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L’assimilation, une chance pour la France !


L’assimilation, une chance pour la France !

Le débat n’aura pas lieu, c’est entendu. Il s’est transformé en festival de postures et d’invectives. Ceux qui voulaient l’interdire ont déjà gagné une bataille : on ne s’entend plus et on n’y comprend plus rien.

Même si on est de bonne foi, cette affaire d’identité est tout sauf simple. Reste qu’elle doit avoir quelque importance pour que l’opportunité d’en parler soit elle-même l’enjeu de tels affrontements.

En attendant, puisqu’on en parle, autant essayer de savoir de quoi on parle. Comment une question apparemment banale –  »Qu’est-ce qu’être français ? » – peut-elle être si atrocement scandaleuse ? Elle appelle forcément, nous dit-on, des réponses ethniques, religieuses voire raciales. En clair, elle serait dirigée contre les musulmans, désignés à la vindicte publique par un gouvernement cynique (et stupide au point de se désintéresser de millions d’électeurs).

[access capability= »lire_inedits »]Et pourtant, il n’est pas question d’origine mais de ce que les philosophes du XVIIIe siècle appelaient les « mœurs ». Dans ce débat sur l’identité nationale, on ne parle pas de race ou de religion mais de culture. Ou plus précisément des modalités de fabrication d’une culture commune. Et le sujet mérite d’autant plus d’être abordé que nous semblons avoir égaré la recette.

Dans le concours d’épithètes insultantes qui a étouffé toute possibilité d’échange d’arguments, on peut vaguement percevoir l’écho de deux positions qui s’affrontent. À l’une des extrémités d’un spectre qui compte de multiples nuances, les partisans du métissage croient à un multiculturalisme égalitaire dans lequel toutes les cultures ont la même place dans la Cité. Conformément à sa démographie, la France devrait devenir gentiment une mosaïque de pratiques et de croyances vivant en bonne intelligence sans se menacer les unes et les autres. À mon humble avis, cela revient à croire que l’anthropologie et l’histoire des sociétés sont aussi plastiques que les frontières et, surtout, cela aboutit, au nom de l’égalité et d’un libéralisme de bon aloi, au différentialisme le plus effréné. Il n’y a qu’en matière d’idées que les amoureux de la diversité prônent l’homogénéité la plus radicale.

À l’autre bout de l’arc idéologique, les assimilationnistes pensent qu’il y a une distinction entre la culture d’accueil et celles qui sont accueillies et que, particulièrement en France, les arrivants successifs sont priés de laisser pas mal de leurs particularités à l’entrée et d’adhérer aux usages communs, bien plus que s’ils étaient allés, par exemple, frapper à la porte des Pays-Bas voisins (avant que la tolérance presque illimitée n’y suscite sa contre-réforme).

Ce ne fut pas toujours rigolo mais, à l’arrivée, faire comme les Romains à Rome s’est toujours révélé payant. Pour tous les Romains, qu’ils soient de souche ancienne ou récente. Oui, l’assimilation est une chance pour la France (que Marc Cohen soit remercié pour sa participation à cette coproduction sémantique). Et pitié, qu’on ne me fasse pas le coup des petits Bretons brimés à coup de langue française, on n’en est plus vraiment là. Du reste, la langue française, c’est tout le mal qu’on souhaite aux petits-enfants d’immigrés.

En réalité, personne ne prétend revenir au républicanisme autoritaire des fondateurs de la IIIe République. Un aimable libéralisme est passé par là, nous rendant tous, et c’est heureux, largement tolérants à la différence, et même, en théorie, à la divergence. Il ne s’agit donc pas de réprimer toute manifestation identitaire mais de savoir où l’on place le curseur.

Pour ma part, je hasarderais une formule : « Oui aux minarets, non à la burqa ! » Oui à l’inscription dans les paysages et dans l’Histoire, non à l’emprise sur les corps et les consciences. S’il faut, in fine, retenir un critère de ce qui n’est pas négociable, je suggère celui de la mixité. La présence des femmes dans l’espace public, c’est ce que nous avons inventé de mieux. C’est un droit de l’Homme.
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Janvier 2010 · N° 19

Article extrait du Magazine Causeur



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Fondatrice et directrice de la rédaction de Causeur. Journaliste, elle est chroniqueuse sur CNews, Sud Radio... Auparavant, Elisabeth Lévy a notamment collaboré à Marianne, au Figaro Magazine, à France Culture et aux émissions de télévision de Franz-Olivier Giesbert (France 2). Elle est l’auteur de plusieurs essais, dont le dernier "Les rien-pensants" (Cerf), est sorti en 2017.

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