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Et si le Royaume-Uni était en réalité l’homme fort de l’Europe?

En partenariat avec la revue "Conflits"


Et si le Royaume-Uni était en réalité l’homme fort de l’Europe?
© Conflits

La revue amie “Conflits” publie en kiosques son nouveau numéro: « Royaume-Uni, l’homme fort de l’Europe». Johnson tombe, le Brexit continue…


Causeur vous propose de lire l’éditorial de Jean-Baptiste Noé.

Avec le Brexit, le Royaume-Uni devait quitter l’Europe. Toujours cette confusion regrettable entre Union européenne et Europe, comme si la sortie de l’UE impliquait un glissement de terrain qui aurait entraîné le Royaume vers un autre continent. Fidèles à leurs habitudes, bon nombre de spécialistes prévoyaient que les sept plaies d’Égypte allaient s’abattre outre-Manche. La famine, car le pays ne serait plus alimenté par le continent, la pauvreté et le chômage de masse puisqu’il quittait une zone économique renommée, et puis la guerre civile et le démembrement, puisque l’Écosse choisirait Bruxelles plutôt que Londres et que l’Ulster reprendrait le chemin des combats pour une question de frontière douanière. Rien de tout cela ne s’est produit. Si le Royaume-Uni n’est pas le paradis, il n’est pas non plus entré en enfer après avoir rompu les amarres de Bruxelles.

Conflits n°41

Maître de l’Europe

Que de belles promesses on nous fit. Paris devait devenir la première place financière d’Europe, les capitaux et les entreprises devaient quitter Londres pour se réfugier en terre libre, c’est-à-dire en zone euro. Six ans plus tard, il n’en est rien. Londres demeure la capitale la plus attractive d’Europe, plus que Paris dont les rats, les embouteillages et l’insécurité ne séduisent guère les investisseurs. La livre sterling devait s’effacer et l’euro dominer la planète financière. À la mi-juillet, pour la première fois de son histoire, le cours de l’euro est descendu à la parité avec le dollar. En relisant les promesses de 2002 lors de l’introduction de la monnaie unique, on peut comprendre que les citoyens se soient détachés de l’UE. Fort d’une indépendance renouvelée, le Royaume-Uni vient de fêter en grande pompe le jubilé de platine de sa reine. Véritable attribut de la puissance britannique, la famille royale de Windsor est la dynastie européenne qui attire tous les regards et capte l’attention des médias. Ces jours de jubilé furent d’ailleurs plus regardés en France que l’intronisation du président de la République. Beaucoup d’Européens y ont trouvé ce qu’ils cherchent chez eux: l’unité, la fierté, la continuité et la grandeur.

À lire ensuite, Jeremy Stubbs: Liz Truss: du vieux vin dans une nouvelle outre?

Dans la guerre en Ukraine, le Royaume-Uni impose ses vues, joue sa partition, toujours reliée à Washington certes, mais qui donne le la et fait prévaloir ses intérêts. Le pays n’est plus dans l’UE, mais le Premier ministre se rend à Kiev, fixe les orientations et trace le chemin suivi par les autres, c’est-à-dire par les États-Unis. Si le Royaume-Uni a quitté Bruxelles, il a renforcé ses liens avec Washington. Nulle politique d’indépendance dans la guerre en Ukraine, mais un alignement sur la ligne de l’OTAN ; ce dont les Anglais semblent se satisfaire. L’ancien Empire rejoue l’affrontement contre l’Empire russe et s’oppose à Moscou avec dureté.

Sommet du G7, Carbis Bay, Angleterre, 11 juin 2021 © Kevin Lamarque/AP/SIPA

Où est la France ?

Encore une fois, Britania rule the waves. Après le Brexit, les Anglais ont conçu le global Britain mais c’est bien en Europe que le principal effort de leur nouvelle stratégie est porté. Sur le continent, c’est l’Allemagne qui a pris le contrôle de l’UE. Son poids économique demeure prépondérant et les Allemands présents à tous les postes clefs de la Commission et du Parlement.

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La France rêvait de « défense européenne », la guerre en Ukraine a enterré cette idée et ressuscité l’OTAN qui, plus que jamais, est la véritable défense en Europe.

Coincé entre Londres et Berlin, Paris se cherche une voie. Le « couple franco-allemand » a vécu. Après avoir imposé au reste de l’Europe la sortie du nucléaire et ses normes environnementales, Berlin se retrouve nu pour l’hiver et les Européens aussi. Pour complaire à l’Allemagne, la France a réduit sa puissance nucléaire civile et abîme ses paysages d’éoliennes. La France demeure le seul pays d’Europe continentale à disposer d’une armée digne de ce nom et à pouvoir se projeter loin de son territoire. Le seul pays aussi de l’UE à posséder des terres, donc des intérêts, sur toutes les mers du monde. Elle a certes une économie fragilisée et des finances publiques dégradées, mais elle a en ses mains des atouts sérieux pour disputer au Royaume-Uni le titre d’homme fort de l’Europe.



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Rédacteur en chef de Conflits, il dirige le cabinet de formation Orbis Géopolitique.

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