Chaque semaine, Philippe Lacoche nous donne des nouvelles de Picardie…
Nous avons bien fait, ma Sauvageonne et moi, de nous rendre au vernissage de l’exposition des œuvres de mon ami le peintre Marc Deudon dans les locaux (prestigieux) de la Société d’Horticulture de Picardie (SHP), rue Le Nôtre, à Amiens. Il faisait chaud ; ma belle était peu vêtue, un peu de lin et de coton sur sa peau de blonde ; des escarpins veillaient sur ses fines pattes de biche. Je crois me souvenir qu’elle avait orné sa cheville gauche de l’adorable petite chaîne d’argent au motif de plume que je lui ai offerte ; une façon de me rassurer : si elle se perd, les concupiscents découvreurs de mon amour seront avertis qu’un écrivain de 107 kilogrammes, adepte des arts martiaux, au menton mussolinien plus volontaire que celui de l’humoriste Booder, veille sur elle. (J’ai oublié de préciser que je venais d’embaucher Rickybanlieue, son admirateur du courrier des lecteurs du site de Causeur, comme garde du corps.)
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À peine arrivée, ma Sauvageonne se dirigea vers les toiles deudoniennes pour les admirer. Je tentais d’en faire de même quand je sentis un regard insistant de poser sur ma nuque rasée par mon coiffeur Didier (galerie marchande d’Intermarché, 410, route d’Abbeville, Amiens). C’était la vice-présidente de la Société de Picardie. « Vous ne me reconnaissez pas ? », m’interrogea-t-elle de ses yeux clairs comme les eaux de la Vesle au lieu-dit La Prise d’Eau, à Sept-Saulx (Marne). « Non… », bredouillai-je, plus timide que Zabou Breitman dans le rôle d’Isabelle dans Thierry La Fronde. « Mais, enfin, nous sommes amis sur Facebook ; je suis Loreline Simonis, la nièce d’Olivier Simonis… » Olivier Simonis ; mon vieux sang et oublonisé de boomer ternois ne fit qu’un tour. Des images me remontaient : Olivier, un bon copain du lycée Henri-Martin, les bières brunes Porter que nous allions engloutir au café Central de Saint-Quentin en compagnie de Philippe Duplaquet, plus marrant qu’un personnage d’un long-métrage de Jean Girault. Et les bringues carabinées auxquelles nous nous adonnions au 136 de la rue de Vermand, garçonnière du grand frère de notre Olivier.
« Bon Dieu mais c’est bien sûr ! », lâchais-je comme assommé par tant d’émotions. Tu te doutes, lectrice adulée, qu’après cette plongée dans mon passé lycéen, je ne pouvais rien refuser à Loreline. Et quand elle me proposa de rencontrer en sa présence, Daniel Carbonnel, président de la SHP, afin qu’il m’exposât les difficultés de son association pour entretenir les beaux locaux de la société, j’excipais mon statut de grand reporter régional chez Causeur, et on y alla tout de go. « Nous avons fêté en décembre dernier les 180 ans de la Société d’Horticulture de Picardie », me confia Daniel Carbonnel. « C’est l’une des plus anciennes d’Amiens car elle est née en 1844. L’espace où nous nous trouvons (N.D.A. : le lieu d’exposition) a été bâti en 1897. En 2027, nous fêterons les 130 ans de l’hôtel de l’horticulture d’Amiens. À l’origine, c’était une immense salle de 300 mètres carrés avec une verrière afin d’obtenir un éclairage zénithal. Tout cela était voulu par le président de l’époque ; il était à la tête de cette société savante. Cette dernière voulait obtenir son autonomie car les cinquante premières années, on l’a promenée un peu partout au sein de la capitale picarde avec des conditions peu faciles pour assurer des cours, des conférences, etc. Son but était d’apporter des connaissances au niveau des jardins, tant pour les plantes potagères qu’ornementales. Aujourd’hui, elle compte 150 membres avec une augmentation de 50% par rapport à l’année dernière. Depuis quatre ans, notre but est de la redynamiser – l’activité avait diminué ces dernières années. Les bâtiments sont sur un seul niveau. Un faux-plafond a été posé dans les années 80 après le choc pétrolier de 73 car l’immeuble était un gouffre au niveau du chauffage. Notre souhait est de garder et préserver l’édifice, donc de faire sauteur de plafond et doubler tous les murs afin de garantir une meilleure isolation. Et créer une verrière isolée. Vous imaginez les coûts des travaux ? On lance donc un appel aux soutiens financiers afin de rénover l’ensemble. On voudrait également renouveler l’ensemble des chaises. On a fait une demande de classement qui doit passer en commission… » Et Loreline d’ajouter : « Ce bâtiment a passé deux guerres ; il est resté intact. Il a été réquisitionné par les Allemands… » Daniel Carbonnel précise : « Ils l’ont un peu dévasté ; ils ont utilisé l’ancien jardin où des camions militaires ne cessaient de passer. Les parquets ont dû être refaits après la guerre. » (Bénéficiant de la reconnaissance d’intérêt général, la SHP peut recevoir des dons, et les donateurs peuvent bénéficier des déductions fiscales. Adresse : 58/60, rue Le Nôtre, 80000 Amiens).
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Avant de quitter les lieux, Loreline nous a fait savoir qu’une mystérieuse et très belle statue ornait le fond du jardin. Ma Sauvageonne et moi sommes allés la découvrir. Devant nous : un homme nu aux longues jambes. Même s’il exhibe une coiffure semblable à celle d’Emmanuel Macron, il ne s’agit pas de lui. Si quelqu’un reconnaît cet être impudique, merci de prévenir la police.


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