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Venise: quand l’art se fait identitaire

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La nouvelle édition de la grande exposition d’art contemporain a un titre explicite: « Étrangers partout »1. Et les organisateurs semblent convaincus que l’art a pour mission de changer les réalités des rapports humains dans le monde réel. Quitte à enfermer les artistes dans des cadres réducteurs ?


Tous les deux ans, pendant près de six mois, il est possible de visiter l’Exposition internationale d’art contemporain de la Biennale de Venise dans les Giardini bucoliques de la Sérénissime, jardins où chaque pays invité dispose d’un pavillon propre qu’il confie à un artiste ou à un collectif le temps de l’événement.

Les pays qui n’y sont pas représentés exposent aussi, mais ailleurs dans la ville – à l’Arsenal, dans les églises, les galeries privées ou certains musées…

L’art contemporain s’immisce partout, dialogue parfois harmonieusement avec le legs architectural et pictural de la Renaissance, s’y heurte souvent. La Biennale d’art contemporain de Venise est un événement culturel majeur ; à ce titre, elle révèle quelque chose de notre époque.

Être né quelque part, dans un corps

Pour assurer la curation de cette 60e édition, la direction de la Biennale a choisi – pour son « regard étranger » – le Brésilien Adriano Pedrosa, commissaire d’exposition et conservateur du Musée d’art de São Paulo (MASP) depuis 2014. Pedrosa est connu pour sa programmation engagée, programmation qui fait la part belle aux thématiques identitaro-communautaires : les sexualités, les féminismes, la condition afro-atlantique. Pour la Biennale, il ne déroge pas à cet engagement en choisissant de traiter de la beauté « marginalisée, exclue, oppressée, effacée par les matrices dominantes de la géo-pensée ». L’objectif est clairement affiché : il s’agit de « cannibaliser les cultures postcoloniales hégémoniques », de l’aveu même du directeur de l’événement à l’origine du choix de Pedrosa. Se présentant comme queer, il revendique le fait d’assumer la dimension politique de sa sélection. Quant au jury, il est présidé par Julia Bryan-Wilson, professeur d’histoire de l’art « LGBTQ+ » à l’Institut pour l’Étude de la Sexualité et du Genre de l’Université de Columbia.

A relire, Elisabeth Lévy: La fin du monde commence à Venise

Cette Biennale porte le titre explicite « Stranieri Ovunque – Foreigners Everywhere – Etrangers partout ». Elle ambitionne de questionner le phénomène de la migration, de problématiser l’extranéité culturelle, géographique et de genre. Par souci de « visibilisation », elle a ostensiblement évincé les artistes qui n’appartiennent pas à des groupes minoritaires.

Les trois écueils de l’art identitaire

Il n’y a, en soi, pas de thème que l’art devrait éviter. Celui de la condition de l’étranger et de notre rapport à lui – étant entendu que nous sommes aussi, dans une certaine mesure, les étrangers d’autrui – est parfaitement légitime, là n’est pas le sujet. Si la politisation du discours artistique peut affaiblir ou contraindre celui-ci, elle lui a souvent été corrélative. On peut même affirmer que l’art peut avoir une fonction politique, sans le réduire à cela.

Ce qui interpelle ici, c’est à notre sens la conjonction de trois tentations anti-artistiques, voire anti-sociales : le littéralisme simplificateur, l’inversion discriminatoire et le fixisme argumentatif. La première a trait à l’un des paradoxes de la pensée néo-progressiste, que l’on retrouve poussé à l’extrême dans la doxa woke, à savoir celui d’une fascination pour le registre métaphorique couplée à une susceptibilité extrême au texte – ainsi un simple mot peut-il, sans nuance, constituer une violence aussi grave qu’une agression physique. L’inversion discriminatoire est, en quelque sorte, l’aboutissement du processus de discrimination dite « positive » ; elle ne se contente pas de promouvoir arbitrairement un individu au détriment d’un autre sur le fondement de considérations identitaires, mais agit délibérément de manière à exclure l’autre pour ce qu’il est, en l’essentialisant. Enfin, le fixisme argumentatif correspond à la sclérose de la pensée, où, au lieu d’évoluer avec l’exercice dialectique démocratique, l’argumentation se fige et se réduit en injonctions morales quasi-religieuses. Une grande partie de la « recherche » post-coloniale et de genre ne fournit plus de savoir scientifique et se contente d’exemplifier à l’envie, d’illustrer un propos axiomatique.

Le délitement du mérite

Le Lion d’Or a été attribué cette année au Pavillon australien. L’artiste aborigène Archie Moore y évoque les effets de la colonisation et des conditions de vies douloureuses subies par les Premières nations autochtones. Un gigantesque tableau généalogique lacunaire tracé à la craie environne des archives juridiques recensant des innombrables morts indigènes ordonnées avec la froideur des registres administratifs. Le Pavillon kosovar a été récompensé pour avoir su saisir le jury par son « activisme féministe ». Quant au collectif Mataaho de Nouvelle-Zélande, également lauréat, il n’a pas manqué d’exprimer sa gratitude à Pedrosa pour son action en faveur des communautés autochtones et des minorités de genre. Les prix spéciaux sont à l’avenant : l’artiste palestinienne engagée Samia Halaby a dédié son prix aux jeunes journalistes gazaouis ; l’artiste queer La Chola Poblete s’oppose pour sa part à l’exotisation des corps et des vécus sud-américains.

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Tous ces travaux ont une valeur artistique, mais la qualité réelle de celle-ci tend à disparaître sous le poids des obsessions communautaires de ceux qui ont la charge de les juger. Voilà l’un des écueils majeurs de l’identitarisme : en valorisant, il dévalorise ; ses célébrations sont conflictuelles et non plus joyeuses ; l’universalité de la condition humaine est, par lui, en tous points déniée.

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  1. Voir https://www.labiennale.org/it ↩︎

À gauche, la soupe à l’union

Construire une gauche «de gouvernement» à l’ombre de Jean-Luc Mélenchon relève de l’utopie. Trop de divergences séparent LFI des classiques socialistes et communistes. Les chefs disent «faire barrage au RN» mais les militants sont-ils prêts à toutes les compromissions ? Qu’elle soit cocue ou prise en otage, la gauche est dans l’impasse.


Le 9 juin, quand tombe à 20 heures le résultat des européennes, les socialistes sont les rois du pétrole. Avec leurs 14 %, ils sont en tête des forces de gauche. « Quand on a vu ça, on s’est dit qu’on pouvait rêver de mener à nouveau la bataille pour l’hégémonie, se souvient un proche d’Hélène Geoffroy, maire socialiste de Vaulx-en-Velin. Faire renaître une gauche réformiste qui s’oppose à la gauche de rupture. »

Et puis, patatras !, dans l’heure qui suit, Emmanuel Macron annonce la dissolution et l’organisation de législatives. « À partir de ce moment-là, on a disparu des écrans radar, enrage cet ancien élu socialiste. Olivier Faure nous a sacrifiés. Et LFI a pris immédiatement le leadership. »

Quand on regarde en replay la manière dont le numéro un du PS s’est comporté ce soir-là sur le plateau TF1, la rapidité avec laquelle il s’est couché au pied de Mathilde Panot, on est en effet confondu. « Par sa reddition en direct face à LFI, Faure a cassé la dynamique que portait la candidature de Raphaël Glucksmann », ne décolère pas notre correspondant.

Impasse

Pourtant, selon ce fin observateur de la vie politique, beaucoup d’élus et d’électeurs du PS pensent que l’alliance avec LFI est une impasse. Non seulement parce que les Insoumis évacuent le logiciel réformiste au profit d’un populisme qui n’a rien à envier à celui de droite, mais aussi parce qu’ils investissent sur un électorat minoritaire et communautarisé, celui des banlieues, qu’ils réduisent à l’électorat musulman et plus particulièrement à celui qui adhère à l’influence islamiste. Le problème est que celui-ci, très conservateur et religieux, ne partage aucune des références historiques de la gauche.

Même le rapport au statut d’exploité n’est pas le même. À gauche, reconnaître l’injustice conduit, en théorie, à la lutte pour l’égalité. Mais dans le logiciel communautariste, la victimisation débouche sur l’appel à la vengeance, donc à l’inversion de la domination. Pour les multiculturalistes, l’égalité n’est pas un objectif, au contraire c’est un leurre, un moyen pour les dominants d’échapper à la punition, de ne pas rendre de comptes.

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Quelle solution alors quand on se retrouve dans une telle impasse ? « Accepter de prendre sa perte et reconstruire une offre politique en lien avec notre histoire », pense un élu de gauche républicaine dans une commune de banlieue parisienne, représentatif en cela de beaucoup d’anciens électeurs socialistes.

Mais pour une autre militante PS, collaboratrice d’élue et bonne connaisseuse des instances socialistes, que nous avons interrogée, Faure nourrit un autre projet : empêcher toute reconstruction d’un courant ouvriériste et social-démocrate. « Il a tout fait pour tuer dans l’œuf ce regain,analyse-t-elle. L’arrivée de nouveaux adhérents attirés par l’image de Glucksmann l’aurait menacé directement pour les congrès à venir, en désavouant sa stratégie d’alliance. Il préfère rester le gestionnaire d’un syndic de faillite plutôt que prendre son risque. »

Bien sûr, tout le monde au PS n’est pas aussi dur envers Faure. Pour un membre du conseil national, qui nous a demandé l’anonymat, les fautes sont à chercher ailleurs : « Il y a eu des efforts au sein de la Nupes pour empêcher que LFI ne soit la force dominante, rappelle-t-il. Mais encore faudrait-il pouvoir compter sur les écologistes. Or ils sont structurellement et idéologiquement plus proches de LFI que de la gauche à l’ancienne, et reconstruire une offre réformiste ne les intéresse pas. Et puis du point de vue de leur boutique, le calcul a été bon : en misant sur le Nouveau Front populaire et en réduisant la question des législatives à la lutte contre le RN, le mauvais score de Marine Tondelier aux européennes a été effacé. » De fait, celle-ci, qui commençait à être contestée, a sauvé son poste. Le congrès extraordinaire, qui devait tenter de lui faire la peau, a été annulé.

Même constat amer s’agissant du Parti communiste. « Ceux qui y incarnent la tradition marxiste ont presque entièrement disparu, regrette notre cacique socialiste. Les Elsa Faucillon et compagnie partagent plus de choses avec Rima Hassan qu’avec Fabien Roussel. » Mais alors, à quoi bon faire alliance, au sein du Nouveau Front populaire, avec des formations qui sont toutes sous l’influence plus ou moins directe de Jean-Luc Mélenchon ? Pour une raison simple. Sur ce point-là, tous nos interlocuteurs sont d’accord : l’union à gauche n’est pas une posture, c’est un mythe. Ce mythe est d’une telle puissance qu’il est impossible de se prononcer contre, sans se mettre à dos ses propres électeurs. L’union, c’est à la fois le but et le chemin, le combat et la victoire.

Dans ce cadre, la marge de manœuvre de Faure est étroite. Selon un ancien élu qui le connaît bien, « Olivier n’est pas un homme qui peut refonder un récit. Il est le décalque de François Hollande, il en a les failles, mais en possède aussi le principal atout. Il faut savoir reconnaître que si cet homme a gagné trois congrès, c’est qu’il sait manœuvrer. Il possède un sens aigu du point d’équilibre dans le rapport de forces. Il comprend où sont les points de bascule et comment en faisant bouger un mec, tu fais tomber toute la ligne des dominos. »

Subtilités

Mais sur le terrain, ce genre de subtilités est de plus en plus mal compris. Propos entendu lors d’une discussion avec une militante de longue date : « S’allier avec des populistes pour sortir des populistes, ça ne fait pas sens. Le réflexe de faire barrage au RN est sain, mais concrètement les gens ont du mal à croire qu’en votant pour un David Guiraud, qui qualifie le Hamas de mouvement de résistance, ils combattent l’extrême droite. Cela joue sur les reports de voix. »

Un constat partagé seulement en partie par les huiles du parti : « La stratégie de LFI dérange, mais il n’empêche qu’elle a payé, remarque le membre du Conseil national du PS cité plus haut. Ils sont passés de 6 à plus de 9 % aux européennes en prenant le clou Gaza/génocide et en l’enfonçant dans le mur de l’information jusqu’à le fracturer. Aujourd’hui, il leur suffit d’exhiber Rima Hassan pour mobiliser l’électorat des banlieues. » Alors certes, la question de la promotion virulente de l’antisémitisme gêne aux entournures. Mais selon nos témoins, candidats et électeurs la résolvent très vite en opérant des distinctions au sein de LFI.

Ainsi Jean-Luc Mélenchon cristallise la colère et le ressentiment de beaucoup d’électeurs de gauche mais paradoxalement, en les fixant sur sa personne, il permet d’épargner son mouvement. François Ruffin est ainsi mis en avant pour rendre les Insoumis fréquentables. Si les socialistes voient bien que Jean-Luc Mélenchon veut rejouer le baiser de la mort donné par Mitterrand au PC, avec Olivier Faure dans le rôle de Georges Marchais, ils n’ont guère d’autre choix que la soumission. Une partie de leurs fiefs, notamment en région parisienne, reposent sur la mobilisation des quartiers, or aujourd’hui ce sont LFI et ses alliés islamistes qui donnent le ton, ils n’ont donc plus les moyens de se payer une conscience.

Les socialistes sont-ils condamnés à cheminer avec LFI ? « Pas forcément, répond un cadre du PS. On ne le crie pas sur les toits, mais le résultat du Nouveau Front populaire au premier tour des législatives est décevant. En pourcentage de voix, on a fait moins que l’addition des scores de la gauche aux européennes. La vérité est qu’il n’y a pas eu d’élan dans les votes, à cause d’un positionnement de LFI qui fait fuir une partie des électeurs. »

La radicalité de Jean-Luc Mélenchon ne laisse d’interroger. « Il pense sincèrement que la période est prérévolutionnaire et qu’une prise de pouvoir sans les urnes est possible,s’inquiète une ancienne élue socialiste. Il n’a aucun intérêt à faire gagner la gauche. D’où ses sorties ambiguës sur le poste de Premier ministre, son jeu avec Rima Hassan, ses discours enflammés sur la Palestine. Mélenchon s’est lepenisé. »

Discours de Jean-Luc Mélenchon lors de la soirée électorale de La France insoumise, à l’annonce des résultats provisoires du premier tour des élections législatives, Paris, 30 juin 2024. ISA HARSIN/SIPA

À l’heure où ces lignes sont écrites, soit à la veille du second tour des législatives, un bruit court dans tout Paris. Grâce à la mécanique des désistements entre carpes et lapins, les gaullistes, la Macronie et la gauche espèrent bien priver le RN et ses alliés de la majorité absolue et seraient en train de négocier la constitution d’un gouvernement de large alliance, dont le premier acte serait le rétablissement de l’impôt sur la fortune. D’autres parient plutôt sur une coalition allant seulement, si l’on ose dire, du PC à LR, excluant donc à la fois le RN et LFI.

Il s’agit en somme de fabriquer un gouvernement incarnant le cercle de la raison. Une perspective qui décontenance nos interlocuteurs, embarrassés par le scénario de l’élection volée, mais soulagés de gagner un peu de temps, même s’ils savent que c’est pour cinq minutes ou trois ans monsieur le bourreau. « Existe-t-il encore un commun qui permette de donner un sens à cette forme d’union nationale ? » se demande l’un d’entre eux. Une question que personne n’ose poser à voix haute. Parce qu’elle contient la réponse.

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Docteur Iman Sanzeux: chic, mon médecin porte le hijab!

L’entrisme et le séparatisme islamistes à l’hopital progressent. Plongée inquiétante dans l’univers des soignants d’Instagram, alliés de l’OMAS et des Frères Musulmans…


Dans un entretien donné au Figaro[1] sur l’influence des Frères Musulmans en France, Monsieur Bertrand Chamoulaud, Directeur National du Renseignement Territorial, déclare : « Nous suivons aussi de près l’Organisation Musulmane des Acteurs de la Santé (OMAS), qui tente de faire entrer l’islam dans les hôpitaux, notamment pour que les infirmières soient voilées. Ou que les patientes soient soignées par une femme. ». Quelle est cette association qui diffuse l’idéologie des Frères Musulmans, activement surveillée par la Police Nationale ?

La menace de l’OMAS

Dans sa déclaration à la préfecture, l’OMAS prône vouloir « fédérer l’ensemble des acteurs de santé afin de proposer de nouvelles avancées et une autre conception de notre métier, inspirées de valeurs musulmanes […] à la lumière des principes de l’Islam. » Avec une première création en préfecture en 2015 (année funeste des attentats) dans la banlieue lyonnaise, l’OMAS ouvre successivement des succursales à Paris et en Normandie. Bien que très active sur les réseaux sociaux, l’OMAS offre le paradoxe d’être relativement opaque sur ses membres et ses financements. À peine, en épluchant les réseaux sociaux, découvrons-nous que le président actuel est le Docteur Mehdi Mhatli, chirurgien ORL du Centre Hospitalier de Draguignan.

Sur le compte Facebook de cette association, des sympathisants musulmans laissent des commentaires où ils sont en recherche de réponses sur le port du voile à l’hôpital (« Salam Aleykhoum. Je cherche des personnes au CHU de Tours […] pour quelques questions, surtout question hijab ») ou en quête d’un soignant qui pratique la médecine prophétique (« Est-ce qu’il y a parmi vous des psychiatres qui auraient à la fois un référentiel religieux et psy pour un avis. »).

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Sur Instagram, l’OMAS se veut le porte-parole d’évènements centrés autour de la religion musulmane, d’activités universitaires ou de soutien à la cause palestinienne. Dans une story, l’OMAS incite ses followers qui sont étudiants en médecine à l’USPN de Bobigny à voter pour des jeunes acquis aux idées des Frères Musulmans, lors des élections d’associations étudiantes (notamment l’AESP13), pour « renforcer notre respect au sein de la faculté. Si nous négligeons cette responsabilité, les conséquences pourraient être néfastes ». Une autre story fait la promotion de « notre sponsor 570easi sur les finances islamiques ». Une autre story, encore, invite ses followers à un week-end de formation au Château de Vallery, dans l’Yonne, pour assister à une table ronde humanitaire en présence d’associations telles que Palmed, Kebchi, Ummanité, le Collectif des Blouses Blanches pour Gaza, De l’Eau pour Tous. Un rapport, disponible sur Internet, désigne Palmed comme « l’exemple le plus significatif d’un réseau européen affilé aux Frères Musulmans, structuré comme un syndicat professionnel »[2]. L’association Kebchi, quant à elle, propose à ses adhérents le sacrifice d’un mouton en Afrique : « Une fois votre mouton immolé, vous pourrez découvrir votre sacrifice en photo »[3] et en vidéo. On s’étonne que des soignants français, dont l’engagement est d’être au service de la vie, puisse faire la promotion d’une association qui diffuse à ses adhérents du contenu audiovisuel de bêtes égorgées. Mais continuons.

Le Dr Iman Sanzeux, fondatrice de l’OMAS et influenceuse sur Instagram

Parmi les membres fondateurs de cette association rattachée aux Frères Musulmans (qu’elle assure, depuis, avoir quitté) : le Dr Iman Sanzeux (pseudonyme utilisé par le Dr Nour El Iman Kaddouri, médecin généraliste de 32 ans qui exerce dans les Hauts-de-France chez SOS Médecins) aux 11,6 K de followers sur Instagram. Avant d’être active sur Instagram, le Dr Kaddouri utilisait également le pseudo de « The Hijabi-doc-to-be » sur Facebook ; interne en médecine générale, elle livrait publiquement son vécu d’étudiante voilée ou rédigeait des billets d’humeur sur le thème de la santé. Si le Dr Sanzeux a quitté l’OMAS, en a-t-elle pour autant quitté l’idéologie frériste ?

En 2019, alors qu’elle était encore interne, le Dr Sanzeux militait contre la législation en matière de laïcité pour les agents du service public, qu’elle vit comme « une humiliation » l’empêchant de garder le voile : « Tant que la loi impose cette neutralité et cette laïcité, […] on n’aura pas de moyen de pression pour y faire face et on continuera à subir ce « dévoilage » forcé. » Elle s’insurge : « Où sont nos instances, où sont nos représentants pour faire bouger les choses à l’échelle nationale ? »

Aujourd’hui diplômée, elle livre sur son compte Instagram, qu’elle prône être une vitrine de son activité médicale, des récits de sa vie privée mais aussi des conseils en matière de religion musulmane, de port du voile et de médecine prophétique. Le Dr Sanzeux évoque son propre retour à l’Islam avec le port du voile à 19 ans, après avoir grandi « dans un environnement exclusivement français « de souche » ». Sur sa conception de la médecine, elle écrit qu’« Allah est le guérisseur, tout le reste n’est que sabab » (« la cause », en arabe). À une follower qui la sollicite pour des conseils matrimoniaux, le Dr Sanzeux lui répond de veiller « à la religiosité du frère » ; à une autre follower qui lui demande son avis sur la Hijama (un outil de la médecine prophétique, à base de ventouses), le Dr Sanzeux approuve cette « sunna prophétique recommandée ». Pourtant, les conséquences délétères de cette pseudoscience islamique ont été régulièrement étiquetées par les autorités scientifiques. À de jeunes étudiantes qui s’inquiètent qu’on leur demande de retirer le hijab à l’hôpital pour des raisons de laïcité, le Dr Sanzeux fustige « la hagra qu’on vit », conseille d’« accepter que c’est temporaire » et de s’installer ensuite en libéral où il n’y a « aucun problème, tu fais ce que tu veux […] mâcha allah ».

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Un article du Ouest-France du 4 juillet dernier[4] relaie l’indignation du Dr Sanzeux au soir du premier tour des élections législatives, qui fustige le succès du Rassemblement national dans sa région. Dans une diatribe vis-à-vis de sa patientèle, à laquelle elle reproche d’avoir élue Marine Le Pen comme députée, elle affirme avoir pris la décision de partir en représailles de ces résultats : « Allez, il est grand temps de songer aller soigner d’autres cœurs ailleurs, moins malades des autres. ». Pourtant, déjà en 2021 (donc, sans aucun rapport avec les législatives), le Dr Sanzeux critiquait dans une story la région de ses patients : du Nord, elle écrit que « c’est vraiment un cadre de vie nul » et qu’elle avait, en revanche, « beaucoup aimé le Qatar ». En 2021, toujours, à une internaute qui lui demande « Tu as un pouvoir, améliorer la situation d’un pays dans le monde, lequel choisiriez-vous ? » (sic), le DSanzeux répond spontanément l’Algérie car « c’est un peuple et un pays incroyables ». Dans une publication où elle livre son analyse du livre Rester barbare de Louisa Yousfi, le DSanzeux s’interroge sur les blancs (« on se demande alors mais qu’attendre des blancs ? »), les fustige (« ces blancs […] enfermés dans leur bienpensance, nous n’avons que faire de leur sollicitude […] », eux qui ont pour projet de « mieux asseoir leur domination ») ; appelle à la violence envers les blancs (« la seule manière de repousser le néant, c’est par la violence qui devient alors le seul moyen d’entrer en communication avec les blancs ») et revendique d’être barbare (« vous le terminerez [ce livre] en voulant tatouer barbare sur votre front »). Que les patients nordistes du Dr Sanzeux (ou plutôt, du Dr Kaddouri) se rassurent donc : avec ou sans Marine Le Pen, la France et ses habitants (à la peau blanche) n’ont jamais eu la faveur de leur généraliste.

Mais le Dr Sanzeux ne s’arrête pas là et, depuis les attentats du 7 octobre, partage à ses followers ses points de vue en matière de géopolitique sur son compte Instagram. Nous y voyons fleurir des tags pro-palestiniens (#wearepalestine, #freepalestine, #withgaza), des appels au boycott « des entreprises qui soutiennent l’occupation » et des incitations à « occuper l’espace public » au sujet de la Palestine. Cet hiver, le Dr Sanzeux publie une vidéo où elle annonce avoir blacklisté une patiente de la structure où elle exerce, sous le motif que cette dernière aurait informé le secrétariat qu’elle souhaitait être soignée par un médecin qui ne soit ni le Dr Sanzeux, ni un autre de ses confrères (qui aurait lui aussi un nom d’origine maghrébine). Le Dr Sanzeux poursuit, « on lui a dit qu’il était impensable de choisir son médecin et encore moins selon des critères ethniques ». C’est, d’une part, bafouer l’article 6 du Code de Déontologie des Médecins (« Le médecin doit respecter le droit que possède toute personne de choisir librement son médecin ») ; d’autre part, en l’absence de contexte plus élargi, diffamer bien vite qu’il s’agit d’un choix à caractère discriminatoire. Dans les commentaires, à une internaute qui réagit en postant un commentaire à caractère antisioniste au sujet de cette patiente (« Je suis sûre qu’elle aime trop Israël et la betterave cette conne »), le Dr Sanzeux approuve avec un like et ajoute un commentaire dans lequel elle s’esclaffe.

Dans le Coran, un hadith du Prophète enseigne : « Soyez bienveillants avec votre prochain et Celui qui est dans les Cieux sera miséricordieux envers vous. » Pour le Dr Sanzeux, co-fondatrice de l’OMAS, la bienveillance enseignée par le Prophète semble s’être arrêtée aux portes de la charte de la laïcité, des blancs et des Israéliens.

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[1] Christophe Cornevin et Jean Chichizola. « Islamisme, ultragauche, écologie radicale… les nombreux défis du patron du renseignement territorial. », Le Figaro, N°24811, Édition du 31 mai 2024, p. 2

[2] « Islamist Organizations », https://jcpa.org/the-spiders-web/chapter-i-delegitimization-in-germany/islamist-organizations/, Consulté le 12 juillet 2024.

[3] « Kebchi Solidarity », https://kebchi.fr/notre-concept.html, Consulté le 12 juillet 2024.

[4] Mélissa Boufigi. « Iman, femme médecin voilée en territoire RN », https://www.ouest-france.fr/societe/racisme/temoignage-cest-un-centre-communautaire-iman-femme-medecin-voilee-en-territoire-rn-097ee6a6-394d-11ef-9f2b-c38da737f062, Consulté le 12 juillet 2024.

La gauche «victorieuse» avoue des connivences politico-médiatiques et tolère un racisme anti-blanc décomplexé

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La France s’enfonce toujours plus loin dans l’abime racialiste


Quel spectacle désolant ! Compromissions, tripatouillages et magouilles à tous les étages. Et des hectolitres de moraline pour nous enrober tout ça. Représentants politiques, sportifs millionnaires, magistrats syndiqués et artistes subventionnés se sont plu à se faire peur en criant de concert au loup fasciste. Les médias aux ordres du pouvoir et l’audiovisuel public gauchisant ont déversé leurs mensonges et ignoré pareillement la vie des Français sacrifiés à leurs désirs sociétaux, diversitaires et immigrationnistes, en particulier ces Français de la France périphérique qu’ils méprisent, tous, de tout leur cœur.

Que la fête recommence !

L’affront républicain a parfaitement fonctionné. Nombre d’électeurs ayant voté pour Ensemble ou le NFP se plaindront d’ici peu du pouvoir d’achat continuant de dégringoler, de l’UE continuant d’imposer à la France ses diktats, de l’immigration continuant de nous submerger, de la désindustrialisation continuant de plonger le pays dans la dépendance économique et le chômage, des oukases écologiques retardant la relance du nucléaire ou promouvant la décroissance, etc. Nous leur rappellerons alors durement que, au nom d’un « barrage républicain » carnavalesque, ils ont voté pour des formations politiques ayant décrété que la France était bonne à jeter aux ordures. Européistes fédéralistes, davosiens mondialistes, écologistes radicalisés ou immigrationnistes, islamo-compatibles ou non, tous ne pensent qu’à désagréger notre pays. Pour ce faire, les uns ont choisi d’accélérer le remplacement de son peuple historique – comprenant les Français dits de souche aussi bien que des descendants d’immigrés parfaitement intégrés – en augmentant l’immigration sous tous les prétextes possibles, y compris le prétexte climatique. Les autres ont décidé de satisfaire les « élites » (financières, politiques, médiatiques, artistiques) dont ils se targuent ou envisagent de faire partie et qui sont à l’abri du besoin et des conséquences d’une immigration communautariste et islamisante. S’ajoutent à ces funestes motivations les marécageuses tractations nécessaires à la survie politique d’arrogants vieux chevaux centristes ou de dispensables éléphants socialistes et à l’émergence de nouveaux politicards professionnels, avides des privilèges que seule une République corrompue peut offrir d’une manière si dispendieuse.  

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LFI est satisfaite. Il y a de quoi. Malgré un antisionisme antisémite de plus en plus brutalement affiché, malgré les violences staliniennes internes, malgré des propositions économiques plus démagogiques les unes que les autres, malgré des candidats flirtant avec un fascisme si souvent attribué au camp d’en face, le mouvement mélenchoniste a mis au pas ses « alliés » et a su tirer son épingle du jeu électoraliste. « Aujourd’hui, nous nous préparons à gouverner, nous nous préparons à appliquer le programme qui est le nôtre », assure Manuel Bompard. De son côté, l’apathique Olivier Faure justifie l’accord luciférien avec LFI et le NPA : le PS a doublé le nombre de ses députés, l’anesthésiant François Hollande est de retour, l’ex-ministre macroniste Aurélien Rousseau rentre au bercail. Ce dernier avoue sur son compte X devoir sa victoire aux castors des médias privés et publics : « Ma gratitude à la presse, je pense en particulier à la PQR, aux antennes de France bleue, et au journal Le Monde, mais aussi La Croix, Libé ou l’Humanité. Leur travail a été indispensable et à la hauteur de ce moment historique. Une presse libre et de très haut niveau (sic). » Une certaine connivence politico-médiatique est étalée sans vergogne au grand jour. Il est vrai que les médias français « libres » n’ont pas fait dans la demi-mesure pour « barrer la route à l’extrême droite ». Pour s’en convaincre, il suffit, par exemple, de comparer le traitement des informations visant les brebis galeuses du RN et celui concernant les antisémites, fichés S et autres barbouzes du NFP. Si l’on a les nerfs assez solides, on peut aussi réécouter la radio publique, France Inter en tête : quinze jours de messages plus ou moins subliminaux, d’éditoriaux politiques partisans, de journaux masquant les « faits divers » pouvant accréditer l’idée d’une insécurité grandissante, d’analogies historiques douteuses, etc. Du travail propagandiste d’orfèvre, digne de celui de sa consœur télévisuelle, France TV. Ailleurs, sur le plateau de BFMTV en l’occurence, interrogée par l’impayable Benjamin Duhamel, Clémentine Autain a elle aussi chaleureusement remercié les médias qui, face au danger que représenterait le RN, « ont changé de braquet » et ont ardemment contribué à la victoire du NFP. Cette gauche se croit décidément tout permis : l’écologiste Marie-Charlotte Garin, élue dans le Rhône, ne s’est pas gênée pour révéler ses visites réitérées dans une école primaire du 7ème arrondissement de Lyon et exhiber devant la presse, comme si cela allait de soi, une fresque fabriquée par des bambins de 6 à 9 ans très en avance sur leur âge. « Vous êtes la meilleure députée », ont écrit les uns, tandis que d’autres ont gribouillé, sans l’aide de leur maîtresse, paraît-il, d’éloquents messages pour « combattre le RN » et en finir avec « les racistes et les fascistes ». Cette calamiteuse anecdote confirme au passage que l’école n’est définitivement plus le lieu de la transmission des savoirs mais bien celui du bourrage de crâne idéologique.

Les « antiracistes » triomphent

Il paraît que, depuis quelque temps, la « parole raciste se libère ». Rokhaya Diallo a récemment corroboré cette impression. Sur le plateau de BFMTV, face à un Charles Consigny atterré et un Manuel Bompard conciliant, la journaliste woko-racialiste a en effet estimé qu’il y avait trop de Blancs – ou, pour le dire à sa manière, « pas assez de personnes non-blanches » – sur la première photo de famille du NFP. Elle a été « éblouie » par tant de blanchité étalée. La victoire du NFP – qui vaut, aux yeux de Mme Diallo, soumission aux thèses racialistes et diversitaires qu’elle promeut, et lui permet de tenir éhontément des propos racistes sur un plateau télé – devrait accentuer le sentiment anti-français qui corrompt les rangs de la gauche et de l’extrême gauche, ainsi que le racisme anti-Blanc qui croît dans notre pays et dont Mme Diallo se moque comme elle se moque de Charles Consigny, ce « pauvre petit chou » qui ose s’opposer à sa conception raciale de la société. Entre les deux tours des élections, dans The Guardian cette fois, Rokhaya Diallo n’a pas manqué de comparer, comme c’est original, le RN au « régime collaborationniste de Vichy », et de louanger, comme c’est bizarre, LFI et sa « position claire contre l’islamophobie dans un contexte où l’hostilité envers les musulmans en France est normalisée (sic) ». L’article est globalement une lourde charge contre la France – Mme Diallo est coutumière du fait. Cette militante woke n’aime pas la France, ce « pays très vieux, très lent à bouger et très petit dans le monde » dans lequel une « vieille élite blanche ne supporte pas de voir ses privilèges lui échapper » (Libération, 26 octobre 2010). Elle qui n’avait déjà pas sa langue vénéneuse dans la poche, profite de la victoire du NFP sous la férule de LFI pour libérer totalement sa parole et laisser apparaître, sous le vernis de l’antiracisme politique, un racisme anti-blanc plus ou moins maquillé. Sur Sud Radio, André Bercoff a demandé à ses auditeurs d’envisager ce qui se serait passé si quelqu’un avait déclaré dans les médias que la photo de l’équipe de France de football est « un peu sombre ». Imaginez les cris d’orfraie que la gauche politico-médiatique aurait poussés si cette même personne avait affirmé, hilare, que cette photo lui a « obscurci » la vue ! Dans le cas présent, wokisme oblige, Mme Diallo a pu tenir un propos raciste sans avoir à subir les foudres des ligues antiracistes ou de la gauche bien-pensante. 

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La parole raciste se libère également du côté de Mediapart qui n’hésite pas à publier un article intitulé « Malgré des efforts à gauche, l’Assemblée reste blanche, bourgeoise et éloignée de la société mobilisée (sic) » dans lequel les journalistes comptent les « député.es racisé.es » de chacune des formations politiques. Aucun journaliste moralisateur du Monde, de Libération, de La Croix ou de l’audiovisuel public n’a trouvé à redire à ce racisme décomplexé. Dans Le Figaro, Michaël Sadoun relève en revanche cette donnée « symptomatique de la métamorphose de la gauche », à savoir, conséquemment à un accueil débridé des théories racialistes issues des universités et des associations antiracistes américaines, la tentation d’appliquer en France une discrimination positive officielle en faveur des « non blancs » dans les lieux de savoir et de pouvoir et, donc, de juger « les personnes selon leur appartenance plutôt que sur leur mérite », le but étant bien sûr de remplacer autant que faire se peut tous ceux qui sont considérés par les idéologues wokes et les islamistes comme des dominants et des privilégiés : les Blancs et les « super-Blancs » (les Juifs). Sur la scène de ce théâtre lugubre, Mme Diallo et l’extrême gauche jouent la même pièce révolutionnaire, racialiste (et raciste), antisioniste (et antisémite), immigrationniste et multiculturaliste. Côté cour, la nomenklatura bruxelloise, toujours empressée de mettre au pas les peuples qui ne veulent pas mourir, applaudit et préconise plus d’immigration tout en laissant – quand elle ne l’épaule pas – l’islam politique s’installer sur le continent. Côté jardin, les Frères musulmans rient dans leurs barbes en regardant ce spectacle et en se préparant à entrer définitivement en scène. Ils savent que la France est à l’agonie et que plus rien ne pourra la sauver. Trop d’ennemis se sont liés contre elle depuis un demi-siècle. Les ennemis de l’intérieur lui ont d’ailleurs fait le plus grand mal – mal sournois, incurable, inoculé au nom de « valeurs républicaines et démocratiques » dévoyées, derniers oripeaux moraux d’une gauche décharnée qui continue pourtant d’imposer sa loi destructrice. Et de nous pousser, inéluctablement, vers l’abîme.

L’erreur de Huntington

En 1996 paraissait l’essai de Samuel Huntington, Le Choc des civilisations. À en croire l’auteur, la fin de la guerre froide, bien loin d’asseoir la suprématie américaine, comme l’avait cru Francis Fukuyama (La Fin de l’histoire, 1991), a contribué à déplacer les conflits. Non plus sur un axe est-ouest, mais selon un axe nord-sud ; non plus sur des bases économiques, mais sur des bases idéologiques, en particulier religieuses. Notre chroniqueur revient sur l’intuition géniale de Huntington, et en propose un correctif important : il n’y a pas de clash des civilisations, mais un conflit entre la civilisation et la barbarie. Une affirmation dont nous lui laissons courageusement la responsabilité.


Ce qui caractérise les grandes idées, c’est que même quand on en a repéré les failles, voire la faillite, elles restent de grandes idées. L’analyse marxiste de l’aliénation — reprise de celle que faisait La Boétie dans son Discours de la servitude volontaire, publié en 1576 — me revient à l’esprit chaque fois que je croise une femme voilée (soit, à Marseille, une fois toutes les cinq secondes). L’Origine des espèces de Darwin est sans doute entachée d’erreurs, mais les hypothèses du naturaliste sur la sélection naturelle se vérifient à chaque seconde en regardant des gosses dans une salle de classe remonter vers le singe à grands coups de « wesh ! » « wesh ! ». On peut se gausser de Freud, expliquer que les romanciers avaient déjà décortiqué le cerveau humain — mais l’évidence du substrat obsessionnellement sexué dans la conscience humaine (la mienne, en tout cas) est confirmée dans le conscient comme dans l’inconscient. Que le Moi ne soit pas maître dans sa propre maison, ou que quoi que l’on tente avec ses enfants, on fasse mal, n’a même plus besoin d’être démontré — surtout quand on regarde les enfants d’une classe à Marseille…
Et comme l’ont expliqué en leur temps Copernic ou Galilée, la Terre n’est pas plate et tourne autour du soleil. N’en déplaise aux littéralistes des religions auto-révélées.

Le professeur d’Harvard de sciences politiques Samuel Huntington (1927-2008), photographié en Allemagne en 2005 © THIEL CHRISTIAN/SIPA

Samuel Huntington, avec son Choc des civilisations en 1996, a magnifiquement senti la ré-orientation des conflits à l’échelle planétaire. Non plus la conquête maniaque de territoires frontaliers (en cela la guerre russo-ukrainienne n’est rien qu’une survivance du passé), mais le grignotage patient de l’Occident par des civilisations extérieures, un jeu de go à grande échelle où le conquérant place des jetons pour s’accaparer des espaces.

Mais alors, où est l’erreur de Huntington ? En cela qu’il ne s’agit pas par exemple de choc de civilisation, mais de l’affrontement entre une civilisation — la nôtre — et une non-civilisation, l’islam.

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L’idée m’est venue il y a longtemps, en visite à Grenade. L’Alhambra est le sommet architectural des conquérants islamistes de la péninsule ibérique, qui avaient tenté de remonter au-delà des Pyrénées — une obsession qui ne les a pas quittés. C’est très joli, l’Alhambra. Un beau témoignage d’Al-Andalus, ce mythe forgé de toutes pièces pour inventer un paradis perdu à des conquérants sanguinaires — voir le livre de Serafín Fanjul (2017). Mais à l’époque où les artisans arabes travaillaient joliment la terre cuite et l’émail dans le sud de l’Espagne, les artistes occidentaux couvraient l’Europe de cathédrales.

C’est que l’art occidental est l’héritier des Gréco-Romains, qui ont façonné la civilisation occidentale bien avant qu’un chamelier harcelé de soleil crût entrer en relation avec un dieu d’amour qui conseille de massacrer les impies et d’épouser des petites filles.
Un exemple ? L’évolution du statut de la femme, en Occident, est un marqueur de notre civilisation. Le maintien de la femme dans une infériorité de principe, dans l’idéologie islamique, est un marqueur de barbarie.
Contre-exemple : les immigrés d’origine asiatique n’hésitent pas à s’intégrer, à s’assimiler : ils viennent de ce que Huntington appelle « la civilisation sinisante », une vraie civilisation qui n’a rien à craindre de la nôtre — et qui ne tente pas, pour le moment, de nous supplanter. C’est ainsi que Léa Cho, Coréenne cannoise de 16 ans, vient d’obtenir un double 20 / 20 à l’Épreuve Anticipée de Français.

En vérité, je le dis très solennellement à mes collègues enseignants : il n’y a pas à respecter les croyances fanatiques d’élèves englués dans la barbarie. Nous devons, à chaque instant, appliquer le programme de Voltaire : Ecrasons l’infâme — c’est-à-dire la superstition et le fanatisme, les croyances erronées, et tous les signes extérieurs de ces croyances. Quand un néo-député LFI, Rodrigo Arenas, ex-président de la FCPE, propose d’annuler le décret interdisant l’abaya, on voit qu’il est encore fécond, le ventre qui a enfanté la bête immonde…

Je sors fin août un essai intitulé L’Ecole sous emprise dont je me permets de recopier ici la quatrième de couverture, comme on dit :
« Samuel Paty, professeur d’histoire décapité en 2020… Dominique Bernard, professeur de Lettres poignardé à mort dans son lycée d’Arras en 2023… Et tant d’autres menacés, insultés, agressés chaque jour dès qu’ils s’avisent de heurter les certitudes mortifères des élèves et de leurs parents.
« Pour les enseignants, l’école se fait désormais la boule au ventre, sous le regard suspicieux de mouvances religieuses radicalisées, soutenues parfois par les enseignants eux-mêmes.
« Alors que l’École publique traverse une crise multiforme, Jean-Paul Brighelli plaide en faveur d’un système éducatif restauré et d’une laïcité intransigeante pour contrer l’emprise de l’entrisme islamiste.
« Les enseignants doivent retrouver le droit d’instruire enfants et adolescents contre leurs propres convictions, sans s’autocensurer. Est-il vraiment trop tard, face aux réseaux infiltrés du fanatisme, pour ressusciter ces « hussards noirs de la République » que furent jadis les instituteurs ? »

L’École est le champ de bataille final. Si nous courbons la tête, si nous laissons le moindre interstice aux affirmations mensongères et aux attitudes mortifères de gosses fanatisés, nous sommes perdus. Si dans la rue, nous autorisons l’expression de la barbarie, nous sommes foutus. Si nous continuons à financer les organisations « culturelles » de gens qui haïssent la notion même de culture, nous sommes morts.

Huntington avait raison : les conflits sont désormais entrés en phase chaude. Il avait tort, ce n’est pas une civilisation contre l’autre, mais un coin que des ignorants tentent d’insérer dans le pays qui les reçoit, qui les assimilerait s’ils le désiraient, mais qui doit les repousser comme un organisme chasse un corps étranger qui cherche à l’infecter.

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Tour de France sous la canicule: la cuite monumentale de Zaaf

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Un Tour sans sa journée de canicule ne serait pas vraiment un Tour ! Cette 111ème édition a connu la sienne mardi – probablement pas l’unique d’ici Nice, son terme, si l’on en croit la météo – lors de la 16ème étape Gruissan-Nîmes. Mais à la différence d’autrefois, la chaleur n’a eu aucune conséquence sur le déroulement de la course.

Boire un petit coup, c’est agréable

Les Tours d’antan ne disposaient pas de l’impressionnante logistique des actuels pour ravitailler les coureurs en boisson fraîche. Un coureur consomme en moyenne dans une étape comme celle de mardi entre 15 et 20 bidons d’eau (avec parfois quelques additifs), soit entre 10 et 13 litres. Les directeurs sportifs embarquent dans leurs deux voitures suiveuses pas loin de 150 bidons stockés dans des glacières. Ils en font aussi distribuer d’autres par des assistants disposés le long du parcours dans les endroits prévus par l’organisation.

Alors, autrefois, jusqu’aux années 60, les équipiers, dits porteurs d’eau, ne disposant pas de cette assistance pour étancher la soif de leur leader, se livraient à « la chasse à la canette ». Cela consistait à débouler en groupe dans les bistrots situés sur l’itinéraire et à se livrer à une razzia de tout ce qui était buvable, alcoolisé ou pas. Certains ladres tenanciers envoyaient la facture à l’organisation, en vain. Quant aux spectateurs compatissants, ils tendaient des bouteilles qui contenaient assez fréquemment du vin, surtout dans les régions vinicoles du sud.

C’est ainsi que ces « chasses à la canette » ont été sources de rocambolesques, épiques, cocasses, péripéties qui ont longtemps alimenté « la légende des cycles ». En voici une, la plus mémorable de toutes :        

C’était la 13ème étape du Tour 1950, disputée un 28 juillet, un jour de cagnard. Le thermomètre indiquait quelque chose comme 40°C bien qu’à l’époque le dérèglement climatique ne s’était pas encore manifesté. Le départ avait été donné à Perpignan et l’arrivée était jugée à Nîmes, comme celle de ce mardi.

Abdel-Kader Zaaf en juin 1952. DR.

Le Tour se disputait par équipes nationales et régionales. L’Algérie était alors française. Elle disposait en conséquence d’une équipe baptisée Afrique du Nord composée à la fois de Pieds-noirs et de musulmans à parité dont un certain Abdel-Kader Zaaf, à deux reprises champion de France amateur entre autres mérites.

Le pays de la soif

Ce jour-là, il s’échappe avec son coéquipier Pied-noir, Marcel Molinès. Bien que rompus à courir sous un soleil de plomb, les deux fuyards ont la pépie, et l’étanchent avec les boutanches que le public leur tend. Et que contiennent-elles ? Du pinard, du jaja surtout blanc. On était dans une région où on faisait pisser la vigne et elle pissait ce qu’on appelle aujourd’hui des vins de soif, de la piquette quoi.

Malédiction que ces boutanches tendues généreusement ! Ne buvant pas d’alcool ainsi que le prescrit sa religion, Zaaf à qui la victoire d’étape semblait promise glougloute aux goulots un max et se ramasse une cuite monumentale. Dans un virage, il fonce tout droit et percute un de ces platanes qui ornaient les routes de l’époque. Il est groggy ; un groupe de vignerons du coin se précipite à son secours, l’asperge du contenu d’un sceau dont on dira plus tard avoir été du vin (ce détail invérifiable servira d’alibi). Zaaf revient à lui mais ne recouvre pas tout à fait ses esprits. Il enfourche sa bécane et repart… mais en sens inverse. Le public lui hurle qu’il est à contresens. Il prend ces vociférations pour des encouragements et fonce tête baissée dans l’espoir de rejoindre son acolyte d’échappée. C’était une époque où une échappée prenait facilement son quart d’heure d’avance.

Mais, à la sortie d’un virage, au lieu de revoir le dossard de ce dernier, il se retrouve face à la meute du peloton qui fonce sur lui. Coup de frein, chute collective, c’est la pagaille qui vaudra à Marcel Molinès la victoire et à Zaaf de terminer dernier, juste devant la voiture balai mais dans les délais.

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Par la suite, pour lui sauvegarder sa réputation de bon musulman, un journaliste, Jacques Augendre (déjà le politiquement correct !) prétendra qu’il n’était pas bourré. S’il puait la vinasse, c’est parce que le contenu du sceau qui lui fit reprendre conscience contenait du pinard, pas d’H2O.

D’accord, mais alors s’il n’était rond pas comme un petit-pois pourquoi est-il reparti en sens inverse ? Pourquoi a-t-il pris pour encouragements les vociférations d’un public qui n’en croyait pas ses yeux : on n’avait jamais vu dans une course un échappé rebrousser chemin pour réintégrer le peloton. Ce fut la première fois et la dernière de l’histoire du Tour.

En tout cas, ce déboire sera son aubaine. Il lui vaudra une gloire que ne lui aurait pas rapportée la victoire d’étape. Tous les organisateurs de critériums d’après-Tour où les coureurs se faisaient un joli bouquet d’oseille voudront l’avoir à l’affiche. Tout le monde veut voir le phénomène… Boire un coup de trop deviendra en Algérie « se faire Zaaf » ou encore « se Zaafer la tronche ».

L’année suivante, le seul Tour qu’il terminera sur les quatre auxquels il participa, il aura l’astuce de le terminer 66ème, dernier du général. Etre la « lanterne rouge » valait son pesant de contrats post Grande boucle. Le dernier était aussi convoité que le premier, certes moins bien payé, mais bien payé cependant. Et souvent, grâce à la complicité tacite du peloton, le dernier du Tour finissait premier du critérium.

«Möbius Morphosis»: parfaitement beau

Avec le Ballet de Lyon, la compagnie d’acrobates XY et la Maîtrise de Radio France, Rachid Ouramdane compose une fresque échevelée à dimension épique.


Une foule impressionnante (vingt-cinq danseurs du Ballet national de Lyon, une trentaine d’acrobates de la Compagnie XY, des dizaines d’adolescents de la Maîtrise de Radio France) surgissant des mille recoins du temple, entièrement vêtue de noir et magnifiquement encadrée par les quatre puissants piliers qui portent les coupoles du Panthéon ; une foule qui subitement se disloque, éclate et jaillit en gerbes à l’instar d’une vaste pièce d’eau dans laquelle on aurait lancé un énorme rocher : les premières images de « Möbius Morphosis » sont superbes.

Quand la forme se suffit à elle-même

Des corps lancés dans les airs, des colonnes humaines qui se dressent comme autant d’appels à l’envol et de défis à la pesanteur, des courses échevelées, des figures de groupes audacieuses, sinon téméraires, qui enchantent fugitivement le regard et qui s’évanouissent avec la même magnificence que des feux d’artifices : ce spectacle chorégraphique a été créé en plein air, à Lyon, au théâtre antique de Fourvière, puis repris sur une esplanade à Annecy, non loin du lac. Mais il n’y a jamais été aussi beau assurément que dans la blancheur néo-classique du temple jadis édifié par Soufflot, encadré par l’architecture puissante de ce Panthéon qui l’exalte et qu’il exalte.

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Il serait vain de vouloir donner un sens à cette débauche de tableaux. Cette chorégraphie, cette mise en scène foisonnante dont on imagine aisément à quelles difficultés prodigieuses de réalisation elles se sont confrontées, ne sont rien d’autres qu’un éblouissant exercice esthétique. Mais si solide et harmonieux, si bien mené, que la forme se suffit à elle-même. Dans cet ouragan, elle sait demeurer noble, sobre, parfois même apaisée, et sait aussi ne pas se perdre dans le superflu, quand bien même, vers sa fin, l’ouvrage se répète et s’essouffle et mériterait d’être amputé d’un bon quart d’heure.  Pour la maison de joaillerie Van Cleef et Arpels qui a soutenu financièrement l’entreprise, c’est un beau cadeau. De même que pour ce festival olympique des Arts dans lequel s’insère « Möbius Morphosis ».

Réticences dissipées

Même si l’on peut comprendre qu’il y ait eu des réticences à voir un temple comme le Panthéon métamorphosé une fois encore en lieu de spectacle (mais cela s’est déjà fait avec des formes bien moins respectables), il est si rare qu’une fresque chorégraphique emplisse si dignement une telle monumentalité que ces réticences ne peuvent, de fait, que se dissiper.

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Certes, Rachid Ouramdane reprend à l’envi des figures qu’il a déjà imaginées pour d’autres productions. Mais pour qui a le bonheur de découvrir ici son travail et pour qui tout est donc parfaitement neuf, l’ensemble est saisissant et ne peut qu’être admiré. Assez facile avec ses effets de voix trop voulus, sa féérie un peu complaisante, la composition musicale électronique de Jean-Benoît Dunckel a toutefois le mérite de n’être pas envahissante et offre même de brefs instants de grâce. Elle n’empêche pas de penser toutefois que des partitions musicales d’une tout autre envergure auraient pu porter certains tableaux à l’incandescence.

Ce n’est probablement pas très avouable dans le cadre du « politiquement correct » qui ordonne qu’ils soient encensés : mais au sein de la nébuleuse d’artistes chorégraphiques « issus de l’immigration » selon la formule consacrée, Rachid Ouramdane est bien l’un des seuls à avoir quelque envergure. 

« Möbis Morphosis » les 17 et 18 juillet à 20h. Panthéon Location Théâtre de Chaillot ; 01 53 65 30 00. Rediffusion sur Culturebox le 23 juillet 2024 en « primetime ».

Le nouveau job de Gabriel Attal

Le gouvernement de Gabriel Attal a finalement bien démissionné, mais il reste en place – avec des prérogatives très limitées. Après son dernier conseil des ministres, hier, Gabriel Attal est chargé de gérer les « affaires courantes ».


Avec Emmanuel Macron et ses bons amis, l’imagination – dans sa forme la plus débridée – est bel et bien au pouvoir. Voilà qu’ils viennent de nous sortir de leur chapeau une catégorie toute nouvelle de personnel politique : le démissionnaire non démissionné. Ou si vous préférez le partant maintenu à demeure, la chaise vide occupée, etc. C’est ainsi que M. Gabriel Attal, Premier ministre ayant présenté sa démission, cette fois-ci acceptée par le boss, se trouve néanmoins confirmé dans le rôle auquel il est cependant censé avoir renoncé, cela très officiellement, dans les formes requises par le règlement.

Job d’été

Le voici installé dans un nouveau rôle, investi d’un nouveau job : celui de non-Premier ministre. Cependant comme il faut bien que quelqu’un paraisse quand même s’occuper peu ou prou du quotidien de la boutique, il est précisé qu’il reste en charge des affaires croulantes du pays. Extrêmement croulantes, en effet, les affaires. Comme chacun sait.

Pour cela, il peut compter encore sur son équipe. Une joyeuse bande de collaborateurs mangés à la même sauce que lui, c’est à dire à la fois dehors et dedans, formant donc en quelque sorte un non-gouvernement. La même chose qu’un vrai, chimiquement pur, sauf que celui est constitué exclusivement, vous l’aurez compris, de ministres qui ne le sont plus, ministres. Je sais, on a du mal à suivre. Mais voilà sept ans que la « pensée complexe » du patron d’en haut ne cesse de nous embrouiller les méninges, de nous donner le tournis.

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Donc, on attend le prochain non-conseil de ce non-gouvernement et les non-décisions que ces non-ministres pourraient encore prendre : la couleur des crayons feutres dans les administrations, la température souhaitable du thé de cinq heures, le quota de billets gratuits pour la grande marade d’ouverture des Jeux olympiques, l’attribution d’un droit d’entrée prioritaire de Mme Nakamura à l’Académie Française avec option pour le Panthéon quand le moment sera venu…

Coup tordu

Mais, finalement, pas si couillon que ça, le petit arrangement en question. Car en réfléchissant bien, je veux dire en tentant de nous hisser au niveau de ces sublimes intelligences, de les rejoindre dans leurs exercices conceptuels de haute volée, il devient clair que M. Attal a réussi là une splendide opération.

Nul n’ignore que le Premier ministre est un fusible entre les mains du président. Le Premier ministre qui, le jour même de sa nomination, doit remettre au président une lettre de démission en bonne et due forme mais non datée, et que, de ce fait, le grand chef à plumes est en droit d’utiliser quand il le souhaite. Or, peut-on démissionner quelqu’un qui l’est déjà ? Assurément non. Ainsi, voilà notre non-Premier ministre absolument non démissionnable, indéboulonnable, du moins ce côté-là. Posé là à vie pour tout dire. Matignon à vie, pensez ! M. Mélenchon en rêvait. M. Attal l’a fait (enfin presque).

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Comment Coca-Cola « dope » les Jeux

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Partenaire historique des J.O., Coca-Cola, en injectant des millions de dollars, dope financièrement le CIO (Comité international olympique). Revers de la médaille, la firme américaine impose son goût et ses choix…


Dans « Le Miroir des Sports » du 28 janvier 1930, le lecteur tombait sur un article fort de café : « Des études très poussées par l’institut Pharmacologique de Hambourg ont démontré à l’évidence que les effets de la caféine sur les performances des athlètes sont positifs et forts puissants. »

À l’époque la lutte contre le dopage en est à ses balbutiements. En France il faut attendre les années 60 pour qu’elle s’active et le 10 juin 1966, sur la première liste officielle de produits interdits jamais publiée, on trouve la triméthylxanthine, nom scientifique de la… caféine. 16 ans plus tard, en février 1982, le CIO place également la caféine sur la liste des substances illicites (à partir d’un seuil fixé à 15 microgrammes / ml).

Comment en est-on arrivé là ?

Le docteur Jean-Pierre de Mondenard, l’un des meilleurs experts mondiaux de la lutte contre le dopage1, et historien hors pair du sport, a exhumé un entretien qu’Alexandre de Mérode (président de la Commission médicale du CIO de 1967 à 2002) donnait au journal L’Équipe le 16 mai 1983. Mérode y révèle que ce sont des tests effectués pendant les Jeux de Montréal en 1976 qui ont alerté et poussé le CIO à sévir : « Dès Montréal en 1976, nous avons été alertés par des concentrations anormales de caféine. À Lake Placid, ce fut pire et la situation s’aggrava encore à Moscou en 1980. Cela nous a conduits à interdire la caféine, puisque nos méthodes d’investigation le permettaient. »

À lire aussi, Martin Pimentel: Thomas Jolly, « mi-homme mi-coffre fort »

Cela pose toutefois un énorme problème. D’image de marque. Pour Coca-Cola. Depuis les jeux d’Amsterdam en 1928, la firme américaine est le sponsor numéro un du CIO (et depuis 1978, partenaire de la Coupe du Monde de foot…). Or son soda contient de la… caféine. La nouvelle réglementation du CIO jette alors un froid. Certes le Coca-Cola n’est pas un produit dopant mais il contient une substance prohibée, ce qui fait mauvais genre pour un partenaire de l’Olympisme.

Alexandre de Mérode est conscient de ce conflit d’intérêts et dans ses commentaires à L’Équipe, il tient immédiatement à ménager la firme américaine :
« Nous ne voulons pas empêcher les athlètes de boire du café ou du Coca-Cola. Nous voulons simplement éviter un usage abusif de la caféine par injections massives dans le corps humain, comme cela se produit actuellement. (…) Nous affirmons que notre intention n’est pas de porter tort à la firme Coca-Cola, ni d’entraver l’utilisation de cette boisson. Nous avons, en effet, fixé le seuil critique d’utilisation de la caféine à quinze microgrammes par millilitre. Cela équivaut à l’ingestion de vingt litres de Coca-Cola dans une journée et à plus de quinze litres de café normalement concentré. »

Il n’empêche, le Coca-Cola reste une boisson dont l’un des composants est un produit interdit… Mais l’ardoise va être effacée. En janvier 2004, l’AMA (l’agence mondiale antidopage, à qui il revient désormais d’établir la liste des produits interdits) supprime de la liste la… caféine ! Coca-Cola a-t-il fait pression pour obtenir cette suppression ?

Une chose est sûre, si la caféine a disparu de la liste des produits interdits, le dopage à la caféine n’a, lui, pas disparu.

Mercredi 18 mai 2005, le bureau de Sydney de l’agence américaine Associated Press publie un communiqué qui tombe comme un pavé dans la mare : « L’Agence mondiale antidopage envisage de remettre la caféine sur sa liste de produits interdits après les propos du capitaine de l’équipe d’Australie de rugby, George Gregan, qui a affirmé en avoir pris pour améliorer ses performances. Le directeur de l’AMA, David Howman, a déclaré aujourd’hui que les informations selon lesquelles Gregan et d’autres athlètes australiens utilisaient de la caféine pour améliorer leurs performances étaient « perturbantes ». »

L’AMA est perturbée mais ne bouge pas. Dans un rapport du 24 octobre 2006, intitulé « Le Sport et un monde en harmonie », le CIO reconnaît pourtant que la caféine a des « propriétés indéniables en matière d’amélioration des performances ».

11 juillet 2022. Alors que le Tour de France bat son plein, le quotidien Ouest-France publie une enquête au titre révélateur : « Le peloton fait-il n’importe quoi avec la caféine ? » ainsi présentée : « La consommation de caféine, aucunement interdite dans le peloton du Tour de France, n’est pas nouvelle. Ni dans le vélo, ni dans d’autres sports. Mais depuis quelques années, elle décolle. À tel point que cela inquiète certains acteurs du cyclisme… »

À lire aussi, Dominique Labarrière: À la Seine comme à la ville

14 avril 2024, le quotidien sportif L’Equipe s’interroge sur les nombreuses et violentes chutes qui depuis le début de la saison surviennent au sein du peloton. Parmi les causes évoquées, l’excès de caféine. Le témoignage du coureur Rudy Molard (Groupama-FDJ, 34 ans) est sans sucre à propos de la sur-consommation de café : « On en parle régulièrement entre coureurs parce qu’il n’y a pas de limite et je pense que ça peut jouer sur le caractère agressif de certains… ça a toujours existé mais je pense que les doses qui étaient prises étaient moindres au début de ma carrière par rapport à maintenant. » Mais toujours aucune réaction des autorités compétentes. C’est pourtant un café et l’addiction.

Si Paris 2024 devait être mis en bouteille, cela serait dans une cannette de Coca-Cola !

Avec les millions de dollars que Coca-Cola injecte dans le CIO, la devise olympique s’enrichit d’un qualificatif : «  plus haut, plus vite, plus fort, plus lucratif…  » Et offre à la firme américaine, sinon les pleins pouvoirs, du moins une influence certaine. En 1996, alors qu’Athènes rêvait d’accueillir en Grèce les Jeux du centenaire, le CIO a imposé Atlanta, la ville américaine d’où Coca-Cola gère son empire, le berceau de la maison mère.

Pour 2008, alors que le régime chinois suscitait l’indignation internationale, le CIO a désigné Pékin, à la grande satisfaction de la firme d’Atlanta, soucieuse de prendre pied sur le marché chinois, où elle s’est fait rapidement un allié de poids, l’entreprise Mengniu Dairy, géant des produits laitiers, dont une filiale s’emploie désormais à l’embouteillage du Coca-Cola. Ainsi en 2019, Coca-Cola, associé à l’industriel chinois, a signé avec le CIO un contrat de partenariat qui court jusqu’en 2032, et leur assure l’exclusivité des droits marketing mondiaux. Montant de la transaction ? Top secret. Selon le quotidien britannique Financial Times, Coca-Cola aurait investi dans l’opération 3 milliards de dollars… À ce tarif, la firme en impose… jusque dans la sélection des sports…

À chaque nouvelle olympiade, outre les 28 sports labellisés olympiques (de l’athlétisme à la natation en passant par toutes les autres disciplines traditionnelles), le programme propose de nouveaux sports, des sports dits additionnels, en démonstration, proposés par le pays organisateur, mais validés par le seul CIO. Pour Paris 2024, il y avait quatre places à prendre. Dans cette optique, la fédération de pétanque avait déposé sa candidature, car la pétanque n’est pas seulement un divertissement de vacanciers, c’est aussi un sport international, fédéré dans 165 pays, avec 200 millions de pratiquants, sur les pourtours de la Méditerranée et dans le Maghreb, mais aussi en Asie, notamment en Thaïlande, où il  est très populaire. Las, la pétanque est restée sur le carreau. Les sports validés par le CIO ont été le surf, l’escalade et le skate-board (tous trois déjà retenus aux Jeux de Tokyo en 2021) plus un petit nouveau : le breakdance !

À lire aussi, Jonathan Siksou: Place de la discorde

Fort lucidement, Joseph Cantarelli, alors président de la Fédération française de pétanque et de jeu provençal, analysait les raisons de cet échec : «Comme vous toutes et tous j’accuse ce que nous ressentons comme un «coup dur» qui vient de frapper notre intime conviction de voir les Sports de boules et donc notre sport pétanque entrer, sur nos terres, aux JO de Paris. Comme quoi les critères d’entrée aux JO ne sont plus exclusivement liés aux valeurs fondamentales du sport en tant que tel mais plutôt et de préférence au seul succès médiatique d’un sport ou d’une «pratique» auprès de la jeunesse. » Tout est dit. Si le breakdance a été sélectionné c’est qu’il s’adresse à la jeunesse, la cible prioritaire de Coca-Cola. Et le programme officiel annonce la couleur : « Et si on dansait à Paris au cœur de l’été ? À peine cinq ans après avoir été reconnu en tant que sport de haut niveau en France, le « breaking » s’apprête à faire son entrée triomphale aux Jeux Olympiques de Paris 2024. Et pas n’importe où. Les 32 athlètes qualifiés – 16 B-Girls et 16 B-Boys s’affronteront en duel les 9 et 10 août prochain sur l’iconique Place de la Concorde. » Place qui sera aux couleurs de Coca-Cola.

Dans ces conditions, la désignation de la chanteuse Aya Nakamura pour la cérémonie d’ouverture et du rappeur Jul pour allumer la flamme à Marseille coulent du goulot d’un soda… C’est moins une volonté politique qu’un choix publicitaire pour satisfaire Coca-Cola, qui dans l’optique des JO a organisé le Coca-Cola Music Tour, une tournée de concerts à travers la France, pour mettre les Jeux en musique et Paris en bouteille.

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  1. Voir https://dopagedemondenard.com/ ↩︎

Donald Trump passé du côté cœur…

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À Milwaukee, lundi soir, Donald Trump a été accueilli triomphalement à la convention républicaine, au surlendemain d’un attentat qui aurait pu lui couter la vie. Il a annoncé la nomination du sénateur de l’Ohio J.D. Vance1 comme colistier. Le mobile du tireur Thomas Matthew Crooks reste pour l’instant inconnu.


La cause est entendue. Au mois de novembre, Donald Trump sera élu président des États-Unis. À cause de la sénilité intermittente de Joe Biden et du dernier débat entre eux, qui l’a vu sombrer. Grâce à, si j’ose dire, la tentative d’assassinat dont Donald Trump a été victime et qui à un centimètre près aurait pu être mortelle.

Le comportement de Trump, après la commission de ce crime, a été admirable de courage et supérieurement habile sur le plan politique, en manifestant des vertus de combat et de résistance magnifiées par la tragédie à laquelle il avait échappé par miracle, une sauvegarde exploitée comme un signe du destin.

Les États-Unis, une démocratie violente

Il ne peut plus perdre après un tel concours de circonstances. Joe Biden a admis qu’il avait eu tort de demander qu’on « cible » son adversaire même s’il a précisé ce qu’il entendait par là et qui n’avait rien à voir avec l’agression qui a suivi. Il a confirmé qu’il irait jusqu’au bout tout en comprenant ceux qui s’inquiétaient pour sa santé et souhaitaient son abandon.

Les quelques réactions odieuses de gens regrettant que Donald Trump s’en soit tiré comptent peu face à un climat général qui semble avoir pris la mesure des risques de la violence verbale et de l’outrance développées lors de la campagne présidentielle. Donald Trump, pas exempt de critiques sur ce plan, a pris conscience des devoirs qui devaient être les siens désormais en faisant un appel à l’unité.

A lire aussi, Dominique Labarrière: Trump: petit cours de journalisme politiquement correct

Il faut à ce sujet relever la remarquable influence de ses deux conseillers principaux, une femme très professionnelle et respectée par tous (Susie Wiles) et un homme, ancien militaire, chargé de débusquer les erreurs et les points faibles de ses contradicteurs et opposants (Chris LaCivita). La nouveauté est que Donald Trump les écoute et s’en porte bien.

Mais au-delà de sa victoire programmée, j’ai été frappé par l’extraordinaire élan de sympathie et de solidarité qui a montré à quel point la tentative d’assassinat sur Donald Trump avait fait radicalement changer le regard sur lui, non pas seulement de ses soutiens et des militants républicains – l’ovation interminable à la Convention républicaine ayant ému Trump lui-même – mais des citoyens américains qui n’étaient pas favorables à sa cause et des médias qui lui étaient hostiles.

Trump nous surprendra toujours

Ces derniers n’ont sans doute pas changé d’avis sur l’homme, sa personnalité et son projet mais ils ne pouvaient pas faire autrement que d’être pris dans ce mouvement dominant d’accalmie de la politique partisane au bénéfice d’une concorde magnifiquement conjoncturelle. Le signe le plus éclatant de cette parenthèse de grâce a été le fait que tous les médias ont interrompu leur programme pour montrer en direct Donald Trump dans son triomphe à la Convention républicaine.

Au mois de novembre, son élection acquise, il lui restera à démontrer quels effets ont eu sur lui et sur sa pratique du pouvoir les événements dramatiques de ces derniers jours. Pour ma part, si j’ai désapprouvé évidemment son comportement judiciaire, son mépris pour l’État de droit et sa provocation ayant inspiré l’attaque du Capitole, je n’avais pas été un critique compulsif de son action lors de son premier mandat, au moins jusqu’à l’arrivée du Covid.

Pour le second mandat, j’entends bien que Donald Trump est certainement capable du pire mais son imprévisibilité peut aussi le conduire vers le meilleur. En tout cas, avec lui, il se passe toujours quelque chose et il ne sera pas un président amorphe. L’énorme changement dont Donald Trump sera forcément enrichi est que, depuis le crime dont il a réchappé heureusement et les conséquences qu’il a engendrées, il est passé, aux États-Unis et dans une grande partie du monde, du côté cœur.


  1. À ce sujet, relire J. D. Vance: un Éric Zemmour américain?, Lucien Rabouille, Causeur.fr (2002) ↩︎

Venise: quand l’art se fait identitaire

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© ALFONSO CATALANO/Shutterstock/SIPA

La nouvelle édition de la grande exposition d’art contemporain a un titre explicite: « Étrangers partout »1. Et les organisateurs semblent convaincus que l’art a pour mission de changer les réalités des rapports humains dans le monde réel. Quitte à enfermer les artistes dans des cadres réducteurs ?


Tous les deux ans, pendant près de six mois, il est possible de visiter l’Exposition internationale d’art contemporain de la Biennale de Venise dans les Giardini bucoliques de la Sérénissime, jardins où chaque pays invité dispose d’un pavillon propre qu’il confie à un artiste ou à un collectif le temps de l’événement.

Les pays qui n’y sont pas représentés exposent aussi, mais ailleurs dans la ville – à l’Arsenal, dans les églises, les galeries privées ou certains musées…

L’art contemporain s’immisce partout, dialogue parfois harmonieusement avec le legs architectural et pictural de la Renaissance, s’y heurte souvent. La Biennale d’art contemporain de Venise est un événement culturel majeur ; à ce titre, elle révèle quelque chose de notre époque.

Être né quelque part, dans un corps

Pour assurer la curation de cette 60e édition, la direction de la Biennale a choisi – pour son « regard étranger » – le Brésilien Adriano Pedrosa, commissaire d’exposition et conservateur du Musée d’art de São Paulo (MASP) depuis 2014. Pedrosa est connu pour sa programmation engagée, programmation qui fait la part belle aux thématiques identitaro-communautaires : les sexualités, les féminismes, la condition afro-atlantique. Pour la Biennale, il ne déroge pas à cet engagement en choisissant de traiter de la beauté « marginalisée, exclue, oppressée, effacée par les matrices dominantes de la géo-pensée ». L’objectif est clairement affiché : il s’agit de « cannibaliser les cultures postcoloniales hégémoniques », de l’aveu même du directeur de l’événement à l’origine du choix de Pedrosa. Se présentant comme queer, il revendique le fait d’assumer la dimension politique de sa sélection. Quant au jury, il est présidé par Julia Bryan-Wilson, professeur d’histoire de l’art « LGBTQ+ » à l’Institut pour l’Étude de la Sexualité et du Genre de l’Université de Columbia.

A relire, Elisabeth Lévy: La fin du monde commence à Venise

Cette Biennale porte le titre explicite « Stranieri Ovunque – Foreigners Everywhere – Etrangers partout ». Elle ambitionne de questionner le phénomène de la migration, de problématiser l’extranéité culturelle, géographique et de genre. Par souci de « visibilisation », elle a ostensiblement évincé les artistes qui n’appartiennent pas à des groupes minoritaires.

Les trois écueils de l’art identitaire

Il n’y a, en soi, pas de thème que l’art devrait éviter. Celui de la condition de l’étranger et de notre rapport à lui – étant entendu que nous sommes aussi, dans une certaine mesure, les étrangers d’autrui – est parfaitement légitime, là n’est pas le sujet. Si la politisation du discours artistique peut affaiblir ou contraindre celui-ci, elle lui a souvent été corrélative. On peut même affirmer que l’art peut avoir une fonction politique, sans le réduire à cela.

Ce qui interpelle ici, c’est à notre sens la conjonction de trois tentations anti-artistiques, voire anti-sociales : le littéralisme simplificateur, l’inversion discriminatoire et le fixisme argumentatif. La première a trait à l’un des paradoxes de la pensée néo-progressiste, que l’on retrouve poussé à l’extrême dans la doxa woke, à savoir celui d’une fascination pour le registre métaphorique couplée à une susceptibilité extrême au texte – ainsi un simple mot peut-il, sans nuance, constituer une violence aussi grave qu’une agression physique. L’inversion discriminatoire est, en quelque sorte, l’aboutissement du processus de discrimination dite « positive » ; elle ne se contente pas de promouvoir arbitrairement un individu au détriment d’un autre sur le fondement de considérations identitaires, mais agit délibérément de manière à exclure l’autre pour ce qu’il est, en l’essentialisant. Enfin, le fixisme argumentatif correspond à la sclérose de la pensée, où, au lieu d’évoluer avec l’exercice dialectique démocratique, l’argumentation se fige et se réduit en injonctions morales quasi-religieuses. Une grande partie de la « recherche » post-coloniale et de genre ne fournit plus de savoir scientifique et se contente d’exemplifier à l’envie, d’illustrer un propos axiomatique.

Le délitement du mérite

Le Lion d’Or a été attribué cette année au Pavillon australien. L’artiste aborigène Archie Moore y évoque les effets de la colonisation et des conditions de vies douloureuses subies par les Premières nations autochtones. Un gigantesque tableau généalogique lacunaire tracé à la craie environne des archives juridiques recensant des innombrables morts indigènes ordonnées avec la froideur des registres administratifs. Le Pavillon kosovar a été récompensé pour avoir su saisir le jury par son « activisme féministe ». Quant au collectif Mataaho de Nouvelle-Zélande, également lauréat, il n’a pas manqué d’exprimer sa gratitude à Pedrosa pour son action en faveur des communautés autochtones et des minorités de genre. Les prix spéciaux sont à l’avenant : l’artiste palestinienne engagée Samia Halaby a dédié son prix aux jeunes journalistes gazaouis ; l’artiste queer La Chola Poblete s’oppose pour sa part à l’exotisation des corps et des vécus sud-américains.

A lire aussi, Jonathan Siksou: Se jouer des Jeux

Tous ces travaux ont une valeur artistique, mais la qualité réelle de celle-ci tend à disparaître sous le poids des obsessions communautaires de ceux qui ont la charge de les juger. Voilà l’un des écueils majeurs de l’identitarisme : en valorisant, il dévalorise ; ses célébrations sont conflictuelles et non plus joyeuses ; l’universalité de la condition humaine est, par lui, en tous points déniée.

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  1. Voir https://www.labiennale.org/it ↩︎

À gauche, la soupe à l’union

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Le premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure, appelle à « faire barrage » au Rassemblement national dans un discours place de la République à Paris, après l’annonce des résultats du premier tour des élections législatives, 30 juin 2024 © ISA HARSIN/SIPA

Construire une gauche «de gouvernement» à l’ombre de Jean-Luc Mélenchon relève de l’utopie. Trop de divergences séparent LFI des classiques socialistes et communistes. Les chefs disent «faire barrage au RN» mais les militants sont-ils prêts à toutes les compromissions ? Qu’elle soit cocue ou prise en otage, la gauche est dans l’impasse.


Le 9 juin, quand tombe à 20 heures le résultat des européennes, les socialistes sont les rois du pétrole. Avec leurs 14 %, ils sont en tête des forces de gauche. « Quand on a vu ça, on s’est dit qu’on pouvait rêver de mener à nouveau la bataille pour l’hégémonie, se souvient un proche d’Hélène Geoffroy, maire socialiste de Vaulx-en-Velin. Faire renaître une gauche réformiste qui s’oppose à la gauche de rupture. »

Et puis, patatras !, dans l’heure qui suit, Emmanuel Macron annonce la dissolution et l’organisation de législatives. « À partir de ce moment-là, on a disparu des écrans radar, enrage cet ancien élu socialiste. Olivier Faure nous a sacrifiés. Et LFI a pris immédiatement le leadership. »

Quand on regarde en replay la manière dont le numéro un du PS s’est comporté ce soir-là sur le plateau TF1, la rapidité avec laquelle il s’est couché au pied de Mathilde Panot, on est en effet confondu. « Par sa reddition en direct face à LFI, Faure a cassé la dynamique que portait la candidature de Raphaël Glucksmann », ne décolère pas notre correspondant.

Impasse

Pourtant, selon ce fin observateur de la vie politique, beaucoup d’élus et d’électeurs du PS pensent que l’alliance avec LFI est une impasse. Non seulement parce que les Insoumis évacuent le logiciel réformiste au profit d’un populisme qui n’a rien à envier à celui de droite, mais aussi parce qu’ils investissent sur un électorat minoritaire et communautarisé, celui des banlieues, qu’ils réduisent à l’électorat musulman et plus particulièrement à celui qui adhère à l’influence islamiste. Le problème est que celui-ci, très conservateur et religieux, ne partage aucune des références historiques de la gauche.

Même le rapport au statut d’exploité n’est pas le même. À gauche, reconnaître l’injustice conduit, en théorie, à la lutte pour l’égalité. Mais dans le logiciel communautariste, la victimisation débouche sur l’appel à la vengeance, donc à l’inversion de la domination. Pour les multiculturalistes, l’égalité n’est pas un objectif, au contraire c’est un leurre, un moyen pour les dominants d’échapper à la punition, de ne pas rendre de comptes.

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Quelle solution alors quand on se retrouve dans une telle impasse ? « Accepter de prendre sa perte et reconstruire une offre politique en lien avec notre histoire », pense un élu de gauche républicaine dans une commune de banlieue parisienne, représentatif en cela de beaucoup d’anciens électeurs socialistes.

Mais pour une autre militante PS, collaboratrice d’élue et bonne connaisseuse des instances socialistes, que nous avons interrogée, Faure nourrit un autre projet : empêcher toute reconstruction d’un courant ouvriériste et social-démocrate. « Il a tout fait pour tuer dans l’œuf ce regain,analyse-t-elle. L’arrivée de nouveaux adhérents attirés par l’image de Glucksmann l’aurait menacé directement pour les congrès à venir, en désavouant sa stratégie d’alliance. Il préfère rester le gestionnaire d’un syndic de faillite plutôt que prendre son risque. »

Bien sûr, tout le monde au PS n’est pas aussi dur envers Faure. Pour un membre du conseil national, qui nous a demandé l’anonymat, les fautes sont à chercher ailleurs : « Il y a eu des efforts au sein de la Nupes pour empêcher que LFI ne soit la force dominante, rappelle-t-il. Mais encore faudrait-il pouvoir compter sur les écologistes. Or ils sont structurellement et idéologiquement plus proches de LFI que de la gauche à l’ancienne, et reconstruire une offre réformiste ne les intéresse pas. Et puis du point de vue de leur boutique, le calcul a été bon : en misant sur le Nouveau Front populaire et en réduisant la question des législatives à la lutte contre le RN, le mauvais score de Marine Tondelier aux européennes a été effacé. » De fait, celle-ci, qui commençait à être contestée, a sauvé son poste. Le congrès extraordinaire, qui devait tenter de lui faire la peau, a été annulé.

Même constat amer s’agissant du Parti communiste. « Ceux qui y incarnent la tradition marxiste ont presque entièrement disparu, regrette notre cacique socialiste. Les Elsa Faucillon et compagnie partagent plus de choses avec Rima Hassan qu’avec Fabien Roussel. » Mais alors, à quoi bon faire alliance, au sein du Nouveau Front populaire, avec des formations qui sont toutes sous l’influence plus ou moins directe de Jean-Luc Mélenchon ? Pour une raison simple. Sur ce point-là, tous nos interlocuteurs sont d’accord : l’union à gauche n’est pas une posture, c’est un mythe. Ce mythe est d’une telle puissance qu’il est impossible de se prononcer contre, sans se mettre à dos ses propres électeurs. L’union, c’est à la fois le but et le chemin, le combat et la victoire.

Dans ce cadre, la marge de manœuvre de Faure est étroite. Selon un ancien élu qui le connaît bien, « Olivier n’est pas un homme qui peut refonder un récit. Il est le décalque de François Hollande, il en a les failles, mais en possède aussi le principal atout. Il faut savoir reconnaître que si cet homme a gagné trois congrès, c’est qu’il sait manœuvrer. Il possède un sens aigu du point d’équilibre dans le rapport de forces. Il comprend où sont les points de bascule et comment en faisant bouger un mec, tu fais tomber toute la ligne des dominos. »

Subtilités

Mais sur le terrain, ce genre de subtilités est de plus en plus mal compris. Propos entendu lors d’une discussion avec une militante de longue date : « S’allier avec des populistes pour sortir des populistes, ça ne fait pas sens. Le réflexe de faire barrage au RN est sain, mais concrètement les gens ont du mal à croire qu’en votant pour un David Guiraud, qui qualifie le Hamas de mouvement de résistance, ils combattent l’extrême droite. Cela joue sur les reports de voix. »

Un constat partagé seulement en partie par les huiles du parti : « La stratégie de LFI dérange, mais il n’empêche qu’elle a payé, remarque le membre du Conseil national du PS cité plus haut. Ils sont passés de 6 à plus de 9 % aux européennes en prenant le clou Gaza/génocide et en l’enfonçant dans le mur de l’information jusqu’à le fracturer. Aujourd’hui, il leur suffit d’exhiber Rima Hassan pour mobiliser l’électorat des banlieues. » Alors certes, la question de la promotion virulente de l’antisémitisme gêne aux entournures. Mais selon nos témoins, candidats et électeurs la résolvent très vite en opérant des distinctions au sein de LFI.

Ainsi Jean-Luc Mélenchon cristallise la colère et le ressentiment de beaucoup d’électeurs de gauche mais paradoxalement, en les fixant sur sa personne, il permet d’épargner son mouvement. François Ruffin est ainsi mis en avant pour rendre les Insoumis fréquentables. Si les socialistes voient bien que Jean-Luc Mélenchon veut rejouer le baiser de la mort donné par Mitterrand au PC, avec Olivier Faure dans le rôle de Georges Marchais, ils n’ont guère d’autre choix que la soumission. Une partie de leurs fiefs, notamment en région parisienne, reposent sur la mobilisation des quartiers, or aujourd’hui ce sont LFI et ses alliés islamistes qui donnent le ton, ils n’ont donc plus les moyens de se payer une conscience.

Les socialistes sont-ils condamnés à cheminer avec LFI ? « Pas forcément, répond un cadre du PS. On ne le crie pas sur les toits, mais le résultat du Nouveau Front populaire au premier tour des législatives est décevant. En pourcentage de voix, on a fait moins que l’addition des scores de la gauche aux européennes. La vérité est qu’il n’y a pas eu d’élan dans les votes, à cause d’un positionnement de LFI qui fait fuir une partie des électeurs. »

La radicalité de Jean-Luc Mélenchon ne laisse d’interroger. « Il pense sincèrement que la période est prérévolutionnaire et qu’une prise de pouvoir sans les urnes est possible,s’inquiète une ancienne élue socialiste. Il n’a aucun intérêt à faire gagner la gauche. D’où ses sorties ambiguës sur le poste de Premier ministre, son jeu avec Rima Hassan, ses discours enflammés sur la Palestine. Mélenchon s’est lepenisé. »

Discours de Jean-Luc Mélenchon lors de la soirée électorale de La France insoumise, à l’annonce des résultats provisoires du premier tour des élections législatives, Paris, 30 juin 2024. ISA HARSIN/SIPA

À l’heure où ces lignes sont écrites, soit à la veille du second tour des législatives, un bruit court dans tout Paris. Grâce à la mécanique des désistements entre carpes et lapins, les gaullistes, la Macronie et la gauche espèrent bien priver le RN et ses alliés de la majorité absolue et seraient en train de négocier la constitution d’un gouvernement de large alliance, dont le premier acte serait le rétablissement de l’impôt sur la fortune. D’autres parient plutôt sur une coalition allant seulement, si l’on ose dire, du PC à LR, excluant donc à la fois le RN et LFI.

Il s’agit en somme de fabriquer un gouvernement incarnant le cercle de la raison. Une perspective qui décontenance nos interlocuteurs, embarrassés par le scénario de l’élection volée, mais soulagés de gagner un peu de temps, même s’ils savent que c’est pour cinq minutes ou trois ans monsieur le bourreau. « Existe-t-il encore un commun qui permette de donner un sens à cette forme d’union nationale ? » se demande l’un d’entre eux. Une question que personne n’ose poser à voix haute. Parce qu’elle contient la réponse.

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Docteur Iman Sanzeux: chic, mon médecin porte le hijab!

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L’entrisme et le séparatisme islamistes à l’hopital progressent. Plongée inquiétante dans l’univers des soignants d’Instagram, alliés de l’OMAS et des Frères Musulmans…


Dans un entretien donné au Figaro[1] sur l’influence des Frères Musulmans en France, Monsieur Bertrand Chamoulaud, Directeur National du Renseignement Territorial, déclare : « Nous suivons aussi de près l’Organisation Musulmane des Acteurs de la Santé (OMAS), qui tente de faire entrer l’islam dans les hôpitaux, notamment pour que les infirmières soient voilées. Ou que les patientes soient soignées par une femme. ». Quelle est cette association qui diffuse l’idéologie des Frères Musulmans, activement surveillée par la Police Nationale ?

La menace de l’OMAS

Dans sa déclaration à la préfecture, l’OMAS prône vouloir « fédérer l’ensemble des acteurs de santé afin de proposer de nouvelles avancées et une autre conception de notre métier, inspirées de valeurs musulmanes […] à la lumière des principes de l’Islam. » Avec une première création en préfecture en 2015 (année funeste des attentats) dans la banlieue lyonnaise, l’OMAS ouvre successivement des succursales à Paris et en Normandie. Bien que très active sur les réseaux sociaux, l’OMAS offre le paradoxe d’être relativement opaque sur ses membres et ses financements. À peine, en épluchant les réseaux sociaux, découvrons-nous que le président actuel est le Docteur Mehdi Mhatli, chirurgien ORL du Centre Hospitalier de Draguignan.

Sur le compte Facebook de cette association, des sympathisants musulmans laissent des commentaires où ils sont en recherche de réponses sur le port du voile à l’hôpital (« Salam Aleykhoum. Je cherche des personnes au CHU de Tours […] pour quelques questions, surtout question hijab ») ou en quête d’un soignant qui pratique la médecine prophétique (« Est-ce qu’il y a parmi vous des psychiatres qui auraient à la fois un référentiel religieux et psy pour un avis. »).

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Sur Instagram, l’OMAS se veut le porte-parole d’évènements centrés autour de la religion musulmane, d’activités universitaires ou de soutien à la cause palestinienne. Dans une story, l’OMAS incite ses followers qui sont étudiants en médecine à l’USPN de Bobigny à voter pour des jeunes acquis aux idées des Frères Musulmans, lors des élections d’associations étudiantes (notamment l’AESP13), pour « renforcer notre respect au sein de la faculté. Si nous négligeons cette responsabilité, les conséquences pourraient être néfastes ». Une autre story fait la promotion de « notre sponsor 570easi sur les finances islamiques ». Une autre story, encore, invite ses followers à un week-end de formation au Château de Vallery, dans l’Yonne, pour assister à une table ronde humanitaire en présence d’associations telles que Palmed, Kebchi, Ummanité, le Collectif des Blouses Blanches pour Gaza, De l’Eau pour Tous. Un rapport, disponible sur Internet, désigne Palmed comme « l’exemple le plus significatif d’un réseau européen affilé aux Frères Musulmans, structuré comme un syndicat professionnel »[2]. L’association Kebchi, quant à elle, propose à ses adhérents le sacrifice d’un mouton en Afrique : « Une fois votre mouton immolé, vous pourrez découvrir votre sacrifice en photo »[3] et en vidéo. On s’étonne que des soignants français, dont l’engagement est d’être au service de la vie, puisse faire la promotion d’une association qui diffuse à ses adhérents du contenu audiovisuel de bêtes égorgées. Mais continuons.

Le Dr Iman Sanzeux, fondatrice de l’OMAS et influenceuse sur Instagram

Parmi les membres fondateurs de cette association rattachée aux Frères Musulmans (qu’elle assure, depuis, avoir quitté) : le Dr Iman Sanzeux (pseudonyme utilisé par le Dr Nour El Iman Kaddouri, médecin généraliste de 32 ans qui exerce dans les Hauts-de-France chez SOS Médecins) aux 11,6 K de followers sur Instagram. Avant d’être active sur Instagram, le Dr Kaddouri utilisait également le pseudo de « The Hijabi-doc-to-be » sur Facebook ; interne en médecine générale, elle livrait publiquement son vécu d’étudiante voilée ou rédigeait des billets d’humeur sur le thème de la santé. Si le Dr Sanzeux a quitté l’OMAS, en a-t-elle pour autant quitté l’idéologie frériste ?

En 2019, alors qu’elle était encore interne, le Dr Sanzeux militait contre la législation en matière de laïcité pour les agents du service public, qu’elle vit comme « une humiliation » l’empêchant de garder le voile : « Tant que la loi impose cette neutralité et cette laïcité, […] on n’aura pas de moyen de pression pour y faire face et on continuera à subir ce « dévoilage » forcé. » Elle s’insurge : « Où sont nos instances, où sont nos représentants pour faire bouger les choses à l’échelle nationale ? »

Aujourd’hui diplômée, elle livre sur son compte Instagram, qu’elle prône être une vitrine de son activité médicale, des récits de sa vie privée mais aussi des conseils en matière de religion musulmane, de port du voile et de médecine prophétique. Le Dr Sanzeux évoque son propre retour à l’Islam avec le port du voile à 19 ans, après avoir grandi « dans un environnement exclusivement français « de souche » ». Sur sa conception de la médecine, elle écrit qu’« Allah est le guérisseur, tout le reste n’est que sabab » (« la cause », en arabe). À une follower qui la sollicite pour des conseils matrimoniaux, le Dr Sanzeux lui répond de veiller « à la religiosité du frère » ; à une autre follower qui lui demande son avis sur la Hijama (un outil de la médecine prophétique, à base de ventouses), le Dr Sanzeux approuve cette « sunna prophétique recommandée ». Pourtant, les conséquences délétères de cette pseudoscience islamique ont été régulièrement étiquetées par les autorités scientifiques. À de jeunes étudiantes qui s’inquiètent qu’on leur demande de retirer le hijab à l’hôpital pour des raisons de laïcité, le Dr Sanzeux fustige « la hagra qu’on vit », conseille d’« accepter que c’est temporaire » et de s’installer ensuite en libéral où il n’y a « aucun problème, tu fais ce que tu veux […] mâcha allah ».

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Un article du Ouest-France du 4 juillet dernier[4] relaie l’indignation du Dr Sanzeux au soir du premier tour des élections législatives, qui fustige le succès du Rassemblement national dans sa région. Dans une diatribe vis-à-vis de sa patientèle, à laquelle elle reproche d’avoir élue Marine Le Pen comme députée, elle affirme avoir pris la décision de partir en représailles de ces résultats : « Allez, il est grand temps de songer aller soigner d’autres cœurs ailleurs, moins malades des autres. ». Pourtant, déjà en 2021 (donc, sans aucun rapport avec les législatives), le Dr Sanzeux critiquait dans une story la région de ses patients : du Nord, elle écrit que « c’est vraiment un cadre de vie nul » et qu’elle avait, en revanche, « beaucoup aimé le Qatar ». En 2021, toujours, à une internaute qui lui demande « Tu as un pouvoir, améliorer la situation d’un pays dans le monde, lequel choisiriez-vous ? » (sic), le DSanzeux répond spontanément l’Algérie car « c’est un peuple et un pays incroyables ». Dans une publication où elle livre son analyse du livre Rester barbare de Louisa Yousfi, le DSanzeux s’interroge sur les blancs (« on se demande alors mais qu’attendre des blancs ? »), les fustige (« ces blancs […] enfermés dans leur bienpensance, nous n’avons que faire de leur sollicitude […] », eux qui ont pour projet de « mieux asseoir leur domination ») ; appelle à la violence envers les blancs (« la seule manière de repousser le néant, c’est par la violence qui devient alors le seul moyen d’entrer en communication avec les blancs ») et revendique d’être barbare (« vous le terminerez [ce livre] en voulant tatouer barbare sur votre front »). Que les patients nordistes du Dr Sanzeux (ou plutôt, du Dr Kaddouri) se rassurent donc : avec ou sans Marine Le Pen, la France et ses habitants (à la peau blanche) n’ont jamais eu la faveur de leur généraliste.

Mais le Dr Sanzeux ne s’arrête pas là et, depuis les attentats du 7 octobre, partage à ses followers ses points de vue en matière de géopolitique sur son compte Instagram. Nous y voyons fleurir des tags pro-palestiniens (#wearepalestine, #freepalestine, #withgaza), des appels au boycott « des entreprises qui soutiennent l’occupation » et des incitations à « occuper l’espace public » au sujet de la Palestine. Cet hiver, le Dr Sanzeux publie une vidéo où elle annonce avoir blacklisté une patiente de la structure où elle exerce, sous le motif que cette dernière aurait informé le secrétariat qu’elle souhaitait être soignée par un médecin qui ne soit ni le Dr Sanzeux, ni un autre de ses confrères (qui aurait lui aussi un nom d’origine maghrébine). Le Dr Sanzeux poursuit, « on lui a dit qu’il était impensable de choisir son médecin et encore moins selon des critères ethniques ». C’est, d’une part, bafouer l’article 6 du Code de Déontologie des Médecins (« Le médecin doit respecter le droit que possède toute personne de choisir librement son médecin ») ; d’autre part, en l’absence de contexte plus élargi, diffamer bien vite qu’il s’agit d’un choix à caractère discriminatoire. Dans les commentaires, à une internaute qui réagit en postant un commentaire à caractère antisioniste au sujet de cette patiente (« Je suis sûre qu’elle aime trop Israël et la betterave cette conne »), le Dr Sanzeux approuve avec un like et ajoute un commentaire dans lequel elle s’esclaffe.

Dans le Coran, un hadith du Prophète enseigne : « Soyez bienveillants avec votre prochain et Celui qui est dans les Cieux sera miséricordieux envers vous. » Pour le Dr Sanzeux, co-fondatrice de l’OMAS, la bienveillance enseignée par le Prophète semble s’être arrêtée aux portes de la charte de la laïcité, des blancs et des Israéliens.

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[1] Christophe Cornevin et Jean Chichizola. « Islamisme, ultragauche, écologie radicale… les nombreux défis du patron du renseignement territorial. », Le Figaro, N°24811, Édition du 31 mai 2024, p. 2

[2] « Islamist Organizations », https://jcpa.org/the-spiders-web/chapter-i-delegitimization-in-germany/islamist-organizations/, Consulté le 12 juillet 2024.

[3] « Kebchi Solidarity », https://kebchi.fr/notre-concept.html, Consulté le 12 juillet 2024.

[4] Mélissa Boufigi. « Iman, femme médecin voilée en territoire RN », https://www.ouest-france.fr/societe/racisme/temoignage-cest-un-centre-communautaire-iman-femme-medecin-voilee-en-territoire-rn-097ee6a6-394d-11ef-9f2b-c38da737f062, Consulté le 12 juillet 2024.

La gauche «victorieuse» avoue des connivences politico-médiatiques et tolère un racisme anti-blanc décomplexé

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De gauche à droite, les députés d'extrème gauche Clémentine Autain, Marine Tondelier et Ian Brossat, Montreuil, 18 juin 2024 © ISA HARSIN/SIPA

La France s’enfonce toujours plus loin dans l’abime racialiste


Quel spectacle désolant ! Compromissions, tripatouillages et magouilles à tous les étages. Et des hectolitres de moraline pour nous enrober tout ça. Représentants politiques, sportifs millionnaires, magistrats syndiqués et artistes subventionnés se sont plu à se faire peur en criant de concert au loup fasciste. Les médias aux ordres du pouvoir et l’audiovisuel public gauchisant ont déversé leurs mensonges et ignoré pareillement la vie des Français sacrifiés à leurs désirs sociétaux, diversitaires et immigrationnistes, en particulier ces Français de la France périphérique qu’ils méprisent, tous, de tout leur cœur.

Que la fête recommence !

L’affront républicain a parfaitement fonctionné. Nombre d’électeurs ayant voté pour Ensemble ou le NFP se plaindront d’ici peu du pouvoir d’achat continuant de dégringoler, de l’UE continuant d’imposer à la France ses diktats, de l’immigration continuant de nous submerger, de la désindustrialisation continuant de plonger le pays dans la dépendance économique et le chômage, des oukases écologiques retardant la relance du nucléaire ou promouvant la décroissance, etc. Nous leur rappellerons alors durement que, au nom d’un « barrage républicain » carnavalesque, ils ont voté pour des formations politiques ayant décrété que la France était bonne à jeter aux ordures. Européistes fédéralistes, davosiens mondialistes, écologistes radicalisés ou immigrationnistes, islamo-compatibles ou non, tous ne pensent qu’à désagréger notre pays. Pour ce faire, les uns ont choisi d’accélérer le remplacement de son peuple historique – comprenant les Français dits de souche aussi bien que des descendants d’immigrés parfaitement intégrés – en augmentant l’immigration sous tous les prétextes possibles, y compris le prétexte climatique. Les autres ont décidé de satisfaire les « élites » (financières, politiques, médiatiques, artistiques) dont ils se targuent ou envisagent de faire partie et qui sont à l’abri du besoin et des conséquences d’une immigration communautariste et islamisante. S’ajoutent à ces funestes motivations les marécageuses tractations nécessaires à la survie politique d’arrogants vieux chevaux centristes ou de dispensables éléphants socialistes et à l’émergence de nouveaux politicards professionnels, avides des privilèges que seule une République corrompue peut offrir d’une manière si dispendieuse.  

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LFI est satisfaite. Il y a de quoi. Malgré un antisionisme antisémite de plus en plus brutalement affiché, malgré les violences staliniennes internes, malgré des propositions économiques plus démagogiques les unes que les autres, malgré des candidats flirtant avec un fascisme si souvent attribué au camp d’en face, le mouvement mélenchoniste a mis au pas ses « alliés » et a su tirer son épingle du jeu électoraliste. « Aujourd’hui, nous nous préparons à gouverner, nous nous préparons à appliquer le programme qui est le nôtre », assure Manuel Bompard. De son côté, l’apathique Olivier Faure justifie l’accord luciférien avec LFI et le NPA : le PS a doublé le nombre de ses députés, l’anesthésiant François Hollande est de retour, l’ex-ministre macroniste Aurélien Rousseau rentre au bercail. Ce dernier avoue sur son compte X devoir sa victoire aux castors des médias privés et publics : « Ma gratitude à la presse, je pense en particulier à la PQR, aux antennes de France bleue, et au journal Le Monde, mais aussi La Croix, Libé ou l’Humanité. Leur travail a été indispensable et à la hauteur de ce moment historique. Une presse libre et de très haut niveau (sic). » Une certaine connivence politico-médiatique est étalée sans vergogne au grand jour. Il est vrai que les médias français « libres » n’ont pas fait dans la demi-mesure pour « barrer la route à l’extrême droite ». Pour s’en convaincre, il suffit, par exemple, de comparer le traitement des informations visant les brebis galeuses du RN et celui concernant les antisémites, fichés S et autres barbouzes du NFP. Si l’on a les nerfs assez solides, on peut aussi réécouter la radio publique, France Inter en tête : quinze jours de messages plus ou moins subliminaux, d’éditoriaux politiques partisans, de journaux masquant les « faits divers » pouvant accréditer l’idée d’une insécurité grandissante, d’analogies historiques douteuses, etc. Du travail propagandiste d’orfèvre, digne de celui de sa consœur télévisuelle, France TV. Ailleurs, sur le plateau de BFMTV en l’occurence, interrogée par l’impayable Benjamin Duhamel, Clémentine Autain a elle aussi chaleureusement remercié les médias qui, face au danger que représenterait le RN, « ont changé de braquet » et ont ardemment contribué à la victoire du NFP. Cette gauche se croit décidément tout permis : l’écologiste Marie-Charlotte Garin, élue dans le Rhône, ne s’est pas gênée pour révéler ses visites réitérées dans une école primaire du 7ème arrondissement de Lyon et exhiber devant la presse, comme si cela allait de soi, une fresque fabriquée par des bambins de 6 à 9 ans très en avance sur leur âge. « Vous êtes la meilleure députée », ont écrit les uns, tandis que d’autres ont gribouillé, sans l’aide de leur maîtresse, paraît-il, d’éloquents messages pour « combattre le RN » et en finir avec « les racistes et les fascistes ». Cette calamiteuse anecdote confirme au passage que l’école n’est définitivement plus le lieu de la transmission des savoirs mais bien celui du bourrage de crâne idéologique.

Les « antiracistes » triomphent

Il paraît que, depuis quelque temps, la « parole raciste se libère ». Rokhaya Diallo a récemment corroboré cette impression. Sur le plateau de BFMTV, face à un Charles Consigny atterré et un Manuel Bompard conciliant, la journaliste woko-racialiste a en effet estimé qu’il y avait trop de Blancs – ou, pour le dire à sa manière, « pas assez de personnes non-blanches » – sur la première photo de famille du NFP. Elle a été « éblouie » par tant de blanchité étalée. La victoire du NFP – qui vaut, aux yeux de Mme Diallo, soumission aux thèses racialistes et diversitaires qu’elle promeut, et lui permet de tenir éhontément des propos racistes sur un plateau télé – devrait accentuer le sentiment anti-français qui corrompt les rangs de la gauche et de l’extrême gauche, ainsi que le racisme anti-Blanc qui croît dans notre pays et dont Mme Diallo se moque comme elle se moque de Charles Consigny, ce « pauvre petit chou » qui ose s’opposer à sa conception raciale de la société. Entre les deux tours des élections, dans The Guardian cette fois, Rokhaya Diallo n’a pas manqué de comparer, comme c’est original, le RN au « régime collaborationniste de Vichy », et de louanger, comme c’est bizarre, LFI et sa « position claire contre l’islamophobie dans un contexte où l’hostilité envers les musulmans en France est normalisée (sic) ». L’article est globalement une lourde charge contre la France – Mme Diallo est coutumière du fait. Cette militante woke n’aime pas la France, ce « pays très vieux, très lent à bouger et très petit dans le monde » dans lequel une « vieille élite blanche ne supporte pas de voir ses privilèges lui échapper » (Libération, 26 octobre 2010). Elle qui n’avait déjà pas sa langue vénéneuse dans la poche, profite de la victoire du NFP sous la férule de LFI pour libérer totalement sa parole et laisser apparaître, sous le vernis de l’antiracisme politique, un racisme anti-blanc plus ou moins maquillé. Sur Sud Radio, André Bercoff a demandé à ses auditeurs d’envisager ce qui se serait passé si quelqu’un avait déclaré dans les médias que la photo de l’équipe de France de football est « un peu sombre ». Imaginez les cris d’orfraie que la gauche politico-médiatique aurait poussés si cette même personne avait affirmé, hilare, que cette photo lui a « obscurci » la vue ! Dans le cas présent, wokisme oblige, Mme Diallo a pu tenir un propos raciste sans avoir à subir les foudres des ligues antiracistes ou de la gauche bien-pensante. 

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La parole raciste se libère également du côté de Mediapart qui n’hésite pas à publier un article intitulé « Malgré des efforts à gauche, l’Assemblée reste blanche, bourgeoise et éloignée de la société mobilisée (sic) » dans lequel les journalistes comptent les « député.es racisé.es » de chacune des formations politiques. Aucun journaliste moralisateur du Monde, de Libération, de La Croix ou de l’audiovisuel public n’a trouvé à redire à ce racisme décomplexé. Dans Le Figaro, Michaël Sadoun relève en revanche cette donnée « symptomatique de la métamorphose de la gauche », à savoir, conséquemment à un accueil débridé des théories racialistes issues des universités et des associations antiracistes américaines, la tentation d’appliquer en France une discrimination positive officielle en faveur des « non blancs » dans les lieux de savoir et de pouvoir et, donc, de juger « les personnes selon leur appartenance plutôt que sur leur mérite », le but étant bien sûr de remplacer autant que faire se peut tous ceux qui sont considérés par les idéologues wokes et les islamistes comme des dominants et des privilégiés : les Blancs et les « super-Blancs » (les Juifs). Sur la scène de ce théâtre lugubre, Mme Diallo et l’extrême gauche jouent la même pièce révolutionnaire, racialiste (et raciste), antisioniste (et antisémite), immigrationniste et multiculturaliste. Côté cour, la nomenklatura bruxelloise, toujours empressée de mettre au pas les peuples qui ne veulent pas mourir, applaudit et préconise plus d’immigration tout en laissant – quand elle ne l’épaule pas – l’islam politique s’installer sur le continent. Côté jardin, les Frères musulmans rient dans leurs barbes en regardant ce spectacle et en se préparant à entrer définitivement en scène. Ils savent que la France est à l’agonie et que plus rien ne pourra la sauver. Trop d’ennemis se sont liés contre elle depuis un demi-siècle. Les ennemis de l’intérieur lui ont d’ailleurs fait le plus grand mal – mal sournois, incurable, inoculé au nom de « valeurs républicaines et démocratiques » dévoyées, derniers oripeaux moraux d’une gauche décharnée qui continue pourtant d’imposer sa loi destructrice. Et de nous pousser, inéluctablement, vers l’abîme.

L’erreur de Huntington

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Femmes musulmanes vêtues d'habit traditionnel hijab ou abaya sur un marché et dans une rue de la Sarthe, 11 juillet 2024 © SICCOLI PATRICK/SIPA

En 1996 paraissait l’essai de Samuel Huntington, Le Choc des civilisations. À en croire l’auteur, la fin de la guerre froide, bien loin d’asseoir la suprématie américaine, comme l’avait cru Francis Fukuyama (La Fin de l’histoire, 1991), a contribué à déplacer les conflits. Non plus sur un axe est-ouest, mais selon un axe nord-sud ; non plus sur des bases économiques, mais sur des bases idéologiques, en particulier religieuses. Notre chroniqueur revient sur l’intuition géniale de Huntington, et en propose un correctif important : il n’y a pas de clash des civilisations, mais un conflit entre la civilisation et la barbarie. Une affirmation dont nous lui laissons courageusement la responsabilité.


Ce qui caractérise les grandes idées, c’est que même quand on en a repéré les failles, voire la faillite, elles restent de grandes idées. L’analyse marxiste de l’aliénation — reprise de celle que faisait La Boétie dans son Discours de la servitude volontaire, publié en 1576 — me revient à l’esprit chaque fois que je croise une femme voilée (soit, à Marseille, une fois toutes les cinq secondes). L’Origine des espèces de Darwin est sans doute entachée d’erreurs, mais les hypothèses du naturaliste sur la sélection naturelle se vérifient à chaque seconde en regardant des gosses dans une salle de classe remonter vers le singe à grands coups de « wesh ! » « wesh ! ». On peut se gausser de Freud, expliquer que les romanciers avaient déjà décortiqué le cerveau humain — mais l’évidence du substrat obsessionnellement sexué dans la conscience humaine (la mienne, en tout cas) est confirmée dans le conscient comme dans l’inconscient. Que le Moi ne soit pas maître dans sa propre maison, ou que quoi que l’on tente avec ses enfants, on fasse mal, n’a même plus besoin d’être démontré — surtout quand on regarde les enfants d’une classe à Marseille…
Et comme l’ont expliqué en leur temps Copernic ou Galilée, la Terre n’est pas plate et tourne autour du soleil. N’en déplaise aux littéralistes des religions auto-révélées.

Le professeur d’Harvard de sciences politiques Samuel Huntington (1927-2008), photographié en Allemagne en 2005 © THIEL CHRISTIAN/SIPA

Samuel Huntington, avec son Choc des civilisations en 1996, a magnifiquement senti la ré-orientation des conflits à l’échelle planétaire. Non plus la conquête maniaque de territoires frontaliers (en cela la guerre russo-ukrainienne n’est rien qu’une survivance du passé), mais le grignotage patient de l’Occident par des civilisations extérieures, un jeu de go à grande échelle où le conquérant place des jetons pour s’accaparer des espaces.

Mais alors, où est l’erreur de Huntington ? En cela qu’il ne s’agit pas par exemple de choc de civilisation, mais de l’affrontement entre une civilisation — la nôtre — et une non-civilisation, l’islam.

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L’idée m’est venue il y a longtemps, en visite à Grenade. L’Alhambra est le sommet architectural des conquérants islamistes de la péninsule ibérique, qui avaient tenté de remonter au-delà des Pyrénées — une obsession qui ne les a pas quittés. C’est très joli, l’Alhambra. Un beau témoignage d’Al-Andalus, ce mythe forgé de toutes pièces pour inventer un paradis perdu à des conquérants sanguinaires — voir le livre de Serafín Fanjul (2017). Mais à l’époque où les artisans arabes travaillaient joliment la terre cuite et l’émail dans le sud de l’Espagne, les artistes occidentaux couvraient l’Europe de cathédrales.

C’est que l’art occidental est l’héritier des Gréco-Romains, qui ont façonné la civilisation occidentale bien avant qu’un chamelier harcelé de soleil crût entrer en relation avec un dieu d’amour qui conseille de massacrer les impies et d’épouser des petites filles.
Un exemple ? L’évolution du statut de la femme, en Occident, est un marqueur de notre civilisation. Le maintien de la femme dans une infériorité de principe, dans l’idéologie islamique, est un marqueur de barbarie.
Contre-exemple : les immigrés d’origine asiatique n’hésitent pas à s’intégrer, à s’assimiler : ils viennent de ce que Huntington appelle « la civilisation sinisante », une vraie civilisation qui n’a rien à craindre de la nôtre — et qui ne tente pas, pour le moment, de nous supplanter. C’est ainsi que Léa Cho, Coréenne cannoise de 16 ans, vient d’obtenir un double 20 / 20 à l’Épreuve Anticipée de Français.

En vérité, je le dis très solennellement à mes collègues enseignants : il n’y a pas à respecter les croyances fanatiques d’élèves englués dans la barbarie. Nous devons, à chaque instant, appliquer le programme de Voltaire : Ecrasons l’infâme — c’est-à-dire la superstition et le fanatisme, les croyances erronées, et tous les signes extérieurs de ces croyances. Quand un néo-député LFI, Rodrigo Arenas, ex-président de la FCPE, propose d’annuler le décret interdisant l’abaya, on voit qu’il est encore fécond, le ventre qui a enfanté la bête immonde…

Je sors fin août un essai intitulé L’Ecole sous emprise dont je me permets de recopier ici la quatrième de couverture, comme on dit :
« Samuel Paty, professeur d’histoire décapité en 2020… Dominique Bernard, professeur de Lettres poignardé à mort dans son lycée d’Arras en 2023… Et tant d’autres menacés, insultés, agressés chaque jour dès qu’ils s’avisent de heurter les certitudes mortifères des élèves et de leurs parents.
« Pour les enseignants, l’école se fait désormais la boule au ventre, sous le regard suspicieux de mouvances religieuses radicalisées, soutenues parfois par les enseignants eux-mêmes.
« Alors que l’École publique traverse une crise multiforme, Jean-Paul Brighelli plaide en faveur d’un système éducatif restauré et d’une laïcité intransigeante pour contrer l’emprise de l’entrisme islamiste.
« Les enseignants doivent retrouver le droit d’instruire enfants et adolescents contre leurs propres convictions, sans s’autocensurer. Est-il vraiment trop tard, face aux réseaux infiltrés du fanatisme, pour ressusciter ces « hussards noirs de la République » que furent jadis les instituteurs ? »

L’École est le champ de bataille final. Si nous courbons la tête, si nous laissons le moindre interstice aux affirmations mensongères et aux attitudes mortifères de gosses fanatisés, nous sommes perdus. Si dans la rue, nous autorisons l’expression de la barbarie, nous sommes foutus. Si nous continuons à financer les organisations « culturelles » de gens qui haïssent la notion même de culture, nous sommes morts.

Huntington avait raison : les conflits sont désormais entrés en phase chaude. Il avait tort, ce n’est pas une civilisation contre l’autre, mais un coin que des ignorants tentent d’insérer dans le pays qui les reçoit, qui les assimilerait s’ils le désiraient, mais qui doit les repousser comme un organisme chasse un corps étranger qui cherche à l’infecter.

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Tour de France sous la canicule: la cuite monumentale de Zaaf

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Tour de France, 16 juillet 2024 © Zac Williams/SWpix.com/Shutterst/SIPA

Un Tour sans sa journée de canicule ne serait pas vraiment un Tour ! Cette 111ème édition a connu la sienne mardi – probablement pas l’unique d’ici Nice, son terme, si l’on en croit la météo – lors de la 16ème étape Gruissan-Nîmes. Mais à la différence d’autrefois, la chaleur n’a eu aucune conséquence sur le déroulement de la course.

Boire un petit coup, c’est agréable

Les Tours d’antan ne disposaient pas de l’impressionnante logistique des actuels pour ravitailler les coureurs en boisson fraîche. Un coureur consomme en moyenne dans une étape comme celle de mardi entre 15 et 20 bidons d’eau (avec parfois quelques additifs), soit entre 10 et 13 litres. Les directeurs sportifs embarquent dans leurs deux voitures suiveuses pas loin de 150 bidons stockés dans des glacières. Ils en font aussi distribuer d’autres par des assistants disposés le long du parcours dans les endroits prévus par l’organisation.

Alors, autrefois, jusqu’aux années 60, les équipiers, dits porteurs d’eau, ne disposant pas de cette assistance pour étancher la soif de leur leader, se livraient à « la chasse à la canette ». Cela consistait à débouler en groupe dans les bistrots situés sur l’itinéraire et à se livrer à une razzia de tout ce qui était buvable, alcoolisé ou pas. Certains ladres tenanciers envoyaient la facture à l’organisation, en vain. Quant aux spectateurs compatissants, ils tendaient des bouteilles qui contenaient assez fréquemment du vin, surtout dans les régions vinicoles du sud.

C’est ainsi que ces « chasses à la canette » ont été sources de rocambolesques, épiques, cocasses, péripéties qui ont longtemps alimenté « la légende des cycles ». En voici une, la plus mémorable de toutes :        

C’était la 13ème étape du Tour 1950, disputée un 28 juillet, un jour de cagnard. Le thermomètre indiquait quelque chose comme 40°C bien qu’à l’époque le dérèglement climatique ne s’était pas encore manifesté. Le départ avait été donné à Perpignan et l’arrivée était jugée à Nîmes, comme celle de ce mardi.

Abdel-Kader Zaaf en juin 1952. DR.

Le Tour se disputait par équipes nationales et régionales. L’Algérie était alors française. Elle disposait en conséquence d’une équipe baptisée Afrique du Nord composée à la fois de Pieds-noirs et de musulmans à parité dont un certain Abdel-Kader Zaaf, à deux reprises champion de France amateur entre autres mérites.

Le pays de la soif

Ce jour-là, il s’échappe avec son coéquipier Pied-noir, Marcel Molinès. Bien que rompus à courir sous un soleil de plomb, les deux fuyards ont la pépie, et l’étanchent avec les boutanches que le public leur tend. Et que contiennent-elles ? Du pinard, du jaja surtout blanc. On était dans une région où on faisait pisser la vigne et elle pissait ce qu’on appelle aujourd’hui des vins de soif, de la piquette quoi.

Malédiction que ces boutanches tendues généreusement ! Ne buvant pas d’alcool ainsi que le prescrit sa religion, Zaaf à qui la victoire d’étape semblait promise glougloute aux goulots un max et se ramasse une cuite monumentale. Dans un virage, il fonce tout droit et percute un de ces platanes qui ornaient les routes de l’époque. Il est groggy ; un groupe de vignerons du coin se précipite à son secours, l’asperge du contenu d’un sceau dont on dira plus tard avoir été du vin (ce détail invérifiable servira d’alibi). Zaaf revient à lui mais ne recouvre pas tout à fait ses esprits. Il enfourche sa bécane et repart… mais en sens inverse. Le public lui hurle qu’il est à contresens. Il prend ces vociférations pour des encouragements et fonce tête baissée dans l’espoir de rejoindre son acolyte d’échappée. C’était une époque où une échappée prenait facilement son quart d’heure d’avance.

Mais, à la sortie d’un virage, au lieu de revoir le dossard de ce dernier, il se retrouve face à la meute du peloton qui fonce sur lui. Coup de frein, chute collective, c’est la pagaille qui vaudra à Marcel Molinès la victoire et à Zaaf de terminer dernier, juste devant la voiture balai mais dans les délais.

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Par la suite, pour lui sauvegarder sa réputation de bon musulman, un journaliste, Jacques Augendre (déjà le politiquement correct !) prétendra qu’il n’était pas bourré. S’il puait la vinasse, c’est parce que le contenu du sceau qui lui fit reprendre conscience contenait du pinard, pas d’H2O.

D’accord, mais alors s’il n’était rond pas comme un petit-pois pourquoi est-il reparti en sens inverse ? Pourquoi a-t-il pris pour encouragements les vociférations d’un public qui n’en croyait pas ses yeux : on n’avait jamais vu dans une course un échappé rebrousser chemin pour réintégrer le peloton. Ce fut la première fois et la dernière de l’histoire du Tour.

En tout cas, ce déboire sera son aubaine. Il lui vaudra une gloire que ne lui aurait pas rapportée la victoire d’étape. Tous les organisateurs de critériums d’après-Tour où les coureurs se faisaient un joli bouquet d’oseille voudront l’avoir à l’affiche. Tout le monde veut voir le phénomène… Boire un coup de trop deviendra en Algérie « se faire Zaaf » ou encore « se Zaafer la tronche ».

L’année suivante, le seul Tour qu’il terminera sur les quatre auxquels il participa, il aura l’astuce de le terminer 66ème, dernier du général. Etre la « lanterne rouge » valait son pesant de contrats post Grande boucle. Le dernier était aussi convoité que le premier, certes moins bien payé, mais bien payé cependant. Et souvent, grâce à la complicité tacite du peloton, le dernier du Tour finissait premier du critérium.

«Möbius Morphosis»: parfaitement beau

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© Quentin Chevrier

Avec le Ballet de Lyon, la compagnie d’acrobates XY et la Maîtrise de Radio France, Rachid Ouramdane compose une fresque échevelée à dimension épique.


Une foule impressionnante (vingt-cinq danseurs du Ballet national de Lyon, une trentaine d’acrobates de la Compagnie XY, des dizaines d’adolescents de la Maîtrise de Radio France) surgissant des mille recoins du temple, entièrement vêtue de noir et magnifiquement encadrée par les quatre puissants piliers qui portent les coupoles du Panthéon ; une foule qui subitement se disloque, éclate et jaillit en gerbes à l’instar d’une vaste pièce d’eau dans laquelle on aurait lancé un énorme rocher : les premières images de « Möbius Morphosis » sont superbes.

Quand la forme se suffit à elle-même

Des corps lancés dans les airs, des colonnes humaines qui se dressent comme autant d’appels à l’envol et de défis à la pesanteur, des courses échevelées, des figures de groupes audacieuses, sinon téméraires, qui enchantent fugitivement le regard et qui s’évanouissent avec la même magnificence que des feux d’artifices : ce spectacle chorégraphique a été créé en plein air, à Lyon, au théâtre antique de Fourvière, puis repris sur une esplanade à Annecy, non loin du lac. Mais il n’y a jamais été aussi beau assurément que dans la blancheur néo-classique du temple jadis édifié par Soufflot, encadré par l’architecture puissante de ce Panthéon qui l’exalte et qu’il exalte.

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Il serait vain de vouloir donner un sens à cette débauche de tableaux. Cette chorégraphie, cette mise en scène foisonnante dont on imagine aisément à quelles difficultés prodigieuses de réalisation elles se sont confrontées, ne sont rien d’autres qu’un éblouissant exercice esthétique. Mais si solide et harmonieux, si bien mené, que la forme se suffit à elle-même. Dans cet ouragan, elle sait demeurer noble, sobre, parfois même apaisée, et sait aussi ne pas se perdre dans le superflu, quand bien même, vers sa fin, l’ouvrage se répète et s’essouffle et mériterait d’être amputé d’un bon quart d’heure.  Pour la maison de joaillerie Van Cleef et Arpels qui a soutenu financièrement l’entreprise, c’est un beau cadeau. De même que pour ce festival olympique des Arts dans lequel s’insère « Möbius Morphosis ».

Réticences dissipées

Même si l’on peut comprendre qu’il y ait eu des réticences à voir un temple comme le Panthéon métamorphosé une fois encore en lieu de spectacle (mais cela s’est déjà fait avec des formes bien moins respectables), il est si rare qu’une fresque chorégraphique emplisse si dignement une telle monumentalité que ces réticences ne peuvent, de fait, que se dissiper.

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Certes, Rachid Ouramdane reprend à l’envi des figures qu’il a déjà imaginées pour d’autres productions. Mais pour qui a le bonheur de découvrir ici son travail et pour qui tout est donc parfaitement neuf, l’ensemble est saisissant et ne peut qu’être admiré. Assez facile avec ses effets de voix trop voulus, sa féérie un peu complaisante, la composition musicale électronique de Jean-Benoît Dunckel a toutefois le mérite de n’être pas envahissante et offre même de brefs instants de grâce. Elle n’empêche pas de penser toutefois que des partitions musicales d’une tout autre envergure auraient pu porter certains tableaux à l’incandescence.

Ce n’est probablement pas très avouable dans le cadre du « politiquement correct » qui ordonne qu’ils soient encensés : mais au sein de la nébuleuse d’artistes chorégraphiques « issus de l’immigration » selon la formule consacrée, Rachid Ouramdane est bien l’un des seuls à avoir quelque envergure. 

« Möbis Morphosis » les 17 et 18 juillet à 20h. Panthéon Location Théâtre de Chaillot ; 01 53 65 30 00. Rediffusion sur Culturebox le 23 juillet 2024 en « primetime ».

Le nouveau job de Gabriel Attal

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Plongeon dans l'inconnu ? Le Premier ministre Gabriel Attal visite la grande piscine olympique à Nanterre, 15 juillet 2024 © STEPHANE LEMOUTON-POOL/SIPA

Le gouvernement de Gabriel Attal a finalement bien démissionné, mais il reste en place – avec des prérogatives très limitées. Après son dernier conseil des ministres, hier, Gabriel Attal est chargé de gérer les « affaires courantes ».


Avec Emmanuel Macron et ses bons amis, l’imagination – dans sa forme la plus débridée – est bel et bien au pouvoir. Voilà qu’ils viennent de nous sortir de leur chapeau une catégorie toute nouvelle de personnel politique : le démissionnaire non démissionné. Ou si vous préférez le partant maintenu à demeure, la chaise vide occupée, etc. C’est ainsi que M. Gabriel Attal, Premier ministre ayant présenté sa démission, cette fois-ci acceptée par le boss, se trouve néanmoins confirmé dans le rôle auquel il est cependant censé avoir renoncé, cela très officiellement, dans les formes requises par le règlement.

Job d’été

Le voici installé dans un nouveau rôle, investi d’un nouveau job : celui de non-Premier ministre. Cependant comme il faut bien que quelqu’un paraisse quand même s’occuper peu ou prou du quotidien de la boutique, il est précisé qu’il reste en charge des affaires croulantes du pays. Extrêmement croulantes, en effet, les affaires. Comme chacun sait.

Pour cela, il peut compter encore sur son équipe. Une joyeuse bande de collaborateurs mangés à la même sauce que lui, c’est à dire à la fois dehors et dedans, formant donc en quelque sorte un non-gouvernement. La même chose qu’un vrai, chimiquement pur, sauf que celui est constitué exclusivement, vous l’aurez compris, de ministres qui ne le sont plus, ministres. Je sais, on a du mal à suivre. Mais voilà sept ans que la « pensée complexe » du patron d’en haut ne cesse de nous embrouiller les méninges, de nous donner le tournis.

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Donc, on attend le prochain non-conseil de ce non-gouvernement et les non-décisions que ces non-ministres pourraient encore prendre : la couleur des crayons feutres dans les administrations, la température souhaitable du thé de cinq heures, le quota de billets gratuits pour la grande marade d’ouverture des Jeux olympiques, l’attribution d’un droit d’entrée prioritaire de Mme Nakamura à l’Académie Française avec option pour le Panthéon quand le moment sera venu…

Coup tordu

Mais, finalement, pas si couillon que ça, le petit arrangement en question. Car en réfléchissant bien, je veux dire en tentant de nous hisser au niveau de ces sublimes intelligences, de les rejoindre dans leurs exercices conceptuels de haute volée, il devient clair que M. Attal a réussi là une splendide opération.

Nul n’ignore que le Premier ministre est un fusible entre les mains du président. Le Premier ministre qui, le jour même de sa nomination, doit remettre au président une lettre de démission en bonne et due forme mais non datée, et que, de ce fait, le grand chef à plumes est en droit d’utiliser quand il le souhaite. Or, peut-on démissionner quelqu’un qui l’est déjà ? Assurément non. Ainsi, voilà notre non-Premier ministre absolument non démissionnable, indéboulonnable, du moins ce côté-là. Posé là à vie pour tout dire. Matignon à vie, pensez ! M. Mélenchon en rêvait. M. Attal l’a fait (enfin presque).

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Comment Coca-Cola « dope » les Jeux

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La joueuse de tennis biélorusse Aryna Sabalenka boit un Coca-Cola à Roland Garros, Paris, 5 juin 2024 © Javier Garcia/Shutterstock/SIPA

Partenaire historique des J.O., Coca-Cola, en injectant des millions de dollars, dope financièrement le CIO (Comité international olympique). Revers de la médaille, la firme américaine impose son goût et ses choix…


Dans « Le Miroir des Sports » du 28 janvier 1930, le lecteur tombait sur un article fort de café : « Des études très poussées par l’institut Pharmacologique de Hambourg ont démontré à l’évidence que les effets de la caféine sur les performances des athlètes sont positifs et forts puissants. »

À l’époque la lutte contre le dopage en est à ses balbutiements. En France il faut attendre les années 60 pour qu’elle s’active et le 10 juin 1966, sur la première liste officielle de produits interdits jamais publiée, on trouve la triméthylxanthine, nom scientifique de la… caféine. 16 ans plus tard, en février 1982, le CIO place également la caféine sur la liste des substances illicites (à partir d’un seuil fixé à 15 microgrammes / ml).

Comment en est-on arrivé là ?

Le docteur Jean-Pierre de Mondenard, l’un des meilleurs experts mondiaux de la lutte contre le dopage1, et historien hors pair du sport, a exhumé un entretien qu’Alexandre de Mérode (président de la Commission médicale du CIO de 1967 à 2002) donnait au journal L’Équipe le 16 mai 1983. Mérode y révèle que ce sont des tests effectués pendant les Jeux de Montréal en 1976 qui ont alerté et poussé le CIO à sévir : « Dès Montréal en 1976, nous avons été alertés par des concentrations anormales de caféine. À Lake Placid, ce fut pire et la situation s’aggrava encore à Moscou en 1980. Cela nous a conduits à interdire la caféine, puisque nos méthodes d’investigation le permettaient. »

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Cela pose toutefois un énorme problème. D’image de marque. Pour Coca-Cola. Depuis les jeux d’Amsterdam en 1928, la firme américaine est le sponsor numéro un du CIO (et depuis 1978, partenaire de la Coupe du Monde de foot…). Or son soda contient de la… caféine. La nouvelle réglementation du CIO jette alors un froid. Certes le Coca-Cola n’est pas un produit dopant mais il contient une substance prohibée, ce qui fait mauvais genre pour un partenaire de l’Olympisme.

Alexandre de Mérode est conscient de ce conflit d’intérêts et dans ses commentaires à L’Équipe, il tient immédiatement à ménager la firme américaine :
« Nous ne voulons pas empêcher les athlètes de boire du café ou du Coca-Cola. Nous voulons simplement éviter un usage abusif de la caféine par injections massives dans le corps humain, comme cela se produit actuellement. (…) Nous affirmons que notre intention n’est pas de porter tort à la firme Coca-Cola, ni d’entraver l’utilisation de cette boisson. Nous avons, en effet, fixé le seuil critique d’utilisation de la caféine à quinze microgrammes par millilitre. Cela équivaut à l’ingestion de vingt litres de Coca-Cola dans une journée et à plus de quinze litres de café normalement concentré. »

Il n’empêche, le Coca-Cola reste une boisson dont l’un des composants est un produit interdit… Mais l’ardoise va être effacée. En janvier 2004, l’AMA (l’agence mondiale antidopage, à qui il revient désormais d’établir la liste des produits interdits) supprime de la liste la… caféine ! Coca-Cola a-t-il fait pression pour obtenir cette suppression ?

Une chose est sûre, si la caféine a disparu de la liste des produits interdits, le dopage à la caféine n’a, lui, pas disparu.

Mercredi 18 mai 2005, le bureau de Sydney de l’agence américaine Associated Press publie un communiqué qui tombe comme un pavé dans la mare : « L’Agence mondiale antidopage envisage de remettre la caféine sur sa liste de produits interdits après les propos du capitaine de l’équipe d’Australie de rugby, George Gregan, qui a affirmé en avoir pris pour améliorer ses performances. Le directeur de l’AMA, David Howman, a déclaré aujourd’hui que les informations selon lesquelles Gregan et d’autres athlètes australiens utilisaient de la caféine pour améliorer leurs performances étaient « perturbantes ». »

L’AMA est perturbée mais ne bouge pas. Dans un rapport du 24 octobre 2006, intitulé « Le Sport et un monde en harmonie », le CIO reconnaît pourtant que la caféine a des « propriétés indéniables en matière d’amélioration des performances ».

11 juillet 2022. Alors que le Tour de France bat son plein, le quotidien Ouest-France publie une enquête au titre révélateur : « Le peloton fait-il n’importe quoi avec la caféine ? » ainsi présentée : « La consommation de caféine, aucunement interdite dans le peloton du Tour de France, n’est pas nouvelle. Ni dans le vélo, ni dans d’autres sports. Mais depuis quelques années, elle décolle. À tel point que cela inquiète certains acteurs du cyclisme… »

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14 avril 2024, le quotidien sportif L’Equipe s’interroge sur les nombreuses et violentes chutes qui depuis le début de la saison surviennent au sein du peloton. Parmi les causes évoquées, l’excès de caféine. Le témoignage du coureur Rudy Molard (Groupama-FDJ, 34 ans) est sans sucre à propos de la sur-consommation de café : « On en parle régulièrement entre coureurs parce qu’il n’y a pas de limite et je pense que ça peut jouer sur le caractère agressif de certains… ça a toujours existé mais je pense que les doses qui étaient prises étaient moindres au début de ma carrière par rapport à maintenant. » Mais toujours aucune réaction des autorités compétentes. C’est pourtant un café et l’addiction.

Si Paris 2024 devait être mis en bouteille, cela serait dans une cannette de Coca-Cola !

Avec les millions de dollars que Coca-Cola injecte dans le CIO, la devise olympique s’enrichit d’un qualificatif : «  plus haut, plus vite, plus fort, plus lucratif…  » Et offre à la firme américaine, sinon les pleins pouvoirs, du moins une influence certaine. En 1996, alors qu’Athènes rêvait d’accueillir en Grèce les Jeux du centenaire, le CIO a imposé Atlanta, la ville américaine d’où Coca-Cola gère son empire, le berceau de la maison mère.

Pour 2008, alors que le régime chinois suscitait l’indignation internationale, le CIO a désigné Pékin, à la grande satisfaction de la firme d’Atlanta, soucieuse de prendre pied sur le marché chinois, où elle s’est fait rapidement un allié de poids, l’entreprise Mengniu Dairy, géant des produits laitiers, dont une filiale s’emploie désormais à l’embouteillage du Coca-Cola. Ainsi en 2019, Coca-Cola, associé à l’industriel chinois, a signé avec le CIO un contrat de partenariat qui court jusqu’en 2032, et leur assure l’exclusivité des droits marketing mondiaux. Montant de la transaction ? Top secret. Selon le quotidien britannique Financial Times, Coca-Cola aurait investi dans l’opération 3 milliards de dollars… À ce tarif, la firme en impose… jusque dans la sélection des sports…

À chaque nouvelle olympiade, outre les 28 sports labellisés olympiques (de l’athlétisme à la natation en passant par toutes les autres disciplines traditionnelles), le programme propose de nouveaux sports, des sports dits additionnels, en démonstration, proposés par le pays organisateur, mais validés par le seul CIO. Pour Paris 2024, il y avait quatre places à prendre. Dans cette optique, la fédération de pétanque avait déposé sa candidature, car la pétanque n’est pas seulement un divertissement de vacanciers, c’est aussi un sport international, fédéré dans 165 pays, avec 200 millions de pratiquants, sur les pourtours de la Méditerranée et dans le Maghreb, mais aussi en Asie, notamment en Thaïlande, où il  est très populaire. Las, la pétanque est restée sur le carreau. Les sports validés par le CIO ont été le surf, l’escalade et le skate-board (tous trois déjà retenus aux Jeux de Tokyo en 2021) plus un petit nouveau : le breakdance !

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Fort lucidement, Joseph Cantarelli, alors président de la Fédération française de pétanque et de jeu provençal, analysait les raisons de cet échec : «Comme vous toutes et tous j’accuse ce que nous ressentons comme un «coup dur» qui vient de frapper notre intime conviction de voir les Sports de boules et donc notre sport pétanque entrer, sur nos terres, aux JO de Paris. Comme quoi les critères d’entrée aux JO ne sont plus exclusivement liés aux valeurs fondamentales du sport en tant que tel mais plutôt et de préférence au seul succès médiatique d’un sport ou d’une «pratique» auprès de la jeunesse. » Tout est dit. Si le breakdance a été sélectionné c’est qu’il s’adresse à la jeunesse, la cible prioritaire de Coca-Cola. Et le programme officiel annonce la couleur : « Et si on dansait à Paris au cœur de l’été ? À peine cinq ans après avoir été reconnu en tant que sport de haut niveau en France, le « breaking » s’apprête à faire son entrée triomphale aux Jeux Olympiques de Paris 2024. Et pas n’importe où. Les 32 athlètes qualifiés – 16 B-Girls et 16 B-Boys s’affronteront en duel les 9 et 10 août prochain sur l’iconique Place de la Concorde. » Place qui sera aux couleurs de Coca-Cola.

Dans ces conditions, la désignation de la chanteuse Aya Nakamura pour la cérémonie d’ouverture et du rappeur Jul pour allumer la flamme à Marseille coulent du goulot d’un soda… C’est moins une volonté politique qu’un choix publicitaire pour satisfaire Coca-Cola, qui dans l’optique des JO a organisé le Coca-Cola Music Tour, une tournée de concerts à travers la France, pour mettre les Jeux en musique et Paris en bouteille.

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  1. Voir https://dopagedemondenard.com/ ↩︎

Donald Trump passé du côté cœur…

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Donald Trump et son colistier JD Vance à Milwaukee, 16 juillet 2024. Les partisans du milliardaire leur ont réservé un triomphe et ont scandé "Fight Fight! (« battez-vous ! »), les mots prononcés par M. Trump le poing levé et le visage en sang lorsqu’il s’est relevé après les tirs qui l’ont visé samedi © Julia Nikhinson/AP/SIPA

À Milwaukee, lundi soir, Donald Trump a été accueilli triomphalement à la convention républicaine, au surlendemain d’un attentat qui aurait pu lui couter la vie. Il a annoncé la nomination du sénateur de l’Ohio J.D. Vance1 comme colistier. Le mobile du tireur Thomas Matthew Crooks reste pour l’instant inconnu.


La cause est entendue. Au mois de novembre, Donald Trump sera élu président des États-Unis. À cause de la sénilité intermittente de Joe Biden et du dernier débat entre eux, qui l’a vu sombrer. Grâce à, si j’ose dire, la tentative d’assassinat dont Donald Trump a été victime et qui à un centimètre près aurait pu être mortelle.

Le comportement de Trump, après la commission de ce crime, a été admirable de courage et supérieurement habile sur le plan politique, en manifestant des vertus de combat et de résistance magnifiées par la tragédie à laquelle il avait échappé par miracle, une sauvegarde exploitée comme un signe du destin.

Les États-Unis, une démocratie violente

Il ne peut plus perdre après un tel concours de circonstances. Joe Biden a admis qu’il avait eu tort de demander qu’on « cible » son adversaire même s’il a précisé ce qu’il entendait par là et qui n’avait rien à voir avec l’agression qui a suivi. Il a confirmé qu’il irait jusqu’au bout tout en comprenant ceux qui s’inquiétaient pour sa santé et souhaitaient son abandon.

Les quelques réactions odieuses de gens regrettant que Donald Trump s’en soit tiré comptent peu face à un climat général qui semble avoir pris la mesure des risques de la violence verbale et de l’outrance développées lors de la campagne présidentielle. Donald Trump, pas exempt de critiques sur ce plan, a pris conscience des devoirs qui devaient être les siens désormais en faisant un appel à l’unité.

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Il faut à ce sujet relever la remarquable influence de ses deux conseillers principaux, une femme très professionnelle et respectée par tous (Susie Wiles) et un homme, ancien militaire, chargé de débusquer les erreurs et les points faibles de ses contradicteurs et opposants (Chris LaCivita). La nouveauté est que Donald Trump les écoute et s’en porte bien.

Mais au-delà de sa victoire programmée, j’ai été frappé par l’extraordinaire élan de sympathie et de solidarité qui a montré à quel point la tentative d’assassinat sur Donald Trump avait fait radicalement changer le regard sur lui, non pas seulement de ses soutiens et des militants républicains – l’ovation interminable à la Convention républicaine ayant ému Trump lui-même – mais des citoyens américains qui n’étaient pas favorables à sa cause et des médias qui lui étaient hostiles.

Trump nous surprendra toujours

Ces derniers n’ont sans doute pas changé d’avis sur l’homme, sa personnalité et son projet mais ils ne pouvaient pas faire autrement que d’être pris dans ce mouvement dominant d’accalmie de la politique partisane au bénéfice d’une concorde magnifiquement conjoncturelle. Le signe le plus éclatant de cette parenthèse de grâce a été le fait que tous les médias ont interrompu leur programme pour montrer en direct Donald Trump dans son triomphe à la Convention républicaine.

Au mois de novembre, son élection acquise, il lui restera à démontrer quels effets ont eu sur lui et sur sa pratique du pouvoir les événements dramatiques de ces derniers jours. Pour ma part, si j’ai désapprouvé évidemment son comportement judiciaire, son mépris pour l’État de droit et sa provocation ayant inspiré l’attaque du Capitole, je n’avais pas été un critique compulsif de son action lors de son premier mandat, au moins jusqu’à l’arrivée du Covid.

Pour le second mandat, j’entends bien que Donald Trump est certainement capable du pire mais son imprévisibilité peut aussi le conduire vers le meilleur. En tout cas, avec lui, il se passe toujours quelque chose et il ne sera pas un président amorphe. L’énorme changement dont Donald Trump sera forcément enrichi est que, depuis le crime dont il a réchappé heureusement et les conséquences qu’il a engendrées, il est passé, aux États-Unis et dans une grande partie du monde, du côté cœur.


  1. À ce sujet, relire J. D. Vance: un Éric Zemmour américain?, Lucien Rabouille, Causeur.fr (2002) ↩︎