Il Messagero, principal quotidien de la Ville éternelle, s’en étrangle d’indignation : une commission du conseil municipal de Rome vient de prendre la décision de supprimer les chiffres romains dans les documents officiels et sur les plaques indiquant les noms des voies et places de la ville. Ainsi, l’avenue Pio IX sera désormais « l’avenue Pio nono » la piazza Sixto IV « Piazza Sixto quarto », et le reste à l’avenant. Rois et papes se voient d’un trait de plume dépouillés de leur chiffre distinctif de majesté, utilisant la numération latine, jugée archaïque, semeuse de trouble dans les systèmes informatiques, et indéchiffrable par les générations d’analphabètes privés de latin par les pédagogues « modernes » au pouvoir.
Rome n’est plus dans Rome ! Pour Il Messagero, ce coup de force estival de la municipalité (de gauche) de la capitale de l’Italie ouvre la porte à l’expulsion planétaire des chiffres romains des rares lieux où ils étaient encore visibles par le peuple : le nom des rues, des siècles, des arrondissements… Si le centre lâche, il est à craindre que la périphérie parte en débandade ! Il se trouvera bien chez Mme Hidalgo un esprit fort, avide de notoriété et de combats glorieux au nom de l’égalité, pour dénoncer le caractère discriminatoire du mode de numération hérité de Jules César ! Les bourgeois du Ve (non du Cinquième !) fréquenteront bientôt le lycée Henri quatre ou pourquoi pas H4, SMS compatible et tenant compte de la sensibilité de l’islam de France, très attaché aux chiffres arabes. A Rome, il se murmure que les ennemis des chiffres latins ont profité du pontificat du pape François, non concerné par la réforme, pour fomenter leur mauvais coup.
Fait à Rome le XXIV juillet MMXV.
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