des chercheurs algériens ont certes rectifié cette idée en évoquant l’origine religieuse de la violence durant la guerre d’Algérie. Mais ils n’en ont jamais fait l’objet d’une étude spécifique. Ni Mohamed Harbi, pourtant le plus contestataire des historiens algériens de cette période, ni les autres grands historiens français spécialistes de cette période, Guy Pervillé et Gilbert Meynier. Personne n’avait osé mettre les pieds dans le plat, tant la question est tabou, et démontrer que déjà la guerre d’Algérie (1954-1962) avait eu une « dimension » religieuse.

A lire aussi: La guerre d’indépendance a rendu impossible la rupture entre la France et l’Algérie

Ce mérite revient à Roger Vétillard, fortement encouragé d’ailleurs par Gilbert Meynier dans cette délicate entreprise. Peut-être parce que cet ancien médecin spécialiste qui a attendu la retraite pour se lancer dans l’étude de la guerre d’Algérie a su profiter de cette liberté de n’être pas historien de profession. Ce qui en retour lui faisait obligation de redoubler de scrupules quant aux sources et à leur traitement. Fort de son savoir médical, il va, tel le sémiologue, aller du symptôme (discours, prises de positions, programmes, etc.) vers la matrice, celle dont il ne faudrait pas montrer le sein, l’islam. Pas l’islamisme, non, simplement l’islam, qui imprègne conscience et inconscient, paroles, gestes et actes. Or  la société algérienne, profondément islamisée depuis 16 siècles est naturellement sculptée par les concepts-clés de la doctrine, et notamment par celui qui règle le rapport à l’autre, le djihad. Il reviendra aux dirigeants nationalistes de l’ALN-FLN, y compris ceux connus pour être des « laïcs », de puiser sans vergogne dans ce fonds sans fond, que ce soit par volonté de manipuler facilement les collectifs ou par opportunisme politique.

L’ennemi est « l’infidèle », la guerre est un « djihad »

Ne dit-on pas « moudjahid », alors que le mot arabe pour « combattant » existe ? « Fidaï » (« fidayine » au pluriel), qui évoque le « sacrifice », pour désigner le terroriste (celui qui en tuant y compris des civils est chargé de provoquer de la terreur) et « chahid » (au pluriel « chouhada ») pour le combattant tué, mais dont la signification littérale est « martyr » (de la religion)…

Des preuves, Roger Vétillard va en convoquer 45. Pas une de moins ! « Précises et vérifiables », comme insiste l’auteur. La déclaration d’indépendance du 1er Novembre 1954 a pour but un Etat souverain, mais « dans le cadre des principes islamiques ». On se jure fidélité sur le Coran. On coupe le nez des déviants pris en flagrant délit. L’homosexuel est puni de la peine de mort, quel que soit son grade (le chef militaire Bachir Chihani en fera l’expérience). L’égorgement n’est pas un acte sauvage pour le combattant, puisque sanctifié par l’islam[tooltips content= »« Je suis venu à vous par l’égorgement, a dit Allah » (Abu Ya’La, hadith n° 7285) »]1[/tooltips]. L’ennemi est « l’infidèle », la guerre est un « djihad ». On la mène au cri d’ « Allahou akbar » (Allah est le plus grand). Et ceux qui la font sont des « frères » (« khawa », c’est-à-dire des frères… musulmans). Dans les zones qu’il contrôle, le FLN remplace la juridiction française laïque par la charia.

« L’islam a été le ciment qui nous permit de sceller notre union »

Un des grands dirigeants de la lutte armée, et particulièrement du massacre du 20 août 1955 dans l’est-algérien, Lakhdar Ben Tobbal, avoue dans ses mémoires avoir fait la guerre aux non-musulmans : « Bons ou mauvais, je ne faisais pas de différence ». Un autre dirigeant, Si Abdallah, témoigne : « Nous n’arrivions pas dans une mechta en soldats révolutionnaires mais en combattants de la foi et il est certain que l’islam a été le ciment qui nous permit de sceller notre union… » Même un des dirigeants souvent présenté comme le Saint Just laïque de la révolution et qui sera assassiné par les siens, le Kabyle Abane Ramdane, ne dérogera jamais à l’idéologie dominante qui se veut « arabo-musulmane », et à ce titre signera un texte contre « les berbéristes », destiné à la Fédération de France du FLN. Quant à l’autre chef kabyle, le Colonel Amirouche, très peu savent qu’il adhéra à l’Association des Oulémas (d’où sortiront plus tard les cadres de l’islamisme), qu’il défendit la langue arabe contre le berbère, qu’il s’opposa radicalement aux « berbéristes » (nationalistes qui ne voulaient pas d’une Algérie fondée sur des critères ethniques ou religieux) et qu’il imposa les prières quotidiennes à ses subordonnés dans les maquis.

Aussi, le résultat d’une telle orientation pouvait-il être autre que celui qui s’imposa au moment de l’indépendance et que révéla clairement le président du Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA), Ben Khedda, trente ans plus tard dans ses mémoires : « En refusant notamment la nationalité algérienne automatique pour un million d’Européens, nous avions prévenu le danger d’une Algérie bicéphale »[tooltips content= »La fin de la guerre d’Algérie, Casbah Ed. 1998″]2[/tooltips] ? Les accords d’Evian du 18 mars 1962 (qui ne furent jamais ratifiés par l’organe suprême du congrès de Tripoli) se refusaient à considérer les non-musulmans comme des Algériens. Diktat imposé par le FLN à la France, en échange de l’autorisation à exploiter le pétrole durant 10 ans. Les non-musulmans ne pouvaient devenir Algériens qu’en en faisant la demande, souvent refusée à des militants de la cause indépendantiste.

L’effacement des non-musulmans

Dans le très officiel Mémorial des Martyrs d’Alger, aucun nom de combattants non-musulmans ne figure. Bien plus, à Ténès on débaptisera la rue Ghenassia en rue de Palestine : cet infirmier juif avait pourtant préféré mourir que fuir l’encerclement de l’armée française, afin de rester près de ses blessés. En 1962, le million de chrétiens et de juifs n’eut d’autre choix que de quitter précipitamment ce qu’ils considéraient comme leur pays. Et pour ceux qui, malgré tout, continuaient à espérer pouvoir rester, on commandita l’assassinat du musicien juif Raymond Leyris, le 22 Juin 1961, puis une année plus tard le massacre de centaines de non-musulmans à Oran, le 5 Juillet 1962, méfait à ce jour non-revendiqué par ses auteurs, et à propos duquel aucun historien algérien n’a encore osé entreprendre une recherche, comme on peut s’en douter.

Des preuves de « la dimension religieuse de la guerre d’Algérie », on pourrait encore en trouver de très nombreuses. Ce qui ne manque pas d’étonner, c’est plutôt le refus des élites algériennes comme européennes d’admettre l’évidence. Et si cela pouvait se comprendre durant la guerre d’indépendance, de leur point de vue (ne pas affaiblir « la révolution »), que dire aujourd’hui, 56 ans plus tard ? Ne serait-ce pas parce que cette stratégie de l’aveuglement rend encore quelques services aux élites dhimmisées en cette époque où les violences de l’islamisme, confinées jusque-là aux pays musulmans, sont en train, depuis plus de deux décennies, de s’exporter, notamment en Europe ?

A lire aussi: Et le FLN instaura une Algérie arabo-musulmane

Le livre de Roger Vétillard, qu’aurait aussi bien pu écrire La Palice, est donc une nouvelle invitation à ôter ses œillères et à nommer les choses telles qu’elles sont et non telles qu’on souhaiterait les voir. La lecture d’un monde en plein remodelage y gagnerait en lucidité.

Je lui ferai néanmoins une objection : pourquoi avoir repris la thèse de Mohammed Harbi qui attribue aux « ruraux » la responsabilité de l’imprégnation de la religiosité dans le combat libérateur ? Thèse doublement contredite par le fait que l’Association des Oulémas, d’où émergèrent de nombreux dirigeants, fut toujours dirigée par des citadins, à commencer par Ben Badis, et surtout par le fait que la société algérienne profonde, paysanne, resta fidèle à l’islam confrérique[tooltips content= »L’anthropologue algérienne Fanny Colonna, disparue en 2014, a consacré l’essentiel de son travail à ce sujet, notamment dans Versets de l’invincibilité, 1995, Presses de Sciences Po. »]3[/tooltips], et ce malgré la stigmatisation et les attaques des nationalistes et de l’Association des Oulémas avant l’indépendance, et des islamistes du FIS-GIA dans les années 90, pour tenter de s’imposer comme unique représentant dans le champ du religieux. Sans succès jusqu’à aujourd’hui. Et à tel point que Bouteflika, changeant le fusil d’épaule, fut contraint de s’en faire des alliés…

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La France, victime de la décadence médiatique

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Sophie de Menthon. SIPA. 00812836_000005

Une tribune de Sophie de Menthon.


Tous coupables de cette décadence médiatique que nous encourageons en mordant à l’hameçon ? A moins que ce ne soit le modèle économique de la presse à bout de souffle ? Ou encore la faute d’une paresse intellectuelle entretenue ? Mais la réalité est bien là, nous ingurgitons en boucle une bouillie médiatique indigente qui nous conditionne. Un embrigadement volontaire qui nous soumet à une sorte d’influence sans issue, le syndrome de Stockholm !

Quand le scoop tue l’info

Trop nombreuses, les chaînes d’info en continu sont astreintes à une compétition permanente au mépris absolu de la qualité et de l’objectivité qui nécessitent un peu de temps et d’investigation. Presse écrite ou audiovisuel, on n’a plus les moyens de mener des enquêtes sérieuses. Quant à la radio, les jeunes de moins de 25 ans ne l’écoutent pas. Nos parents attendaient les « nouvelles », on nous a conditionné à attendre les scoops.

Nous ne choisissons plus nos vecteurs d’information, nous zappons inlassablement. Saluons toutefois les bonnes émissions… Mais comment supportons-nous de regarder indéfiniment ces malheureux reporters postés, qui attendent inlassablement un micro à la main qu’il se passe quelque chose quelque part, meublant de propos insipides mais haletants de longues heures creuses. L’envoyé spécial qui nous annonce qu’il n’a rien à dire mais qu’il va le dire. Le micro qui se tend aux victimes des inondations en leur demandant (sic) « …et vous espérez que les pluies vont être moins abondantes ? » Ou encore guettant l’annonce du nouveau gouvernement qui ne vient pas, et qui enfin arrive… par dépêche AFP ! Ce qui nous a offert récemment le spectacle hilarant du messager posté devant Matignon ou l’Elysée, micro au poing, consultant son portable pour y trouver la composition du gouvernement.

La télé vit avec l’espoir de la « breaking news » qui permet de stopper n’importe quelle émission pour faire semblant d’être les premiers informés et donner le sentiment que c’est important et que tout s’arrête : suspense ! Pour que le téléspectateur ne s’ennuie pas pendant les informations ou les débats (ce qu’on peut comprendre), on lui met en sous-titre d’autres infos qui n’ont rien à voir avec le sujet traité, évitant ainsi réflexion et concentration ; en même temps, il peut vérifier sur les réseaux sociaux s’il n’y a pas une « fake news » qui traîne.

La recherche du feuilleton

Les sujets qui font la « une » avec matraquage systématique ont heureusement une durée de vie assez limitée, comme par exemple la sortie du CD posthume de Johnny Hallyday faisant l’objet d’émissions d’autant plus spéciales que personne n’avait pu écouter encore les chansons. Mais on nous expliquait comment le secret avait été bien gardé avec les mêmes précautions que s’il s’agissait d’un engin nucléaire, reportage prolongé tard dans la nuit jusqu’à 1h du matin pour guetter les fans qui seraient les premiers dans les points de vente ouverts à minuit… et toujours le même reporter micro au point dans une rue déserte auquel on demande : « Est ce que la foule se presse déjà devant la boutique ? »

Les engouements médiatiques auxquels il est impossible d’échapper sont créés de toute pièce par le phénomène de répétition et la psalmodiation crescendo qu’il faut alimenter sans cesse par un nouveau détail essentiel.

A lire aussi: Immigration: les médias nous mènent en bateau

Le feuilleton est un objectif rêvé, comme celui concernant Benalla auquel on finit par s’attacher, chouette un rebondissement : le certificat des victimes tabassées serait un faux de l’aveu du médecin qui l’a produit. Après la sortie du disque de Johnny Hallyday on devrait repartir sur l’héritage, les droits et le procès entre les enfants et la veuve. Mélenchon vient de nous offrir un entracte avec la rixe de sa perquisition, sa liaison supposée, et, oh ! bonheur, il en a rajouté en insultant l’accent… d’une journaliste ! Comme c’est la presse qui porte plainte on en a pour un bout de temps, sans compter l’ineffable proposition de loi factice sur la stigmatisation des accents : la « glottophobie » dont on ignorait tous l’existence. En plus, voila qui pourrait relancer l’affaire Zemmour ?

Tout cela est bien rodé : scoop, internet, presse, commentateurs télé, gros-titre, presse people, reprise de la presse people, hurlements de l’opposition et on recommence.

Les médias sont l’actualité

Les hallalis sont monnaie courante, s’acharnant sur l’ennemi public numéro 1 de l’instant qu’on abandonne à terre quasi mort ; si on l’a calomnié (la « fake news » n’est pas autre chose que la calomnie) deux ou trois lignes et quelques brèves feront l’affaire pour ajuster le tir ou démentir. De toute façon, il ne sera jamais blanchi…

Ce qui est grave, c’est la manipulation des esprits et l’impossibilité de s’exprimer avec nuance et de remettre les choses à leur juste place, l’indignation fait vendre et nous achetons. Le nombre croissant de mots interdits, les soupçons permanents de stigmatisation, de racisme, d’intolérance, etc. font partie du prêt-à-penser généralisé et fournissent les occasions de s’indigner. Seuls les medias seraient politiquement corrects !

Nos sondages eux-mêmes finissent par être le reflet de ce dont on nous gave. Les medias ont décidé d’avoir pitié des retraités ? Pourquoi pas, mais alors impossible d’expliquer quoi que ce soit, l’émotionnel prime et défile sur les ondes des victimes qui nous font part de leurs déboires et de l’amputation de leur maigre revenu.

La vraie question qui se pose est aujourd’hui de savoir si ces medias que nous suivons en schizophrènes, malgré la désapprobation générale qui se manifeste à leur encontre, vont finir par faire échouer la réforme de la France ? La descente aux enfers du président de la République est-elle réellement le résultat de sa politique ou de ce que les medias ont décidé d’en retenir ?

Les politiques puisent dans ce déferlement de scandales de quoi étoffer leur position d’opposants impuissants. Ils n’en sortent pas grandis et les Français ne sont pas dupes. Toutefois, à force de se contenter de l’écume des choses et de trucider nos rois en les choisissant comme boucs-émissaires, nous courons au naufrage politique intellectuel et social du pays.

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Jeunesse de droite: le grand replacement

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La Manif pour tous, Paris, 26 mai 2013 / Antoine Antoniol

L’hégémonie de la gauche dans la jeunesse française est révolue. La droite intellectuelle ne rase plus les murs et conquiert même les plateaux télévisés. Mais cette embellie doit davantage à la crise de notre société multiculturelle qu’au travail idéologique mené par quelques jeunes plumes au conservatisme parfois trop dogmatique.


Jadis, le monde était simple : les jeunes votaient à gauche, militaient à gauche, pensaient à gauche. Moralement discrédité à la Libération, le camp conservateur pliait l’échine devant une gauche qui s’arrogeait le monopole du cœur et de la vérité. Sartre pouvait exciter la haine de classe en accusant à tort un notaire de meurtre, Mitterrand dépasser l’entendement en promettant de sortir du capitalisme en cent jours, SOS Racisme fasciser quiconque questionnait la société multiculturelle, les jeunes générations acquiesçaient.

Or, voilà qu’après une longue éclipse, quelques francs-tireurs conservateurs creusent le sillon tracé par leurs aînés et franchissent les portes des médias. Zemmour et Buisson ayant ouvert la voie, Mathieu Bock-Côté, Eugénie Bastié (Le Figaro, Limite), François-Xavier Bellamy courent les plateaux télévisés, des revues comme Éléments sortent de la marginalité, des instituts de formation catholiques, identitaires libéraux ou un peu de tout cela à la fois émergent. Le tout est encouragé par la nouvelle mission métapolitique – gagner la bataille des idées – que s’assigne la jeune garde conservatrice, dont la coqueluche se nomme Marion Maréchal, et la base hésite entre un vote LR ou FN.

Quand la droite bat le pavé…

Aussi fluctuants soient ses contours, reste un mouvement de fond, que le brillant trentenaire Alexandre de Vitry pointe dans son pamphlet Sous les pavés, la droite : la jeune droite conservatrice ne craint plus de s’affirmer comme telle, de se doter d’une idéologie et de repenser son rapport au libéralisme. Ce n’est pas la première fois qu’émerge une jeunesse de droite revendiquant haut et fort cette étiquette. Le 30 mai 1968, les jeunesses gaullistes étaient sorties du bois pour soutenir le Général contre la « chienlit » des lanceurs de pavé. Tout en s’inscrivant dans cette lignée, les jeunes sarkozystes du début des années 2000 assumaient un rapport décomplexé à l’argent et à la réussite sociale qui les distinguait des caciques chiraquiens. Quelques années plus tard, poussée par l’offensive sociétale du quinquennat Hollande, une génération de jeunes catholiques conservateurs se soulève contre le mariage pour tous. Cette dernière vague investit le domaine des idées et porte un projet politique de transformation de la société.

Pour Alexandre de Vitry, c’est là que le bât blesse : la droite trahit sa nature pragmatique à force de battre le pavé et de forger une idéologie cohérente, sûre d’elle-même et dominatrice. Cette quête du Grand Soir conservateur ignore toute la complexité du réel, les invariants de la nature humaine et les pesanteurs du monde. Ici, entre en jeu la littérature, laquelle rappelle à l’homme son devoir d’humilité. En prétendant faire table rase du réel qui lui déplaît (liberté sexuelle, homoparentalité, droit à l’avortement…), une certaine droite suridéologisée rejoint les errements démiurgiques d’une gauche que l’idée de rupture obsède depuis la Révolution française. De sorte qu’un 10 mai 1981 conservateur pourrait bien être suivi de lendemains qui déchantent rappelant le tournant de la rigueur de 1983.

Conservateurs de souches

Parlons franc. Si sa défense paradoxale du droit à la contradiction et sa critique du pavlovisme antilibéral font l’effet d’un grand bol d’air, le réquisitoire ad hominem que dresse Vitry frôle parfois l’antifascisme policier, dont une certaine gauche est si friande. Mais à tout péché miséricorde. Grâces lui soient rendues, ainsi qu’à Eugénie Bastié, pour avoir engagé un dialogue fécond dans nos colonnes.

Cette jeunesse intellectuelle hostile aux mots d’ordre de 68 n’a pas surgi tout armée du crâne de Jupiter. Dans l’opinion, une vague générationnelle s’y reconnaît. « La jeunesse est à l’image de la société française : très divisée et diverse. 25 % des jeunes ont voté Mélenchon, mais toute une frange qui vit de plain-pied dans la société multiculturelle est en attente de valeurs d’ordre », indique le politologue et directeur d’études de l’IFOP Jérôme Fourquet. De l’avis quasi général, à droite, l’insécurité culturelle engendrée par une immigration massive inassimilée explique à la fois l’importance du vote FN et le repli identitaire de nombreux catholiques, de plus en plus opposés au pape François. N’en déplaise aux antiracistes professionnels, beaucoup des jeunes adversaires du multiculturalisme partisans d’une immigration limitée, sinon de la remigration, ont des origines exotiques. Français de plusieurs souches, ils désarçonnent le camp d’en face, à l’image de l’avocat libertaire Nicolas Gardères : « Le véritable renouveau de la droite n’est pas dans les idées, il est dans l’incarnation. Son discours est de plus en plus porté dans le champ politico-médiatique par les femmes comme les porte-parole de la Manif pour tous, des homosexuels (Philippot) et des hommes appartenant à des minorités religieuses (Zemmour). »

A lire aussi: « Le conservatisme semble sorti de l’ombre »

Vu de gauche, l’itinéraire d’un Édouard Chanot, journaliste-chroniqueur sur la chaîne russe Radio Sputnik, paraît incompréhensible, tant il défie les a priori. Ce trentenaire franco-philippin met à l’actif de la droite culturelle deux grandes victoires sémantiques, remportées notamment sur le front de la lutte contrer l’islamisme : « La désignation de l’ennemi et la reconnaissance de facto du “grand remplacement”. » L’expression forgée par Renaud Camus fait florès dans les médias, même pour la dénoncer, quoique Chanot préfère parler de « grande balkanisation », persuadé que notre société se communautarise à mesure que les flux migratoires progressent. La reconnaissance de cet état de fait n’est sans doute pas entièrement imputable aux intellectuels qui confirment ce diagnostic aisément observable au quotidien. « Ce ne sont pas les idées qui dominent le monde, mais les circonstances », glisse l’ancien étudiant d’Assas, successivement militant UNI, auditeur de l’Institut de formation politique (IFP), membre des cercles conservateurs américains, puis élève de l’Institut Iliade, fondé après le suicide de l’essayiste néo-païen Dominique Venner, figure de la droite radicale identitaire. Un cursus honorum qui résume les tours et détours de sa quête de sens. « Mes amitiés avec cette mouvance étonnent toujours, mais j’ai beaucoup lu le philosophe Léo Strauss qui prône le retour aux Anciens », explique Chanot. Et sur le marché de l’identité, l’Institut Iliade « pour la longue mémoire européenne » offre une formation clé en main autour de la tradition, des mythes hors d’âge et autres expressions d’une identité charnelle résolument völkisch.

« Le discours de la gauche se heurte aujourd’hui à la réalité »

À la confluence de la mouvance identitaire, de l’antilibéralisme et du conservatisme, François Bousquet, 50 ans, rédacteur en chef d’Éléments et gérant de La Nouvelle Librairie, se réjouit de voir la tectonique des plaques intellectuelles bouger. « Difficile de nier qu’il y a un renouveau intellectuel du conservatisme qui profite plus à la droite qu’à la gauche, autrement affectée par la crise de l’idéologie du progrès », diagnostique-t-il. Pour s’en convaincre, il suffit de jeter un œil sur les couvertures d’Éléments, publication de la Nouvelle Droite devenue un magazine qui a pignon sur rue : les intellectuels de gauche, Onfray, Gauchet, Julliard, Guilluy, s’y bousculent presque ! Sur fond d’antilibéralisme, le magazine aux éditos signés Alain de Benoist redistribue les cartes du jeu idéologique. Pour la philosophe analyste du discours politique et des idéologies Nathalie Krikorian, « on assiste aujourd’hui à une forme de décomposition des idéologies, en particulier à gauche. La seule chose qui a permis à la gauche française de survivre, dans son aberration révolutionnariste et égalitariste, c’est son discours immigrationniste et différentialiste des années 1980. Mais il se heurte aujourd’hui à la réalité. » Les idées circulent tant et si bien d’un bout à l’autre du champ intellectuel que le droit à la différence, popularisé par la Nouvelle Droite, a été repris par l’antiracisme mitterrandien. C’est au nom de ce même droit que François Bousquet revendique aujourd’hui un éloge de la frontière contre « la montée de l’indifférenciation, de sociétés indifférenciées suite à un lissage universel ».

Pour autant, cette jeune garde conservatrice est loin d’occuper tout l’espace à droite où cette vague antilibérale suscite quelques étranglements. Avec Alexandre de Vitry, de jeunes libéraux moquent la Sainte Trinité de l’antiprogressisme, formée par Michéa, Guilluy et Orwell. Au côté de Benjamin Demeslay, le rédacteur en chef de L’Incorrect, Gabriel Robin, 33 ans, prépare pour début 2019 la sortie du Non du peuple, un essai explicitement dirigé contre le conservatisme antilibéral. Robin dénonce le nouveau prêt-à-penser des légions de la Manif pour tous, dont le gros livre rouge est La Cause du peuple, de Patrick Buisson : « Dans l’imaginaire de la droite française des années 2000 et 2010, la France périphérique tient la place du tiers-monde pour la gauche post-68. Pour Buisson, la Manif pour tous sera pour la “France de Johnny” ce que les bolcheviks furent aux damnés de la Terre, une élite régénérée portant sur ses épaules un peuple méprisé. » La droite quart-mondiste existe, tout le monde l’a rencontrée en librairie. Pour Robin, Buisson fantasme avec style et brio un peuple paré de toutes les vertus conservatrices. Tout comme, sur le flanc gauche, Michéa associe un peu trop mécaniquement aux gens ordinaires la common decency orwellienne. Faut-il avoir oublié Céline pour croire que la pauvreté rend vertueux…

Cherchez le peuple

Paradoxalement, la jeune droite libérale cède à la vieille tentation maurrassienne de calquer ses schémas idéologiques sur les attentes du « pays réel ». Ainsi, toutes les études d’opinion confirment une montée des valeurs consuméristes et individualistes dans la jeunesse française, d’ailleurs majoritairement partisane du mariage et de l’adoption homosexuels, aux antipodes de la Manif pour tous. Quant à la France périphérique, si bien décrite par le géographe Christophe Guilluy, ses habitants rêvent moins d’une nouvelle chouannerie que d’un libéralisme tempéré par des frontières. « Le Français moyen assimile le libéralisme au fait de payer moins d’impôts, de travailler plus pour gagner plus, ou d’entreprendre sans être trop entravé. C’est d’ailleurs une des raisons du succès de Nicolas Sarkozy en 2007 », analyse Gabriel Robin. Cela ne signifie pas, tant s’en faut, que le peuple des campagnes et des pavillons ne s’intéresse qu’à l’argent. Nombre de Français périphériques céderaient volontiers aux sirènes d’un « populisme patrimonial » (Dominique Reynié) à même de préserver leur mode de vie, s’il existait.

Le décalage entre la France concrète et la vision qu’en ont certains intellectuels conservateurs s’explique peut-être aussi par un biais sociologique. Dans ce qui reste de France catholique bourgeoise, des soixante-huitards au carré, enfants gâtés de la démocratie et de la révolution sexuelle, exercent un droit d’inventaire légitime, mais parfois inconséquent, sur notre société libérale. Ainsi, « aucune doctrine n’est moins comprise que le libéralisme, en France », regrette le philosophe Raphaël Enthoven : « Ce n’est pas la liberté du renard dans le poulailler. Rien n’est pire, aux yeux d’un libéral, qu’un individualisme échevelé, qui se satisfait de la guerre de chacun contre chacun. Un libéralisme bien compris suppose l’égalité des chances (sans laquelle la concurrence est faussée) et le respect de la loi (qui est la même pour tous) », poursuit ce républicain de gauche. Là se trouve l’une des clés de la convergence entre antilibéraux des deux rives qui s’exprime dans les colonnes d’Éléments ou de Limite. En faisant indistinctement feu sur le libéralisme, l’individualisme et le multiculturalisme, ces théoriciens ressuscitent des formes sophistiquées de communautarisme, fût-il socialiste ou chrétien. « Les uns veulent remettre le maître d’école au centre du village, les autres le curé », en sourit Gabriel Robin.

C’est dans ce tourbillon idéologique qu’Emmanuel Macron a bâti sa victoire à la dernière présidentielle. Renvoyant dans les cordes droite et gauche, Jupiter a coiffé sur le poteau tous ceux qui pensaient l’enjeu identitaire incontournable. Les intellectuels conservateurs sont donc encore loin de réunir derrière eux un bloc majoritaire. C’est à partir de ce constat que Marion Maréchal a créé l’Institut de sciences sociales, économiques et politiques pour former les cadres conservateurs de demain. À l’université, l’hégémonie de la gauche, moribonde ou contestée ailleurs, est toujours écrasante. Le sorbonnard et professeur certifié Lucien Rabouille, 24 ans, constate : « En termes de masse critique, on est écrasé. Il y a des phalanges de sociologues et d’historiens Insoumis », du Collège de France à la plus modeste fac de province. Un peu comme Alexandre de Vitry, il estime que la droite intellectuelle fait fausse route en se piquant d’idéologie : « Il faudrait laisser la prétention de l’objectivité à la gauche. On n’est pas armés pour se battre sur ce terrain. » Certes, mais pourquoi renoncer au combat politique alors que tant de défis se posent à la société ? Dans son dialogue avec Vitry, Eugénie Bastié entend tenir les deux bouts de la chaîne. Littéraires et politiques pourraient s’accorder sur la reconnaissance d’ « une forme d’incomplétude, de modestie face à l’histoire, de refus de l’utopie » qui ne dispense pas la droite d’avoir des idées politiques. Aux nouveaux hussards de relever le gant !

Sous les pavés, la droite

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Antispécisme, l’hérésie cathare au temps des grands abattoirs

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L'antispéciste David Olivier sur Iamvegan TV / Capture d'écran Facebook

L’antispécisme est un millénarisme. Et ce n’est pas un hasard s’il apparaît aujourd’hui…


« Si la souffrance de la gazelle importe, il y a un problème de solidarité avec la gazelle. Le lion va, au cours de sa vie, tuer des centaines de gazelles. Est-ce qu’il est juste de laisser le lion faire cela ? Soulever ce problème et répondre que : ‘Oui, on devrait dans l’idéal changer la nature (…) dans la mesure du possible’, c’est la seule réponse qui soit crédible et qui permette de montrer que nous prenons réellement au sérieux la question de la souffrance des animaux. » Ces propos sont de David Olivier, coauteur de La révolution antispéciste et cofondateur des Cahiers antispécistes. Dans la même vidéo, circulant sur les réseaux sociaux, il explique que l’on doit garder les chats à l’intérieur pour les empêcher de chasser, estimant qu’il faut mettre en balance les désirs du chat, et ceux des souris qui « ont une fin atroce entre les griffes du chat ».

L’extrême naïveté, la puérilité absolue de cette vision poussent évidemment à un haussement de sourcil ou d’épaules. Mais pour l’historien, il est assez fascinant de voir resurgir un utopisme aussi radical à une époque et dans des sociétés si différentes de celles qui virent jadis émerger ce genre de discours.

La faim des temps

En lisant ces lignes, le lecteur un peu instruit aura sans doute songé, sans nécessairement connaître la référence exacte, à Isaïe 65, 24 : « Le loup et l’agneau paîtront ensemble, Le lion, comme le bœuf, mangera de la paille, Et le serpent aura la poussière pour nourriture. Il ne se fera ni tort ni dommage Sur toute ma montagne sainte, Dit l’Eternel ». Ce texte biblique est un texte eschatologique, qui décrit la Jérusalem céleste. Ce genre de texte a toujours été interprété comme désignant exclusivement le monde d’après la fin du monde, le Royaume céleste ; par conséquent, tout en étant l’objet de l’espérance des croyants, les choses décrites représentaient également une liste de tout ce qui demeurerait jusqu’à la fin des temps, et qu’il était par conséquent illusoire d’espérer changer ici-bas.

A lire aussi: « L’apocalypse semble être devenue une quasi-certitude scientifique »

On peut penser que le caractère très répandu de ce type de croyance ne relève pas seulement d’une sorte de puérilité de l’esprit humain, qui se plairait à imaginer un monde sans aucun problème, mais aussi d’une sagesse traditionnelle dissuadant les membres de la société de gaspiller leur énergie, voire de mettre ladite société en péril, en poursuivant des chimères. Les exhortations du Christ sur le fait que les anges de Dieu se chargeront de séparer le bon grain de l’ivraie au Jugement dernier, mais que les hommes ne doivent pas chercher à faire eux-mêmes cette justice absolue, relèvent du même registre.

Le catharisme, l’antispécisme des origines

Or, on assiste précisément, avec ce discours végan et antispéciste radical, à une réémergence d’une forme de millénarisme, cette posture religieuse qui consiste à vouloir hâter la fin des temps, et amener dans notre monde terrestre le monde tel qu’il ne saurait être qu’après l’avènement du royaume divin, et ce au moyen de pratiques sacrificielles extrêmes, qui prennent généralement deux formes : l’ascèse extrême et/ou le massacre des « méchants ». On retrouve aujourd’hui dans l’antispécisme ces deux mamelles du millénarisme : il y a d’une part le régime végan toujours plus exigeant et d’autre part le terrorisme contre les fauteurs du mal qu’il s’agit d’éradiquer.

L’Eglise catholique a toujours condamné le millénarisme (canon 676 du Catéchisme), rangeant notamment sous cette catégorie le « messianisme sécularisé », le communisme au XXe siècle, mais avant cela de nombreuses occurrences historiques avaient pu être observées, des Taborites de Bohême aux Anabaptistes de Munster, toujours à l’origine de nombreux massacres. Mais il est intéressant de noter que l’une des occurrences qui évoquent le plus nos actuels antispécistes sont les fameux cathares du XIIIe siècle, dont la doctrine prônait un respect absolu de toute vie et par conséquent un régime alimentaire exclusivement végétarien – plus encore, certains pratiquaient l’endura, une privation totale de nourriture conduisant à une mort supposée bienheureuse. Par ailleurs, les cathares rejetaient la propriété privée, ce qui est bien souvent le cas de nos antispécistes et végans, souvent proches de l’extrême gauche quand il s’agit de politique. Plus encore, les cathares condamnaient la sexualité et bannissaient la procréation, ce que certains écologistes radicaux tiennent aujourd’hui pour un moyen de « sauver la planète ».

L’homme, un animal comme un autre

Nos antispécistes arrivent à aller plus loin que les cathares sur un point : en abaissant l’homme au niveau des autres animaux – ou en hissant les autres animaux à l’égal de l’homme, comme on voudra. C’est que dans une société déchristianisée, l’idée de Dieu, et d’un homme fait à son image et donc distinct des autres êtres vivants, s’efface naturellement. En écoutant les prêches antispécistes, on pense au curé d’Ars : « Laissez une paroisse vingt ans sans prêtre : on y adorera les bêtes ».

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Aujourd’hui comme hier, ces chimères sont souvent dangereuses pour la santé, pour certains de leurs membres, et pour tous les autres, auxquels ils auraient la tentation d’imposer leur vision par la violence. On peut par ailleurs penser que, si leur excentricité et leur activisme attirent l’attention des journalistes, leurs idées n’iront jamais très au-delà d’une proportion infime de la population, comme du temps des cathares d’ailleurs : ce genre de vie et d’idées radicales, utopistes, ne sont jamais faites que pour une très petite quantité d’exaltés.

Une (dangereuse) réponse aux excès de notre époque

Ce qui ne signifie pas pour autant qu’il ne faut pas prendre cette éruption antispéciste au sérieux, comme symptôme d’un mal frappant nos sociétés. Repensons aux cathares : ce n’est pas un hasard si ce courant radicalement antimatérialiste s’est manifesté à l’époque de ce qu’on appelle la théocratie pontificale, l’apogée du pouvoir de l’institution ecclésiastique en Europe médiévale, où le clergé était très riche et sa direction encombrée de préoccupations politiques et matérielles. Aujourd’hui, la poussée antispéciste est sans nul doute à mettre en lien avec l’extrême industrialisation de l’élevage animal, et avec une exploitation du vivant qui, pour n’être pas illégitime, est souvent faite dans des conditions indignes.

A lire aussi: Je suis animaliste, pas un violent brouteur d’herbe

Aussi bien se souviendra-t-on que, outre le catharisme, le XIIIe siècle vit également apparaître les ordres mendiants, et notamment celui de saint François d’Assises, qui prôna tout à la fois une pauvreté toute christique et une amitié pour toutes les bêtes, frères et sœurs dans la Création ; c’est sur la base de cet héritage que tous les papes depuis plus d’un siècle ont encouragé la protection et le respect des animaux.

Une réponse équivalente aux questions qui suscitent les crispations antispécistes reste peut-être à inventer.

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Il est pas frais mon saumon (d’élevage) ?

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saumon elevage chili
Saumon d'élevage écossais. Sipa. Numéro de reportage : 00229865_000005.

L’élevage industriel de saumon est un massacre écologique, alimentaire et sanitaire. Horreur, malheur !


S’agissait-il d’un pur concours de circonstances ? Toujours est-il que je n’avais jamais tant entendu parler du saumon d’élevage qu’en ce jour, déjà lointain, de fin d’été.

L’élevage détruit des régions entières

Tout a commencé dès potron-minet, avec la lecture d’un article du Monde Diplomatique de septembre, intitulé « Saumon, du mets de luxe au fléau écologique ». Cela s’est poursuivi en début de soirée avec un autre, celui que j’ai croisé en épluchant le Libé de ce même lundi : « Au Chili, 700 saumons se font la malle, leur proprio sur le grill. » Dans le premier, j’ai découvert que, juste derrière la Norvège, le Chili était actuellement le plus gros producteur au monde de salmonidés, alors même que, il y a moins d’un siècle, il fallait se lever d’aussi bonne heure que moi pour croiser un poisson de ce type aux abords des côtes chiliennes. Dans le second, j’ai appris que 690 000 saumons d’élevage s’étaient échappés de ce qui ressemble à un camp de concentration aquatique, ce qui n’était pas sans augurer de méchantes retombées environnementales.

Est-ce moi qui aie un problème ? En tout cas, j’ai du mal à comprendre : 1/ pourquoi le Chili s’est lancé à corps perdu dans ce type de « production », avec l’appui de politiciens et d’institutions en cheville avec les industriels du secteur ; 2/ pourquoi des hommes a priori doués de raison ont ainsi pris le risque de saccager un peu plus une partie de notre planète, déjà mal en point, malgré les dénégations du Donald et l’inertie générale des gouvernements actuellement en place.

Des chairs cocktails de molécules toxiques

Certes, « ça » – l’élevage industriel – rapporte de l’argent. Mais à bien y regarder, ça n’en rapporte qu’à peu de gens en fait : les propriétaires des moyens de production ; ceux qui en ont déjà sous le matelas souvent : les riches. Certes, cela crée, paraît-il, des dizaines de milliers d’emplois, directs et indirects. Mais ce sont surtout de mauvais emplois, peu rémunérateurs, qui ne permettent pas à ceux qui les exercent de vivre décemment. Surtout, cela vaut-il le coup de détruire des régions entières, jusque-là préservées de fléaux écologiques, réputées pour leur beauté et la qualité de leurs eaux ? A la limite, les saumons « produits » seraient bons, tant au niveau gustatif que sanitaire, on pourrait peut-être trouver au moins une raison de continuer. Sauf que… ils ne le sont pas. En effet, ils sont saturés d’antibiotiques, administrés massivement pour lutter contre les maladies que favorise la promiscuité dans laquelle se trouvent autant de poissons concentrés en un même lieu. Leur chair, gorgée de pesticides déversés pour lutter contre le « pou du saumon », est un cocktail de molécules toxiques, voire létales pour tout organisme humain qui en absorberait régulièrement.

En résumé, exceptés quelques-uns, toujours les mêmes ou peu s’en faut, cet élevage industriel ne profite à personne, et certainement pas à des saumons au mieux appréhendés comme des biens à disposition de cet homme encouragé par la tradition cartésienne à se rendre « maître et possesseur de la nature ». En réalité, cette façon de « faire du poisson » est un bel exemple de désastre à exécution successive, comme il existe des contrats du même nom. Sauf qu’ici, on chercherait en vain une quelconque forme d’accord préalable entre plusieurs parties. Il n’y a eu qu’une volonté unilatérale, celle manifestée par des rapaces ayant flairé la bonne affaire, qui s’est imposée sans débat, presque subrepticement.

Arrêtons les frais !

A présent que ses conséquences se font cruellement sentir, des voix pourraient s’élever afin d’arrêter là les frais. Ce n’est pourtant pas ce qu’il advient. Au lieu de cela, le saccage continue. Et ce n’est certainement pas demain la veille que les destinataires de cette « nourriture » songeront à s’insurger contre le scandale consistant à exiger de l’argent, donc du temps de travail pour la plupart d’entre nous, afin de l’obtenir.

Sommes-nous donc à ce point idiots ? N’avons-nous donc rien dans la caboche ? Est-il possible que pas un ne se rende compte qu’il y a quelque chose de fondamentalement pourri dans toute cette histoire ?

Certes, des groupes de pêcheurs chiliens, depuis le début, se montrent hostiles et râlent. On ne prendra même pas trop de risques à supputer que les cliques de « consomm’acteurs » hantant les « Croc Nature », « Biocoop » et autres échoppes huilessentialisées à mort, dans la mesure où l’ingestion de tels poiscailles menace de leur fiche la diarrhée ou de nuire à leur « capital santé », boycottent déjà scrupuleusement ces produits, aussi « haram » pour eux que peut l’être un bout de jambon pour un musulman. Mais à part eux, qui tout cela interpelle-t-il vraiment ? Un, deux, peut-être trois couillons comme moi ?

Si tel est le cas, on n’a pas fini d’en bouffer, de la merde. Et nos jours sur cette planète sont d’ores et déjà comptés. Car quand on chie là où l’on mange…

Violences: l’école n’est que le reflet de la société

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Violences du 1er mai 2018 à Paris. SIPA. 00857010_000013

Les violences dont sont victimes profs et élèves à l’école ne sont pas le fait de l’école, mais celui d’une société qui transpire la brutalité.


Dans le domaine éducatif, chacun sait qu’il faut s’y prendre le plus tôt possible, et avec une ferme autorité, pour ancrer dans l’esprit et les pratiques des enfants les habitudes et les réflexes les plus sains et les plus indispensables à la vie commune – familiale, amicale, sociale. Qu’il faille dans le même mouvement respecter la nature singulière de chaque enfant, et ne rien faire qui puisse entraver son adaptation au monde nouveau qui l’attend, est une évidence morale, même si pour les adultes la synthèse relève d’une quasi aporie. Ce défi devient crucial lorsque les enfants prennent le dessus sur les adultes, mais le principe reste déterminant. C’est pourquoi, de toute la profondeur de sa compréhension, Hannah Arendt pouvait porter, dans Reflections on Little Rock, ces jugements objectifs, tranchés et assez cruels :

« L’éducation progressiste, […] en abolissant l’autorité des adultes, nie implicitement leur responsabilité à l’égard du monde dans lequel ils ont fait naître leurs enfants, et refuse le devoir de les guider dans ce monde. »

Et dans La Crise de la culture :

« Avec la conception et la naissance, les parents n’ont pas seulement donné la vie à leurs enfants ; ils les ont en même temps introduits dans un monde. En les éduquant, ils assument la responsabilité de la vie et du développement de l’enfant, mais aussi celle de la continuité du monde. Ces deux responsabilités ne coïncident aucunement et peuvent même entrer en conflit. En un certain sens, cette responsabilité du développement de l’enfant va contre le monde : l’enfant a besoin d’être tout particulièrement protégé et soigné pour éviter que le monde puisse le détruire. Mais ce monde aussi a besoin d’une protection qui l’empêche d’être dévasté et détruit par la vague des nouveaux venus qui déferle sur lui à chaque nouvelle génération. » « L’école n’est en aucune façon le monde », mais « l’institution qui s’intercale entre le monde et le domaine privé que constitue le foyer pour permettre la transition entre la famille et le monde ». « Vis-à-vis des jeunes, les éducateurs font figure de représentants d’un monde dont […] ils doivent assumer la responsabilité, même si, secrètement ou ouvertement, ils le souhaitent différent de ce qu’il est. Cette responsabilité n’est pas imposée arbitrairement aux éducateurs ; elle est implicite du fait que les jeunes sont introduits par les adultes dans un monde en perpétuel changement. Qui refuse d’assumer cette responsabilité du monde ne devrait ni avoir d’enfant, ni avoir le droit de prendre part à leur éducation. »

L’école crève de ses lâchetés…

Durant les quarante-deux années qu’a duré ma carrière professionnelle, j’ai exercé successivement les fonctions de professeur de lettres, de proviseur de cités scolaires, d’inspecteur général, de conseiller de ministre. J’ai beaucoup publié, notamment sur la pratique éthique et professionnelle du chef d’établissement scolaire. J’ai donc eu l’occasion de témoigner de la qualité, de l’écoute et du courage de belles personnalités de notre système éducatif, auxquelles je dois beaucoup, – mais surtout qui ont permis à notre école de résister aux coups de boutoir et aux lâchetés qui ont jalonné son existence, et qui hypothèquent lourdement son avenir. Il s’agit, en particulier, de la dévalorisation et du désinvestissement de la pratique des sanctions, sinon même des obstacles fréquemment mis à leur application par la hiérarchie supérieure, « pour des raisons politiques », comme on me l’a souvent signifié, parfois de façon risible.

Je n’en fournirai ici que deux brèves illustrations, concernant la conduite inadmissible, en l’occurrence, d’adultes en charge d’élèves (l’équivalent se retrouve naturellement quant au comportement d’élèves dans les textes et structures officiels, comme dans les instructions circonstancielles émanant des autorités supérieures).

L’intendant d’un des lycées que j’ai dirigés, homme d’une haute valeur professionnelle et morale, excédé par l’incompétence, la mauvaise volonté et le comportement asocial d’un personnel pourtant essentiel à la bonne marche de son service, rédige à son sujet un rapport parfaitement objectif et circonstancié. Il le signe. J’y ajoute, manuscrite, la mention suivante : « En accord total avec l’ensemble des termes de ce rapport », je contresigne le document et l’adresse à mon supérieur hiérarchique. Ce dernier, quelques jours plus tard, me joint au téléphone et me pose immédiatement la question suivante : « Dites-moi : il est comment, votre intendant ? »

Je résume le deuxième épisode. Pour me faire enfin céder à sa demande de suppression d’un rapport très sévère que j’avais rédigé sur un personnel « protégé » par sa fonction syndicale, mon supérieur hiérarchique me convoque toutes affaires cessantes dans son bureau. Devant mon refus d’obtempérer à son injonction répétée, et faute d’arguments recevables, il me lance tout à coup : « Je sais que vous êtes un proviseur reconnu, mais on me dit que les résultats de votre lycée sont en baisse ! » (ce qui, en l’occurrence, n’était pas le cas)

…qui sont celles de la société

Ce type de comportement, assez induré, peut en partie expliquer l’état de déréliction croissante où se trouve notre système éducatif, quant à son niveau de qualité et de réussite : les comparaisons internationales en fournissent, chaque année davantage, une preuve indiscutable. Mais c’est aussi le cas des questions de sécurité, morale comme physique, et de discipline : la comptabilité officielle des incidents journaliers, par hypothèse incomplète, en atteste amplement. – Et cependant, le fond de la question n’est plus du tout celui-là.

En réalité, dans la période si troublée et désaxée que nous connaissons aujourd’hui, il est proprement impossible, impensable même, que notre école puisse se rétablir par elle-même : cette crise s’inscrit dans un contexte bien plus large. J’aimerais pouvoir dire qu’il y suffirait que n’y soient nommés que des responsables académiques et départementaux, mais d’abord nationaux, hyper déterminés à la redresser, dotés du courage et de l’énergie nécessaires, et surtout soutenus par leur ministre. Ce n’est hélas plus du tout la question ! En effet, l’Education nationale, aujourd’hui, ne constitue plus un domaine séparé, comme par miracle, du reste de la communauté nationale, et de toutes les autres responsabilités de l’Etat ! Si elle l’a jamais été, l’école n’est plus ce lieu quasi sacré, où n’entrent ni les disputes ni la violence de la vie sociale et politique : chaque jour qui passe montre désormais, sur quasiment tous les plans, y compris les plus triviaux, que notre vie sociale et politique et la réalité de notre institution scolaire sont étroitement imbriquées. Et que donc leur destinée même sera conjointe, dans notre pays, pour le pire ou pour le meilleur.

De ce fait fondamental découle une évidence aveuglante. La priorité politique absolue est que l’Etat, sous toutes ses formes et par toutes ses forces, se fasse enfin respecter, sur la totalité des territoires de notre pays, dans tous les domaines de la vie civile et sociale, et y assure l’ordre républicain et la sécurité, matrices de toutes les libertés publiques et privées. Pour nos dirigeants, faire mine d’essayer, ou même essayer loyalement de rétablir, dans la seule éducation, l’ordre et la sécurité nécessaires aux études, comme si cela pouvait s’effectuer indépendamment de ses autres fonctions régaliennes, s’avèrera pour l’école comme pour le pays tout entier d’une parfaite et coûteuse inutilité – temps et énergie gaspillés en pure perte, voire pire. Tant que des voitures seront brûlées sur un terrain vague ou sur un parking en banlieue, que de modestes habitants des cités seront forcés pour rentrer chez eux de montrer patte blanche à des trafiquants de stupéfiants, que la police, les pompiers ou des soignants ne pourront pas pénétrer en sécurité dans ces zones perdues de la République, que le voile féminin intégral sera de facto toléré sur certaines parties du territoire, il serait absolument inutile, et parfaitement ridicule, vaste et vain gaspillage des deniers de l’Etat, comme de la confiance des citoyens dans les pouvoirs publics, que l’Etat tente, fût-ce à grands frais, de remettre notre école sur la bonne voie : ce serait cataplasme sur jambe de bois.

« L’effondrement de l’autorité n’est-elle pas la vraie et seule crise de civilisation ? »

Sur ce champ crucial, déterminant, je veux citer ces propos de Raymond Aron, comme si souvent d’une clairvoyance et d’une honnêteté intellectuelle hors de pair. Ils pourraient s’appliquer à la très grave situation où se trouvent actuellement la France et notre pauvre Europe :

« Si des pères, des maîtres, des supérieurs hiérarchiques, des prêtres n’inspirent plus de respect, il ne subsiste que la puissance nue ou l’anarchie. »[tooltips content= »Études politiques, 1972, cité par Mathieu Bock-Côté, Raymond Aron, notre contemporain, revue Arguments, 2013. »]1[/tooltips]

« L’effondrement de l’autorité n’est-elle pas la vraie et seule crise de civilisation ? »[tooltips content= »Plaidoyer pour l’Europe décadente,1977. »]2[/tooltips]

Et peut-être surtout ce dur constat, si actuel :

« Pendant ces années de décadence[tooltips content= »Il s’agit ici des années 1930. »]3[/tooltips], […] quel gouvernement pouvait sortir de la compétition entre des partis qui se perdaient dans des intrigues parlementaires et qui refusaient d’ouvrir les yeux ? Baisse de la natalité, baisse de la production, effondrement de la volonté nationale : il m’est arrivé par instants de penser, peut-être de dire tout haut : s’il faut un régime autoritaire pour sauver la France, soit, acceptons-le tout en le détestant. »[tooltips content= »Mémoires. Cité par Jean-Louis Crémieux-Brilhac, Les Français de l’an 40. »]4[/tooltips]

Pour qu’un esprit tel que Raymond Aron, si affectivement et intellectuellement attaché aux libertés publiques et privées, en vienne à se résoudre, certes douloureusement, à leur réduction, il fallait que la menace fût exceptionnellement grave et imminente. Et elle l’était ! C’est à nous aujourd’hui qu’il incombe de prendre la mesure des dangers que traversent la France et l’Europe, pour les affronter, avec la lucidité, la détermination et les moyens nécessaires.

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