Accueil Édition Abonné Décembre 2017 Au secours, les petits blancs me persécutent !

Au secours, les petits blancs me persécutent !


Au secours, les petits blancs me persécutent !
Le député Danièle Obono à l'Assemblée nationale, octobre 2017. SIPA. 00828065_000144

Danièle Obono peut toujours faire mieux. Après avoir nié la radicalisation d’un chauffeur de bus qui refusait de prendre le volant à la suite d’une femme, après avoir défendu début novembre Houria Bouteldja, porte-parole des Indigènes de la République (PIR), qu’elle considère comme une « camarade antiraciste », le 24 novembre, sur Sud Radio, elle se faisait l’avocate des stages en non-mixité raciale organisés par le syndicat d’enseignants SUD Éducation 93 : « La pratique de la non-mixité n’est pas dangereuse. »

De son côté, le 22 novembre sur LCI, Maboula Soumahoro – maître de conférences à l’université de Tours et présidente de l’association Black History Month et non pas beauf de base au café du commerce – n’était pas du tout choquée par une liste qui s’est présentée aux élections municipales de Sarcelles pour faire battre le maire, car il était juif. Son argument est tout à fait révélateur de l’ambiguïté de sa « pensée » : « Ils n’ont pas été élus », donc où est le problème ?

La dictature des « petits blancs »

C’est donc horripilé par l’écœurante montée en puissance de ce racisme drapé d’antiracisme que je m’attaque à cette chronique, installé avec mon ordinateur sur un banc du square voisin afin de profiter d’un rayon de soleil inespéré. Chaudement emmitouflé dans ma doudoune, je me suis plongé dans le sujet et… j’avoue m’être endormi.

– « Tu prêtes ton ordi ? »

C’est cette phrase qui m’a réveillé. Debout face à moi, me dominant d’autant plus que je m’étais avachi dans mon sommeil, quatre Guillaume, ni look banlieue ni look skin, plutôt Auteuil-Neuilly-Passy c’est mon ghetto, jean propret et col en V, vrillent le bleu inquiétant de leurs yeux dans mes pupilles encore éblouies par le jour succédant à la nuit.

Mes années Créteil me soufflent que ça va mal tourner. Surtout quand celui qui avait déjà parlé ajoute : « Oh fils de catin ! J’te parle ! »

Alors je me suis levé avec un sourire niais et j’ai tendu mon ordi. Et quand le blond s’est approché pour le prendre, je lui ai envoyé un coup de pied qui voulait atteindre le visage, mais n’a touché que le genou (c’est ça de prendre de l’âge) et j’ai sprinté, mon ordi sous le bras.

Le temps de surprise et la seconde qu’a pris le groupe pour voir comment allait celui qui était au sol m’ont conféré une petite avance. Mais pas énorme énorme…

Surtout que j’ai perdu du temps quand je suis passé devant la vitrine du miroitier. Parce que je me suis vu dans la glace ! Ça m’a cloué ! J’ai découvert que j’étais noir ! J’étais devenu un putain de négro bro ! Alors forcément, ça m’a coupé les jambes. J’ai perdu un temps précieux… qui a permis aux Guillaume de me tomber dessus. Les coups arrivaient de partout et je tenais mon ordi comme j’avais appris à le faire d’un ballon ovale sous la mêlée quand je jouais au rugby.

Les deux flics n’auraient pas crié : « Oh, les cachets d’aspirine, vous le lâchez où on commet une violence policière ?! » Je crois que j’y serais passé…

Mon kebab francisé !

Coup de bol, deux flics noirs. Comme moi. Je ne serai donc pas, a priori, suspect. Ils ne se sont d’ailleurs pas privés de leur balancer des tas de remarques racistes du genre : « Eh, péquenaud, pourquoi tu retournes pas dans ton Berri », et toutes ces sortes de mots doux auxquels je suis d’ordinaire farouchement opposé, mais dont j’avoue qu’ils m’ont d’autant plus défoulé que je n’avais pas à endosser la culpabilité de les prononcer.

Et puis le flic qui avait des galons m’a dit : « Ça va monsieur ? Pas trop de bobos ? Pas besoin d’un marabout ? »

J’ai fait non de la tête en me disant que j’étais devenu dingue et je suis rentré chez moi, serrant victorieusement mon ordi sous le bras.

En bas de mon immeuble, j’ai croisé la gardienne qui promenait un chien que je n’avais jamais vu.

– Vous gardez des chiens maintenant ?

– Non, c’est le mien…

– Mais non ! Je le connais votre Rex… c’est un berger allemand !

– Ah, Rex, oui. Mais il a fallu que je change…

– Pourquoi, il est mort ?

Et c’est là qu’elle m’a regardé avec une petite nuance de commisération.

– Ben non, les quotas…

Devant mon incompréhension effrayée, elle a eu la bonté de m’expliquer.

– Comme le kebab de Mehmet a été transformé en brasserie munichoise, ça faisait trop d’Allemands dans le quartier… Donc il a fallu que je change. J’ai voulu prendre un lévrier espagnol, rapport à mon pays natal, mais c’était pas possible à cause de mon nom de jeune fille : Martinez. Ça faisait trop d’Espagne ! Alors j’ai pris un berger belge…

Le kebab de Mehmet transformé en taverne à choucroute ? Incroyable ! Hier encore je lui avais acheté un complet sauce blanche et on avait parlé du Galatasaray.

Je me suis retourné le plus lentement possible, parce que je savais déjà que ce que j’allais découvrir n’allait pas me plaire…

Effectivement, le kebab était devenu une usine à bière. Sur le pas de la porte, Mehmet en culotte de peau m’a fait un petit signe amical. Sa fière moustache turkmène était tout à fait en accord avec le costume bavarois, surtout qu’il l’avait teinte en blond.

Libé a failli me réveiller

J’ai traversé la rue, hypnotisé.

– Mehmet, qu’est-ce qui se passe ?

Il m’a répondu en allemand ! En allemand !

– Gehen Sie Herren hinein. Die Küche ist hier ausgezeichnet…

Et comme je ne comprenais rien, il m’a traduit en Français avec un accent à couper au couteau :

– Fenez mozieur, zé gut Küche izi…

J’ai paniqué. Je suis parti en courant avec une seule idée en tête : trouver refuge chez ma mère qui allait me rassurer comme elle savait si bien le faire après mes pires cauchemars.

Bloqué à un feu en attendant qu’il passe au rouge, j’ai eu le temps de déchiffrer le panneau publicitaire sur l’immeuble en face.

Une jeune beauté noire souriait à l’objectif. « Si vous broyez du blanc, écoutez Afrika. Afrika met de la couleur dans vos oreilles ! »

Quand je suis arrivé chez ma mère, j’étais dans un sale état.

– Eh ben !… Tu es frais !

Tout s’est mis à tourner. Je me suis précipité dans les toilettes. Et j’ai hurlé !

– Maman ?! C’est quoi ces chiottes ?!

– Surveille ton langage s’il te plaît ! Tu te crois chez les toubabs ?!

– Mais pourquoi tu as fait ça, maman ?!!!

– Si tu venais me voir un peu plus souvent, tu serais au courant de ce qui se passe chez ta mère… Ils voulaient nous coller un kebab dans le quartier ! Tu te rends compte ?! Pour ramasser toute la racaille des faces de craie, merci bien ! Leurs foutus quotas… Alors on a créé une association de quartier et on leur a dit : « La Turquie d’accord, mais pas les kebabs ! » Et c’est comme ça que depuis deux mois, tout le quartier a des toilettes à la turque…

Bien sûr que finalement, je me suis réveillé pour de vrai. Un Libé du 24 novembre traînait sur le banc. En le feuilletant, je suis tombé sur une tribune intitulée « Contre le lynchage médiatique et les calomnies visant les antiracistes » soutenant tout ce qui collabore avec l’islamisme et l’antisémitisme décolonial.

Et j’ai su que je dormais encore…

Décembre 2017 - #52

Article extrait du Magazine Causeur




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est cinéaste et scénariste. Il a notamment réalisé La journée de la jupe (2009).

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