Accueil Brèves La Terreur ? Quelle horreur ! Réponse à Isabelle Marchandier

La Terreur ? Quelle horreur ! Réponse à Isabelle Marchandier


En rapprochant « Onfray », « Mélenchon » et « Terreur » dans sa brève du 11 avril, Isabelle Marchandier ne pouvait manquer d’attiser ma curiosité historienne et de flatter mon goût pour la pique politique bien sentie dont seul Causeur a le secret. Hélas, je n’ai pas réussi à me réjouir avec elle de l’horreur de la Terreur éprouvée par Michel Onfray.

La Terreur étant un sujet clivant et, pour cette raison, un sujet politique, je serais bien mal avisé de reprocher à Isabelle Marchandier d’avoir joué son rôle de polémiste. Mais j’ai scrupules à ne pas jouer mon modeste rôle d’historien.
Certes, on peut apprécier que Michel Onfray se découvre une âme girondine. Au passage, sa métamorphose n’est pas si récente puisqu’on peut la lire dans son Eloge de Charlotte Corday, publié en 2009. On peut aussi louer qu’il se soit converti à la modération et à la démocratie représentative. Au passage, son Eloge de Charlotte Corday, laisse subsister certains doutes. Soit ! On peut enfin apprécier qu’il dénonce la différence de traitement médiatique réservé aux références culturelles des extrêmes.

Mais que devient la Terreur dans cette histoire ? Un sempiternel topique ! Robespierre et Saint-Just ? « Avec raison », des « massacreurs ». Carrier ? Rien de moins que le « Eichmann de la Révolution ». Ces quelques lignes ne purgerons pas le sujet, mais essayons. La Terreur est un épisode qui relève autant des faits que d’une construction historique liée à des luttes de partis : dès 1794, les Thermidoriens brossent le portrait en noir de Robespierre et de ses amis afin de s’exonérer d’avoir participé à la Terreur. La Convention, dans un contexte particulièrement compliqué, a cherché, autant que faire se pouvait, à canaliser les revendications radicales des sans-culottes et la violence, sans pour autant les maîtriser. La Terreur n’a été théorisée à aucun moment tel qu’on l’entend du terrorisme totalitaire. Ce n’est pas là nier l’existence des victimes ni nier la violence ou la minimiser. C’est simplement tenter de redonner un peu plus de complexité au passé – qui n’est jamais moins complexe que le présent.

A comparer Carrier à Eichmann, on ne comprendra bientôt plus, ni Carrier, ni Eichmann, non plus que la spécificité des événements auxquels ces acteurs renvoient. En creux, l’on devine que Robespierre – puisque, comme de bien entendu, il donnait tous les ordres – sera bientôt notre Hitler national. Que gagnerons-nous à relativiser ainsi sur le même plan des formes si différentes de violence et de pratiques politiques ? Une bonne joute politique peut-être, un peu moins d’intelligibilité sans doute.



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