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1789, une histoire de zombies

"La Révolution", la série inédite de Netflix


1789, une histoire de zombies
© Netflix

La dernière série sur Netflix, La Révolution, est d’abord à prendre comme un pur divertissement qui récrit l’histoire avec les codes du mauvais genre. Et c’est plutôt plaisant.


La dernière série française sur Netflix, La Révolution, ne lésine pas sur les moyens. Pour reconstituer le décor largement fantasmé dans le genre gothique de la France des années 1780 dans le comté imaginaire de Montargis, tout est soigné jusqu’au moins détail. La forteresse impressionnante, la forêt de toits misérables, les costumes et en permanence, un clair-obscur à la fois crasseux et léché qui doit plus à l’esthétique du film d’épouvante qu’à Rembrandt.

Pur divertissement

Il ne faut demander, à la série La Révolution d’Aurélien Molas, qui aura par ailleurs d’autres saisons, que ce qu’elle peut donner. Un pur divertissement qui ne prétend en rien à une quelconque ambition historique. L’utiliser comme support pédagogique, par exemple, demanderait beaucoup d’habileté aux enseignants. D’abord parce qu’il faudra tout de même passer vite sur les scènes de sexe et de violence qui sont traitées dans la grande tradition du genre, c’est-à-dire sans concessions. Ensuite parce qu’il faut admettre le point de départ de La Révolution.

Une hybridation plaisante de tous les « mauvais genres », fantastique, gore, zombie et compagnie…

Elle se déroule dans une réalité parallèle, dans une histoire alternative, un peu comme la seconde guerre mondiale dans le Maître du Haut Château de Dick (visible sur Amazon Prime). On appelle ça une uchronie. La Révolution française aura bien lieu, mais pas pour les raisons que l’on croit habituellement et se déroulera différemment, comme l’explique la voix-off de la jeune fille au commencement, même si on vous a raconté une toute autre histoire dans les manuels. Ce qu’on veut bien croire puisque la jeune fille en question, dans une scène inaugurale digne d’un western italien, arrive tranquillement à cheval devant Versailles en ruines et abat en duel au pistolet, dans un décor de neige, un aristocrate à perruque avant de le décapiter. On comprendra plus tard la nécessité de ce petit plus sadique…

Jouons avec les mauvais genres

Le point de divergence uchronique, comme on dit,  se situe vers 1787, quand une épidémie d’un genre nouveau, qui passe par le sang, transforme une partie de l’aristocratie en zombies, ou en vampires, ou en un mélange des deux, comme il vous plaira. 

Les deux ou trois premiers épisodes qui sont principalement des épisodes d’exposition jouent peut-être un peu trop avec les mystères d’une intrigue polyphonique et un risque d’égarement mais ils ont au moins le mérite de préciser le cadre et l’atmosphère tout de même assez inédits et de nous présenter les personnages joués par de bons acteurs, la plupart encore peu connus. Un seigneur sans pitié qui se nourrit de donzelles égarées (souvenir inconscient de Gilles de Rais et de la Bête du Gévaudan ?), une gamine qui fait des cauchemars terrifiants où elle voit le seigneur sans pitié, ce qui est ennuyeux car il est de la famille, un jeune médecin de la prison du comté de Montargis, un certain Joseph Guillotin qui découvre peu à peu la nature de la maladie et de l’épidémie qui menacent ;  une aristocrate, tante de la jeune fille aux cauchemars, qui prend peu à peu le parti de la Fraternité, un groupe de paysans rebelles. Rajoutez un esclave noir accusé à tort des meurtres des fillettes, du vaudou, de l’anthropophagie et vous aurez un joyeux foutoir, une hybridation plaisante de tous les « mauvais genres », fantastique, gore, zombie et compagnie.

Et quand on en arrive à l’épisode 4 et que l’action décolle vraiment, à moins de vouloir prendre au sérieux le très vague et très caricatural « message révolutionnaire », on prend un vrai plaisir de spectateur à ce combat des lumières contre les ténèbres qui a fini par déclencher La Révolution.

Pour le reste, il est amusant de voir que les Lumières, ce qui nous a enchanté, sont incarnées par le jeune Joseph Guillotin (qui sera, par humanité afin d’éviter les souffrances des condamnés, un des inventeurs de la guillotine) et un prêtre qui exerce systématiquement un droit d’asile dans son église, à croire qu’il a lu la dernière encyclique papale.

La Révolution, sur Netflix, huit épisodes de cinquante minutes. Création : Aurélien Molas.



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