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Macron: faux libéral, vrai autoritaire


Macron: faux libéral, vrai autoritaire
Emmanuel Macron, Saint-Etienne-du-Rouvray, juillet 2017. Sipa. Numéro de reportage : AP22082602_000016.

Macron s’est complu dans ses premières déclarations publiques, comme son discours au Congrès de Versailles,  à dénoncer les « démocraties illibérales ». Mais respecte-t-il lui-même le libéralisme?


Il avait suffi qu’il débute sa campagne présidentielle avec une réputation de libéral pour prendre plusieurs longueurs d’avance sur ses concurrents: il a ainsi d’emblée conquis 10 % de voix de droite sans beaucoup perdre sur sa gauche grâce à ses connivences libertaires.

Quelques faux-semblants

D’être issu de l’aile droite du Parti socialiste n’aurait pas suffi. La loi Macron de 2015 avait pour but d’ancrer cette réputation libérale, notamment auprès du patronat. Les réticences qu’elle a rencontrées au parti socialiste – au point de nécessiter le passage en force par le 49-3, n’ont fait que conforter l’image du jeune ministre.

Des yeux avertis auraient cependant aperçu dans son programme les risques que Macron faisait courir au vrai libéralisme: il y était prévu par exemple de livrer au public le nom des entreprises qui ne feraient pas assez d’efforts en faveur de la parité ; « Nous ferons de la lutte contre la discrimination une priorité nationale »; ira-t-on comme le propose un rapport parlementaire jusqu’à rendre obligatoires des cycles de formation à la non-discrimination ? En tous cas, des emplois « francs » (à définir) seront créés dans les « quartiers » (entendons les banlieues peuplées d’immigrés).

Discrimination positive

Quels critères dans un tel environnement pour choisir les bénéficiaires des « accélérateurs d’association » (c’est-à-dire en bon français des aides supplémentaires à la vie associative): leur « correction politique » évidemment. Seul espoir: que les difficultés budgétaires rendent vaine cette promesse.

En outre, Macron promettait aux salariés quittant volontairement leur entreprise de bénéficier de l’assurance chômage, ce qui risque de ruiner sérieusement l’autorité des patrons.

Les premières mesures prises vont dans le sens de la discrimination positive: les classes de 10 élèves seront réservées aux zones d’enseignement prioritaires, comme si la méthode globale n’avait pas fait des dégâts à l’apprentissage de la lecture hors de ces zones.

Une disposition inquiétante du projet de loi travail

Plus inquiétante est une disposition envisagée dans le projet de loi travail relative aux indemnités de licenciement. Le projet prévoit, et c’est raisonnable, que les indemnités que pourront fixer les tribunaux en cas de licenciement abusif seront plafonnées. Mais il prévoit aussi, ce qui est beaucoup plus contestable, que ce plafond ne s’appliquera pas en cas de discrimination.

Quelle discrimination? On le devine : les femmes, les homosexuels, les non-Blancs, les musulmans etc. La conséquence immédiate sera que, en cas de licencient collectif, les premiers touchés seront ceux qu’Anne Lauvergeon appelait les « mâles blancs ». Au motif de lutter contre la discrimination, on instaure la discrimination.

L’effet de cette loi sera d’aggraver la division du peuple en communautés et catégories. Loin d’alléger l’atmosphère au nom d’une saine égalité républicaine, elle approfondira les clivages communautaires – et naturellement les rancœurs qui vont avec, dont on devine les conséquences électorales.

Du prétendu libéralisme

Ainsi, cette loi prétendue libérale, sur ce sujet au moins, est tous sauf libérale. Déjà la loi El Khomri, faux nez d’une loi Macron bis, ouvrait la porte entre les lignes (sauf empêchement technique) à la pratique religieuse en entreprise, avec là aussi des risques de tension.

Appliquée telle quelle, une telle loi ne fera que développer les frustrations d’une partie de la population. Macron a été porteur, non seulement d’un parfum de libéralisme mais de « politiquement correct » renforcé : ouverture à l’immigration, intégrisme écologique, antiracisme, discrimination positive à tous les étages etc. Il a ainsi obtenu la sympathie de la presse et le vote des musulmans.

Macron s’est ainsi montré le bon élève de la fondation Terra Nova qui prévoyait la formation d’un nouveau bloc de gauche s’appuyant sur les minorités, raciales, religieuses et sexuelles, comme le Parti démocrate américain.

Une fascination pour le décorum

Il se peut d’ailleurs que ces excès de l’anti-discrimination, qui déjà prospéraient sous Sarkozy[tooltips content=’Nicolas Sarkozy avait donné une grande publicité à la nomination d’un préfet d’origine maghrébine, oubliant qu’il y en avait eu une bonne dizaine pendant et après la guerre d’ Algérie.’]1[/tooltips], datent : l’exaspération des Français aurait dû conduire à les tempérer. Sur ce chapitre, le nouveau président est resté un bon élève de Sciences Po années 2000 façon Richard Descoings. Au moment où de nombreux intellectuels remettent en cause ces pratiques qui, dans les prétoires, tendent de plus en plus à limiter la liberté d’expression, Macron en rajoute une couche.

Les gêneurs médiatiques écartés

Les décisions du nouveau président ne sont pas le seul sujet d’inquiétude : l’atmosphère que son élection a créée l’est tout autant. Paris Première et Europe 1 n’ont pas attendu pour licencier la non-conformiste Natacha Polony, Jean-Claude Brighelli a été exclu du Point, Olivier Delahousse de BFM TV : sus à la dissidence ! Eric Zemmour, lui, a été condamné d’une manière particulièrement lourde par la 17e chambre correctionnelle pour des propos sur l’immigration qui devraient être ouverts au libre débat. Plusieurs autres affaires mettant en cause des personnalités moins connues laissent craindre un durcissement de la justice favorisé par la servilité d’une partie de la magistrature à l’égard de l’esprit du temps.

Macron l’autoritaire

L’autoritarisme de Macron s’est exprimé au travers de son goût du décorum, de l’écrasement du premier ministre par le Congrès de Versailles, du projet de loi antiterroriste où beaucoup voient la pérennisation de l’état d’urgence, du recours systématique  aux ordonnances. Mais ce n’est là que la surface des choses. Par derrière, on voit poindre une dictature du politiquement correct qui pourrait rendre la France un peu plus étouffante.

Rappelons enfin que le libéralisme saurait se réduire à la réforme du Code du travail: il implique aussi une baisse de prélèvements obligatoires. Or de cela, il n’est nullement question: le quinquennat commence au contraire par l’annonce de hausses d’impôts et des dépenses nouvelles.

Les Français, ne tarderont pas à s’en apercevoir: Macron est tout le contraire d’un libéral.



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est essayiste.

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