Accueil Culture C’est toujours Noël en Somme

C’est toujours Noël en Somme

Les Dessous Chics


C’est toujours Noël en Somme
Philippe et Mireille Béra © Philippe Lacoche

Chaque semaine, Philippe Lacoche nous donne des nouvelles de Picardie…


Il est des éditeurs pusillanimes qui répugnent à prendre des risques et qui, contrairement à la jolie chanson d’Enrico Macias, ont dans le cœur tous les euros des réassorts. A l’opposé, d’autres n’ont peur de rien ; ils se lancent dans de véritables aventures artistiques, littéraires, poétiques, sans trop se soucier des futurs chiffres de ventes. C’est le cas des éditions Cadastre8Zéro d’Amiens qui viennent de publier deux livres du regretté Bernard Noël. Ce sont leurs dernières publications : Le Chemin d’encre, et Ecrits en regard, De la peinture de François Rouan.

Je connais depuis de longues années leurs fondateurs, Mireille et Philippe Béra. Celui-ci était conseiller artistique à la Direction régionale des affaires culturelles de Picardie (DRAC), et son épouse a longtemps dirigé d’Institut médicoéducatif de Grand-Laviers, dans la Somme où elle invitait régulièrement écrivains, artistes et musiciens à animer des ateliers au profit des élèves. Il y a peu, je les ai retrouvés au Café, chez Pierre, à Amiens ; ils voulaient me présenter leurs deux derniers ouvrages.

Pour une fois, ma Sauvageonne adorée, mon ébouriffée aux yeux verts, verts de Vesle, n’était pas à mes côtés. Était-elle en train de prendre un café en compagnie de Rickybanlieue, l’un de ses plus fervents admirateurs qui l’a fait savoir récemment à la faveur d’un texte publié dans le courrier des lecteurs du site Causeur ? Non, je ne le pense pas. Depuis qu’elle s’est racheté des toiles, elle devait peindre, joyeuse, et si mignonne dans sa blouse jaune maculée de peinture acrylique.

© Philippe Lacoche

À lire aussi, Philippe Lacoche : De la Vesle à la Nièvre ou le temps qui fuit

Cadastre8Zéro est une maison associative fondée en 2005. Elle a publié une cinquantaine d’ouvrages d’écrivains, d’artistes et de photographes tels que Denis Dormoy, Maxime Godard, Clément Foucard, Sylvie Payet, Michel Butor, Arrabal, Jean-Pierre Cannet, Roger Wallet, Bernard Noël, bien sûr, etc. « Bernard Noël rencontra le peintre François Rouan en 1976 pour un entretien dont La Quinzaine Littéraire publia la transcription », explique Philippe Béra dans un texte de présentation de l’opus Le Chemin d’encre. « Trente ans plus tard, à l’initiative des éditions Cadastre8Zéro, Bernard Noël retrouva François Rouan dans son atelier de Laversine. Les deux amis décidèrent alors de faire un livre à partir d’un texte dont Bernard Noël avait entrepris l’écriture. C’est ainsi que Cadastre8Zéro édita en 2011 un premier ouvrage dans une version bilingue français-espagnol qui comprenait cinq séquences de sept strophes, sous le titre de Ce jardin d’encre (…). Bernard Noël nous annonça qu’il poursuivait l’écriture de Ce jardin d’encre et que seule sa propre fin, la sienne, disait-il, en arrêterait le cours… Mise en place d’une expérience que l’écrivain « n’avait jamais vécue aussi clairement auparavant » (…) A l’issue de cette expérience, nous avons exprimé à Bernard Noël notre souhait d’éditer séparément la version complète de son texte en tant que dernier et 11e titre de la collection « Donc » qu’il dirigea durant 11 ans. Bernard Noël nous indiqua alors qu’il reviendrait aux éditions Cadastre8Zéro de prendre cette initiative après « sa fin » qui intervint le 13 avril 2021. »

Quant à Ecrits en regard, De la peinture de François Rouan, Philippe Béra raconte que durant tout le temps de leur correspondance du Chemin d’encre, Bernard Noël est allé dans l’atelier François Rouan plusieurs fois. « Il a écrit cette correspondance en regard de sa peinture. Il voulait écrire un quatrième livre : jamais il n’a pu se rendre dans l’atelier pour le faire car il est mort. On a donc décidé de publier ces textes-là après son décès. On a mis la transcription de ce premier et à la fin une lettre verticale qu’il a écrite à François Rouan en 2020. Le premier texte est un entretien ; le dernier c’est une lettre. Au milieu il y a trois textes que l’on peut qualifier de critiques. » Et Mireille Béra d’ajouter : « Bernard Noël était un individu qui ne se laissait pas facilement approcher mais il était d’une générosité et d’une fidélité rares en amitié. Il nous avait tellement apporté qu’on a eu envie de terminer avec lui de façon à lui rendre hommage. » Un bel hommage en effet.



Vous venez de lire un article en accès libre.
Causeur ne vit que par ses lecteurs, c’est la seule garantie de son indépendance.
Pour nous soutenir, achetez Causeur en kiosque ou abonnez-vous !

Article précédent De sexe et d’âme
Article suivant De l’euthanasie rentable au complotisme décomplexé
Il a publié une vingtaine de livres dont "Des Petits bals sans importance, HLM (Prix Populiste 2000) et Tendre Rock chez Mille et Une Nuits. Ses deux derniers livres sont : Au Fil de Creil (Castor astral) et Les matins translucides (Ecriture). Journaliste au Courrier Picard et critique à Service littéraire, il vit et écrit à Amiens, en Picardie. En 2018, il est récompensé du prix des Hussards pour "Le Chemin des fugues".

RÉAGISSEZ À CET ARTICLE

Pour laisser un commentaire sur un article, nous vous invitons à créer un compte Disqus ci-dessous (bouton S'identifier) ou à vous connecter avec votre compte existant.
Une tenue correcte est exigée. Soyez courtois et évitez le hors sujet.
Notre charte de modération