Moins de 200 000 manifestants recensés en France le 2 octobre par les autorités: une mobilisation presque confidentielle pour un mouvement national. Les professeurs en particulier ont préféré «sécher» la grève. Cette corporation, qui vote massivement à gauche depuis des décennies, ne savait visiblement pas très bien pour quelle noble cause battre le pavé cette fois-ci.
Dans le Parisien d’hier matin[1], une professeur des écoles dit ne pas vouloir faire grève car les raisons avancées sont trop vastes, voire trop vagues et qu’elle n’y retrouve pas les nécessités de son métier.
Elle voudrait donc qu’on circonscrive les revendications à des objectifs plus spécifiquement scolaires, pense-t-on. Eh bien non ! Elle déplore qu’on ne parle pas et qu’on ne manifeste pas pour « l’inclusion ». Comme si ce terme désignait quelque chose de plus précis d’une part, et comme s’il désignait un problème typiquement scolaire d’autre part !
Il s’avère que deux histoires me furent racontées dernièrement au sujet de la dite inclusion. D’abord, et comme le souligne à maintes reprises Jean-Claude Michéa, il faut savoir que la plupart des réformes sociétales cachent une décision économique qui ne va pas de soi. Ici, le budget rétréci pour les hôpitaux de jour ayant vocation à accueillir des enfants en difficulté psychique. On supprime des moyens d’un côté, et on trouve la solution en demandant à des professeurs n’ayant aucune formation dans ce domaine, et n’ayant pas a priori à en avoir puisque leur métier ne consiste pas à s’occuper de ces enfants-là, de les accueillir dans leurs classes.
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Un professeur d’histoire-géographie m’a raconté son expérience sur deux ans. Ne sachant absolument pas quoi faire de l’élève qui lui fut confié, il fit cours aux autres comme il avait l’habitude et le devoir de le faire, et l’élève resta en rade sur sa chaise l’année durant. Deux fois de suite, il connut cette situation absurde qui culmina dans la proposition que fit un collègue qu’on manifestât pour plus de moyens… pour l’inclusion. Pour le coup, l’intersectionnalité ici aurait eu du bon si elle avait inspiré une toute autre manifestation ; à savoir celle qui aurait accompagné le corps hospitalier pour qu’il récupère les moyens de s’occuper des enfants dont il avait la charge jusqu’à présent. Mais je suppose que cela l’aurait fichu mal, qu’on aurait crié à la discrimination, comment ça, sont contre l’inclusion, sale engeance etc.
La deuxième histoire concerne mon petit-fils aîné qui fait sa scolarité au fin fond de la Bretagne et qui a connu lui aussi deux années de suite les effets de l’inclusion à marche forcée. Nous sommes en primaire et deux enfants en difficulté psychique accompagnés chacun d’un AESH (accompagnateur d’enfant en situation de handicap) n’écoutent ni le professeur ni l’AESH, perturbent le cours à longueur de journée, infligeant aux autres enfants un bruit et une fatigue dont personne ne veut entendre parler. C’est toujours cette préférence pour la minorité dont la majorité fait les frais qu’on privilégie. En outre, on peut se demander en quoi le coût d’un AESH par enfant revient moins cher qu’un budget conséquent pour des professionnels en hôpital de jour…
Était-il si difficile d’imaginer l’inclusion autrement ? Etait-il à ce point difficile de penser à des activités communes, à des sorties communes, à des rencontres sur certains thèmes ou durant des voyages ? Afin que des enfants ne pouvant suivre la scolarité habituelle puissent rencontrer leurs congénères et nouer des liens avec eux. Ainsi, chacun aurait pu bénéficier de l’enseignement qui lui convient tout en profitant de moments partagés. Il est étonnant de s’apercevoir que le mantra qui, de nos jours, fait de la différence la valeur absolue soit noyé dans une inclusion qui veut l’effacer à tout prix…
[1] https://www.leparisien.fr/societe/a-quand-une-greve-qui-ne-soit-pas-fourre-tout-pourquoi-les-profs-ne-se-mobilisent-pas-02-10-2025-JH2OG4UDLBFQRCWFKRK5NK76MA.php


