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Voici pourquoi la France devrait plutôt dire merci à Israël

Comment expliquer les distances que prennent nos dirigeants politiques avec Israël? Trop souvent, ils donnent l’impression de vouloir ménager une «rue arabe», comme s’ils avaient entériné l’idée d’un «grand remplacement» en cours. Alors qu’Israël est en guerre à une frontière civilisationnelle séparant peuples d’Occident et peuples opprimés par l’islamisme, estime notre chroniqueur.


La France couchée n’aime pas voir Israël debout. Le petit État hébreu, qui veut en découdre avec son puissant ennemi islamiste, laisse voir en contraste ce qu’est devenue l’ancienne puissance européenne: une nation flageolante qui, à travers des élites émasculées et fascinées par l’adversaire, a renoncé à se faire respecter et à combattre. Boualem Sansal, écrivain algérien, met le couteau dans la plaie quand il explique (Le Figaro Magazine, 20 septembre) : « La France est un pays à la ramasse qui vit sur des gloires passées ». Cela fait cinquante ans que les gouvernements successifs reculent, et l’Union européenne avec eux, devant les constantes exigences des 57 États membres de l’organisation de la Coopération islamique (OCI). Ceux-ci n’ont de cesse depuis le premier choc pétrolier (1973), sous couvert de chantages pétroliers et sécuritaires, de réclamer et d’obtenir des protections et des promotions culturelles au profit de leurs populations immigrées. L’historienne Bat Ye’or a abondamment documenté ces abandons.

Le pessimisme de Boualem Sansal

Ce renoncement de la France à imposer ses valeurs a rendu marginale l’assimilation maghrébine et a fait du séparatisme la règle. Quand Sansal assure, mardi matin sur CNews (L’heure des pros) : « Dans 50 ans, l’islamisation aura, à ce point, gagné qu’elle pèsera sur les fondamentaux français. Il faudra repenser la république, le droit, etc. », il illustre ce que pourrait être le grand remplacement, conjonction d’une immigration musulmane massive et d’un effacement honteux du pays conquis. Ce destin est-il inexorable ? Si le somnambulisme d’État reste la règle, Sansal aura raison.

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Les distances que prend Emmanuel Macron avec Israël, qui vient d’engager une riposte d’envergure contre le Hezbollah au Liban après avoir brisé les reins du Hamas à Gaza, illustrent une fois de plus la peur qui paralyse la France face à l’islam conquérant, téléguidé par l’apocalyptique théocratie iranienne. Même l’élimination par Tsahal, le 21 septembre au Liban, d’Ibrahim Aqiil, responsable de l’attentat de 1983 contre le Drakkar à Beyrouth (58 parachutistes français tués) n’a pas été saluée par le chef de l’État. « La réplique israélienne est insupportable », a dit Laurent Fabius, président du Conseil constitutionnel, mercredi matin sur RTL en commentant la réponse au pogrom du 7 octobre. Alors qu’une communauté de destin lie Israël à la France, deux vieilles nations confrontées au même ennemi fanatisé, les dirigeants se déshonorent à vouloir rendre les armes devant cet islam dont Sansal rappelle qu’il est « un système profondément totalitaire ». Le gouvernement a même renoncé à créer un ministère de la Laïcité, de peur d’être accusé d’islamophobie par la gauche soumise. Celle-ci manifeste en revanche avec ceux qui appellent à « l’intifada dans Paris ».

Israël, une frontière civilisationnelle

Ces traitrises « humanistes » sont méprisables. D’autant que le courage qui habite le peuple israélien, pour l’instant solidaire de Benyamin Netanyahu dans sa guerre contre le « nazislamisme », porte en lui la possible libération des peuples opprimés par les obscurantistes.
C’est le Hezbollah qui a défiguré le Liban jadis idyllique. C’est l’Iran des ayatollahs qui oppresse ses citoyens, dont une partie applaudit Tsahal dans les humiliations qu’elle porte au régime dictatorial qui redoute de répliquer.
Dans ses guerres, Israël se bat aussi pour la France et les démocraties occidentales angéliques. C’est pourquoi elles devraient oser lui dire merci.

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Quelques réflexions sur la guerre du Liban

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Les critiques fusent contre Israël, accusé d’avoir déclenché la guerre au Liban. Mais, ce n’est pas Israël qui a déclenché cette guerre ! L’État hébreu réagit avec près d’un an de délai à une guerre que le Hezbollah a lancée contre lui le 8 octobre 2023.


Ce jour-là, au lendemain des massacres perpétrés par le Hamas, le Hezbollah  lance des roquettes et des missiles sur Israël. Depuis lors, il en a envoyé près de 10 000 – une trentaine en moyenne chaque jour. La plupart ont été interceptés, ce qui fait que certains les assimilent à d’inoffensifs pétards. C’est faux : ils sont destinés à tuer, et  ils ont  tué. Beaucoup ont déjà oublié Majdal Shams[1], ce village druse israélien dont 12 enfants âgés de 10 à 18 ans ont été tués le 27 juillet 2024. Et ils ne sont pas les seules victimes israéliennes.

Le Hezbollah n’a pas de circonstances atténuantes

Imagine-t-on qu’un pays voisin, disons la Belgique, envoie des missiles sur la France, que les populations du Nord, du Pas-de-Calais, des Ardennes et de la Meuse soient obligées de s’enfuir, que ces départements deviennent inhabités et que la France ne réplique pas ? C’est ce qui se passe depuis près d’un an avec les habitants du Nord de la Galilée. 80 000 citoyens israéliens ont abandonné leur lieu de vie. Pour rappel, ces territoires sont à l’intérieur de la ligne internationalement acceptée de 1949, et, contrairement aux Palestiniens, le Hezbollah ne peut arguer de la moindre brimade historique et de la moindre revendication territoriale ; cela ne l’empêche pas d’avoir un seul but: la destruction d’Israël. 

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Ceux qui prétendent qu’un cessez-le-feu est nécessaire et qu’une solution diplomatique est possible  veulent oublier qu’en 2008 la résolution 1701 a été votée par le Conseil de Sécurité. Elle enjoignait au Hezbollah de se retirer au nord du Litani, à 30 km de la frontière. Elle n’a jamais été respectée, le Hezbollah envoie des missiles quand il le veut et la force de l’ONU, la FINUL, joue au sud du Litani un rôle particulièrement inutile.

L’objectif du Hezbollah était de saigner Israël par une guerre d’attrition et de rendre inhabitable le nord du pays. Mais  il semble qu’il ait voulu aussi réitérer les exploits du Hamas et effectuer également massacres et prises d’otages. Il faudrait peut-être que les Israéliens s’excusent d’avoir empêché l’exécution de ce plan…

Cibles et dégâts collatéraux

On critique Israël à cause du nombre de morts civiles lors des bombardements mais tous les bombardements, aussi ciblés soient-ils, font des victimes civiles et quelle que soit la réalité des distinctions entre civils et militaires, quelles que soient les précautions des Israéliens, des civils paient effectivement un lourd tribut. La guerre, c’est terrible. 30000 civils normands peut-être ont été tués dans les bombardements alliés qui ont précédé le Débarquement. 

La situation est d’autant plus tragique que, comme le Hamas, le Hezbollah cache une partie de son arsenal chez des civils. L’alternative au bombardement – l’envoi de troupes terrestres – soulèverait les mêmes protestations. Lesquelles ont malheureusement aussi  un aspect partisan : l’opération sur les bipeurs et  talkies-walkies a entrainé aussi des accusations contre Israël. Pourtant, les victimes civiles collatérales ont été rares, et il n’y a probablement pas eu dans l’histoire de la guerre d’opération plus précise, puisque celui qui était ciblé portait le bipeur qui prouvait son appartenance au Hezbollah.

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Certains disent que cette guerre est la guerre de Benjamin Netanyahu, et qu’il la mène pour des motifs personnels.L’engagement au Liban était réclamé par une grande part de la hiérarchie militaire, et on reprochait plutôt au Premier Ministre ses atermoiements à ce sujet. Répéter qu’il mène cette guerre pour de sombres raisons personnelles, c’est affaiblir  la légitimité d’Israël qui lutte pour son existence. Cela n’a rien à voir avec le fait d’être ou non un partisan de Benjamin Netanyahu ; une commission d’enquête est une obligation historique et morale, mais après la guerre, et cette commission devra être impartiale.

Macron: «Il ne peut pas et il ne doit pas y avoir de guerre au Liban»

Je ne suis pas un critique systématique du président Macron, mais je suis abasourdi. Alors que la France vient de soutenir un des textes les plus antiisraéliens de l’histoire de l’ONU, alors que les bombardements n’ont pas encore commencé et qu’on est sous le choc de l’épisode des bipeurs, qui a essentiellement frappé le Hezbollah et pas le peuple libanais dans son ensemble, voici cette déclaration dont la solennité frise à la posture théâtrale. 

Le Liban dont parle le président, un modèle du vivre ensemble dont la France serait le protecteur, ce Liban n’existe plus et  Israël n’est pas  responsable de sa disparition. Les  conflits intercommunautaires, les calculs personnels des chefs et la détermination de l’Iran ont abouti à ce qu’est le Liban aujourd’hui, un pays failli, sous la mainmise de la mafia terroriste du Hezbollah, que le président Macron n’a même pas cité dans son discours. A-t-il eu une pensée pour ces 58 parachutistes français qui en 1983 ont péri dans l’explosion de l’immeuble du Drakkar fomentée par le Hezbollah? Savait-il que Ibrahim Aqil, le chef militaire qu’Israël venait d’éliminer, avait été un des organisateurs de cet attentat ? S’est-il demandé quelles options s’offraient à Israël, devant un ennemi qui veut sa disparition et a commencé une guerre où il prend le Liban en otage ? Il y a quatre ans, le président Macron avait de façon spectaculaire et inefficace assuré le Liban du soutien de la France après l’explosion du port de Beyrouth. Le Liban n’a pas osé incriminer le Hezbollah, responsable de cette explosion et la France n’a pas osé s’exprimer sur ce déni de justice évident. La France s’active aujourd’hui pour un cessez-le-feu transitoire en indiquant que le Liban ne se relèverait pas d’une guerre. Le Liban, chacun le sait, mais personne ne veut le dire, ne redeviendra un vrai pays que si le Hezbollah est démantelé, mais il est plus populaire aux Nations Unies de  bloquer contre Israël le balancier du en même temps et de prononcer solennellement des appels à la paix dont le Hezbollah fait semblant d’être le plus fervent partisan…


[1] https://www.causeur.fr/israel-liban-qui-sont-ces-enfants-massacres-a-majdal-shams-288801

Attentat du Drakkar: l’oubli honteux…

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En 1983, le Hezbollah tuait 58 militaires français à Beyrouth. Pourtant, l’élimination ciblée, par Tsahal, des responsables de cet attentat, n’a pas été saluée par le président Macron


Hélas…
Pas une ligne…
Pas un mot…

Rappelez-vous ! C’était en 1983, au Liban, ce cher Liban, pays du Cèdre qui sent le sapin !

Le Hezbollah frappait la France en tuant 58 militaires venus stabiliser la région. L’auteur, un certain Fouad Chokr, terroriste de renom, de sale renom si je puis m’exprimer ainsi, fait partie de la bande de personnes tuées le 20 septembre 2024, une frappe ciblée durant laquelle 16 hauts dirigeants de l’unité d’élite Force Redwan ont été décimés, ceux-là mêmes qui préparaient un deuxième 7-Octobre.

Naïvement, avec mon petit cerveau de fils d’immigré, je pensais que la France allait se réjouir de la frappe israélienne, voire manifester sa joie en l’honneur de nos militaires disparus. J’espérais une déclaration de soutien envers Israël, à la limite d’un petit remerciement, même du bout des lèvres.

Hélas !
Pas une ligne
Pas un mot !

Même pas un signe, une main tendue, un sourire, un clignement d’œil, un battement de cils !

Rien !
Nada !
Presque comme du mépris !

Ce silence honteux s’apparente au fond à un oubli qui renvoie la mort de ces soldats innocents aux oubliettes de l’histoire, comme un évènement tragique que l’on veut voir disparaître, comme une honte, une mauvaise maladie, une MST chopée durant une nuit de débauche avec des personnes peu fréquentables, le tout dans la quête de la France à vouloir conserver son influence au pays du Levant !

Influence et bonne image, voici les deux mamelles du rêve français en Orient!

Erreur fatale !

Les Accords Sykes-Picot qui en 1916 partagent les restes arabes de l’Empire ottoman, entre la France et l’Empire britannique, permettent de récupérer la Syrie et le Liban. Soit ! Mais tout cela, c’est du passé, comme la perte d’influence française en Afrique !

J’ai envie de paraphraser Serge Lama dans sa chanson « Souvenirs, attention Dangers! » Souvenirs et dangers, car l’image de la France semble figée dans un passé glorieux alors que le chaos géopolitique est désormais présent, avec un Iran fort, possédant la volonté non seulement de détruire l’État hébreu mais aussi et surtout de reconstituer un empire d’influence, grâce au religieux – l’arc chiite – ou bien le régalien, d’État à État comme au Liban ou au Venezuela.

Le chemin de Damas passe donc par Téhéran, au grand dam des Occidentaux qui se cachent les yeux, mais qui accusent Israël de « trop de se défendre » ! A ce propos, je pose une question de Candide : « Mais quelle serait la réaction de la France si ce pays recevait, chaque jour, des dizaines de roquettes sur la tête ?! » La cécité française ne mène pas vers la Lumière mais vers le déshonneur, le noir de l’humiliation pendant que des otages français croupissent dans des tunnels sordides, sans eau, sans électricité, avec une absence totale d’hygiène.

Au fond, des otages tentent de survivre tandis que la France tente de s’accrocher à son souvenir d’une France dominante. Ce rêve honteux et cette fuite en avant vont se payer cher… très cher ! Souvenirs d’Octobre… Attention… Dangers terroristes !

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Festival d’Automne: l’hiver de la création

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Le Festival d’Automne, naguère si brillant, est devenu la vitrine de la supercherie contemporaine. La création de Il Cimento dell’Armonia e dell’Inventione, signée par Anne Teresa De Keersmaeker et Radouan Mriziga, est aussi affligeante que le public venu l’applaudir.


Là, on a vraiment touché le fond. Et même plus bas encore. Signée par Anne Teresa De Keersmaeker et Radouan Mriziga, Il Cimento dell’Armonia e dell’Inventione est une production « chorégraphique » si misérable qu’on ne saurait la qualifier sans mots assassins.

Que cette chose ait été programmée à la fois par le Théâtre de la Ville et le Festival d’Automne rend l’événement encore plus accablant.

Pour mesurer l’inanité de cette composition, tout comme celle de son exécution, il faudrait imaginer s’être rendu à un concert et n’y découvrir que des musiciens débutants ; être allé au théâtre et y entendre ânonner un texte infantile lu par des illettrés ; ou avoir ouvert un livre écrit par un analphabète. Durant ce sidérant pensum de 90 minutes, il n’y a réellement pas un geste, pas un seul, qui donnerait le sentiment d’avoir été posé là autrement que par des amateurs sans imagination aucune. Comme persillée au cours de longues plages de silence, seule est séduisante l’interprétation très fragmentée des Quatre Saisons de Vivaldi qu’en donne l’ensemble Gli Incogniti. 

Quel géniteur pour cet insondable néant ?

Certes, la redoutable De Keersmaeker, si abusivement encensée, a pu maintes fois afficher des spectacles indigents à côté d’autres pourtant remarquables. Certes, elle manie généralement un vocabulaire limité, répétitif et prévisible. Mais on peine à croire tout de même qu’elle ait pu être véritablement l’auteur d’un travail à ce point infantile. Alors on en vient évidemment à soupçonner, sans du tout pouvoir l’affirmer, que le coupable est ce Radouane Mriziga jusque-là inconnu au bataillon, mais s’annonçant avec superbe comme un « chorégraphe et danseur bruxellois originaire de Marrakech qui aborde la danse par le prisme de l’architecture et brosse le portrait de l’être humain comme un exercice d’équilibre entre l’intellect, le corps et l’esprit ». Un Mriziga qui fut élève de l’école fondée par De Keersmaeker dans la capitale belge, et à qui l’impérieuse Flamande aurait cédé le pas sous le coup d’une bouffée d’humilité proprement miraculeuse.

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Pourtant, on a du mal à imaginer que cette femme à qui la rumeur prête depuis toujours un caractère irascible et dont l’attitude au travail a fait le sujet d’une plainte collective pour « violence psychologique, harcèlement, comportement autoritaire et imprévisible » de la part d’une vingtaine de personnes, on a du mal à imaginer qu’elle ait pu si aimablement céder la place à un Marocain quasiment débutant, quoi qu’en disent les propos ronflants qu’il affiche à son sujet. À moins qu’elle n’ait éventuellement songé à se racheter une conduite. Ou qu’elle ne soit sous l’emprise de cette complaisance qu’affecte depuis longtemps le politiquement correct en faveur des artistes « issus de l’immigration », quel que soit leur talent. Ou leur absence de talent.

La danseuse et chorégraphe belge flamande Anne Teresa De Keersmaeker © Yonhap News/NEWSCOM/SIPA

Pour servir Il Cimento…, quatre individus : deux blocs massifs aux noms balkaniques et deux hommes plus frêles qui exécutent médiocrement les choses les plus insignifiantes, mais dont on devine toutefois, à la faveur d’attitudes furtives, qu’ils pourraient offrir tout autre chose que ce à quoi on les a l’un et l’autre abandonnés. 

Inflation verbale

Ce qui est plus grave, infiniment plus grave dans cette regrettable aventure, comme dans bien d’autres d’ailleurs, c’est que deux institutions aussi considérables que le Festival d’Automne et le Théâtre de la Ville cautionnent, en la programmant, une telle production.

Jadis conçu par Michel Guy, puis porté par Alain Crombecque, le Festival d’Automne, dans son époque la plus brillante, s’était tout d’abord donné pour tâche de faire connaître en France l’élite de l’avant-garde américaine, avant de servir celle de la création française et européenne. Le Théâtre de la Ville, lui, pour avoir affiché les plus grands noms de la danse contemporaine de la seconde moitié du XXe siècle, qui étaient souvent les mêmes que ceux du Festival d’Automne, s’est hissé en son temps au rang des scènes européennes les plus novatrices.

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Lourds de leur réputation d’excellence, aujourd’hui quelque peu usurpée, ils font croire implicitement à un public qui déjà n’a plus connu les géants de naguère et n’a plus guère de références artistiques, que ce qu’ils programment est du même niveau que ce qui fit leur réputation dans le passé. Ils trompent de ce fait tout un public de consommateurs paraissant dépourvus de culture artistique, de repères solides, et, plus fâcheux encore, qui semblent dénués de libre arbitre, de tout jugement personnel. Les superlatifs employés dans les programmes qui présentent les ouvrages, cette inflation verbale souvent reprise dans la presse qui a abdiqué son travail critique ou n’ose plus rendre compte des réalités décevantes de la scène contemporaine, tout contribue à égarer des gens à qui on annonce ou laisse penser que ce qu’ils découvrent est exceptionnel. Exceptionnel, évidemment, puisque affiché dans un théâtre et par un festival de grande renommée.

Immense chorégraphe !!!!

En province, où cette calamiteuse production se donnera dans la foulée, on ne fait pas plus sobre. Dans telle ville du Sud-ouest, le programme qui annonce Il Cimento… ose en toute impudeur voir en De Keersmaeker une « immense chorégraphe », faute sans doute de trouver un adjectif encore plus monumental. Beau bourrage de crâne initié naguère par les nationalistes flamands en pleine expansion, trop heureux de pouvoir exhiber un produit de leur terroir qui n’en avait alors guère à offrir dans les années 1980.

Et pour quel résultat ? Un produit de consommation aussi désolant qu’Il Cimento… a été acclamé chaque soir au Théâtre de la Ville par toute une fraction du public paraissant décidée à aimer à tout prix ce qu’on lui a désigné. Une fraction, mais la plus bruyante, la plus expansive, qui s’extasie béatement devant des riens et qui se lève ostensiblement à la fin des opérations avec un enthousiasme exhibitionniste pour manifester son adhésion inconditionnelle, sans soupçonner le moins du monde combien elle est ridicule et naïve.

Si cette même adhésion aveugle, irréfléchie, en venait à s’appliquer au premier tribun populiste venu, on voit vite vers quoi on risquerait de sombrer.

1h30. Théâtre de la Ville – Sarah Bernhardt


Festival d’Automne, du 8 septembre 2024 au 26 janvier 2025. https://www.festival-automne.com/fr

Cau & Co

Deux jeunes gens, Ludovic Marino et Louis Michaud, dans une manière très originale de biographie-essai, Jean Cau, l’indocile, préfacé par Franz-Olivier Giesbert, lèvent enfin la sentence d’oubli qui frappait Jean Cau (1925-1993), cette figure majeure de résistance au conformisme.


Leur intention n’était pas de réhabiliter un Jean Cau « de droite », mais plutôt de signaler à leurs contemporains qu’ils ont à leur disposition l’œuvre d’un homme qui choisit un beau jour de « réaliser l’actif » de son expérience, soit la somme de ses connaissances, augmentées de ses contradictions intimes : enfance pauvre et provinciale, perspective d’avenir courte, intelligence vive, ambition vaste et balzacienne, entrée réussie dans la vie parisienne sous le haut patronage de Sartre, agacement « de classe » au spectacle de la mondanité « de gauche », fin de l’apprentissage, volte-face politique, ironie mordante du transfuge, lucidité impitoyable.

Il quitta Sartre, dont il fut le secrétaire, sans jamais le renier, et dressa la table pour un festin de polémiste.

Trahison à Saint-Germain-des-Prés

Le retournement de situation comportait des risques. Après sa métamorphose, Jean Cau incarna le reniement, la part d’ombre ; il devint le traître à Saint-Germain-des-Prés, à la gauche installée, aux pétitionnaires de terrasse, au camp du bien, du beau, du vrai.

Qui donc était cet antimoderne éclairé, certifié fasciste par les crétins d’hier, autour desquels s’agglutineront volontiers ceux d’aujourd’hui ? Si l’écrivain se confronta durement à la gauche, ce fut essentiellement par réaction épidermique et raisonnée à l’empire absolu qu’elle exerçait sur l’ensemble des intellectuels. Le moindre désaccord avec la ligne officielle, communiste puis socialiste, entraînait sur-le-champ le déshonneur, le diagnostic accablant et l’accusation publique réitérée : complaisance avec les heures les plus sombres, fascistoïdite en phase aiguë, calomnies et nazi-soit-il ! Les choses sont-elles si différentes de nos jours ?

« Ces tartuffes de l’information toujours se drapent d’une toge morale pour sermonner la terre entière[1]. »

Dans les arènes de Lutèce, il n’affrontait pas les taureaux de Victorino Martín[2], mais les vaches sacrées d’une partie de la classe dominante française, dont leur quotidien préféré Le Monde. Avec Lettres ouvertes à tout Le Monde, l’attaque fut frontale, rude : « Qui êtes-vous, gens du Monde ? Mais voyons, d’incurables bourgeois du xixe ! Vos traits le disent, votre voix, votre ton, vos noms, vos haleines tièdes encore de la vieille charité que vous insufflèrent vos familles. Et cette narine si experte à flairer le péché et le diable, comme je reconnais ses frémissements avides lorsque vous la promenez sur le monde comme il va pour y flairer, ici ou là, l’odeur de soufre de la droite, de la réaction, de l’ordre, de tout ce qui ne répand pas, en somme, les édéniques parfums de la gauche selon votre vaillante troupe de fanatiques boy-scouts oublieux des strophes de “Maréchal, nous voilà !” et la gorge pleine de cantiques écrits par quelque Neruda ou abbé Aragon. »

C’était hier, mais aujourd’hui ?

Maréchal, te voilà !

Sonia Devillers, à France Inter, a provoqué l’hilarité générale des Français en accusant Marion Maréchal de vouloir réhabiliter l’idéologie d’un funeste… maréchal (l’homonymie lui avait soufflé cet audacieux parallèle). Mme Maréchal eut la réplique cinglante, qui mit les rieurs (du plus large éventail électoral) de son côté et désorienta l’infortunée boussole du peuple (de gauche ?). Au reste, Mme Devillers est-elle de gauche ? En tout cas, elle fut maladroite.

Jean Cau est désormais à la disposition de tous ceux qui refusent les récentes (les futures) tyrannies : frondeurs aimables, insoumis vrais, factieux plaisants, bref la joyeuse cohorte des empêcheurs de woker en rond.

Ils suivront ses aventures, car il avait le pessimisme batailleur : la plume-banderille à la main, dos à la palissade, il affrontait la forme hostile toujours recommencée du conformisme. Il contra l’opinion majoritaire, impatiente d’embrocher l’outrecuidant toréador qui la tourmentait et se dérobait toujours à ses assauts.

De qui se woke-t-on ?

Peut-on imaginer ses commentaires, après le spectacle « son et lumière » qui a lancé la quinzaine olympique, son sourire d’ironie devant ce défilé d’images (souvent belles, d’ailleurs), devant ce « woke in progress », conçu par un talentueux metteur en scène, assisté d’un historien officiel d’État (ou municipal) ? Libre à eux de vomir l’Église, mais pourquoi nier l’intention anticatholique dans la représentation caricaturale de la Cène, l’étalage de chairs capricieuses, encombrantes, en lieu et place du Christ et de ses disciples à la table de leur dernier repas ? Voulurent-ils chanter les louanges de la République en montrant une reine qui paraissait consentir à son martyre par l’offrande enjouée de sa décapitation ?

Daphné Bürki, chargée des costumes, déclara que la chanson de John Lennon, Imagine, était « antimilitariste, anticapitaliste, engagée ». Bernard Arnault, patron de LVMH, l’un des principaux financiers de la fête, Coca-Cola, les militaires, les policiers mobilisés jour et nuit ont beaucoup ri de cette « rebelle attitude »…

Déclin du christianisme ? Perte des repères ? Panurgisme ? Jean Cau annonçait tout cela dans L’Agonie de la vieille (La Table ronde, 1970) : « Le judéo-christianisme est à bout de souffle et de course qui, depuis 2 000 ans, a fondé l’ordre, n’importe lequel et fût-ce sous d’étranges avatars. (Le messianisme marxiste fut l’un d’eux.) Mais cette annonce est si grave que nul n’ose la formuler catégoriquement. »

Faut-il préciser que la vieille femme agonisante, veillée par Jean Cau, c’était notre démocratie ?

Ludovic Marino et Louis Michaud, Jean Cau, l’indocile, Gallimard, 2024.

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[1] Jean Cau, Lettres ouvertes à tout Le Monde, Albin Michel, 1976.

[2] Éleveur fameux de taureaux de combat établi à Gerena, dans la province de Séville. Jean Cau fut un aficionado passionné.

Comment briller dans vos dîners en ville en parlant des nouveaux ministres

Une fois après avoir dit comme tout le monde que ce nouveau gouvernement, c’était beaucoup de bruit pour rien, vous marquerez des points en ayant un commentaire politique précis pour chaque membre du nouveau casting de MM. Barnier et Macron… Les fiches de Céline Pina qui suivent vous permettront de faire forte impression.


Le gouvernement le plus à droite depuis les gouvernements Fillon ! Voilà comment une partie de la presse présente l’équipe de Michel Barnier. Le plus drôle c’est qu’il n’y a aucune réalité concrète derrière cet affichage outrancier visant à induire l’idée que la réaction est au pouvoir. D’abord parce que les personnalités en question sont loin d’être des boutefeux et des extrémistes, ensuite parce que les réalités mathématiques sont têtues : ce gouvernement n’a pas de majorité et sa longévité est tributaire du bon vouloir de son opposition, ce qui rend d’emblée caduque l’espoir de rivaliser avec Mathusalem.

Technique et politique

La liste des ministres du gouvernement Barnier contient très peu de noms connus des Français, y compris parmi ceux qui sont en haut de la liste protocolaire. Cela dit tout du déclin de la politique et de la fonction ministérielle. Avant, devenir ministre était soit un bâton de maréchal, soit la reconnaissance d’un parcours politique intéressant, d’une capacité à faire partager une vision, une ambition ou tout du moins une réforme. Aujourd’hui cela devient un premier poste, une sorte de phase de test ; on assiste à la prise de pouvoir de l’équipe réserve. D’où la domination des profils techniques : les noms d’école prestigieux mis en avant remplacent l’expérience et la connaissance des hommes. Ils permettent d’afficher une compétence sans jamais se poser la question de savoir si elle est utile et adaptée au rôle. Or Emmanuel Macron a montré à quel point les gouvernements techniciens ne sont pas meilleurs que les autres, voire accentuent le déclin faute de gouvernail avant tout mais aussi de finesse dans la connaissance des réalités humaines et territoriales. La gestion, même en bon père de famille, si elle n’est pas à négliger, n’est ni un projet, ni un avenir. Voilà pourquoi elle relève de l’administration et non de la politique.

A ce triste constat en train de devenir structurel, s’ajoute un élément conjoncturel fort. Personne ne pense qu’Emmanuel Macron a encore un destin et trop de monde doute qu’il ait même encore un avenir. Pour autant, il est là. Tout sauf discret, tout sauf capable de retenue et de discernement dans la conduite. Il veut tellement être au centre du jeu que gouverner avec ce président-là, c’est être réduit à servir sa communication, c’est accepter la mission au nom de la France pour terminer dans des affrontements stériles avec un étourdi et sa côterie… D’autre part, la petite musique du président empêché de finir son mandat est dans toute les têtes et si cette attente ne se réalise pas, tout le monde a compris que lier son sort au sien, c’était se retrouver disqualifié lorsque les cartes seront rebattues. Il y a donc peu d’espoir que l’engagement aboutisse à quelque chose et beaucoup de chances qu’il nuise aux ambitions ultérieures. Cela, les politiques le savent.

Mission impossible, si vous l’acceptez : le budget

Cette équipe mélange donc personnalités aux profils de techniciens et grands élus locaux. Ceux qui n’ont rien à perdre à acquérir un peu de notoriété, et savent qu’on ne leur fera pas grief s’ils échouent là où personne ne s’attendait à ce qu’ils réussissent. Sa composition sur la forme est donc des plus classiques. On y retrouve la nécessité de nourrir chacun des courants de la coalition et on y affiche l’importance de l’ancrage territorial, mais il y a fort à parier que ce gouvernement ne devrait rien changer à la situation de blocage du pays tant on voit mal de quels leviers il dispose. L’absence des grands leaders le dit, ils sont déjà sur le coup d’après et misent sur l’échec. L’appel à la responsabilité politique ne devrait permettre que l’accouchement d’un budget technique. En la circonstance, ce ne sera déjà pas si mal. En attendant, petite revue de détail de nos nouveaux ministres.

• Didier Migaud (divers gauche), garde des Sceaux, ministre de la Justice. L’ancien membre du PS nommé président de la Cour des comptes par Nicolas Sarkozy était jusqu’alors, à la direction de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique. Il est premier dans l’ordre protocolaire et cela porte un message : il faut faire oublier que les vieilles gloires de la gauche, à l’époque où elle était républicaine, ont toutes refusé de monter sur le Radeau de la Méduse. Ces derniers ont dû probablement manquer le fait que les marins et passagers qui avaient choisi le banc de sable au lieu du radeau ont eu un sort tout aussi funeste… En attendant, la participation de M. Migaud au gouvernement est brandie comme un trophée ; l’homme s’est fait surtout connaitre comme un technicien très compétent, faisant passer son devoir avant l’idéologie et refusant le sectarisme. Il a une expérience politique réelle : maire de Seyssins (38), président de la métropole de Grenoble, rapporteur général du budget à l’Assemblée nationale, président de la commission des Finances… Il a été positionné symboliquement en premier en signe de respect, pour donner également des gages à la « gauche » de la macronie ; la position prestigieuse ayant pour but de faire oublier que le compte n’y est pas et que cette équipe est orientée à droite. Le problème c’est que le rassemblement autour d’Emmanuel Macron est plus un fan club qu’un parti : il n’a ni doctrine ni ligne de force. A tel point que pour exister ce collectif crée des dangers imaginaires, tout en enfonçant la tête dans le sable face aux dangers réels. Gabriel Attal fait ainsi comme si la droite menaçait les droits LGBT, ceux des femmes ou la PMA, alors même que c’est l’alliance de la gauche avec les islamistes qui leur fait courir le plus grand risque. Résoudre des problèmes qui n’existent pas permet de triompher aisément. Voilà pourquoi Gabriel Attal fait toute cette communication et s’attaque à des moulins à vent en les faisant passer pour une armée de réactionnaires. Être protecteur de ce qui n’est pas attaqué permet de brandir un bon bilan de défenseur de place forte et de se construire une image de chevalier blanc sans prendre le moindre coup. Le risque : ne pas échapper au ridicule…

En attendant, le duo Migaud / Retailleau rappelle le tandem Darmanin / Dupond-Moretti où, afin de rassurer le microcosme bobo, l’affichage de l’autorité incarnée par Darmanin était contredit par l’image progressiste et laxiste de l’ancien avocat de la défense. Le retour de cette forme de politique à la Gribouille montre à quel point le président et son entourage n’ont toujours rien compris aux attentes des Français. Sans compter que c’est faire revêtir à Didier Migaud un rôle dont il pourrait modifier les contours. Il en a les capacités.

• Catherine Vautrin (divers droite), ministre du Partenariat avec les territoires et de la Décentralisation. L’ex-ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités (de janvier à septembre), longtemps députée de la Marne, a rejoint Emmanuel Macron en 2022 mais vient à l’origine de la droite. Elle fut pressentie comme Premier ministre en remplacement de Jean Castex en 2022, mais son opposition à la loi « Mariage pour tous » lui a alors valu une bronca de l’aile gauche du parti macroniste. Elle est en deuxième position pour envoyer un message fort aux élus locaux et aux pouvoirs intermédiaires, ignorés ou instrumentalisés sans que cela ne débouche sur rien (rappelons-nous d’Emmanuel Macron se mettant en scène en majesté alors qu’il était censé écouter leur expertise après la crise des gilets jaunes).

• Bruno Retailleau (Les Républicains), ministre de l’Intérieur. Chef du groupe LR au Sénat, élu de Vendée. C’est un des rares, si ce n’est le seul, poids lourd du gouvernement. Il est positionné à un poste stratégique. Cet homme, encore peu connu, est un politique travailleur et courageux. Il a pris des positions très fermes sur l’islamisme. Il s’est opposé au Mariage pour Tous, ce qui a l’art de rendre fou les socialistes qui ont fait de cette réforme sociétale sans grand impact, une épopée épique et une référence majeure, sans se rendre compte qu’au fond elle était facilement rentrée dans les mœurs et que la combattre n’est une priorité pour personne. Il a également voté contre l’inscription de l’IVG dans la Constitution. Or ce vote ne signifie pas le rejet de l’IVG en soi. Un certain nombre de parlementaires ont refusé de se prêter à une mise en scène où le gouvernement prétendait sanctuariser un droit qui n’était pas attaqué en l’inscrivant dans une Constitution dont ce n’est pas l’objet puisque celle-ci est censée traiter de l’organisation des pouvoirs… M. Retailleau a pris des positions très claires sur l’immigration et est en phase avec les attentes des Français sur cette question comme sur le dossier préoccupant de l’islamisation. Ce sont surtout ces questions-là qui inquiètent en réalité une gauche très compromise avec les réseaux et une partie de l’idéologie islamiste dont elle reprend les éléments de langage. Mais comme il serait impopulaire de porter le fer sur ces questions-là, à moins d’être LFI et d’avoir totalement sombré dans l’islamogauchisme, l’aile gauche du parti macroniste préfère concentrer ses critiques sur des soupçons d’homophobie peu avérés.

• Anne Genetet (Renaissance), ministre de l’Education nationale. Elue des Français établis en Europe de l’Est, Asie et Océanie, ancienne vice-présidente du groupe Renaissance à l’Assemblée nationale. Surtout connue pour avoir travaillé sur les sujets de défense et de diplomatie, elle a obtenu le poste grâce à ses liens avec Gabriel Attal, lequel voulait montrer qu’il gardait un peu la main sur certains secteurs. Cela montre surtout qu’il est dégarni en ressources puisque dès la nomination de la ministre, les syndicats ont mis en avant une forme d’illégitimité liée à sa totale méconnaissance d’un secteur très compliqué. Chasser le mammouth ne s’improvise pas, l’apprivoiser non plus ! D’autant que la ministre ne fait pas preuve de retenue ni de discernement, s’en étant pris à Bruno Retailleau avec véhémence dans les médias alors que vendredi son nom tournait déjà comme probable ministre de l’Intérieur. Mais Madame Genetet ne fait que correspondre au nouveau profil politique-type, lequel ne s’affirme plus par ses actions et ses réalisations mais en faisant de son adversaire un repoussoir. Une posture qui promet, alors que l’Education nationale va de mal en pis, que le niveau ne cesse de chuter et que l’institution souffre de la démagogie persistante des syndicats dont les critiques se concentrent uniquement sur le manque de moyens, tandis que les parents d’élèves s’interrogent surtout sur l’absence d’exigence, de discipline et de résultats dans les établissements scolaires, et en ont marre de voir des enseignants recrutés à des niveaux de plus en plus bas.

• Jean-Noël Barrot (MoDem), ministre de l’Europe et des Affaires étrangères. Ancien ministre délégué chargé du Numérique (2022-2024), puis ministre délégué chargé de l’Europe (février-septembre). Le fils de Jacques Barrot est très peu connu du grand public. Il occupe une position délicate : la diplomatie est vue par Emmanuel Macron comme sa chasse gardée bien que cet art soit sans doute bien mieux maitrisé par son nouveau Premier ministre. Affaibli, le président n’en est que plus ingérable, et le secteur de la diplomatie risque de pâtir des tensions qui devraient rapidement se faire jour au sein de l’exécutif. Jean-Noël Barrot est inconnu du grand public et n’est crédité d’aucune réalisation marquante, mais il est jeune (41 ans) et pourrait surprendre.

• Rachida Dati (divers droite), ministre de la Culture et du Patrimoine. Tout récemment exclue des Républicains lorsqu’elle a choisi de rejoindre Emmanuel Macron (janvier), la ministre de la Culture retrouve tous ses petits camarades de droite qu’elle n’a jamais épargné. Ambiance. Mais, ceux-ci sont habitués à son caractère affirmé. Mme Dati garde le même ministère, gage d’efficacité dans les futures négociations budgétaires. Elle en aura besoin, les dossiers chauds ne manquent pas dans le secteur : crise du spectacle vivant, pluralisme politique dans l’audiovisuel public, difficultés à faire vivre la culture en zones rurales, polémique annoncée sur les vitraux de Notre-Dame…

• Sébastien Lecornu (Renaissance), ministre des Armées et des Anciens Combattants. Ministre des Armées depuis mai 2022. C’est un des rares ministres à avoir été maintenu. Comme Rachida Dati, il vient des LR et retrouve donc des visages connus dans le nouveau gouvernement. Accompagnant la hausse des crédits liés aux Armées, l’homme est apprécié des militaires. Le ministère est d’ailleurs très technique, l’aspect politique sur les questions militaires relevant du président. C’est donc un ministère plutôt tranquille, même si les tensions internationales s’exacerbent. Heureusement, la défense nationale n’est pas un sujet qui prête à polémiques politiciennes.

• Agnès Pannier-Runacher (Renaissance-Territoires de Progrès), ministre de la Transition écologique, de l’Energie, du Climat et de la Prévention des risques. Elle a été de tous les gouvernements depuis 2017. Sa nomination pourrait être l’occasion d’envoyer un message d’engagement à la filière nucléaire, son positionnement pro-nucléaire étant un des fils rouges de son engagement gouvernemental.

• Antoine Armand (Renaissance), ministre de l’Economie, des Finances et de l’Industrie. Député de Haute-Savoie et ancien président de la commission des Affaires économiques à l’Assemblée nationale. Comme tant de membres de l’entourage d’Emmanuel Macron, il a lui aussi un profil de technicien. L’homme est très jeune (33 ans), pèse peu et n’a pas d’histoire politique. La nomination de M. Armand marque une relative perte du poids politique de Bercy et de l’importance de son ministre, après le départ de Bruno Le Maire. Elle annonce une implication très forte du Premier ministre sur les questions budgétaires et économiques. Cette nomination peut être comprise comme une façon de dire en creux qu’il s’agit ici de mettre en place un budget de transition, en attendant que les choses sérieuses commencent. Certes, avec le niveau de notre dette, de notre balance commerciale et des coupes budgétaires à réaliser, la tergiversation n’est guère de mise, mais sans majorité il est difficile de faire des choix ambitieux. Un profil technique n’est donc pas un choix incohérent.

• Geneviève Darrieussecq (MoDem), ministre de la Santé et de l’Accès aux soins. Ancienne ministre déléguée chargée des Personnes handicapées (2022-2023), elle hérite d’un ministère en crise continue depuis des années. L’accès à un parcours de soins devient de plus en plus compliqué en secteur rural et périurbain. Inutile de dire que la fragilité de la « coalition » à laquelle appartient Mme Darrieussecq ne fait attendre guère d’avancées sur le secteur.

Une armée de petits profils techniques

• Paul Christophe (Horizons), ministre des Solidarités, de l’Autonomie et de l’Egalité entre les femmes et les hommes. Président de la commission des Affaires sociales, ce proche d’Edouard Philippe présente également un profil technique.

• Valérie Létard (UDI), ministre du Logement et de la Rénovation urbaine. Ancienne députée du Nord, ancienne vice-présidente du Sénat, secrétaire d’Etat sous la présidence de Nicolas Sarkozy. C’est une femme expérimentée, qui connait ses dossiers. Mais c’est la même chose que pour le poste précédent : son profil reste très technique.                                   

• Annie Genevard (Les Républicains), ministre de l’Agriculture, de la Souveraineté alimentaire et de la Forêt. La codirigeante par intérim du parti Les Républicains, ancienne prof de lettres classiques et députée du Doubs depuis 2012, décroche son premier ministère à 68 ans.

• Astrid Panosyan-Bouvet(Renaissance), ministre du Travail et de l’Emploi. Premier poste de ministre pour la députée de Paris qui se signale dans l’hémicycle par son travail sur le fond et son courage sur les sujets de laïcité, d’islamisme, d’égalité hommes/femmes.

• Gil Avérous (divers droite), ministre des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative. Ancien maire de Châteauroux (Indre), il a quitté LR en 2023

• Patrick Hetzel (Les Républicains), ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche. L’ex-directeur général de l’Enseignement supérieur de 60 ans, député du Bas-Rhin, a été conseiller éducation de François Fillon, à Matignon.

• Guillaume Kasbarian (Renaissance), ministre de la Fonction publique, de la Simplification et de la Transformation de l’action publique. Ancien ministre du Logement (février-septembre). Reconnu pour sa compétence sur son précédent secteur.

• François-Noël Buffet (Les Républicains), ministre auprès du Premier ministre, chargé des Outre-mer. Ancien sénateur du Rhône et président de la commission des Lois du Sénat.

• Laurent Saint-Martin (Renaissance), ministre auprès du Premier ministre, chargé du budget et des comptes publics. 

Philippine: martyre de l’impéritie judiciaire

«L’impunité des juges, jusqu’à quand?», s’agace la droite dure, après la mort de Philippine, jeune femme retrouvée dans le Bois de Boulogne. Son meurtrier présumé, un immigré marocain, avait déjà été condamné, n’avait pas effectué toute sa peine de prison, et demeurait sur le territoire français. Sur le dossier des OQTF, après cet énième et terrible fait divers, Bruno Retailleau et Didier Migaud sont attendus au tournant. «C’est à nous, responsables publics, de refuser la fatalité et de faire évoluer notre arsenal juridique, pour protéger les Français. S’il faut changer les règles, changeons-les», a déclaré le premier.


Combien faudra-t-il encore de Philippine, de martyres de la barbarie locale ou d’importation pour qu’on en vienne enfin à légiférer sur la responsabilité de l’institution judiciaire en général et de certains juges en particulier, notamment dans ces cas gravissimes de récidive ?

Scandale à tiroirs

Philippine était jeune, belle, brillante, pleine de vie, sociable, bienveillante. De surcroît blanche et catholique. La proie idéale pour ces monstres, probablement. En vérité, l’écœurement est à son comble, tant le scénario d’épouvante est connu, qui se reproduit ad nauseam.
L’auteur présumé de la monstruosité : un migrant clandestin marocain âgé de 22 ans. Palmarès, un viol peu après son arrivée sur le sol français en 2019. Une étudiante de 19 ans – déjà!- agressée sur un chemin de la forêt de Taverny. Jugement, verdict : sept ans de prison. Sept ans seulement, dirais-je, pour la vie gâchée de cette jeune personne. Voilà bien un premier scandale.
Scandale à tiroirs, puisque le type n’effectue qu’une partie de sa peine. Donc, il sort. Pour de nouvelles balades en forêt ? Allons savoir.
Le 18 juin dernier, cinq ans après les faits – oui, cinq ans – une Obligation de Quitter le Territoire Français (l’une de ces OQTF, arlésiennes procédurales qui pourraient faire rire si l’affaire n’était si grave) est prononcée à son encontre. Dans l’attente de son expulsion, il est placé en Centre de Rétention Administrative (CRA).
Autre élément de scandale, un juge des libertés et de la détention prend la généreuse décision de le libérer. Sans doute considérait-il que la privation de possibles promenades bucoliques était une sanction trop sévère et surtout trop injuste pour ce garçon.

En n’attendant pas Baudot

On voit bien, hélas, le fonds idéologique qui préside à ce genre de décision: le migrant violeur est lui aussi victime, victime de la misère sexuelle dans laquelle le relègue cette horrible société d’oppression blanche et bourgeoise, raciste et post-esclavagiste, qui se fait honteusement tirer l’oreille pour l’accueillir avec tambour et trompette, voire tapis rouge. La doxa idéologique est là : le coupable n’est coupable que parce qu’il est d’abord victime. Cette doctrine effarante était clairement exprimée dans ce qu’on appelle la Harangue de Baudot, écrite en 1974, adressée à une centaine de magistrats frais émoulus de l’école de la magistrature de Bordeaux. « Soyez partiaux, prescrit ce texte de référence. Examinez toujours où sont le fort et le faible, qui ne se confondent pas nécessairement avec le délinquant et sa victime (…) Ayez un préjugé favorable pour la femme contre le mari, pour l’enfant contre le père, pour le débiteur contre le créancier, pour l’ouvrier contre le patron, pour le voleur contre la police »… De là à compléter la litanie en y ajoutant « du violeur contre la martyre », il n’y a sans doute, pour certains magistrats, qu’un pas ou deux à franchir.
Libre à eux, sans doute. Mais libre à la société d’exiger qu’ils aient à rendre des comptes. À l’image de tout citoyen de ce pays. Rendre des comptes, comme tout un chacun, dans les mêmes conditions d’égalité et d’impartialité. Droits de la défense compris, cela va de soi, puisque cela fait partie intégrante de nos principes de saine et honnête justice. Principes qui nous honorent, soit dit en passant.

Mon clocher, ma bataille

Dans un beau livre illustré, l’historien Jean-Pierre Rioux nous raconte comment la défense de nos clochers est devenue, au fil du XXᵉ siècle, un enjeu majeur de la politique patrimoniale française. Vive nos clochers – Avec Barrès, Hugo, Proust et les autres (Editions Bleu Autour, 2024)


Il était là. Au milieu de la paroisse, du village, de la cité, tellement visible, tellement surplombant, tellement sonnant que plus personne ne faisait attention à sa présence séculaire.

Notre décor mental

Il faisait partie de notre décor mental, de notre biotope culturel, de nos racines culturelles, que l’on soit pratiquant ou pas, il était à la fois le témoin de notre histoire communale et la permanence d’une France ancrée dans le catholicisme. Et puis, par lassitude, par abandon, presque involontairement, face à l’explosion des coûts d’entretien et à une déchristianisation lente de nos campagnes, nous n’avons pas su le retenir, le choyer, lui dire combien il était cet ami fidèle, ce gardien de troupeau bienveillant. Ce phare qui éclairait nos plaines inertes plusieurs kilomètres à la ronde était plus qu’un échalas de pierre, il était tuteur et mémoire, recueillement et monument, mystère et rêverie. Un jour, notre église tomba en ruine et notre clocher disparut. Ce jour-là, nous avons perdu un peu de nous-mêmes et l’identité de notre communauté s’en est allée. Dans un monde ultra-connecté et déshumanisé, quelle trace restera-t-il de nos anciennes fraternités ? Ce clocher que nous avions fini par oublier, par délaisser était au cœur de notre vie quotidienne. Il était témoin et acteur de nos solidarités. Il nous rattachait à quelque chose de plus grand que nous. Cette histoire n’est pas une fiction, elle est le symbole du délitement de nos vieux liens qui couraient bien au-delà des remous de la loi de 1905.

Débats sans fin

Nos clochers ne sont pas éternels. Alors, aujourd’hui, le patrimoine ne relève plus du folklore de quelques âmes charitables comme la défense des animaux, mais bien d’un nouveau socle sur lequel de nombreux citoyens, croyants ou non, veulent se rattacher. Nos clochers ont une valeur de transcendance. Ils sont des repères existentiels et non le catafalque de nos turpitudes. On veut les protéger, les sauver, les maintenir en vie mais jusqu’à quel point ? Si les Français sont, de nouveau, sensibles au sort réservé à leurs clochers et à leurs calvaires, le quoi qu’il en coûte n’est plus au programme commun des budgets municipaux.

Jean-Pierre Rioux, spécialiste de l’histoire politique et culturelle de la France contemporaine dresse un panorama de nos clochers dans un ouvrage illustré paru chez « Bleu Autour », la belle maison d’édition située à Saint-Pourçain-sur-Sioule (03). Sous le titre enthousiaste Vive nos clochers, il raconte comment nos églises, épicentres des provinces, ont été à l’origine de féroces combats idéologiques et comment leur sauvegarde est encore une source de débats qui agitent les élus et les populations locales. Car, l’église n’est pas « un bâtiment municipal comme un autre ».

Les grands écrivains à la rescousse

L’intérêt de cette réflexion est qu’elle s’appuie sur les écrits de Barrès, Hugo, Proust et qu’elle débute même sur une chanson, La petite église, de Paul Delmet, interprétée par la voix chaude et perchée de Tino Rossi. Rioux avoue que c’est le refrain de cette incantation populaire dont les paroles commencent ainsi Je sais une église au fond d’un hameau… qui l’a poussé vers La Grande Pitié des églises de France de Maurice Barrès. Le député des Halles et académicien est l’homme par qui tout a commencé. Jean-Pierre Rioux écrit : « Il est donc prêt en 1910 à voler au secours des clochers. Avec une boussole : « Je défends les églises non parce que j’aime dans le catholicisme une gendarmerie spirituelle, mais au nom de la vie intérieure de chacun ». Barrès a le verbe haut et la fougue des convaincus. Par tribunes de presse, il part à l’assaut « pour un classement du bâti le plus ancien » sans se présenter en catholique mais pour mieux « préserver la civilisation et l’âme nationale ». Sa prose emporte et ses mots résonnent à cent ans d’intervalles, avec un mimétisme clairvoyant : « Le meilleur moyen de défendre nos églises, c’est de les faire aimer, d’intéresser le grand public à leur sort ».

Au XXème et en ce début de XXIème siècle, Rioux nous parle de nos rapports plus ou moins distanciés avec nos clochers ; de « la communion avec les poilus » jusqu’à l’émoi de Notre-Dame en flammes. Il va jusqu’évoquer le clocher de l’enfance si cher à Marcel ; dans les premières pages de Swann quand le train arrive à Illiers-Combray, Proust se souvient : « On reconnaissait de bien loin le clocher de la nôtre, inscrivant à l’horizon sa figure inoubliable ».

Vive nos clochers – Avec Barrès, Hugo, Proust et les autres – Bleu autour 184 pages

Vive nos clochers: Avec Barrès, Hugo, Proust et les autres

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Parenthèse (sécuritaire) enchantée

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Quel étrange virus toucha la capitale ?
Où l’insécurité avait-elle mis les voiles ?
Parisiens et touristes ensemble s’extasièrent,
De découvrir Paris nettoyé au karcher,
Procès d’intention ou délit de faciès,
Tout devint permis et passa pour hardiesse.
Initiative louée, d’autant que macronienne,
Si de droite venait-elle, on la dirait vilaine,
Ainsi de pauvres hères sur décision du prince,
Manu militari partirent voir la province,
Jamais gouvernement n’avait offert vacances,
À des indésirables dont on souhaitait l’absence.
Impossible n’est pas français ! Déclarait-il heureux,
Preuve surtout était faite que quand on veut, on peut.

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Ô Jeux Olympiques, parenthèse enchantée,
Enfin les Français s’autorisent à rêver,
Adoubent le roi Teddy, acclament le dieu Léon,
Le sport fédérateur, nouvelle religion !
Qu’importe la noyade de l’économie,
Pourvu que dans la Seine ait lieu son agonie,
Tandis que des champions sont vantés les biceps,
En guise de cérémonie est passée au forceps,
Cette idéologie que l’on nomme wokiste,
Et au nom de laquelle, on plagie jusqu’au Christ
Bienveillance et morale, tout cela dégouline,
Applaudissez Français que l’on vous endoctrine !

C’est ce drôle d’été, dans cette douce France,
Qu’Alain Delon choisit de tirer révérence.
Adieu l’artiste ! Titrent les magazines,
Et puisse Romy t’attendre au bord de la piscine !

Sitôt la flamme éteinte, sitôt reviennent les plaintes.
L’heure est venue braves gens de ranger le drapeau,
Sous peine, assurément, d’être traités de facho.
Dans l’enceinte des stades vous pouvez le chérir,
En dehors de ceux-ci, gardez de le brandir.

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Grand cirque politique, la même ritournelle,
Et c’est la guerre des gauches qui reprend de plus belle,
Érigeant Matignon en glorieux Rubicon,
Qui de Lucie Castets, qui de François Pignon.
Et pourquoi pas Borloo pour ce gouvernement ?
Le risque était trop grand qu’il effraie les enfants.

Jeux paralympiques, France paralysée,
De quel bord vient la mouche qui pique l’Élysée ?
Il oscille, il consulte, et ne fait qu’hésiter.
Que lui en a-t-il pris de dissoudre Assemblée ?
Prends garde monarque à ne point faire durer,
Cet étrange carême, ces quarante journées,
Où d’un gouvernement les Français sont privés
De son utilité le peuple pourrait douter.

Contre Michel Barnier, le pire de la politique…

Après l’annonce de la composition du gouvernement Barnier, les réactions immédiatement médisantes des uns et des autres nous ont offert ce que la politique française a de plus détestable.


Depuis que la composition du gouvernement de Michel Barnier a été annoncée, que de réactions attristantes, auxquelles le Premier ministre a répondu à sa manière le 20 septembre sur le journal de France 2 ! Il ne s’agit pas de supprimer la politique, selon le souhait bizarre exprimé il y a quelques jours par Éric Zemmour, comme si c’était possible et souhaitable, mais de tout faire pour lui donner une expression digne et équilibrée. Et ces derniers jours ont montré que notre démocratie est loin du compte !

Un gouvernement baroque, composé de ministres macronistes et de ministres de droite

Je ne prétends pas avoir éprouvé un enthousiasme sans mélange en prenant connaissance de la liste des ministres, des ministres délégués et des Secrétaires d’État. Même en mesurant les rapports de force parlementaires et l’influence persistante d’un président de la République pourtant directement responsable de la débâcle de ces derniers mois, je regrette pourtant la trop large place donnée aux macronistes de la première heure ou de fraîche date. Elle me fait craindre, dans la pratique, un amollissement de la droite et un chantage permanent du mou sur le nécessaire dans la conduite des affaires gouvernementales.

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Je continue à déplorer qu’un talent comme celui de Gérald Darmanin, qui a sauvé le régalien du naufrage, n’ait pas été mis à contribution dans un autre grand ministère, et que Philippe Juvin, sans doute trop libre et compétent, ait pâti de ces qualités alors qu’il aurait été remarquable à la Santé.

Ce gouvernement est quantitativement impressionnant, et je n’ai pas envie de me moquer de quelques dénominations originales qui renvoient au souci de libérer les missions générales des grands ministères de la charge de se pencher sur le quotidien préoccupant des Français. Par exemple, celle de la « Sécurité du quotidien ». Si elles sont concrétisées, elles constitueront des avancées. Il n’empêche que, cette déception relative formulée, je suis scandalisé par le mépris, la dérision, la condescendance dont ce gouvernement, avant même la moindre démonstration de ses capacités, a été l’objet. Ce n’est pas seulement la stigmatisation des nombreux inconnus qui a été choquante ; comme s’il fallait avoir échoué et être célèbre pour mériter les suffrages du peuple… Mais, plus globalement, la manière dont l’extrémisme de gauche comme de droite, une fraction mécontente d’Ensemble pour la République (EPR) et un certain nombre de médias, ont veillé d’emblée à faire perdre toute légitimité à cette nouvelle équipe. Partialité d’autant plus surprenante que, les yeux fixés sur les sondages, ils auraient dû être alertés et prendre conscience que les vertus dont on créditait le Premier ministre – constance, calme, modération, écoute et considération – étaient précisément celles dont manquait l’univers politique et qui avaient créé si rapidement cette embellie.

Retailleau concentre les critiques

Pour ne prendre qu’un exemple qui a suscité autant d’espérance que de critiques parfois ignominieuses, Bruno Retailleau – qui s’accordera, j’en suis sûr, avec le nouveau garde des Sceaux et dont même ses adversaires reconnaissent la fiabilité, la solidité et son heureuse aptitude à ne pas plier au gré du vent – est traité comme s’il avait été condamné pour racisme. Et je ne peux que déplorer que Manuel Bompard, si bien contredit par Sonia Mabrouk sur CNews, ait relayé cette absurdité. Comme si la joute politique autorisait n’importe quoi.

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L’opprobre anticipé projeté sur le gouvernement de Michel Barnier m’apparaît d’autant plus injuste que je perçois mal qui, ou quel groupe, pourrait avoir l’arrogance de se déclarer, face à lui, irréprochable, exemplaire ou préférable. Du côté du Nouveau Front populaire, avec Lucie Castets Premier ministre imaginaire et l’invocation lassante d’une première place après le second tour des élections législatives sans la moindre chance d’obtenir une majorité à l’Assemblée nationale, on a été confronté trop longtemps à cette méthode redoutable de l’extrême gauche dominant la gauche, consistant à confondre le martèlement de la même idée fausse avec la justesse de la cause. On ne peut pas passer sous silence, malgré les oppositions internes au Parti socialiste, l’insupportable dérive de celui-ci vers une idéologie faisant perdre tout bon sens, au détriment de ce qu’exigerait la responsabilité d’un parti qui se veut de gouvernement. Et de la retenue et décence républicaines qu’on attendrait de l’ancien président de la République François Hollande. Comment ose-t-il sans barguigner s’aligner sur le pire de la politique ? Il se met à l’unisson de pratiques extrêmes comme déposer une motion de censure par principe. Aurait-il été inconcevable que le social-démocrate et député Hollande pèse ses mots et ses actes avant de s’engouffrer dans la caricature d’un affrontement parlementaire ? Au-delà du Parti socialiste, convient-il même de faire un sort à Marine Tondelier qui est inébranlable dans des positions qui plaisent à ses soutiens mais font douter de l’écologie qu’elle propose, des leçons de morale qu’elle assène et d’une vision républicaine qui préfère ses préjugés à la scandaleuse nouvelle que serait la réussite du camp adverse ? Certes, l’écologie dispose maintenant du vibrion François Ruffin qui est devenu courageux – mais discuté dans ses charges – à proportion de son éloignement d’avec Jean-Luc Mélenchon, qui ne lui fait même pas l’honneur d’une riposte. Il me semble qu’il y a en lui du feu follet et que parfois on peut se dire que le cinéaste talentueux fait de l’ombre au député fluctuant ! Dans le collectif de LFI, hier, il était bridé et trop taiseux. Aujourd’hui, est-il suffisant à lui seul pour enthousiasmer et convaincre au-delà de son cercle d’amis ?

Attal égaré ?

Du côté du macronisme, Gabriel Attal devrait se souvenir qu’il a été un grand ministre – trop bref – de l’Éducation nationale et qu’il a acquis une densité, peut-être une profondeur, à la suite de son affrontement avec le président de la République. Il préside le groupe parlementaire EPR et aspire à prendre la tête du parti. On ne le laissera pas faire à sa guise. Je crains que saisi par des ambitions multiples, il se perde dans des jeux partisans et oublie les promesses de l’homme d’État au profit du trublion impérieux qu’il paraît vouloir être maintenant. Ses dernières exigences adressées au Premier ministre – PMA, LGBT, IVG – me semblent plus relever d’obsessions ciblées que du souci de défendre ce qu’il y aurait de prétendument menacé dans les orientations du nouveau gouvernement. Le partisan va l’altérer quand le gouvernemental le sublimait.

Le Premier ministre Michel Barnier au journal télévisé de France 2, dimanche 23 septembre 2024 © Jacques Witt/SIPA

Au regard de la tonalité des propos, des comportements et des critiques de ses adversaires, Michel Barnier doit-il se couvrir de cendres parce qu’il aurait contre lui et certains de ses ministres le pire de la politique ? Bien sûr que non. Dans aucun discours, dans aucune argumentation, je n’ai entendu une once de politesse républicaine, de sagesse démocratique. Pour la France, quoi qu’on pense de ce gouvernement, il faut souhaiter qu’il réussisse autant qu’on le peut dans ce monde dangereux, imprévisible et parfois illisible. Le président de la République a exprimé ce vœu en désirant qu’il soit partagé. Comme il croit pouvoir être le remède après avoir engendré le mal, je doute qu’il soit écouté. Mais est-ce trop demander à tous que de ne pas s’abandonner au pire de la politique ?

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Voici pourquoi la France devrait plutôt dire merci à Israël

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Il y a 22 ans déjà, des signes qui ne trompaient pas... Le 7 avril 2002, à Marseille, une manifestation contre l'antisémitisme et le terrorisme sous haute tension en raison d'une contre-manifestation (photo) © TSCHAEN/SIPA

Comment expliquer les distances que prennent nos dirigeants politiques avec Israël? Trop souvent, ils donnent l’impression de vouloir ménager une «rue arabe», comme s’ils avaient entériné l’idée d’un «grand remplacement» en cours. Alors qu’Israël est en guerre à une frontière civilisationnelle séparant peuples d’Occident et peuples opprimés par l’islamisme, estime notre chroniqueur.


La France couchée n’aime pas voir Israël debout. Le petit État hébreu, qui veut en découdre avec son puissant ennemi islamiste, laisse voir en contraste ce qu’est devenue l’ancienne puissance européenne: une nation flageolante qui, à travers des élites émasculées et fascinées par l’adversaire, a renoncé à se faire respecter et à combattre. Boualem Sansal, écrivain algérien, met le couteau dans la plaie quand il explique (Le Figaro Magazine, 20 septembre) : « La France est un pays à la ramasse qui vit sur des gloires passées ». Cela fait cinquante ans que les gouvernements successifs reculent, et l’Union européenne avec eux, devant les constantes exigences des 57 États membres de l’organisation de la Coopération islamique (OCI). Ceux-ci n’ont de cesse depuis le premier choc pétrolier (1973), sous couvert de chantages pétroliers et sécuritaires, de réclamer et d’obtenir des protections et des promotions culturelles au profit de leurs populations immigrées. L’historienne Bat Ye’or a abondamment documenté ces abandons.

Le pessimisme de Boualem Sansal

Ce renoncement de la France à imposer ses valeurs a rendu marginale l’assimilation maghrébine et a fait du séparatisme la règle. Quand Sansal assure, mardi matin sur CNews (L’heure des pros) : « Dans 50 ans, l’islamisation aura, à ce point, gagné qu’elle pèsera sur les fondamentaux français. Il faudra repenser la république, le droit, etc. », il illustre ce que pourrait être le grand remplacement, conjonction d’une immigration musulmane massive et d’un effacement honteux du pays conquis. Ce destin est-il inexorable ? Si le somnambulisme d’État reste la règle, Sansal aura raison.

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Les distances que prend Emmanuel Macron avec Israël, qui vient d’engager une riposte d’envergure contre le Hezbollah au Liban après avoir brisé les reins du Hamas à Gaza, illustrent une fois de plus la peur qui paralyse la France face à l’islam conquérant, téléguidé par l’apocalyptique théocratie iranienne. Même l’élimination par Tsahal, le 21 septembre au Liban, d’Ibrahim Aqiil, responsable de l’attentat de 1983 contre le Drakkar à Beyrouth (58 parachutistes français tués) n’a pas été saluée par le chef de l’État. « La réplique israélienne est insupportable », a dit Laurent Fabius, président du Conseil constitutionnel, mercredi matin sur RTL en commentant la réponse au pogrom du 7 octobre. Alors qu’une communauté de destin lie Israël à la France, deux vieilles nations confrontées au même ennemi fanatisé, les dirigeants se déshonorent à vouloir rendre les armes devant cet islam dont Sansal rappelle qu’il est « un système profondément totalitaire ». Le gouvernement a même renoncé à créer un ministère de la Laïcité, de peur d’être accusé d’islamophobie par la gauche soumise. Celle-ci manifeste en revanche avec ceux qui appellent à « l’intifada dans Paris ».

Israël, une frontière civilisationnelle

Ces traitrises « humanistes » sont méprisables. D’autant que le courage qui habite le peuple israélien, pour l’instant solidaire de Benyamin Netanyahu dans sa guerre contre le « nazislamisme », porte en lui la possible libération des peuples opprimés par les obscurantistes.
C’est le Hezbollah qui a défiguré le Liban jadis idyllique. C’est l’Iran des ayatollahs qui oppresse ses citoyens, dont une partie applaudit Tsahal dans les humiliations qu’elle porte au régime dictatorial qui redoute de répliquer.
Dans ses guerres, Israël se bat aussi pour la France et les démocraties occidentales angéliques. C’est pourquoi elles devraient oser lui dire merci.

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Quelques réflexions sur la guerre du Liban

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Nations Unis, hier © John Angelillo/UPI/Shutterstock/SIPA

Les critiques fusent contre Israël, accusé d’avoir déclenché la guerre au Liban. Mais, ce n’est pas Israël qui a déclenché cette guerre ! L’État hébreu réagit avec près d’un an de délai à une guerre que le Hezbollah a lancée contre lui le 8 octobre 2023.


Ce jour-là, au lendemain des massacres perpétrés par le Hamas, le Hezbollah  lance des roquettes et des missiles sur Israël. Depuis lors, il en a envoyé près de 10 000 – une trentaine en moyenne chaque jour. La plupart ont été interceptés, ce qui fait que certains les assimilent à d’inoffensifs pétards. C’est faux : ils sont destinés à tuer, et  ils ont  tué. Beaucoup ont déjà oublié Majdal Shams[1], ce village druse israélien dont 12 enfants âgés de 10 à 18 ans ont été tués le 27 juillet 2024. Et ils ne sont pas les seules victimes israéliennes.

Le Hezbollah n’a pas de circonstances atténuantes

Imagine-t-on qu’un pays voisin, disons la Belgique, envoie des missiles sur la France, que les populations du Nord, du Pas-de-Calais, des Ardennes et de la Meuse soient obligées de s’enfuir, que ces départements deviennent inhabités et que la France ne réplique pas ? C’est ce qui se passe depuis près d’un an avec les habitants du Nord de la Galilée. 80 000 citoyens israéliens ont abandonné leur lieu de vie. Pour rappel, ces territoires sont à l’intérieur de la ligne internationalement acceptée de 1949, et, contrairement aux Palestiniens, le Hezbollah ne peut arguer de la moindre brimade historique et de la moindre revendication territoriale ; cela ne l’empêche pas d’avoir un seul but: la destruction d’Israël. 

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Ceux qui prétendent qu’un cessez-le-feu est nécessaire et qu’une solution diplomatique est possible  veulent oublier qu’en 2008 la résolution 1701 a été votée par le Conseil de Sécurité. Elle enjoignait au Hezbollah de se retirer au nord du Litani, à 30 km de la frontière. Elle n’a jamais été respectée, le Hezbollah envoie des missiles quand il le veut et la force de l’ONU, la FINUL, joue au sud du Litani un rôle particulièrement inutile.

L’objectif du Hezbollah était de saigner Israël par une guerre d’attrition et de rendre inhabitable le nord du pays. Mais  il semble qu’il ait voulu aussi réitérer les exploits du Hamas et effectuer également massacres et prises d’otages. Il faudrait peut-être que les Israéliens s’excusent d’avoir empêché l’exécution de ce plan…

Cibles et dégâts collatéraux

On critique Israël à cause du nombre de morts civiles lors des bombardements mais tous les bombardements, aussi ciblés soient-ils, font des victimes civiles et quelle que soit la réalité des distinctions entre civils et militaires, quelles que soient les précautions des Israéliens, des civils paient effectivement un lourd tribut. La guerre, c’est terrible. 30000 civils normands peut-être ont été tués dans les bombardements alliés qui ont précédé le Débarquement. 

La situation est d’autant plus tragique que, comme le Hamas, le Hezbollah cache une partie de son arsenal chez des civils. L’alternative au bombardement – l’envoi de troupes terrestres – soulèverait les mêmes protestations. Lesquelles ont malheureusement aussi  un aspect partisan : l’opération sur les bipeurs et  talkies-walkies a entrainé aussi des accusations contre Israël. Pourtant, les victimes civiles collatérales ont été rares, et il n’y a probablement pas eu dans l’histoire de la guerre d’opération plus précise, puisque celui qui était ciblé portait le bipeur qui prouvait son appartenance au Hezbollah.

A lire aussi, Hervé Ghannad: Attentat du Drakkar: l’oubli honteux…

Certains disent que cette guerre est la guerre de Benjamin Netanyahu, et qu’il la mène pour des motifs personnels.L’engagement au Liban était réclamé par une grande part de la hiérarchie militaire, et on reprochait plutôt au Premier Ministre ses atermoiements à ce sujet. Répéter qu’il mène cette guerre pour de sombres raisons personnelles, c’est affaiblir  la légitimité d’Israël qui lutte pour son existence. Cela n’a rien à voir avec le fait d’être ou non un partisan de Benjamin Netanyahu ; une commission d’enquête est une obligation historique et morale, mais après la guerre, et cette commission devra être impartiale.

Macron: «Il ne peut pas et il ne doit pas y avoir de guerre au Liban»

Je ne suis pas un critique systématique du président Macron, mais je suis abasourdi. Alors que la France vient de soutenir un des textes les plus antiisraéliens de l’histoire de l’ONU, alors que les bombardements n’ont pas encore commencé et qu’on est sous le choc de l’épisode des bipeurs, qui a essentiellement frappé le Hezbollah et pas le peuple libanais dans son ensemble, voici cette déclaration dont la solennité frise à la posture théâtrale. 

Le Liban dont parle le président, un modèle du vivre ensemble dont la France serait le protecteur, ce Liban n’existe plus et  Israël n’est pas  responsable de sa disparition. Les  conflits intercommunautaires, les calculs personnels des chefs et la détermination de l’Iran ont abouti à ce qu’est le Liban aujourd’hui, un pays failli, sous la mainmise de la mafia terroriste du Hezbollah, que le président Macron n’a même pas cité dans son discours. A-t-il eu une pensée pour ces 58 parachutistes français qui en 1983 ont péri dans l’explosion de l’immeuble du Drakkar fomentée par le Hezbollah? Savait-il que Ibrahim Aqil, le chef militaire qu’Israël venait d’éliminer, avait été un des organisateurs de cet attentat ? S’est-il demandé quelles options s’offraient à Israël, devant un ennemi qui veut sa disparition et a commencé une guerre où il prend le Liban en otage ? Il y a quatre ans, le président Macron avait de façon spectaculaire et inefficace assuré le Liban du soutien de la France après l’explosion du port de Beyrouth. Le Liban n’a pas osé incriminer le Hezbollah, responsable de cette explosion et la France n’a pas osé s’exprimer sur ce déni de justice évident. La France s’active aujourd’hui pour un cessez-le-feu transitoire en indiquant que le Liban ne se relèverait pas d’une guerre. Le Liban, chacun le sait, mais personne ne veut le dire, ne redeviendra un vrai pays que si le Hezbollah est démantelé, mais il est plus populaire aux Nations Unies de  bloquer contre Israël le balancier du en même temps et de prononcer solennellement des appels à la paix dont le Hezbollah fait semblant d’être le plus fervent partisan…


[1] https://www.causeur.fr/israel-liban-qui-sont-ces-enfants-massacres-a-majdal-shams-288801

Attentat du Drakkar: l’oubli honteux…

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Le matin du 23 octobre 1983 deux camions piégés ont percuté le "Drakkar" hébergeant les parachutistes français de la force multinationale de sécurité de l'ONU, deux minutes après l'attentat touchant un contingent américain base à l'aéroport de Beyrouth. 58 parachutistes français ont été tués et 15 blessés dans l'action revendiquée par le Hezbollah. Beyrouth, Liban, 23/10/1983 © MORVAN/SIPA

En 1983, le Hezbollah tuait 58 militaires français à Beyrouth. Pourtant, l’élimination ciblée, par Tsahal, des responsables de cet attentat, n’a pas été saluée par le président Macron


Hélas…
Pas une ligne…
Pas un mot…

Rappelez-vous ! C’était en 1983, au Liban, ce cher Liban, pays du Cèdre qui sent le sapin !

Le Hezbollah frappait la France en tuant 58 militaires venus stabiliser la région. L’auteur, un certain Fouad Chokr, terroriste de renom, de sale renom si je puis m’exprimer ainsi, fait partie de la bande de personnes tuées le 20 septembre 2024, une frappe ciblée durant laquelle 16 hauts dirigeants de l’unité d’élite Force Redwan ont été décimés, ceux-là mêmes qui préparaient un deuxième 7-Octobre.

Naïvement, avec mon petit cerveau de fils d’immigré, je pensais que la France allait se réjouir de la frappe israélienne, voire manifester sa joie en l’honneur de nos militaires disparus. J’espérais une déclaration de soutien envers Israël, à la limite d’un petit remerciement, même du bout des lèvres.

Hélas !
Pas une ligne
Pas un mot !

Même pas un signe, une main tendue, un sourire, un clignement d’œil, un battement de cils !

Rien !
Nada !
Presque comme du mépris !

Ce silence honteux s’apparente au fond à un oubli qui renvoie la mort de ces soldats innocents aux oubliettes de l’histoire, comme un évènement tragique que l’on veut voir disparaître, comme une honte, une mauvaise maladie, une MST chopée durant une nuit de débauche avec des personnes peu fréquentables, le tout dans la quête de la France à vouloir conserver son influence au pays du Levant !

Influence et bonne image, voici les deux mamelles du rêve français en Orient!

Erreur fatale !

Les Accords Sykes-Picot qui en 1916 partagent les restes arabes de l’Empire ottoman, entre la France et l’Empire britannique, permettent de récupérer la Syrie et le Liban. Soit ! Mais tout cela, c’est du passé, comme la perte d’influence française en Afrique !

J’ai envie de paraphraser Serge Lama dans sa chanson « Souvenirs, attention Dangers! » Souvenirs et dangers, car l’image de la France semble figée dans un passé glorieux alors que le chaos géopolitique est désormais présent, avec un Iran fort, possédant la volonté non seulement de détruire l’État hébreu mais aussi et surtout de reconstituer un empire d’influence, grâce au religieux – l’arc chiite – ou bien le régalien, d’État à État comme au Liban ou au Venezuela.

Le chemin de Damas passe donc par Téhéran, au grand dam des Occidentaux qui se cachent les yeux, mais qui accusent Israël de « trop de se défendre » ! A ce propos, je pose une question de Candide : « Mais quelle serait la réaction de la France si ce pays recevait, chaque jour, des dizaines de roquettes sur la tête ?! » La cécité française ne mène pas vers la Lumière mais vers le déshonneur, le noir de l’humiliation pendant que des otages français croupissent dans des tunnels sordides, sans eau, sans électricité, avec une absence totale d’hygiène.

Au fond, des otages tentent de survivre tandis que la France tente de s’accrocher à son souvenir d’une France dominante. Ce rêve honteux et cette fuite en avant vont se payer cher… très cher ! Souvenirs d’Octobre… Attention… Dangers terroristes !

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Festival d’Automne: l’hiver de la création

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© Anne Van Aerschot

Le Festival d’Automne, naguère si brillant, est devenu la vitrine de la supercherie contemporaine. La création de Il Cimento dell’Armonia e dell’Inventione, signée par Anne Teresa De Keersmaeker et Radouan Mriziga, est aussi affligeante que le public venu l’applaudir.


Là, on a vraiment touché le fond. Et même plus bas encore. Signée par Anne Teresa De Keersmaeker et Radouan Mriziga, Il Cimento dell’Armonia e dell’Inventione est une production « chorégraphique » si misérable qu’on ne saurait la qualifier sans mots assassins.

Que cette chose ait été programmée à la fois par le Théâtre de la Ville et le Festival d’Automne rend l’événement encore plus accablant.

Pour mesurer l’inanité de cette composition, tout comme celle de son exécution, il faudrait imaginer s’être rendu à un concert et n’y découvrir que des musiciens débutants ; être allé au théâtre et y entendre ânonner un texte infantile lu par des illettrés ; ou avoir ouvert un livre écrit par un analphabète. Durant ce sidérant pensum de 90 minutes, il n’y a réellement pas un geste, pas un seul, qui donnerait le sentiment d’avoir été posé là autrement que par des amateurs sans imagination aucune. Comme persillée au cours de longues plages de silence, seule est séduisante l’interprétation très fragmentée des Quatre Saisons de Vivaldi qu’en donne l’ensemble Gli Incogniti. 

Quel géniteur pour cet insondable néant ?

Certes, la redoutable De Keersmaeker, si abusivement encensée, a pu maintes fois afficher des spectacles indigents à côté d’autres pourtant remarquables. Certes, elle manie généralement un vocabulaire limité, répétitif et prévisible. Mais on peine à croire tout de même qu’elle ait pu être véritablement l’auteur d’un travail à ce point infantile. Alors on en vient évidemment à soupçonner, sans du tout pouvoir l’affirmer, que le coupable est ce Radouane Mriziga jusque-là inconnu au bataillon, mais s’annonçant avec superbe comme un « chorégraphe et danseur bruxellois originaire de Marrakech qui aborde la danse par le prisme de l’architecture et brosse le portrait de l’être humain comme un exercice d’équilibre entre l’intellect, le corps et l’esprit ». Un Mriziga qui fut élève de l’école fondée par De Keersmaeker dans la capitale belge, et à qui l’impérieuse Flamande aurait cédé le pas sous le coup d’une bouffée d’humilité proprement miraculeuse.

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Pourtant, on a du mal à imaginer que cette femme à qui la rumeur prête depuis toujours un caractère irascible et dont l’attitude au travail a fait le sujet d’une plainte collective pour « violence psychologique, harcèlement, comportement autoritaire et imprévisible » de la part d’une vingtaine de personnes, on a du mal à imaginer qu’elle ait pu si aimablement céder la place à un Marocain quasiment débutant, quoi qu’en disent les propos ronflants qu’il affiche à son sujet. À moins qu’elle n’ait éventuellement songé à se racheter une conduite. Ou qu’elle ne soit sous l’emprise de cette complaisance qu’affecte depuis longtemps le politiquement correct en faveur des artistes « issus de l’immigration », quel que soit leur talent. Ou leur absence de talent.

La danseuse et chorégraphe belge flamande Anne Teresa De Keersmaeker © Yonhap News/NEWSCOM/SIPA

Pour servir Il Cimento…, quatre individus : deux blocs massifs aux noms balkaniques et deux hommes plus frêles qui exécutent médiocrement les choses les plus insignifiantes, mais dont on devine toutefois, à la faveur d’attitudes furtives, qu’ils pourraient offrir tout autre chose que ce à quoi on les a l’un et l’autre abandonnés. 

Inflation verbale

Ce qui est plus grave, infiniment plus grave dans cette regrettable aventure, comme dans bien d’autres d’ailleurs, c’est que deux institutions aussi considérables que le Festival d’Automne et le Théâtre de la Ville cautionnent, en la programmant, une telle production.

Jadis conçu par Michel Guy, puis porté par Alain Crombecque, le Festival d’Automne, dans son époque la plus brillante, s’était tout d’abord donné pour tâche de faire connaître en France l’élite de l’avant-garde américaine, avant de servir celle de la création française et européenne. Le Théâtre de la Ville, lui, pour avoir affiché les plus grands noms de la danse contemporaine de la seconde moitié du XXe siècle, qui étaient souvent les mêmes que ceux du Festival d’Automne, s’est hissé en son temps au rang des scènes européennes les plus novatrices.

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Lourds de leur réputation d’excellence, aujourd’hui quelque peu usurpée, ils font croire implicitement à un public qui déjà n’a plus connu les géants de naguère et n’a plus guère de références artistiques, que ce qu’ils programment est du même niveau que ce qui fit leur réputation dans le passé. Ils trompent de ce fait tout un public de consommateurs paraissant dépourvus de culture artistique, de repères solides, et, plus fâcheux encore, qui semblent dénués de libre arbitre, de tout jugement personnel. Les superlatifs employés dans les programmes qui présentent les ouvrages, cette inflation verbale souvent reprise dans la presse qui a abdiqué son travail critique ou n’ose plus rendre compte des réalités décevantes de la scène contemporaine, tout contribue à égarer des gens à qui on annonce ou laisse penser que ce qu’ils découvrent est exceptionnel. Exceptionnel, évidemment, puisque affiché dans un théâtre et par un festival de grande renommée.

Immense chorégraphe !!!!

En province, où cette calamiteuse production se donnera dans la foulée, on ne fait pas plus sobre. Dans telle ville du Sud-ouest, le programme qui annonce Il Cimento… ose en toute impudeur voir en De Keersmaeker une « immense chorégraphe », faute sans doute de trouver un adjectif encore plus monumental. Beau bourrage de crâne initié naguère par les nationalistes flamands en pleine expansion, trop heureux de pouvoir exhiber un produit de leur terroir qui n’en avait alors guère à offrir dans les années 1980.

Et pour quel résultat ? Un produit de consommation aussi désolant qu’Il Cimento… a été acclamé chaque soir au Théâtre de la Ville par toute une fraction du public paraissant décidée à aimer à tout prix ce qu’on lui a désigné. Une fraction, mais la plus bruyante, la plus expansive, qui s’extasie béatement devant des riens et qui se lève ostensiblement à la fin des opérations avec un enthousiasme exhibitionniste pour manifester son adhésion inconditionnelle, sans soupçonner le moins du monde combien elle est ridicule et naïve.

Si cette même adhésion aveugle, irréfléchie, en venait à s’appliquer au premier tribun populiste venu, on voit vite vers quoi on risquerait de sombrer.

1h30. Théâtre de la Ville – Sarah Bernhardt


Festival d’Automne, du 8 septembre 2024 au 26 janvier 2025. https://www.festival-automne.com/fr

Cau & Co

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Jean Cau © Louis Monier/Bridgeman Images

Deux jeunes gens, Ludovic Marino et Louis Michaud, dans une manière très originale de biographie-essai, Jean Cau, l’indocile, préfacé par Franz-Olivier Giesbert, lèvent enfin la sentence d’oubli qui frappait Jean Cau (1925-1993), cette figure majeure de résistance au conformisme.


Leur intention n’était pas de réhabiliter un Jean Cau « de droite », mais plutôt de signaler à leurs contemporains qu’ils ont à leur disposition l’œuvre d’un homme qui choisit un beau jour de « réaliser l’actif » de son expérience, soit la somme de ses connaissances, augmentées de ses contradictions intimes : enfance pauvre et provinciale, perspective d’avenir courte, intelligence vive, ambition vaste et balzacienne, entrée réussie dans la vie parisienne sous le haut patronage de Sartre, agacement « de classe » au spectacle de la mondanité « de gauche », fin de l’apprentissage, volte-face politique, ironie mordante du transfuge, lucidité impitoyable.

Il quitta Sartre, dont il fut le secrétaire, sans jamais le renier, et dressa la table pour un festin de polémiste.

Trahison à Saint-Germain-des-Prés

Le retournement de situation comportait des risques. Après sa métamorphose, Jean Cau incarna le reniement, la part d’ombre ; il devint le traître à Saint-Germain-des-Prés, à la gauche installée, aux pétitionnaires de terrasse, au camp du bien, du beau, du vrai.

Qui donc était cet antimoderne éclairé, certifié fasciste par les crétins d’hier, autour desquels s’agglutineront volontiers ceux d’aujourd’hui ? Si l’écrivain se confronta durement à la gauche, ce fut essentiellement par réaction épidermique et raisonnée à l’empire absolu qu’elle exerçait sur l’ensemble des intellectuels. Le moindre désaccord avec la ligne officielle, communiste puis socialiste, entraînait sur-le-champ le déshonneur, le diagnostic accablant et l’accusation publique réitérée : complaisance avec les heures les plus sombres, fascistoïdite en phase aiguë, calomnies et nazi-soit-il ! Les choses sont-elles si différentes de nos jours ?

« Ces tartuffes de l’information toujours se drapent d’une toge morale pour sermonner la terre entière[1]. »

Dans les arènes de Lutèce, il n’affrontait pas les taureaux de Victorino Martín[2], mais les vaches sacrées d’une partie de la classe dominante française, dont leur quotidien préféré Le Monde. Avec Lettres ouvertes à tout Le Monde, l’attaque fut frontale, rude : « Qui êtes-vous, gens du Monde ? Mais voyons, d’incurables bourgeois du xixe ! Vos traits le disent, votre voix, votre ton, vos noms, vos haleines tièdes encore de la vieille charité que vous insufflèrent vos familles. Et cette narine si experte à flairer le péché et le diable, comme je reconnais ses frémissements avides lorsque vous la promenez sur le monde comme il va pour y flairer, ici ou là, l’odeur de soufre de la droite, de la réaction, de l’ordre, de tout ce qui ne répand pas, en somme, les édéniques parfums de la gauche selon votre vaillante troupe de fanatiques boy-scouts oublieux des strophes de “Maréchal, nous voilà !” et la gorge pleine de cantiques écrits par quelque Neruda ou abbé Aragon. »

C’était hier, mais aujourd’hui ?

Maréchal, te voilà !

Sonia Devillers, à France Inter, a provoqué l’hilarité générale des Français en accusant Marion Maréchal de vouloir réhabiliter l’idéologie d’un funeste… maréchal (l’homonymie lui avait soufflé cet audacieux parallèle). Mme Maréchal eut la réplique cinglante, qui mit les rieurs (du plus large éventail électoral) de son côté et désorienta l’infortunée boussole du peuple (de gauche ?). Au reste, Mme Devillers est-elle de gauche ? En tout cas, elle fut maladroite.

Jean Cau est désormais à la disposition de tous ceux qui refusent les récentes (les futures) tyrannies : frondeurs aimables, insoumis vrais, factieux plaisants, bref la joyeuse cohorte des empêcheurs de woker en rond.

Ils suivront ses aventures, car il avait le pessimisme batailleur : la plume-banderille à la main, dos à la palissade, il affrontait la forme hostile toujours recommencée du conformisme. Il contra l’opinion majoritaire, impatiente d’embrocher l’outrecuidant toréador qui la tourmentait et se dérobait toujours à ses assauts.

De qui se woke-t-on ?

Peut-on imaginer ses commentaires, après le spectacle « son et lumière » qui a lancé la quinzaine olympique, son sourire d’ironie devant ce défilé d’images (souvent belles, d’ailleurs), devant ce « woke in progress », conçu par un talentueux metteur en scène, assisté d’un historien officiel d’État (ou municipal) ? Libre à eux de vomir l’Église, mais pourquoi nier l’intention anticatholique dans la représentation caricaturale de la Cène, l’étalage de chairs capricieuses, encombrantes, en lieu et place du Christ et de ses disciples à la table de leur dernier repas ? Voulurent-ils chanter les louanges de la République en montrant une reine qui paraissait consentir à son martyre par l’offrande enjouée de sa décapitation ?

Daphné Bürki, chargée des costumes, déclara que la chanson de John Lennon, Imagine, était « antimilitariste, anticapitaliste, engagée ». Bernard Arnault, patron de LVMH, l’un des principaux financiers de la fête, Coca-Cola, les militaires, les policiers mobilisés jour et nuit ont beaucoup ri de cette « rebelle attitude »…

Déclin du christianisme ? Perte des repères ? Panurgisme ? Jean Cau annonçait tout cela dans L’Agonie de la vieille (La Table ronde, 1970) : « Le judéo-christianisme est à bout de souffle et de course qui, depuis 2 000 ans, a fondé l’ordre, n’importe lequel et fût-ce sous d’étranges avatars. (Le messianisme marxiste fut l’un d’eux.) Mais cette annonce est si grave que nul n’ose la formuler catégoriquement. »

Faut-il préciser que la vieille femme agonisante, veillée par Jean Cau, c’était notre démocratie ?

Ludovic Marino et Louis Michaud, Jean Cau, l’indocile, Gallimard, 2024.

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[1] Jean Cau, Lettres ouvertes à tout Le Monde, Albin Michel, 1976.

[2] Éleveur fameux de taureaux de combat établi à Gerena, dans la province de Séville. Jean Cau fut un aficionado passionné.

Comment briller dans vos dîners en ville en parlant des nouveaux ministres

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De gauche à droite, Alexandre Portier, Nicole Belloubet (de dos) et Anne Genetet, ministère de l'Éducation nationale, Paris, 23 septembre 2024 © J.E.E/SIPA

Une fois après avoir dit comme tout le monde que ce nouveau gouvernement, c’était beaucoup de bruit pour rien, vous marquerez des points en ayant un commentaire politique précis pour chaque membre du nouveau casting de MM. Barnier et Macron… Les fiches de Céline Pina qui suivent vous permettront de faire forte impression.


Le gouvernement le plus à droite depuis les gouvernements Fillon ! Voilà comment une partie de la presse présente l’équipe de Michel Barnier. Le plus drôle c’est qu’il n’y a aucune réalité concrète derrière cet affichage outrancier visant à induire l’idée que la réaction est au pouvoir. D’abord parce que les personnalités en question sont loin d’être des boutefeux et des extrémistes, ensuite parce que les réalités mathématiques sont têtues : ce gouvernement n’a pas de majorité et sa longévité est tributaire du bon vouloir de son opposition, ce qui rend d’emblée caduque l’espoir de rivaliser avec Mathusalem.

Technique et politique

La liste des ministres du gouvernement Barnier contient très peu de noms connus des Français, y compris parmi ceux qui sont en haut de la liste protocolaire. Cela dit tout du déclin de la politique et de la fonction ministérielle. Avant, devenir ministre était soit un bâton de maréchal, soit la reconnaissance d’un parcours politique intéressant, d’une capacité à faire partager une vision, une ambition ou tout du moins une réforme. Aujourd’hui cela devient un premier poste, une sorte de phase de test ; on assiste à la prise de pouvoir de l’équipe réserve. D’où la domination des profils techniques : les noms d’école prestigieux mis en avant remplacent l’expérience et la connaissance des hommes. Ils permettent d’afficher une compétence sans jamais se poser la question de savoir si elle est utile et adaptée au rôle. Or Emmanuel Macron a montré à quel point les gouvernements techniciens ne sont pas meilleurs que les autres, voire accentuent le déclin faute de gouvernail avant tout mais aussi de finesse dans la connaissance des réalités humaines et territoriales. La gestion, même en bon père de famille, si elle n’est pas à négliger, n’est ni un projet, ni un avenir. Voilà pourquoi elle relève de l’administration et non de la politique.

A ce triste constat en train de devenir structurel, s’ajoute un élément conjoncturel fort. Personne ne pense qu’Emmanuel Macron a encore un destin et trop de monde doute qu’il ait même encore un avenir. Pour autant, il est là. Tout sauf discret, tout sauf capable de retenue et de discernement dans la conduite. Il veut tellement être au centre du jeu que gouverner avec ce président-là, c’est être réduit à servir sa communication, c’est accepter la mission au nom de la France pour terminer dans des affrontements stériles avec un étourdi et sa côterie… D’autre part, la petite musique du président empêché de finir son mandat est dans toute les têtes et si cette attente ne se réalise pas, tout le monde a compris que lier son sort au sien, c’était se retrouver disqualifié lorsque les cartes seront rebattues. Il y a donc peu d’espoir que l’engagement aboutisse à quelque chose et beaucoup de chances qu’il nuise aux ambitions ultérieures. Cela, les politiques le savent.

Mission impossible, si vous l’acceptez : le budget

Cette équipe mélange donc personnalités aux profils de techniciens et grands élus locaux. Ceux qui n’ont rien à perdre à acquérir un peu de notoriété, et savent qu’on ne leur fera pas grief s’ils échouent là où personne ne s’attendait à ce qu’ils réussissent. Sa composition sur la forme est donc des plus classiques. On y retrouve la nécessité de nourrir chacun des courants de la coalition et on y affiche l’importance de l’ancrage territorial, mais il y a fort à parier que ce gouvernement ne devrait rien changer à la situation de blocage du pays tant on voit mal de quels leviers il dispose. L’absence des grands leaders le dit, ils sont déjà sur le coup d’après et misent sur l’échec. L’appel à la responsabilité politique ne devrait permettre que l’accouchement d’un budget technique. En la circonstance, ce ne sera déjà pas si mal. En attendant, petite revue de détail de nos nouveaux ministres.

• Didier Migaud (divers gauche), garde des Sceaux, ministre de la Justice. L’ancien membre du PS nommé président de la Cour des comptes par Nicolas Sarkozy était jusqu’alors, à la direction de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique. Il est premier dans l’ordre protocolaire et cela porte un message : il faut faire oublier que les vieilles gloires de la gauche, à l’époque où elle était républicaine, ont toutes refusé de monter sur le Radeau de la Méduse. Ces derniers ont dû probablement manquer le fait que les marins et passagers qui avaient choisi le banc de sable au lieu du radeau ont eu un sort tout aussi funeste… En attendant, la participation de M. Migaud au gouvernement est brandie comme un trophée ; l’homme s’est fait surtout connaitre comme un technicien très compétent, faisant passer son devoir avant l’idéologie et refusant le sectarisme. Il a une expérience politique réelle : maire de Seyssins (38), président de la métropole de Grenoble, rapporteur général du budget à l’Assemblée nationale, président de la commission des Finances… Il a été positionné symboliquement en premier en signe de respect, pour donner également des gages à la « gauche » de la macronie ; la position prestigieuse ayant pour but de faire oublier que le compte n’y est pas et que cette équipe est orientée à droite. Le problème c’est que le rassemblement autour d’Emmanuel Macron est plus un fan club qu’un parti : il n’a ni doctrine ni ligne de force. A tel point que pour exister ce collectif crée des dangers imaginaires, tout en enfonçant la tête dans le sable face aux dangers réels. Gabriel Attal fait ainsi comme si la droite menaçait les droits LGBT, ceux des femmes ou la PMA, alors même que c’est l’alliance de la gauche avec les islamistes qui leur fait courir le plus grand risque. Résoudre des problèmes qui n’existent pas permet de triompher aisément. Voilà pourquoi Gabriel Attal fait toute cette communication et s’attaque à des moulins à vent en les faisant passer pour une armée de réactionnaires. Être protecteur de ce qui n’est pas attaqué permet de brandir un bon bilan de défenseur de place forte et de se construire une image de chevalier blanc sans prendre le moindre coup. Le risque : ne pas échapper au ridicule…

En attendant, le duo Migaud / Retailleau rappelle le tandem Darmanin / Dupond-Moretti où, afin de rassurer le microcosme bobo, l’affichage de l’autorité incarnée par Darmanin était contredit par l’image progressiste et laxiste de l’ancien avocat de la défense. Le retour de cette forme de politique à la Gribouille montre à quel point le président et son entourage n’ont toujours rien compris aux attentes des Français. Sans compter que c’est faire revêtir à Didier Migaud un rôle dont il pourrait modifier les contours. Il en a les capacités.

• Catherine Vautrin (divers droite), ministre du Partenariat avec les territoires et de la Décentralisation. L’ex-ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités (de janvier à septembre), longtemps députée de la Marne, a rejoint Emmanuel Macron en 2022 mais vient à l’origine de la droite. Elle fut pressentie comme Premier ministre en remplacement de Jean Castex en 2022, mais son opposition à la loi « Mariage pour tous » lui a alors valu une bronca de l’aile gauche du parti macroniste. Elle est en deuxième position pour envoyer un message fort aux élus locaux et aux pouvoirs intermédiaires, ignorés ou instrumentalisés sans que cela ne débouche sur rien (rappelons-nous d’Emmanuel Macron se mettant en scène en majesté alors qu’il était censé écouter leur expertise après la crise des gilets jaunes).

• Bruno Retailleau (Les Républicains), ministre de l’Intérieur. Chef du groupe LR au Sénat, élu de Vendée. C’est un des rares, si ce n’est le seul, poids lourd du gouvernement. Il est positionné à un poste stratégique. Cet homme, encore peu connu, est un politique travailleur et courageux. Il a pris des positions très fermes sur l’islamisme. Il s’est opposé au Mariage pour Tous, ce qui a l’art de rendre fou les socialistes qui ont fait de cette réforme sociétale sans grand impact, une épopée épique et une référence majeure, sans se rendre compte qu’au fond elle était facilement rentrée dans les mœurs et que la combattre n’est une priorité pour personne. Il a également voté contre l’inscription de l’IVG dans la Constitution. Or ce vote ne signifie pas le rejet de l’IVG en soi. Un certain nombre de parlementaires ont refusé de se prêter à une mise en scène où le gouvernement prétendait sanctuariser un droit qui n’était pas attaqué en l’inscrivant dans une Constitution dont ce n’est pas l’objet puisque celle-ci est censée traiter de l’organisation des pouvoirs… M. Retailleau a pris des positions très claires sur l’immigration et est en phase avec les attentes des Français sur cette question comme sur le dossier préoccupant de l’islamisation. Ce sont surtout ces questions-là qui inquiètent en réalité une gauche très compromise avec les réseaux et une partie de l’idéologie islamiste dont elle reprend les éléments de langage. Mais comme il serait impopulaire de porter le fer sur ces questions-là, à moins d’être LFI et d’avoir totalement sombré dans l’islamogauchisme, l’aile gauche du parti macroniste préfère concentrer ses critiques sur des soupçons d’homophobie peu avérés.

• Anne Genetet (Renaissance), ministre de l’Education nationale. Elue des Français établis en Europe de l’Est, Asie et Océanie, ancienne vice-présidente du groupe Renaissance à l’Assemblée nationale. Surtout connue pour avoir travaillé sur les sujets de défense et de diplomatie, elle a obtenu le poste grâce à ses liens avec Gabriel Attal, lequel voulait montrer qu’il gardait un peu la main sur certains secteurs. Cela montre surtout qu’il est dégarni en ressources puisque dès la nomination de la ministre, les syndicats ont mis en avant une forme d’illégitimité liée à sa totale méconnaissance d’un secteur très compliqué. Chasser le mammouth ne s’improvise pas, l’apprivoiser non plus ! D’autant que la ministre ne fait pas preuve de retenue ni de discernement, s’en étant pris à Bruno Retailleau avec véhémence dans les médias alors que vendredi son nom tournait déjà comme probable ministre de l’Intérieur. Mais Madame Genetet ne fait que correspondre au nouveau profil politique-type, lequel ne s’affirme plus par ses actions et ses réalisations mais en faisant de son adversaire un repoussoir. Une posture qui promet, alors que l’Education nationale va de mal en pis, que le niveau ne cesse de chuter et que l’institution souffre de la démagogie persistante des syndicats dont les critiques se concentrent uniquement sur le manque de moyens, tandis que les parents d’élèves s’interrogent surtout sur l’absence d’exigence, de discipline et de résultats dans les établissements scolaires, et en ont marre de voir des enseignants recrutés à des niveaux de plus en plus bas.

• Jean-Noël Barrot (MoDem), ministre de l’Europe et des Affaires étrangères. Ancien ministre délégué chargé du Numérique (2022-2024), puis ministre délégué chargé de l’Europe (février-septembre). Le fils de Jacques Barrot est très peu connu du grand public. Il occupe une position délicate : la diplomatie est vue par Emmanuel Macron comme sa chasse gardée bien que cet art soit sans doute bien mieux maitrisé par son nouveau Premier ministre. Affaibli, le président n’en est que plus ingérable, et le secteur de la diplomatie risque de pâtir des tensions qui devraient rapidement se faire jour au sein de l’exécutif. Jean-Noël Barrot est inconnu du grand public et n’est crédité d’aucune réalisation marquante, mais il est jeune (41 ans) et pourrait surprendre.

• Rachida Dati (divers droite), ministre de la Culture et du Patrimoine. Tout récemment exclue des Républicains lorsqu’elle a choisi de rejoindre Emmanuel Macron (janvier), la ministre de la Culture retrouve tous ses petits camarades de droite qu’elle n’a jamais épargné. Ambiance. Mais, ceux-ci sont habitués à son caractère affirmé. Mme Dati garde le même ministère, gage d’efficacité dans les futures négociations budgétaires. Elle en aura besoin, les dossiers chauds ne manquent pas dans le secteur : crise du spectacle vivant, pluralisme politique dans l’audiovisuel public, difficultés à faire vivre la culture en zones rurales, polémique annoncée sur les vitraux de Notre-Dame…

• Sébastien Lecornu (Renaissance), ministre des Armées et des Anciens Combattants. Ministre des Armées depuis mai 2022. C’est un des rares ministres à avoir été maintenu. Comme Rachida Dati, il vient des LR et retrouve donc des visages connus dans le nouveau gouvernement. Accompagnant la hausse des crédits liés aux Armées, l’homme est apprécié des militaires. Le ministère est d’ailleurs très technique, l’aspect politique sur les questions militaires relevant du président. C’est donc un ministère plutôt tranquille, même si les tensions internationales s’exacerbent. Heureusement, la défense nationale n’est pas un sujet qui prête à polémiques politiciennes.

• Agnès Pannier-Runacher (Renaissance-Territoires de Progrès), ministre de la Transition écologique, de l’Energie, du Climat et de la Prévention des risques. Elle a été de tous les gouvernements depuis 2017. Sa nomination pourrait être l’occasion d’envoyer un message d’engagement à la filière nucléaire, son positionnement pro-nucléaire étant un des fils rouges de son engagement gouvernemental.

• Antoine Armand (Renaissance), ministre de l’Economie, des Finances et de l’Industrie. Député de Haute-Savoie et ancien président de la commission des Affaires économiques à l’Assemblée nationale. Comme tant de membres de l’entourage d’Emmanuel Macron, il a lui aussi un profil de technicien. L’homme est très jeune (33 ans), pèse peu et n’a pas d’histoire politique. La nomination de M. Armand marque une relative perte du poids politique de Bercy et de l’importance de son ministre, après le départ de Bruno Le Maire. Elle annonce une implication très forte du Premier ministre sur les questions budgétaires et économiques. Cette nomination peut être comprise comme une façon de dire en creux qu’il s’agit ici de mettre en place un budget de transition, en attendant que les choses sérieuses commencent. Certes, avec le niveau de notre dette, de notre balance commerciale et des coupes budgétaires à réaliser, la tergiversation n’est guère de mise, mais sans majorité il est difficile de faire des choix ambitieux. Un profil technique n’est donc pas un choix incohérent.

• Geneviève Darrieussecq (MoDem), ministre de la Santé et de l’Accès aux soins. Ancienne ministre déléguée chargée des Personnes handicapées (2022-2023), elle hérite d’un ministère en crise continue depuis des années. L’accès à un parcours de soins devient de plus en plus compliqué en secteur rural et périurbain. Inutile de dire que la fragilité de la « coalition » à laquelle appartient Mme Darrieussecq ne fait attendre guère d’avancées sur le secteur.

Une armée de petits profils techniques

• Paul Christophe (Horizons), ministre des Solidarités, de l’Autonomie et de l’Egalité entre les femmes et les hommes. Président de la commission des Affaires sociales, ce proche d’Edouard Philippe présente également un profil technique.

• Valérie Létard (UDI), ministre du Logement et de la Rénovation urbaine. Ancienne députée du Nord, ancienne vice-présidente du Sénat, secrétaire d’Etat sous la présidence de Nicolas Sarkozy. C’est une femme expérimentée, qui connait ses dossiers. Mais c’est la même chose que pour le poste précédent : son profil reste très technique.                                   

• Annie Genevard (Les Républicains), ministre de l’Agriculture, de la Souveraineté alimentaire et de la Forêt. La codirigeante par intérim du parti Les Républicains, ancienne prof de lettres classiques et députée du Doubs depuis 2012, décroche son premier ministère à 68 ans.

• Astrid Panosyan-Bouvet(Renaissance), ministre du Travail et de l’Emploi. Premier poste de ministre pour la députée de Paris qui se signale dans l’hémicycle par son travail sur le fond et son courage sur les sujets de laïcité, d’islamisme, d’égalité hommes/femmes.

• Gil Avérous (divers droite), ministre des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative. Ancien maire de Châteauroux (Indre), il a quitté LR en 2023

• Patrick Hetzel (Les Républicains), ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche. L’ex-directeur général de l’Enseignement supérieur de 60 ans, député du Bas-Rhin, a été conseiller éducation de François Fillon, à Matignon.

• Guillaume Kasbarian (Renaissance), ministre de la Fonction publique, de la Simplification et de la Transformation de l’action publique. Ancien ministre du Logement (février-septembre). Reconnu pour sa compétence sur son précédent secteur.

• François-Noël Buffet (Les Républicains), ministre auprès du Premier ministre, chargé des Outre-mer. Ancien sénateur du Rhône et président de la commission des Lois du Sénat.

• Laurent Saint-Martin (Renaissance), ministre auprès du Premier ministre, chargé du budget et des comptes publics. 

Philippine: martyre de l’impéritie judiciaire

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Emoi après la mort de Philippine, 19 ans, qui étudiait à Dauphine © Houpline Renard/SIPA - Capture TF1

«L’impunité des juges, jusqu’à quand?», s’agace la droite dure, après la mort de Philippine, jeune femme retrouvée dans le Bois de Boulogne. Son meurtrier présumé, un immigré marocain, avait déjà été condamné, n’avait pas effectué toute sa peine de prison, et demeurait sur le territoire français. Sur le dossier des OQTF, après cet énième et terrible fait divers, Bruno Retailleau et Didier Migaud sont attendus au tournant. «C’est à nous, responsables publics, de refuser la fatalité et de faire évoluer notre arsenal juridique, pour protéger les Français. S’il faut changer les règles, changeons-les», a déclaré le premier.


Combien faudra-t-il encore de Philippine, de martyres de la barbarie locale ou d’importation pour qu’on en vienne enfin à légiférer sur la responsabilité de l’institution judiciaire en général et de certains juges en particulier, notamment dans ces cas gravissimes de récidive ?

Scandale à tiroirs

Philippine était jeune, belle, brillante, pleine de vie, sociable, bienveillante. De surcroît blanche et catholique. La proie idéale pour ces monstres, probablement. En vérité, l’écœurement est à son comble, tant le scénario d’épouvante est connu, qui se reproduit ad nauseam.
L’auteur présumé de la monstruosité : un migrant clandestin marocain âgé de 22 ans. Palmarès, un viol peu après son arrivée sur le sol français en 2019. Une étudiante de 19 ans – déjà!- agressée sur un chemin de la forêt de Taverny. Jugement, verdict : sept ans de prison. Sept ans seulement, dirais-je, pour la vie gâchée de cette jeune personne. Voilà bien un premier scandale.
Scandale à tiroirs, puisque le type n’effectue qu’une partie de sa peine. Donc, il sort. Pour de nouvelles balades en forêt ? Allons savoir.
Le 18 juin dernier, cinq ans après les faits – oui, cinq ans – une Obligation de Quitter le Territoire Français (l’une de ces OQTF, arlésiennes procédurales qui pourraient faire rire si l’affaire n’était si grave) est prononcée à son encontre. Dans l’attente de son expulsion, il est placé en Centre de Rétention Administrative (CRA).
Autre élément de scandale, un juge des libertés et de la détention prend la généreuse décision de le libérer. Sans doute considérait-il que la privation de possibles promenades bucoliques était une sanction trop sévère et surtout trop injuste pour ce garçon.

En n’attendant pas Baudot

On voit bien, hélas, le fonds idéologique qui préside à ce genre de décision: le migrant violeur est lui aussi victime, victime de la misère sexuelle dans laquelle le relègue cette horrible société d’oppression blanche et bourgeoise, raciste et post-esclavagiste, qui se fait honteusement tirer l’oreille pour l’accueillir avec tambour et trompette, voire tapis rouge. La doxa idéologique est là : le coupable n’est coupable que parce qu’il est d’abord victime. Cette doctrine effarante était clairement exprimée dans ce qu’on appelle la Harangue de Baudot, écrite en 1974, adressée à une centaine de magistrats frais émoulus de l’école de la magistrature de Bordeaux. « Soyez partiaux, prescrit ce texte de référence. Examinez toujours où sont le fort et le faible, qui ne se confondent pas nécessairement avec le délinquant et sa victime (…) Ayez un préjugé favorable pour la femme contre le mari, pour l’enfant contre le père, pour le débiteur contre le créancier, pour l’ouvrier contre le patron, pour le voleur contre la police »… De là à compléter la litanie en y ajoutant « du violeur contre la martyre », il n’y a sans doute, pour certains magistrats, qu’un pas ou deux à franchir.
Libre à eux, sans doute. Mais libre à la société d’exiger qu’ils aient à rendre des comptes. À l’image de tout citoyen de ce pays. Rendre des comptes, comme tout un chacun, dans les mêmes conditions d’égalité et d’impartialité. Droits de la défense compris, cela va de soi, puisque cela fait partie intégrante de nos principes de saine et honnête justice. Principes qui nous honorent, soit dit en passant.

Mon clocher, ma bataille

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L'Eglise et le monument aux morts de Plancher-Bas, commune de Haute-Saône. DR.

Dans un beau livre illustré, l’historien Jean-Pierre Rioux nous raconte comment la défense de nos clochers est devenue, au fil du XXᵉ siècle, un enjeu majeur de la politique patrimoniale française. Vive nos clochers – Avec Barrès, Hugo, Proust et les autres (Editions Bleu Autour, 2024)


Il était là. Au milieu de la paroisse, du village, de la cité, tellement visible, tellement surplombant, tellement sonnant que plus personne ne faisait attention à sa présence séculaire.

Notre décor mental

Il faisait partie de notre décor mental, de notre biotope culturel, de nos racines culturelles, que l’on soit pratiquant ou pas, il était à la fois le témoin de notre histoire communale et la permanence d’une France ancrée dans le catholicisme. Et puis, par lassitude, par abandon, presque involontairement, face à l’explosion des coûts d’entretien et à une déchristianisation lente de nos campagnes, nous n’avons pas su le retenir, le choyer, lui dire combien il était cet ami fidèle, ce gardien de troupeau bienveillant. Ce phare qui éclairait nos plaines inertes plusieurs kilomètres à la ronde était plus qu’un échalas de pierre, il était tuteur et mémoire, recueillement et monument, mystère et rêverie. Un jour, notre église tomba en ruine et notre clocher disparut. Ce jour-là, nous avons perdu un peu de nous-mêmes et l’identité de notre communauté s’en est allée. Dans un monde ultra-connecté et déshumanisé, quelle trace restera-t-il de nos anciennes fraternités ? Ce clocher que nous avions fini par oublier, par délaisser était au cœur de notre vie quotidienne. Il était témoin et acteur de nos solidarités. Il nous rattachait à quelque chose de plus grand que nous. Cette histoire n’est pas une fiction, elle est le symbole du délitement de nos vieux liens qui couraient bien au-delà des remous de la loi de 1905.

Débats sans fin

Nos clochers ne sont pas éternels. Alors, aujourd’hui, le patrimoine ne relève plus du folklore de quelques âmes charitables comme la défense des animaux, mais bien d’un nouveau socle sur lequel de nombreux citoyens, croyants ou non, veulent se rattacher. Nos clochers ont une valeur de transcendance. Ils sont des repères existentiels et non le catafalque de nos turpitudes. On veut les protéger, les sauver, les maintenir en vie mais jusqu’à quel point ? Si les Français sont, de nouveau, sensibles au sort réservé à leurs clochers et à leurs calvaires, le quoi qu’il en coûte n’est plus au programme commun des budgets municipaux.

Jean-Pierre Rioux, spécialiste de l’histoire politique et culturelle de la France contemporaine dresse un panorama de nos clochers dans un ouvrage illustré paru chez « Bleu Autour », la belle maison d’édition située à Saint-Pourçain-sur-Sioule (03). Sous le titre enthousiaste Vive nos clochers, il raconte comment nos églises, épicentres des provinces, ont été à l’origine de féroces combats idéologiques et comment leur sauvegarde est encore une source de débats qui agitent les élus et les populations locales. Car, l’église n’est pas « un bâtiment municipal comme un autre ».

Les grands écrivains à la rescousse

L’intérêt de cette réflexion est qu’elle s’appuie sur les écrits de Barrès, Hugo, Proust et qu’elle débute même sur une chanson, La petite église, de Paul Delmet, interprétée par la voix chaude et perchée de Tino Rossi. Rioux avoue que c’est le refrain de cette incantation populaire dont les paroles commencent ainsi Je sais une église au fond d’un hameau… qui l’a poussé vers La Grande Pitié des églises de France de Maurice Barrès. Le député des Halles et académicien est l’homme par qui tout a commencé. Jean-Pierre Rioux écrit : « Il est donc prêt en 1910 à voler au secours des clochers. Avec une boussole : « Je défends les églises non parce que j’aime dans le catholicisme une gendarmerie spirituelle, mais au nom de la vie intérieure de chacun ». Barrès a le verbe haut et la fougue des convaincus. Par tribunes de presse, il part à l’assaut « pour un classement du bâti le plus ancien » sans se présenter en catholique mais pour mieux « préserver la civilisation et l’âme nationale ». Sa prose emporte et ses mots résonnent à cent ans d’intervalles, avec un mimétisme clairvoyant : « Le meilleur moyen de défendre nos églises, c’est de les faire aimer, d’intéresser le grand public à leur sort ».

Au XXème et en ce début de XXIème siècle, Rioux nous parle de nos rapports plus ou moins distanciés avec nos clochers ; de « la communion avec les poilus » jusqu’à l’émoi de Notre-Dame en flammes. Il va jusqu’évoquer le clocher de l’enfance si cher à Marcel ; dans les premières pages de Swann quand le train arrive à Illiers-Combray, Proust se souvient : « On reconnaissait de bien loin le clocher de la nôtre, inscrivant à l’horizon sa figure inoubliable ».

Vive nos clochers – Avec Barrès, Hugo, Proust et les autres – Bleu autour 184 pages

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Parenthèse (sécuritaire) enchantée

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Paris, 17 juillet 2024 © Aurelien Morissard/AP/SIPA

Quel étrange virus toucha la capitale ?
Où l’insécurité avait-elle mis les voiles ?
Parisiens et touristes ensemble s’extasièrent,
De découvrir Paris nettoyé au karcher,
Procès d’intention ou délit de faciès,
Tout devint permis et passa pour hardiesse.
Initiative louée, d’autant que macronienne,
Si de droite venait-elle, on la dirait vilaine,
Ainsi de pauvres hères sur décision du prince,
Manu militari partirent voir la province,
Jamais gouvernement n’avait offert vacances,
À des indésirables dont on souhaitait l’absence.
Impossible n’est pas français ! Déclarait-il heureux,
Preuve surtout était faite que quand on veut, on peut.

A lire aussi, Elisabeth Lévy: Il faut savoir terminer une trêve

Ô Jeux Olympiques, parenthèse enchantée,
Enfin les Français s’autorisent à rêver,
Adoubent le roi Teddy, acclament le dieu Léon,
Le sport fédérateur, nouvelle religion !
Qu’importe la noyade de l’économie,
Pourvu que dans la Seine ait lieu son agonie,
Tandis que des champions sont vantés les biceps,
En guise de cérémonie est passée au forceps,
Cette idéologie que l’on nomme wokiste,
Et au nom de laquelle, on plagie jusqu’au Christ
Bienveillance et morale, tout cela dégouline,
Applaudissez Français que l’on vous endoctrine !

C’est ce drôle d’été, dans cette douce France,
Qu’Alain Delon choisit de tirer révérence.
Adieu l’artiste ! Titrent les magazines,
Et puisse Romy t’attendre au bord de la piscine !

Sitôt la flamme éteinte, sitôt reviennent les plaintes.
L’heure est venue braves gens de ranger le drapeau,
Sous peine, assurément, d’être traités de facho.
Dans l’enceinte des stades vous pouvez le chérir,
En dehors de ceux-ci, gardez de le brandir.

A lire aussi: Immigration et démographie urbaine: les cartes à peine croyables de France Stratégie

Grand cirque politique, la même ritournelle,
Et c’est la guerre des gauches qui reprend de plus belle,
Érigeant Matignon en glorieux Rubicon,
Qui de Lucie Castets, qui de François Pignon.
Et pourquoi pas Borloo pour ce gouvernement ?
Le risque était trop grand qu’il effraie les enfants.

Jeux paralympiques, France paralysée,
De quel bord vient la mouche qui pique l’Élysée ?
Il oscille, il consulte, et ne fait qu’hésiter.
Que lui en a-t-il pris de dissoudre Assemblée ?
Prends garde monarque à ne point faire durer,
Cet étrange carême, ces quarante journées,
Où d’un gouvernement les Français sont privés
De son utilité le peuple pourrait douter.

Contre Michel Barnier, le pire de la politique…

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Le nouveau gouvernement réuni autour de Michel Barnier à Matignon, 23 septembre 2024 © Eric TSCHAEN -Pool/SIPA

Après l’annonce de la composition du gouvernement Barnier, les réactions immédiatement médisantes des uns et des autres nous ont offert ce que la politique française a de plus détestable.


Depuis que la composition du gouvernement de Michel Barnier a été annoncée, que de réactions attristantes, auxquelles le Premier ministre a répondu à sa manière le 20 septembre sur le journal de France 2 ! Il ne s’agit pas de supprimer la politique, selon le souhait bizarre exprimé il y a quelques jours par Éric Zemmour, comme si c’était possible et souhaitable, mais de tout faire pour lui donner une expression digne et équilibrée. Et ces derniers jours ont montré que notre démocratie est loin du compte !

Un gouvernement baroque, composé de ministres macronistes et de ministres de droite

Je ne prétends pas avoir éprouvé un enthousiasme sans mélange en prenant connaissance de la liste des ministres, des ministres délégués et des Secrétaires d’État. Même en mesurant les rapports de force parlementaires et l’influence persistante d’un président de la République pourtant directement responsable de la débâcle de ces derniers mois, je regrette pourtant la trop large place donnée aux macronistes de la première heure ou de fraîche date. Elle me fait craindre, dans la pratique, un amollissement de la droite et un chantage permanent du mou sur le nécessaire dans la conduite des affaires gouvernementales.

A lire aussi, Elisabeth Lévy: Gouvernement: la laïcité à la française perd une bataille de plus

Je continue à déplorer qu’un talent comme celui de Gérald Darmanin, qui a sauvé le régalien du naufrage, n’ait pas été mis à contribution dans un autre grand ministère, et que Philippe Juvin, sans doute trop libre et compétent, ait pâti de ces qualités alors qu’il aurait été remarquable à la Santé.

Ce gouvernement est quantitativement impressionnant, et je n’ai pas envie de me moquer de quelques dénominations originales qui renvoient au souci de libérer les missions générales des grands ministères de la charge de se pencher sur le quotidien préoccupant des Français. Par exemple, celle de la « Sécurité du quotidien ». Si elles sont concrétisées, elles constitueront des avancées. Il n’empêche que, cette déception relative formulée, je suis scandalisé par le mépris, la dérision, la condescendance dont ce gouvernement, avant même la moindre démonstration de ses capacités, a été l’objet. Ce n’est pas seulement la stigmatisation des nombreux inconnus qui a été choquante ; comme s’il fallait avoir échoué et être célèbre pour mériter les suffrages du peuple… Mais, plus globalement, la manière dont l’extrémisme de gauche comme de droite, une fraction mécontente d’Ensemble pour la République (EPR) et un certain nombre de médias, ont veillé d’emblée à faire perdre toute légitimité à cette nouvelle équipe. Partialité d’autant plus surprenante que, les yeux fixés sur les sondages, ils auraient dû être alertés et prendre conscience que les vertus dont on créditait le Premier ministre – constance, calme, modération, écoute et considération – étaient précisément celles dont manquait l’univers politique et qui avaient créé si rapidement cette embellie.

Retailleau concentre les critiques

Pour ne prendre qu’un exemple qui a suscité autant d’espérance que de critiques parfois ignominieuses, Bruno Retailleau – qui s’accordera, j’en suis sûr, avec le nouveau garde des Sceaux et dont même ses adversaires reconnaissent la fiabilité, la solidité et son heureuse aptitude à ne pas plier au gré du vent – est traité comme s’il avait été condamné pour racisme. Et je ne peux que déplorer que Manuel Bompard, si bien contredit par Sonia Mabrouk sur CNews, ait relayé cette absurdité. Comme si la joute politique autorisait n’importe quoi.

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L’opprobre anticipé projeté sur le gouvernement de Michel Barnier m’apparaît d’autant plus injuste que je perçois mal qui, ou quel groupe, pourrait avoir l’arrogance de se déclarer, face à lui, irréprochable, exemplaire ou préférable. Du côté du Nouveau Front populaire, avec Lucie Castets Premier ministre imaginaire et l’invocation lassante d’une première place après le second tour des élections législatives sans la moindre chance d’obtenir une majorité à l’Assemblée nationale, on a été confronté trop longtemps à cette méthode redoutable de l’extrême gauche dominant la gauche, consistant à confondre le martèlement de la même idée fausse avec la justesse de la cause. On ne peut pas passer sous silence, malgré les oppositions internes au Parti socialiste, l’insupportable dérive de celui-ci vers une idéologie faisant perdre tout bon sens, au détriment de ce qu’exigerait la responsabilité d’un parti qui se veut de gouvernement. Et de la retenue et décence républicaines qu’on attendrait de l’ancien président de la République François Hollande. Comment ose-t-il sans barguigner s’aligner sur le pire de la politique ? Il se met à l’unisson de pratiques extrêmes comme déposer une motion de censure par principe. Aurait-il été inconcevable que le social-démocrate et député Hollande pèse ses mots et ses actes avant de s’engouffrer dans la caricature d’un affrontement parlementaire ? Au-delà du Parti socialiste, convient-il même de faire un sort à Marine Tondelier qui est inébranlable dans des positions qui plaisent à ses soutiens mais font douter de l’écologie qu’elle propose, des leçons de morale qu’elle assène et d’une vision républicaine qui préfère ses préjugés à la scandaleuse nouvelle que serait la réussite du camp adverse ? Certes, l’écologie dispose maintenant du vibrion François Ruffin qui est devenu courageux – mais discuté dans ses charges – à proportion de son éloignement d’avec Jean-Luc Mélenchon, qui ne lui fait même pas l’honneur d’une riposte. Il me semble qu’il y a en lui du feu follet et que parfois on peut se dire que le cinéaste talentueux fait de l’ombre au député fluctuant ! Dans le collectif de LFI, hier, il était bridé et trop taiseux. Aujourd’hui, est-il suffisant à lui seul pour enthousiasmer et convaincre au-delà de son cercle d’amis ?

Attal égaré ?

Du côté du macronisme, Gabriel Attal devrait se souvenir qu’il a été un grand ministre – trop bref – de l’Éducation nationale et qu’il a acquis une densité, peut-être une profondeur, à la suite de son affrontement avec le président de la République. Il préside le groupe parlementaire EPR et aspire à prendre la tête du parti. On ne le laissera pas faire à sa guise. Je crains que saisi par des ambitions multiples, il se perde dans des jeux partisans et oublie les promesses de l’homme d’État au profit du trublion impérieux qu’il paraît vouloir être maintenant. Ses dernières exigences adressées au Premier ministre – PMA, LGBT, IVG – me semblent plus relever d’obsessions ciblées que du souci de défendre ce qu’il y aurait de prétendument menacé dans les orientations du nouveau gouvernement. Le partisan va l’altérer quand le gouvernemental le sublimait.

Le Premier ministre Michel Barnier au journal télévisé de France 2, dimanche 23 septembre 2024 © Jacques Witt/SIPA

Au regard de la tonalité des propos, des comportements et des critiques de ses adversaires, Michel Barnier doit-il se couvrir de cendres parce qu’il aurait contre lui et certains de ses ministres le pire de la politique ? Bien sûr que non. Dans aucun discours, dans aucune argumentation, je n’ai entendu une once de politesse républicaine, de sagesse démocratique. Pour la France, quoi qu’on pense de ce gouvernement, il faut souhaiter qu’il réussisse autant qu’on le peut dans ce monde dangereux, imprévisible et parfois illisible. Le président de la République a exprimé ce vœu en désirant qu’il soit partagé. Comme il croit pouvoir être le remède après avoir engendré le mal, je doute qu’il soit écouté. Mais est-ce trop demander à tous que de ne pas s’abandonner au pire de la politique ?

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