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« Bloquons tout! »: LFI, pilleur d’idées

Le billet politique d’Ivan Rioufol


« Bloquons tout! »: LFI, pilleur d’idées
Le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, a donné une conférence de presse après avoir présidé une réunion interministérielle de crise au sujet des manifestations du 10 septembre, Paris © Gabrielle CEZARD/SIPA

Alors que des blocages sont organisés un peu partout en France ce mercredi 10 septembre, Bruno Retailleau a mis en cause l’ultra-gauche lors d’un point presse, qu’il a jugé responsable de plusieurs débordements « violents ». Selon lui, « la mobilisation citoyenne a été récupérée et instrumentalisée par ces mouvances [d’extrème gauche], avec le soutien des Insoumis ». En nommant Sébastien Lecornu à Matignon, le président Macron joue la montre et prive les citoyens de leur droit à s’exprimer démocratiquement lors d’élections anticipées, estime notre chroniqueur Ivan Rioufol.


Les Français ne se laisseront plus éternellement berner. Encore moins par Jean-Luc Mélenchon quand il dit parler en leur nom. Le savoir-faire de LFI dans la récupération du mouvement « Bloquons tout ! », lancé ce mercredi, n’est destiné qu’à promouvoir les intérêts de l’extrême gauche. Or il est peu probable que les citoyens, excédés des mauvaises manières de la politique, se laissent encore longtemps déposséder dans leurs initiatives. En l’occurrence, cette protestation contre le gouvernement avait été lancée, au début de l’été sur le réseau Telegram, par Les Essentiels, un groupe souverainiste et classé à droite.

Stratégie du coucou

Observer la manière dont LFI se précipite sur la moindre originalité émanant d’anonymes dit la vacuité de ses stratégies, hormis celle du coucou qui pond ses œufs dans le nid des autres. Spoliée par LFI, cette France silencieuse confirme son potentiel de créativité réactive. Cette dynamique est appelée à pallier l’effacement des partis et leur pauvreté intellectuelle. Le symbole du gilet jaune, choisi pour rendre visible les oubliés, était sorti de l’intelligence de la France périphérique avant d’être détourné, déjà, par la gauche radicale qui allait en faire un repoussoir. L’idée de retourner les panneaux signalétiques des communes rurales pour illustrer le mouvement agricole « On marche sur la tête » n’a pas eu besoin non plus du concours de publicistes. En octobre 2013, M. Mélenchon avait traité de « nigauds » les Bretons mobilisés à Quimper contre l’écotaxe : ils avaient trouvé dans le bonnet rouge, symbole d’une jacquerie contre Colbert de 1675, l’emblème de leur combat. Tandis que le monde politique radote et que la gauche vitupère, la société civile phosphore. Le génie populaire va avoir de plus en plus son mot à dire…

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Dans l’immédiat, il est à craindre que l’extrême gauche, dans son obsession à détruire et à voler les places, ne décourage les citoyens désireux de manifester leurs irritations. La logique révolutionnaire de LFI et son goût pour la violence prédisposent à des confrontations qui sont autant de repoussoirs. Les mobilisations des forces de l’ordre (80.000 hommes) prévoient, pour aujourd’hui, de possibles affrontements dans des tentatives de blocages de points névralgiques. Or Mélenchon s’apprête, ainsi, à faire le jeu d’Emmanuel Macron en rendant « Bloquons tout ! » répulsif.

Les Français, en mal d’expressions publiques, risquent d’être expropriés encore un peu plus du champ politique et social. Le choix du chef de l’Etat, après la démission de François Bayrou mardi, de jouer la montre pour tenter de tenir encore vingt mois avec Sébastien Lecornu, nommé hier soir à Matignon, va priver les citoyens de leur droit à s’exprimer démocratiquement lors de législatives, voire même d’une présidentielle anticipée.

Cette relégation prolongée des citoyens, par une classe politique soucieuse de sa seule survie, ne peut que les inciter à se mobiliser et à se constituer, grâce aux réseaux sociaux, en force d’appoint. La France de demain se construit hors les murs de la politique, qui ne sait plus quoi dire. Les gens ordinaires, ces #Gueux, ont l’imagination pour eux…

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Journaliste, éditorialiste, essayiste. (ex-Le Figaro, CNews, Causeur)

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