Le surréalisme renaît à Lagny-sur-Marne


Une jeune fille de 19 ans, entièrement nue et enduite d’huile d’olive, a blessé deux policiers venus l’interpeller, nous apprend Le Parisien. Elle est qualifiée de démente, ce que je trouve profondément injuste. Dans un monde complètement fou, cruel et de plus en plus inhumain, ce geste me semble au contraire profondément normal voire moral. On pourrait en effet, à travers le comportement de Valérie, puisque c’est son prénom, voir une manière de nous renvoyer à un présent de plus en plus halluciné que les gens affectent de trouver vivable même dans un RER aux heures de pointe, dans une file d’attente à un guichet de Pôle emploi ou après quelques minutes passées devant une chaîne d’infos en continu.

Comment ne pas penser, par exemple, à la fameuse phrase de Philip K. Dick, dans Ubik, ce roman décrivant une société entièrement soumise à la marchandise et aux manipulations de la réalité : « Je suis vivant et vous êtes morts. » Valérie sera sans doute déclarée irresponsable pénalement puisque l’intervention de la police a été déclenchée par ses hurlements qui duraient depuis des heures et ont fini par excéder les voisins. Il n’empêche, si nous avions deux sous de bon sens, pour marquer notre angoisse, il faudrait tous nous mettre nus, nous couvrir d’huile d’olive et hurler à plein poumons.

On peut aussi penser que Valérie a renoué avec la grande tradition surréaliste. On nous apprend ainsi qu’elle aurait juste avant frappé sa maman, ne faisant en cela que suivre les recommandations de Benjamin Péret et de Paul Eluard dans 152 proverbes mis au goût du jour (1925) : « Il faut battre sans mère tant qu’elle est jeune » Et puis, somme toute, les deux policiers n’ont été que légèrement atteints, l’un au tibia et à la cuisse, l’autre à la main ce qui fait de Valérie quelqu’un de beaucoup moins violent qu’André Breton qui écrivait : «L’acte surréaliste le plus simple consiste, revolvers aux poings, à descendre dans la rue et à tirer au hasard, tant qu’on peut, dans la foule.»

Pour le reste, j’espère que Valérie a pensé à utiliser de l’huile d’olive bio pressée à froid, afin de préserver sa jolie peau.



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