Les Républicains : une droite à l’américaine?


Le débat sur le nouveau nom de l’UMP s’était jusqu’à présent focalisé sur l’hypothétique confiscation de la République par Nicolas Sarkozy. Accusation tellement énorme qu’elle ne résiste pas à l’examen. Les républicains et les démocrates se disputent-ils la démocratie et la république américaine ? Pas le moins du monde. Le Parti Socialiste aurait mieux fait de rester indifférent à cet énième changement de marque. Son indignation résonne comme un aveu de faiblesse. Comme si le parti de Blum et Mitterrand craignait lui-même de s’éloigner des valeurs républicaines.

La bataille pour la propriété intellectuelle de la République perdue en Justice, Jean-Christophe Cambadélis est contraint de politiser son discours. Comme l’a révélé Caroline Roux sur Europe 1, le Premier secrétaire du PS a donné comme consigne d’évoquer non pas « Les Républicains » mais « le Parti républicain ». La communication du PS semble changer d’angle d’attaque et renvoie le nouveau parti de droite aux partis de George W. Bush ou d’Alain Madelin. Non choix en réalité car Alain Madelin et « la bande à Léo » du PR n’ont jamais caché leur admiration pour l’Amérique de Ronald Reagan.

Sans doute Nicolas Sarkozy avait-il anticipé cette référence à l’Amérique, y compris au sein de son propre camp. Il a pris le pari (risqué) d’assumer le parallèle malgré l’anti-américanisme culturel de notre pays.

Les Républicains congrès fondateur Paris

Coïncidence d’autant plus frappante que la droite française va pour la première fois organiser des primaires, et que celles-ci se tiendront en même temps que les primaires républicaines (américaines) – dont les péripéties du Caucus de l’Iowa à l’investiture de la Convention tiendront en haleine l’opinion publique l’année prochaine. Avec cette primaire ouverte, non seulement la droite française singe la démocratie américaine mais elle abandonne l’idée gaullienne de la rencontre entre un homme et son peuple rassemblé. En 2016, le candidat républicain sera de toute évidence l’homme d’un parti avant d’être un candidat à la présidentielle.

Nicolas Sarkozy ne craint pas la comparaison, surtout avec l’Amérique. C’est une de ses qualités ; il aime provoquer, faire bouger les lignes, appeler à la rupture. Aux affaires étrangères, le couple Sarkozy-Kouchner puis Sarkozy-Juppé avait marqué pour notre pays une inédite lune de miel atlantiste et une rupture très nette avec les années Chirac-Villepin. Douze ans après le sursaut de la France face à l’invasion de l’Irak par l’Amérique, le parti gaulliste achève sa mue. Il assume son atlantisme après sa conversion maastrichtienne à une Europe de plus en plus fédérale. En 2002, l’UMP ressemblait déjà furieusement à l’UDF. Désormais c’est clair, avec le Parti Républicain, les héritiers de Valéry Giscard d’Estaing l’ont emporté sur ceux du général de Gaulle.

Les socialistes pourraient aisément critiquer cette nouvelle ligne politique libérale et américanisée. La lune de miel franco-américaine devait se terminer en 2012 tellement les socialistes s’étaient érigés en défenseur de notre tradition diplomatique d’indépendance nationale. Mais sur le dossier syro-iranien comme dans sa liaison incestueuse avec les pétromonarchies du Golfe, Laurent Fabius est plus en phase avec John McCain et Benyamin Netanyahou qu’avec John Kerry.

*Photo : © AFP STEPHANE DE SAKUTIN



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est responsable des questions internationales à la fondation du Pont neuf.

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