Hollande : la diplomatie de la girouette


Hollande : la diplomatie de la girouette

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Ce qu’il y a de pénible avec notre Président, c’est qu’il aussi velléitaire sur la scène intérieure qu’hors de l’hexagone. L’affaire de la vente des BPC de classe Mistral à la Russie vient cruellement nous le rappeler. Pris entre l’atlantisme de Laurent Fabius et le pragmatisme de Le Drian, Hollande hésite. Encore et toujours. Depuis le début de l’année, c’est un ballet incessant de communiqués contradictoires sur la vente de ces navires de guerre. Selon le degré de la pression américaine ou russe, la girouette placée sur le toit de l’Elysée se tourne au gré des vents contraires.

Ainsi la France suspend jusqu’à novembre la livraison des BPC, laquelle devait avoir lieu… fin octobre- début novembre. Une concession en forme de trompe-l’œil, le temps du sommet otanien de Newport. Pour preuve, Hollande n’a pas tardé à préciser que la suspension annoncée était elle-même suspendue à l’hypothèse imminente d’un accord entre Kiev et Moscou. Accord dont on sait qu’ ils sont nombreux en Ukraine, mais rarement suivi d’effets. Pendant ce temps-là, les essais navals du Vladivostok se poursuivent à Saint-Nazaire. Et les travaux du Sébastopol avancent bon train. Drôle de suspension…

François Hollande a souvent fait l’admiration (ou le dégoût) de ses contemporains pour sa capacité à synthétiser les positions adverses. Il a fait merveille au PS, à la tête des “transcourants”, pour réconcilier toutes les chapelles de la gauche. Et sur le dossier des Mistral, Hollande agit comme dans un congrès socialiste; il plie devant toutes les revendications, sans jamais rompre. Il dit à chacun ce qu’il veut entendre, sans jamais fâcher personne. Mais à force de courbettes, plus personne ne prend ses déclarations au sérieux. François Hollande n’est pas un secrétaire général de l’OTAN, de l’ONU ou de l’OSCE qui joue la montre, il est Président d’une nation à la voix traditionnellement forte. C’est bien son problème.
Cela ne veut pas dire que la position médiane de la diplomatie Hollande soit inintéressante a priori. Pourvu qu’on s’y tienne et qu’on l’assume. Car la France peut jouer un rôle dans cette crise, si tant est qu’elle retrouve son positionnement équilibré entre Moscou et Washington.

Avec quarante ans d’avance, De Gaulle avait anticipé la chute du mur de Berlin et la future Europe de l’Atlantique à l’Oural. Il avait conscience que le rôle historique de la France était de réconcilier la Russie avec l’Europe, voire l’Amérique. Une vision qui a souvent fait consensus en France. Des voix gaulliennes se sont d’ailleurs fait entendre, Henri Guaino et François Fillon notamment, pour s’élever contre cette énième pantalonnade. On aimerait qu’à gauche, celles de Chevènement, de Védrine et pourquoi pas de Montebourg s’expriment aussi.

Car ainsi fonctionne notre Président. Il va, il vient, il recule, il revient, comme suspendu au milieu des pressions politiques; si elle n’a pas de poids gaullo-réaliste sur son plateau gauche, la balance hollandaise va inexorablement pencher vers les partisans d’une confrontation avec la Russie. Pour le plus grand malheur de l’Europe.

*Photo : okano.



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est responsable des questions internationales à la fondation du Pont neuf.

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