Accueil Culture « Le 15h17 pour Paris »: Clint Eastwood, l’Occident qui se défend

« Le 15h17 pour Paris »: Clint Eastwood, l’Occident qui se défend


« Le 15h17 pour Paris »: Clint Eastwood, l’Occident qui se défend
"Le 15h17 pour Paris" de Clint Eastwood, 2018.

Le dernier film de Clint Eastwood, Le 15h17 pour Paris, ne mérite pas les critiques qui lui sont faites.


Autant le dire tout de suite le nouveau film de Clint Eastwood, Le 15H17 pour Paris est magnifique. N’en déplaise à tous les critiques des différents médias et des spécialistes en cinéma gênés par le sujet de fond et la forme du film.

Le cinéma américain a une force qu’aucun autre cinéma ne possède dans sa façon de s’approprier des évènements historiques et sociaux (guerres, émeutes, terrorisme, grèves…). Tout comme Coppola, De Palma, Kubrick et Cimino pour le Vietnam, De Palma et Bigelow pour l’Irak, Bigelow pour le terrorisme et les émeutes de Détroit, Clint Eastwood traite avec une intelligence, une rare acuité et un grand sens du récit de l’affaire de l’attentat déjoué dans le Thalys du 21 août 2015 en provenance d’Amsterdam et à destination de Paris, comportant un arrêt à Bruxelles (départ 15h17) où monte le terroriste.

De l’or pour les braves

Il met en scène six des principaux citoyens ayant eu le courage d’intervenir pour contrecarrer les projets criminels de l’islamiste Ayoub El-Khazzani. L’enseignant universitaire américain Mark Moogalian, blessé par balles au cou après qu’il s’est précipité sur le terroriste pour lui arracher sa Kalachnikov, sa femme Isabelle Risacher, un passager britannique Chris Norman qui aida à la maitrise de l’assaillant et surtout les trois citoyens américains Spencer Stone, appartenant à l’U.S. Air Force, Alek Skarlatos, membre d’une unité de la Garde nationale américaine, et leur ami d’enfance Anthony Sadler, un jeune étudiant en kinésithérapie, qui, au péril de leur vie, ont neutralisé le terroriste. L’idée de génie de Clint Eastwood est d’avoir confié les rôles de cette histoire aux principaux protagonistes eux-mêmes. Tous sont extrêmement convaincants pour des acteurs débutants.

L’Amérique d’en bas qui gêne la France d’en haut

Clint Eastwood, par la force de son scénario, nous raconte l’histoire de trois gamins américains totalement banals, des enfants de l’Amérique moyenne appartenant à des familles désunies, pour Spencer et Alek, et à une famille modeste pour Anthony Sadler. Ces enfants, qui n’arrivent pas à se concentrer à l’école, aiment faire les clowns, se montrer impertinents, ne travaillent guère, répondent aux enseignants et se font bien souvent réprimander par les professeurs et le principal de leur collège. Mais l’on perçoit, malgré leur manque de concentration, qu’une amitié sincère, un goût pour la vie et une force intérieure les animent. C’est Spencer, grand dadais parfois simpliste mais toujours déterminé, persuadé d’être mu par une force qui le mènerait vers un destin plus grand que lui qui personnalise le plus sûrement la détermination et la force de l’âme dans ce film juste et nécessaire. Spencer, conscient de la peine profonde que ressent sa mère face à ses agissements, prie et cette prière est un élément essentiel du film, celui qui fait se rencontrer la détermination absolue et la contingence la plus incroyable au monde.

« Sur la terre de la Liberté et la patrie des courageux »

Ces trois gamins devenus adultes se retrouvent en voyage en Europe comme le font de nombreux américains. Eastwood nous montre comment ces trois types communs ne perçoivent la réalité de l’Europe qu’à travers les différents selfies qu’ils en prennent. Le cinéaste filme l’Italie, l’Allemagne, les Pays-Bas comme des clichés touristiques, tout en insistant sur la beauté des paysages et de l’architecture, la sensualité des lieux, des mets et du vin, la beauté et la liberté des êtres humains face à la vie, au plaisir de vivre, au sexe. Tout ce que l’on risque de perdre quand le terrorisme islamiste frappe.

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L’action dans le Thalys est brève mais nous montre avec une précision sèche la volonté criminelle du tueur et la foi sans faille des sauveteurs. Leur contingence et leur détermination ont conduit à un destin de légende ces trois garçons ordinaires. Grand film politique, servi par une mise en scène efficace, Le 15H17 pour Paris est la fascinante histoire de patriotisme et d’héroïsme de trois amis que rien ne sépare. La belle prière que Spencer prononçait au début du film est reprise à la fin, le Bien l’a emporté sur les ténèbres. Le vent souffle où il veut.



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est directeur de cinéma.

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