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Macron, la politique des petites phrases

Comment Macron maîtrise le jeu politique par la communication


Macron, la politique des petites phrases
Capture d'écran Twitter / Sibeth N'Diaye

Gouvernement italien taxé de « cynisme et d’irresponsabilité » le 12 juin. Minima sociaux dans lesquels « on met un pognon de dingue » le 13. Emmanuel Macron nous gratifie d’avis tranchants sur bien des sujets. Il entend surtout rester le métronome du temps politique. Notre petit Mozart de la tactique politicienne tente de récupérer la sympathie de la gauche en montrant qu’il n’est pas « fasciste » et qu’il a un grand cœur pour les migrants. Puis, il s’arrange pour plaire à la droite en pestant sur l’état des finances publiques.

Si l’assertion d’Emmanuel Macron sur les minima sociaux est tout à fait exacte – les dépenses sociales accaparent 56% du PIB, un record que même les démocraties « illibérales » honnies ne nous envient pas – sa formulation gouailleuse, soigneusement captée et relayée sur internet par sa conseillère en communication, Sibeth Ndiaye, visait à faire parler les oppositions.

Une valse à mille temps

En digne héritier de François Hollande et Nicolas Sarkozy, Emmanuel Macron emprunte de plus en plus leur goût pour les petites phrases. Faute d’obtenir des résultats, il espère faire illusion en donnant le tournis. Avec cette stratégie, c’est malheureusement toujours le « politiquement correct » qui l’emporte : « le terrorisme a changé de forme, on ne peut plus rien y faire, ma bonne dame ! Les salariés français doivent s’adapter à la mondialisation, mon bon monsieur ! Il faut plus d’Europe dans ce monde de fous, mes chers concitoyens ! »

Cette feuille de route ne séduit pas grand monde mais, face à l’inertie des oppositions, Emmanuel Macron peut dérouler sans trop d’accrocs.

L’accostage du bateau identitaire

Macron sait qu’une alliance « à l’italienne » entre la France insoumise et le Rassemblement national est impossible. Les positions des deux partis sur l’immigration sont irréconciliables. Tant que ceux-là ne se mettront pas autour d’une table et que Laurent Wauquiez pataugera, il peut dormir tranquille.

Les réformes économiques ont surtout fait monter Jean-Luc Mélenchon. Emmanuel Macron s’applique désormais à énerver le camp droitier. Quand on voit la place prise par l’Aquarius dans nos journaux la semaine passée, force est de constater que la thématique identitaire est le nœud du débat politique actuel. Le président va pouvoir l’exploiter pour faire remonter la droite. Enfin, juste ce qu’il faut…

L’ancien Premier ministre, Manuel Valls, lui, ne se préoccupe plus depuis longtemps d’être politiquement correct. Il sait les maux qui rongent le pays. Mais sur le cynisme du locataire de l’Elysée, il se voile visiblement la face. Selon le Canard enchaîné, le Catalan aurait récemment déclaré devant Edouard Philippe et des députés LREM : « Nous ne parlons pas assez de l’Europe et des vagues migratoires, qui vont être le gros sujet à traiter (…) Sur la laïcité, on ne voit pas très clair ». Mais c’est voulu, cher Manuel ! Voilà la méthode : laisser croire que les questions d’identité nationale ou de laïcité ne sont pas traitées. De quoi ulcérer la droite qui finit par se demander si le « grand remplacement » n’existerait pas…

La division selon Macron

Le politiquement correct est parfaitement incarné par le centrisme de Macron. Il a réussi à l’imposer et même à faire rêver au néolibéralisme les soixante-huitards. Cet horizon est présenté comme indépassable. L’acculturation sans saveur qui résulte de la globalisation déplaît pourtant de plus en plus. Au sein d’une Europe où les populistes ont le vent en poupe, Macron et la moitié des Insoumis ont, pour reprendre les mots de l’essayiste Jérôme Blanchet-Gravel« troqué le bien commun pour défendre toutes les minorités imaginables ». La politique « inclusive » d’Emmanuel Macron exclue de plus en plus de citoyens à qui l’on veut faire croire que Médine et Charlie Hebdo, c’est grosso merdo les mêmes « provocations ».

Seule une troisième voie politique pourrait faire bouger les choses. Dans la droite de gouvernement, Laurent Wauquiez vient de limoger Virginie Calmels, la juppéiste mal à l’aise avec sa ligne. Parallèlement, Brice Hortefeux et Nadine Morano ont été intégrés à son point du mardi matin. La « radicalisation » des Républicains continue.

Se séparer de Calmels est un non-évènement. La mise à l’écart de Valérie Pécresse et Xavier Bertrand, deux vrais poids lourds, est autrement plus problématique pour Laurent Wauquiez. Quant à Marion Maréchal, elle « obnubilerait » l’auvergnat selon Michel Houellebecq. On comprend pourquoi. Mais on ne voit pas encore comment les idées majoritaires des Français sur les questions d’identité ou d’immigration trouveront demain une traduction concrète et tangible…



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