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Faits divers: le crime est notre affaire!

Les faits divers, un facteur d'unité?


Faits divers: le crime est notre affaire!

Les Français ont une passion pour les faits divers qui les interrogent sur leur propre personnalité


« Pourquoi un tel engouement pour les faits divers ? » C’est la question que pose Guillaume de Dieuleveult dans un excellent article du Figaro en date du 27 novembre.

Le hasard de l’écoute matinale fait que dans l’émission « Grand bien vous fasse ! » d’Ali Rebeihi, le 15 décembre, le même sujet a été traité.

Il m’a semblé que ce thème était si riche, et la passion des Français pour les faits divers tellement majoritaire et consensuelle, que je pouvais me donner le droit d’aller plus avant que je ne l’avais fait déjà dans un billet du 9 février 2018 : « Sang pour cent: le crime, une passion ordinaire… »

Pourquoi, en effet, une telle dilection, partagée par toutes les classes sociales, pour le sombre de la criminalité, l’extra-ordinaire d’un comportement et d’une tragédie ou parfois, dans un registre moins lourd, l’anecdotique singulier de telle ou telle séquence de vie ?

Les faits sont divers et la curiosité à leur égard unit. Celle-ci n’est pas sordide ni vulgaire, elle ne révèle rien de malsain, elle considère avec une fascination emplie de bonne conscience les épisodes criminels, les incroyables ressources du Mal. Ce dernier ne cesse d’inventer, de sorte qu’hier sera dépassé par aujourd’hui que le futur relativisera.

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Il faut demeurer aux aguets puisque la nature malfaisante d’une minorité engendrera, sans se lasser, de quoi combler chez nous ce besoin paradoxal mais incontestable de notre similitude et, à la fois, de notre différence.

Comme l’a pensé la philosophe Simone Weil, certes « les démons sont en nous » mais, la plupart du temps, ils y demeurent et nos fors intérieurs échappent, pour une part, au registre le plus abject, à l’innommable porté à son comble. Si les démons nous habitent, nous ne les accueillons pas tous.

Simone Weil. SIPA, 00412865_000002
Simone Weil. SIPA, 00412865_000002

Il y a des crimes qu’on s’imagine pouvoir commettre, aux assises par exemple, j’avais remarqué combien la fausse monnaie bénéficiait d’un préjugé favorable ! Il y en a d’autres tellement étrangers à notre être, par leur singularité cruelle et littéralement inhumaine, que nous les considérons comme un spectacle affreux qui pourtant nous concerne – on le sait, on le sent, puisque leur monstruosité ne les fait pas sortir de notre condition – mais nous place en même temps dedans et dehors: ils sont de la même essence que nous mais leurs actes nous inspirent un sentiment de stupéfaction indignée se résumant dans un « ce n’est pas possible ! », euphémisme pour dire l’inexprimable d’un dégoût hors de toute mesure.

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Parfois – heureusement il s’agit d’une rareté – chez certains qui ne s’empêchent pas de confondre le crime avec l’homme qui l’a perpétré, surgit presque une fascination pour cette humanité qui a osé la toute-puissance, est allée au bout des extrémités les plus honteuses, les plus sordides. D’ailleurs on peut regretter à ce sujet que, sans discriminer assez, des médias prétendant informer subliment le pire et constituent en héros de misérables destinées.

Outre que les faits divers soient peut-être, mais sans mépris de ma part, un opium du peuple et pour poursuivre la métaphore marxiste, la psychologie d’un monde qui en manque, ils sont aussi la preuve éclatante que les démons sont partout, que nous avons à leur résister ; la liberté n’est pas de les laisser vivre mais de les tuer avant que lâchés ils tuent.

Mon expérience m’a souvent démontré que le crime peut être, pour un homme, le moyen d’administrer par le pire une situation qui le dépasse. La réflexion sur les faits divers, une pédagogie pour les coupables et les innocents.



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Magistrat honoraire, président de l'Institut de la parole, chroniqueur à CNews et à Sud Radio.

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