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Camarade W.


Camarade W.

Un spectre hante les marxistes-léninistes lucides que nous sommes et ce spectre, c’est la fin de l’administration Bush. Georges W. Bush a mené une expérience communiste sans précédent et dans son travail de sape du capitalisme, aurait écrit Marx, « nous reconnaissons notre vieille amie, notre vieille taupe qui sait si bien travailler sous terre pour apparaître brusquement : la Révolution ». Savoir qu’il risque de ne pas finir son œuvre, c’est-à-dire détruire le capitalisme, pour une stupide question de calendrier électoral, voilà qui a de quoi nous inquiéter. Que le ticket vainqueur en novembre soit celui des mencheviks Obama-Bidden ou celui des cléricalo-fascistes Mc Cain-Palin, il est évident qu’ils tenteront tout pour liquider l’œuvre titanesque de Georges W. Bush si nous n’avons pas atteint d’ici là ce point de non-retour où l’économie de marché ne sera plus que le mauvais rêve d’une société endormie.

C’est donc une véritable course contre la montre qui se joue sous nos yeux : l’héroïque Texan, le Potomac de la pensée, le quarterback de la révolution mondiale aura-t-il le temps d’achever sa tâche ?

Le bilan de Georges W. Bush est en effet celui d’un véritable génie du communisme. Voici un homme dont le visage ne devrait pas, pour la postérité, être taillé dans la pierre du mont Rushmore, aux côtés de Washington, Jefferson, Lincoln et Théodore Roosevelt. Au contraire, il faudrait plutôt imaginer son mâle profil inscrit sur le drapeau rouge de l’émancipation, à la suite de ceux de Marx, Engels, Lénine, Staline et Mao.

Son entreprise pour discréditer l’économie de marché est trop concertée, trop pensée pour que l’on puisse un seul instant croire au hasard, à la maladresse ou à la malhonnêteté. C’est avec une maîtrise et une efficacité exemplaires que le quarante-troisième président des Etats-Unis a accéléré le processus de décomposition du capitalisme, suivant à la lettre les recommandations de Marx plutôt que d’Adam Smith et de Lénine plutôt que de Milton Friedmann, contrairement à ce que veulent faire accroire des observateurs superficiels. Rappelons que la prise de pouvoir de Georges Bush, en 2000, suit une technique typiquement bolchévique. Un respect apparent des formes de la démocratie bourgeoise mais, dans la réalité, aucune hésitation à brusquer les faits. Ainsi le décompte des voix en Floride fut-il au premier mandat de W ce que la prise du palais d’Hiver fut à la révolution d’Octobre : le coup de rein décisif.

Ensuite, très vite, il y eut la guerre et pas n’importe quelle guerre mais la guerre impérialiste dont Lénine disait dans L’opportunisme et la faillite de la deuxième Internationale : « L’époque de l’impérialisme capitaliste est celle où le capitalisme a atteint sa maturité, celle où il l’a dépassée, et se trouve à la veille de son écroulement ; il est mûr au point de devoir céder la place au socialisme (…) Considérer qu’une guerre est une guerre de libération nationale, entraîne une tactique ; considérer qu’elle est impérialiste en implique une autre. Le Manifeste indique clairement cette autre tactique. La guerre « amènera une crise économique et politique » qu’il faudra « utiliser » non pour atténuer la crise, non pour défendre la patrie, mais au contraire pour « secouer » les masses, en vue de « hâter le renversement de la domination de la classe capitaliste ». »

Cette crise, nous y sommes enfin, grâce à la politique visionnaire du bushisme. Quelle intelligence dans la création d’un climat économique favorable aux idiots utiles du marché mondialisé et aux savants fous de la financiarisation dont le chef d’œuvre est la subprime immobilière, produit bancaire psychotique et délire monomaniaque sur la valeur d’échange ! Ne s’agissait-il pas de convaincre les emprunteurs que le pavillon en planches d’une Sarah Palin quelconque dans la banlieue d’Anchorage finirait un jour ou l’autre par valoir autant que la résidence en marbre de Julia Roberts à Beverly Hill ? Ainsi a joué à plein ce que Georges W Bush, fin lecteur du Capital, véritable althussérien de la Maison Blanche, a pu appeler avec Marx, « le caractère fétiche de la marchandise ».

Et le voilà, notre petit père des grandes plaines, maintenant que l’effondrement est imminent, qui prépare les réformes de structures indispensables pour passer au socialisme réel : ses bras armés, la Banque Fédérale et le secrétariat d’Etat au Trésor nationalisent à tour de bras les grandes banques, les assureurs, les organismes de crédit. C’est une manière de NEP qui laisse pour seules victimes du talon de fer du marché les patrons de supérette de Wichita, les équipementiers automobiles de Talahasee et les fermières survivalistes du Montana. Le jour venu, tous, ruinés, aigris, revenus de leurs illusions sur la libre entreprise, rejoindront les rangs de la Grande Révolution Communiste Américaine.

Notre seule angoisse, donc, ce sont ces maudites élections de novembre qui pourraient tout remettre en question. A moins que, pour sauver les acquis de ses deux mandats, le camarade Bush décide de passer, avec l’aide des vétérans d’Irak et d’Afghanistan, à la dictature du prolétariat.

Ce que nous souhaitons ici, de tout cœur.



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