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Ah, s’ils n’avaient pas Vincent Bolloré !

Le billet de Philippe Bilger


Ah, s’ils n’avaient pas Vincent Bolloré !
Vincent Bolloré, pose lors d'une audition devant la commission d'enquête parlementaire sur les procédures d'octroi des autorisations des services de télévision nationale à l'Assemblée nationale à Paris, le 13 mars 2024 © Jacques Witt/SIPA

Vincent Bolloré est devenu l’ennemi idéal : milliardaire, catholique, conservateur, il concentre sur lui toutes les obsessions de la gauche médiatique. Mais cette diabolisation mécanique dit plus de la paresse du débat public que de l’homme lui-même.


Il y a des polémiques et des dénonciations qui font rire par leur caractère systématique, des obsessions qui amusent. Je ne cesse de me réjouir de la constance avec laquelle Vincent Bolloré tient lieu de sujet universel quand on n’a plus rien à dire.

D’abord lui, évidemment, puis ceux qui travaillent avec lui ou dans un univers qu’il possède. Vincent Bolloré est stigmatisé avec une pauvreté d’argumentation qui confine au néant. Il est milliardaire, il est conservateur et a le front de vouloir communiquer ses idées et les défendre. J’oubliais le grief fondamental : il est catholique et va régulièrement à la messe. Son entourage est décrit comme s’il s’agissait d’une coterie adepte de mauvais coups. Les chroniqueurs qui participent à des débats sur CNews, avec une totale liberté, sont considérés comme des assujettis à Vincent Bolloré et ont beau protester du contraire, ils ne sont pas crus. Le pire advient quand ils ont le culot, en plus, d’estimer, voire d’admirer Vincent Bolloré. Il ne fait pas bon en France louer si peu que ce soit les personnalités richissimes, même quand elles doivent tout à elles-mêmes, mais émettre un jugement favorable à Vincent Bolloré relève du péché mortel.

La seule manière pour Vincent Bolloré d’échapper à cette hostilité réflexe, créatrice d’un consensus médiocre, est de voir ce courant délétère se détourner de lui pour accabler, aussi mécaniquement, un autre milliardaire, Pierre-Edouard Stérin, gangrené par ce double vice aux yeux de la majorité des médias : il est également catholique et prétend, offense suprême, en tirer les conséquences dans la vie intellectuelle, politique et médiatique. Il est évidemment intolérable qu’une personnalité non pourvue de la carte de gauche ait de telles ambitions. Matthieu Pigasse, lui, peut tout se permettre : il pense bien.

Ah, s’ils n’avaient pas Vincent Bolloré !

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Celui-ci ne sert pas seulement à nourrir en permanence un procès contre lui et ceux qui sont fiers de travailler sous son égide, de près ou de loin. Il permet aussi à ses adversaires d’être immédiatement crédités d’une aura et d’une indiscutable légitimité dès lors qu’ils se posent en anti-Bolloré. Cette grâce octroyée d’autorité, comme s’il s’agissait du seul critère pertinent, bénéficie à des personnalités certes estimables comme Olivier Legrain, « L’anti-Bolloré » (Le Nouvel Obs). Sa volonté exclusive de soutenir des médias de gauche et d’aider à leur création sur un mode très généreux et très opératoire ne démontre rien par elle-même, sinon son appétence pour l’idéologie de gauche et d’extrême gauche.

Dans l’article élogieux qui lui est consacré par Véronique Groussard, on voit bien tout ce dont elle le crédite parce qu’il est de gauche et donc par essence remarquable. En revanche, elle ne nous démontre pas le caractère nocif de l’information et de la liberté selon Vincent Bolloré et n’interroge pas le fond de la vision d’Olivier Legrain, de sorte qu’en conclusion, on connaît les projets de celui-ci, son idéologie, ses hostilités, mais rien de ce qui l’autoriserait à se poser en modèle par rapport à Vincent Bolloré.

CNews est à droite, n’est pas à gauche. Oui, et alors ?

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Magistrat honoraire, président de l'Institut de la parole, chroniqueur à CNews et à Sud Radio.

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