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Frappés par les sanctions et accros à la chirurgie esthétique, les Russes développent une alternative au botox

« Bon Botox de Russie »


Frappés par les sanctions et accros à la chirurgie esthétique, les Russes développent une alternative au botox
Image d'illustration Unsplash

La presse internationale est persuadée que Vladimir Poutine a recours à des injections de toxine botulique pour garder un front bien lisse. Mais le produit pourrait venir à manquer suite à l’invasion de l’Ukraine.


Depuis la guerre en Ukraine, l’état psychologique de Vladimir Poutine est l’objet de spéculations incessantes de la part de commentateurs médiatiques et de spécialistes médicaux en Occident. Mais son état physiologique inspire aussi de la curiosité, ou pour être plus précis, l’état de sa physionomie.

Depuis plus de dix ans, la presse occidentale s’interroge sur les changements frappants que présente son visage avec le passage du temps, changements qui sont généralement attribués à un recours régulier à la chirurgie esthétique.

Vlad l’empailleur

C’est le quotidien britannique de gauche, The Guardian, qui ouvre le bal en septembre 2011. Les modifications visibles sur le visage du leader russe (alors Premier ministre) depuis qu’il a participé à une réunion à Kiev en octobre 2010 avec une grande ecchymose autour d’un œil, alimentent la spéculation en Russie concernant un recours possible à la chirurgie esthétique. L’article cite un internaute qui a même suggéré que le lifting pourrait avoir pour but de contrer l’accusation selon laquelle, dans le milieu politique russe, il n’y aurait pas de visages nouveaux.

Vladimir Poutine et Xi Jinping, Pékin, 4 février 2022 © Alexei Druzhinin/SPUTNIK / SIPA /

Le même mois, un quotidien de droite, The Daily Mail, sous le titre « From Russia with Botox » (« Bon Botox de Russie »), relève les changements visibles dans la physionomie de Poutine lors de son apparition à un congrès de son parti. Attribuant l’absence de rides à de généreuses injections de botox, le journal croit discerner des interventions esthétiques sur les joues, les arcades sourcilières et les poches sous les yeux. Interrogés, des chirurgiens esthétiques britanniques – jalousie professionnelle ? – critiquent un travail excessif voire bâclé. Néanmoins, Poutine serait en bonne compagnie, car d’autres chefs à tendance autoritaire, comme Berlusconi et Kadhafi, seraient également accrocs à la chirurgie rajeunissante.

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Les années passent et les médias étrangers prolongent ces réflexions de temps en temps. Mais les spéculations repartent de plus belle en novembre 2021, suite à une rencontre avec le président palestinien, Mahmoud Abbas, où le chef d’Etat russe a le visage encore plus bouffi que d’habitude. Est-il malade ou est-ce le résultat d’injections de toxine botulique et autres coups de bistouri ? En février 2022, le tabloïde anglais, The Daily Express, commente l’absence de rides et l’inexpressivité apparente des yeux chez Poutine. Le journal y voit des preuves probables d’interventions esthétiques qui sont de nouveau jugées excessives par un chirurgien de Manchester consulté pour l’occasion.

Ça se dégonfle ?

Le 6 mars, le quasi-homonyme français du journal anglais, L’Express, revient sur la question en interviewant François Hourmont, professeur de sciences politiques à l’université d’Angers, auteur d’un livre récent sur le « capital esthétique » des gouvernants, Pouvoir et beauté. Le tabou du physique en politique (Presses universitaires de France, 2021). Selon le chercheur, la chirurgie esthétique aurait transformé l’ex-agent du KGB en « un double monstrueux de lui-même ». Il a également commenté le paradoxe d’un homme si soucieux de son image macho ayant recours à des techniques de rajeunissement plutôt associées à la vanité féminine. Ce serait le résultat de l’obsession de certains hommes de pouvoir avec leur image.

C’est une dizaine de jours plus tard que tombe une nouvelle inquiétante, apte cette fois à accélérer le vieillissement de Poutine. L’agence Reuters annonce que, parmi les sociétés pharmaceutiques qui, pour respecter le programme de sanctions décidé par les États occidentaux, mettent fin à toutes leurs activités en Russie concernant des produits non-essentiels, se trouve AbbVie, le fabricant du botox. 

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Quelles en seront les conséquences pour le leader russe ? Que va faire l’homme fort du Kremlin ? Va-t-il devoir se montrer en public, les joues creuses et le front ridé, comme un Dorian Gray devenu enfin identique à son vrai portrait de vieillard déformé ? Le tabloïd numérique américain, The Daily Beast, se frotte les mains devant une éventuelle déconvenue pour celui qui a ordonné l’invasion de l’Ukraine.

Il faut ajouter que, à part le botox, le Cialis, un rival du Viagra, va également manquer en Russie. La vie sexuelle des Russes, de même que l’image des mâles machistes vieillissants, risque de prendre un sacré coup. La chirurgie esthétique ne cesse de progresser sur le marcher russe. En 2019, le pays est arrivé en quatrième position pour le nombre total d’interventions, après le Brésil, les États-Unis et le Mexique. La clientèle est bien entendu composée très majoritairement de femmes. Elles sont de plus en plus jeunes car se trouvant sur un marché matrimonial où la concurrence est impitoyable. Chacune doit faire le maximum pour attirer – et ensuite garder – un époux. S’embellir est le mot d’ordre, quoi qu’il en coûte… Hélas, les effets de ces sanctions sur le peuple russe et son chef d’État risquent d’être très limités. Les Russes auraient déjà développé leurs propres alternatives au botox : le Miatox et surtout le Relatox qui aurait été mis sur le marché dès 2014.

Le seul hic, c’est qu’il faudra un peu de temps avant que les fabricants russes ne produisent ces produits en assez grand volume pour compenser la disparition brutale du botox. Vladimir Poutine peut donc aller de l’avant, le front serein (et lisse), le sourire aux lèvres (mais pas dans les yeux).

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est directeur adjoint de la rédaction de Causeur.

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