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De la dilatation des corps subtils

Dilatée, dilatée ! Est-ce que j’ai une gueule de dilatée?


De la dilatation des corps subtils
Bruno Le Maire prend la pose chez lui, Paris, 21 avril 2023 © Eric Dessons/JDD/SIPA

Au moment même où sa politique budgétaire fait Fitch, Monsieur le Grand Argentier de France s’illustre dans la gaillardise littéraire. 


Quelques lignes de son imposant roman Fugue Américaine font un tabac. Elles caracolent d’écran en écran, se murmurent de bouche à oreille jusque dans les endroits les mieux tenus de la République, si toutefois il y en a encore. 

Le succès est tel que je ne résiste pas au plaisir de vous en faire partager un tout petit morceau : « Elle me tournait le dos; elle se jetait sur le lit; elle me montrait le renflement de son anus. « Tu viens, Oskar ? Je suis dilatée comme jamais. » On en conviendra, voilà qui donne envie. On notera au passage que notre auteur se montre, par ailleurs, adepte du point virgule. À l’ancienne. Vieux style. La classe. L’agrégé ès lettres qu’il est se débusque dans ce genre de subtilité. La retrouve-t-on, cette classe, cette subtilité, dans le choix du terme «  dilatée » ? À voir. Est-ce qu’on écrirait, par exemple, qu’une rose à son meilleur de l’offrande – si sensuelle – de son parfum est dilatée? Sans doute non. Alors on s’émeut. Au secours Ronsard ! Au secours Jean Genet, lui si inventif dans la poétique des combats de l’arrière. Ici, dirait-on, la froideur technocratique de l’énarque investit jusqu’au traitement littéraire du déduit. Dommage. On aurait espéré mieux. Quelque chose de plus élevé, de plus vibrant et chaud. « Dilatée, dilatée ! Est-ce que j’ai une gueule de dilatée? » pourrait en effet s’offusquer une belle au bord de l’abandon. 

On nous dit que l’auteur serait du matin. Il trousserait sa prose entre cinq et sept, à l’heure où blanchit la campagne. Après quoi, plein d’entrain, parfaitement échauffé, au zénith de sa forme, il s’en irait à son ministère des Finances où, comme on sait, enculer le contribuable est de pratique constante. Tout un art, même. On saisit mieux dès lors pourquoi notre écrivain revendique avec une telle force d’entretenir, dans sa vie même, un lien des plus étroits entre ses fictions et sa réalité. 

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Ex-prof de philo, auteur, conférencier, chroniqueur. Dernières parutions : "Marie Stuart: Reine tragique" coll. Poche Histoire, éditions Lanore. "Le Prince Assassiné – le duc d’Enghien", coll. Poche Histoire, éditions Lanore.

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