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Hommen : les résistants du bac à sable


Hommen : les résistants du bac à sable

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Les Hommen, activistes contre la loi Taubira, ont « fait le buzz »  dimanche dernier en interrompant un bref instant la finale de Roland Garros : l’image d’un jeune homme torse nu, un masque blanc sur le visage, un fumigène à la main, se jetant sur le courtdevant les champions médusés, a fait le tour du monde. Ce mouvement n’est qu’une des nombreuses têtes de l’hydre ayant grandi dans le sein de la Manif pour Tous avec le Printemps français, les Veilleurs, les Mères Veilleuses, Homovox et autres groupuscules constituant une « cathosphère » médiatique mobilisée contre le projet devenu loi.
Cette nébuleuse d’activistes aux profils divers- de la mère de famille au boyscout en passant par l’homo repenti – n’a qu’un mot d’ordre à la bouche « on ne lâche rien », qu’elle met en pratique quotidiennement par des actions coup de poing, le matraquage sur les réseaux sociaux et l’organisation d’événements avant-gardistes aux quatre coins de France. Diverses manifestations ponctuent chaque jour le paysage médiatique : ports de sweat LMPT à l’école, « apéro pour tous », « ventres aux enchères », chasse aux ministres de sortie… on parle même de l’organisation d’un putsch de généraux cathos. De quoi faire trembler les mécréants…
L’agit-prop’ a changé de camp et devient l’outil privilégié de la lutte contre la loi Taubira et la « dictature socialiste ». Les cathos font leurs coming-out et emploient les armes inventées par la modernité qu’ils combattent : slogans, happenings, réseaux sociaux, communication et festivisme[1. Philippe Muray avait déjà souligné cette dérive en notant  que deux des organisateurs des JMJ de  1997, à Paris, étaient aussi des spécialistes de la « Gay Pride » et d’autres manifestations de ce genre. Cf. Essais, Les Belles Lettres, 2010, p. 85 et 861-862.]. Manque d’imagination ou volonté de « faire moderne » à tout prix, les factions reprennent souvent un imaginaire déjà galvaudé ou produit par le système médiatique : ainsi le « printemps français » se veut un écho des révolutions arabes, les Hommen parodient les Femen tandis que les sages Antigones s’en font le miroir catholique, et tout le monde porte le « sweat pour tous » emblème djeune et sexy.
Mais le plus triste est sans doute la récupération godwinesque du mythe de la Resistance par la branche virile et post-adolescente du mouvement.
Les petits bourgeois excités qui finissent en garde à vue pour avoir insulté la police en dockside Sebago ou foutu le bordel à Roland Garros (où la place en finale vaut bien le prix d’une demi mère porteuse ukrainienne) se prennent au mieux pour des néo-croisés, au pire pour des maquisards. Ces jusqu’au-boutinistes (selon l’excellent mot de Basile de Koch) qui ont trop regardé Zorro, galvaudent outrancièrement l’imaginaire et le vocabulaire de la résistance, dérive qui était jusqu’à présent le seul propre des antisarkozystes. C’est reparti comme en 40 !
Ainsi les Hommen reprennent le slogan gaulliste « obéir, c’est trahir, désobéir, c’est servir », choisissent Jean Moulin comme emblème, et  appellent sur leur blog les casques bleus à la rescousse pour « venir libérer militairement le peuple français de ce gouvernement totalitaire et de sa police politique » (sic !).  Fourrant toutes les luttes dans le même panier, le Printemps français récupère le salut gestuel caractéristique des activistes de gauche, le poing levé, et prophétise « bientôt la place Tiananmen ». Les ex-enfants de chœur auto-proclamés «prisonniers politiques» se retrouvent en garde-à-vue et se prennent pour des Saint Sébastien, transpercés par les flèches du paganisme socialiste, sauf qu’au lieu de lever les yeux au ciel dans une résignation céleste comme le fit le martyr, ils gémissent à la dictature sur les réseaux sociaux.
Au milieu de ces provocations et de ces jérémiades déplacées, le seul mouvement vraiment novateur, qui corresponde par sa forme à l’éthique chrétienne est peut être celui des Veilleurs, mouvement pacifique et silencieux, qui lutte par la prière et la réflexion – moyens évangéliques – plutôt que par la provocation, le scandale et la surmédiatisation.  Eux, au moins, ne risquent pas d’être pris le doigt dans l’engrenage de la société du spectacle que tant d’opposants au mariage pour tous cherchent désespérément à séduire.
À ceux qui voudraient continuer le combat autrement que par ces moyens,  je rappellerai les paroles de Jésus à Pierre dans le jardin des Oliviers, alors que celui voulait faire violence aux soldats romains venus l’enlever : « Remets ton épée dans le fourreau. Ne boirai-je pas la coupe que le Père m’a donnée à boire? » (Jean 18:10-11).

NB : Il paraît que certains « partisans » menacent le Tour de France, « si ces petits cons perdent les pédales, ils auront affaire à moi » prévient déjà Marc Cohen…

*Photo: Glassholic



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Journaliste au Figaro, elle participe au lancement de la revue Limite et intervient régulièrement comme chroniqueuse éditorialiste sur CNews.

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