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Pays musulmans: face aux islamistes, la démocratie ne fait pas tout


Pays musulmans: face aux islamistes, la démocratie ne fait pas tout
Election présidentielle en Egypte, mai 2012. SIPA. 00637998_000018
Election présidentielle en Egypte, mai 2012. SIPA. 00637998_000018

André Versaille publie en ce moment un feuilleton sur le site du Monde, intitulé : « Les musulmans ne sont pas des bébés phoques »

Le président turc Recep Tayyip Erdogan a dit: « La démocratie c’est comme un tramway, une fois arrivé au terminus on en descend. »  

Comment penser la question de la démocratie dans le monde arabo-musulman quand, dans bien des États de cette vaste zone, un vote libre donnerait, très vraisemblablement, la victoire aux islamistes qui refusent l’État de droit ? Ce fut notamment le cas à Gaza. On a beaucoup reproché aux États occidentaux de ne pas considérer le vote « démocratique » gazaoui en faveur du Hamas : « Vous voulez la démocratie, et quand un parti qui ne vous plaît pas est élu au suffrage universel, vous refusez de collaborer avec lui. » Comme si un scrutin libre, condition indispensable mais évidemment très insuffisante, pouvait garantir à lui seul l’État de droit. Faudra-t-il encore et toujours revenir à l’élection démocratique allemande de 1933 pour faire comprendre qu’un suffrage, si régulier fût-il, n’implique pas l’instauration d’un État de droit ? Quand saisirons-nous que c’est par la voie des urnes que bien des régimes totalitaires se sont installés avant de cadenasser le système politique afin d’éliminer toute opposition ?

« Un homme, une voix, une fois »

Pour les partis islamistes en général, un scrutin libre et honnête n’augure pas d’une évolution démocratique, mais de sa fermeture. Cette route vers le pouvoir est toujours à sens unique. Une phrase résume bien la conception islamiste du vote : « Un homme, une voix, une fois » (Bernard Lewis). Le pouvoir islamiste établi, il est inconcevable pour ses partisans de renoncer quelques années plus tard à la souveraineté de Dieu représentée par ses serviteurs (il est remarquable que la Tunisie ait fait, jusqu’à présent, exception à cette règle). Contrairement aux démocrates, tenus par principe d’accorder la liberté d’expression ainsi que les autres droits politiques à l’opposition quelle qu’elle soit, les islamistes au pouvoir ne se sentent nullement tenus d’accorder quoi que ce soit à leurs adversaires ; ils s’estiment fondés à réprimer tout ce qu’ils jugent sacrilège, à commencer par la démocratie laïque.

Notre compréhension à l’égard des islamistes est telle que nous sommes devenus sourds et aveugles au désir de démocratie de beaucoup de musulmans, notamment des résistants qui se battent pour la subordination du religieux au civil, le confinement de la religion dans la sphère privée et l’instauration de la liberté en matière religieuse. Dans des États où l’incroyance est hors-la-loi, et où le libre arbitre doit s’effacer au bénéfice de la soumission à Dieu, c’est-à-dire aux imams, la tâche est immense.

Quant à nous, les « progressistes », nous n’en demandons pas tant ! Ce qui nous intéresse, c’est de voir apparaître dans le monde musulman une démocratie d’élections. Quant à la démocratie d’exercice, on verra plus tard. À croire que la participation des partis religieux extrémistes musulmans au suffrage universel est notre priorité.

De quoi cette complaisance témoigne-t-elle, sinon de la conviction de beaucoup d’entre nous que le despotisme religieux ou civil est conforme à la mentalité et à la culture islamique, et que, de toute façon, les musulmans sont incapables d’exercer le libre arbitre, l’esprit critique et la démocratie ?

Retrouvez André Versaille sur son blog, Les musulmans ne sont pas des bébés phoques



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