Accueil Société Ce député n’a rien trouvé de plus urgent que de légiférer contre les « discriminations capillaires »

Ce député n’a rien trouvé de plus urgent que de légiférer contre les « discriminations capillaires »

Chacun sa loi: la folie d'aujourd'hui...


Ce député n’a rien trouvé de plus urgent que de légiférer contre les « discriminations capillaires »
Le député Olivier Serva photographié dans les couloirs à l'Assemblée nationale, en février 2020. Il est à l'époque dans le groupe LREM © NICOLAS MESSYASZ/SIPA

On touche le fond. Nos députés se consacrent chaque jour davantage à des lois basées sur l’individualisme, plutôt que sur l’intérêt général. Et cela aggrave l’éclatement de notre pays.


Que l’individualisme soit devenu la règle d’aujourd’hui relève de la banalité. Chacun est son petit maître et souhaite que sa subjectivité, ses humeurs, ses faiblesses, ses blessures, ses frustrations, ses imperfections soient considérées comme prioritaires et servent de base aux futures inventions législatives.

Comble du ridicule

Je ne plaisante pas. Il y a ce paradoxe qui montre bien la folie française. On admet qu’il y a trop de lois, mais on est prêt cependant à en fabriquer de nouvelles, de moins en moins nécessaires, de plus en plus absurdes. Par exemple, le député du groupe « Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires » (LIOT) de la première circonscription de la Guadeloupe, Olivier Serva, parce qu’il a du mal à supporter sa propre calvitie et les moqueries qu’elle peut susciter, va déposer une proposition de loi contre les discriminations capillaires, dont les femmes aux cheveux crépus ou frisés sont également victimes, dit-il. Il y a là la démonstration qu’on touche le fond, que le comble du ridicule est atteint et que le député ne se consacre plus à l’intérêt général, au service de tous mais prend sa mission législative pour un remède, un pansement, une thérapeutique purement personnelle. Je ne doute pas que certain(e)s puissent parfois être victimes de critiques indélicates à propos de leur chevelure ou non mais cette réalité si minime peut-elle justifier qu’on s’engage dans une voie qui constituera un détail en généralité, des éléments intimement particuliers en un terreau législatif. On ne légifère pas pour quelques-uns, car sinon on va aggraver l’éclatement d’un pays en mille clans, chapelles, autonomies et dissidences.

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Constatant une telle dérive qui fait de soi l’initiateur de tout, je n’ose imaginer, pour chacun, les revendications à venir. Certains se sont moqués de mon cheveu sur la langue. Il est intolérable qu’aucune loi n’ait été édictée pour interdire cette attitude! D’autres ont vu tourner en dérision leur petite taille. Ils en souffrent. Il faut les consoler par une loi. Bien au-delà de ces dispositions physiques sur lesquelles on n’a pas de prise, le simple fait de respirer et de vivre, pour des pessimistes, n’est pas perçu sans trouble ni incommodité. Ils pâtissent, sur ce plan, d’une grave infériorité par rapport à beaucoup d’heureux. Il convient de les soulager par une loi qui interdira de les traiter de tristes sires.

Ensemble tout devient possible

Si on continue ce processus, plus rien ne sera impossible: notre monde ne sera plus qu’un champ de multiples prohibitions où, de notre apparence à nos pensées, de nos disgrâces à nos complexes, tout sera régi par des dispositions légitimes qui nous priveront, avec notre consentement suicidaire, de l’honneur et de la liberté d’être nous-mêmes, tout compris, ombres et lumières mêlées.

À chacun sa loi: ce sera un enfer.

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Magistrat honoraire, président de l'Institut de la parole, chroniqueur à CNews et à Sud Radio.

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