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« Je ne me sens pas représentée par Assa Traoré qui prétend parler au nom des Noirs »

Entretien avec la youtubeuse Stella Kamnga


« Je ne me sens pas représentée par Assa Traoré qui prétend parler au nom des Noirs »
Stella Kamnga. DR

À seulement 26 ans, Stella Kamnga démonte les discours victimaires d’Assa Traoré, Rokhaya Diallo ou autres encenseurs du ressentiment anti France. Après la publication d’une vidéo publiée sur Youtube devenue virale, elle est la nouvelle cible des professionnels la victimisation. Entretien.



Alexis Brunet. Vous venez du Cameroun. Le ressentiment contre les Français y est-il fort ?

Stella Kamnga. Pas au Cameroun en particulier, mais venant de la diaspora oui. Il y a une partie qui s’est bien implantée, qui a fait de bonnes études et qui a réussi socialement, ceux-là on ne les entend pas. L’autre partie qui n’a pas réussi est très bruyante sur les réseaux sociaux. Ce sont eux qui distillent un sentiment anti France et anti-blanc.

En arrivant en France il y a trois ans, avez-vous eu des problèmes d’intégration ?

Non pas du tout. Je n’ai jamais ressenti de racisme à mon égard, ni petite phrase, ni racisme « systémique ».

La vidéo qui vous a fait connaître a déjà été vue plus de 140 000 fois sur Youtube. Pourquoi l’avez-vous faite ?

J’ai décidé de faire cette vidéo à la suite de l’échange entre le leader de la LDNA et Jean Messiha. Mais avant cela, il y a eu le déboulonnage de statues, le mouvement pour le « Black Lives Matter » qui est monté en puissance, le mouvement « Justice pour Adama » et enfin la LDNA, sans compter tout ce qu’on a pu lire sur les réseaux sociaux. Là c’était trop. Ça m’a énervé et j’ai décidé qu’il fallait rétablir la vérité : n’importe qui voulant réussir en France, qu’il soit étranger ou natif, a vraiment la possibilité de faire ce qu’il veut, contrairement à d’autres pays, notamment d’Afrique.

Vous attendiez-vous à ce qu’elle ait autant de succès ?

Non pas du tout, je n’imaginais pas que ça allait prendre une telle ampleur avec son lot de détracteurs. Mes principaux détracteurs viennent de la diaspora en France mais j’ai des soutiens venant d’Africains vivant en Afrique. Ceux-là comprennent mon discours. Il y a un problème de cohérence. Il y a des personnes qui expliquent que la France est raciste et il y a des Africains qui sont quand même prêts à risquer leur vie pour arriver en France. J’ai fait cette vidéo pour rétablir les faits, pour expliquer pourquoi ces Africains veulent venir en France, et pourquoi ceux qui disent que la France est raciste ne veulent pas du tout retourner en Afrique.

On a l’impression qu’il y a une minorité très active qui parle au nom des Noirs de France sans être représentative. Les gens d’origine africaine qui sont heureux en France ont-ils peur de s’exprimer publiquement ?

Oui, il y a un peu de peur car tout le monde n’a pas un mental d’acier pour subir les insultes et l’opprobre sur les réseaux sociaux. Les Africains qui sont arrivés ici et qui ont bien réussi ne veulent pas se mêler de ça. Je pense d’ailleurs que c’est un sentiment typiquement français. C’est comme ça qu’il y a des nombreuses agressions physiques sans que personne ne réagisse. J’en ai été témoin dernièrement dans le métro parisien. Un Blanc s’est fait agressé par des Noirs. Il y avait deux Blancs jeunes d’apparence musclée qui pouvaient intervenir, ils ne l’ont pas fait. J’ai reçu de nombreux témoignages du même genre. Les Africains qui ont réussi ont pris ce même pli, tant qu’il ne se sentent pas concernés directement, tant que l’on ne s’attaque pas à eux personnellement ou à leur famille, ils estiment qu’ils n’ont pas à prendre position. Moi je prends position parce que la montée du communautarisme veut faire croire que les Français sont racistes alors que ce n’est pas le cas et veut faire croire qu’il existe un délit de faciès, ce qui est faux. Quand des policiers vont dans un quartier et se font caillasser par des personnes majoritairement d’origine maghrébine ou africaine, c’est un peu normal que quand ils vont dans ces quartiers ils se protègent, et qu’ils soient plus méfiants et plus vigilants.

Les immigrés qui se comportent mal en France font du mal à ceux qui se comportent bien. Moi par exemple, j’ai voulu demander un prêt étudiant pour m’acquitter de mes frais de scolarité. La banque m’a clairement fait comprendre qu’elle n’accorderait plus de prêts aux étudiants étrangers parce que certains avaient pris des prêts et sont rentrés dans leurs pays respectifs sans les rembourser. Cette banque que je ne citerai pas n’accorde donc plus de prêts aux étudiants étrangers. Ce n’est pas du racisme, je comprends parfaitement la situation, c’est de la méfiance. À cause de ces immigrés qui ont mis un sacré bazar et qui mettent les gens mal à l’aise, ceux qui viennent d’arriver comme moi sont obligés de redoubler, même de tripler d’efforts pour s’affirmer et montrer que nous sommes différents de ces personnes-là. Ceux-là sont quasiment inexistants dans le débat public. On n’entend pas leur voix.

A la suite de vos prises de position publiques, vous avez reçu beaucoup de soutiens. N’avez-vous pas peur d’être récupérée politiquement ?

Je ne suis pas une politicienne et je ne souhaite pas entrer dans un mouvement politique. Je ne peux pas être responsable de ce que des politiciens peuvent faire de mes paroles. Je suis responsable de ce que je dis, pas de la façon dont ça peut être interprété. Ce que je dis relève simplement des positions d’une citoyenne qui en a marre. Cette position-là n’est pas propre à un parti politique ou à une idéologie. Si je sors dans la rue et que j’en ai marre de voir un groupe de personnes qui fout le bazar, qui met le désordre partout et qui met les gens mal à l’aise, je pense que si je le dis ça ne relève pas d’un discours politique, je pense que tout le monde en a marre. Si j’habite dans un lotissement et que je dis qu’il y a des personnes en particulier qui font du bruit, le dire ne relève pas d’un bord politique, ça relève d’un voisin qui en a marre comme tous les autres, tout simplement.

Je ne fais que communiquer ce que je constate et je souhaite aussi rétablir la balance par rapport aux médias qui font exprès, j’ai envie de dire, de mettre de l’huile sur le feu. Les médias donnent toujours la parole aux mêmes personnes. Ils valorisent toujours les même. Le comité « Justice pour Adama » a été encensé par Le MondeLe Figaro ou BFM TV alors qu’à la base, ce mouvement ne devait pas être encensé. Quand Assa Traoré prend la parole pour parler au nom des Noirs je ne me sens pas représentée. Moi je veux être représentée par quelqu’un qui a fait des études et surtout, qui pose les problèmes réels de la société. Le crack, la prostitution et le délit de faciès, je ne me sens pas concernée. Je ne deale pas de crack. Si c’est une réalité dans des quartiers de Seine-Saint-Denis, j’aimerais qu’elle le spécifie au lieu de généraliser pour en faire la cause d’une communauté tout entière. Je refuse d’être représentée par ces personnes-là.

Justement, avez-vous eu des contacts avec des personnes comme Assia Traoré ou Rokhaya Diallo ?

Non mais je ne suis pas contre. Si elles veulent échanger ou avoir un débat je n’ai aucun problème avec ça. Contrairement à ceux qui me détestent, j’estime que tout le monde à le droit à la parole. D’ailleurs, j’ai quand même une petite dent contre vous, Causeur, c’est par rapport à la tribune que vous avez offerte à Rokhaya Diallo (rires). J’en ai marre d’écouter ou de lire cette femme qui passe son temps à se plaindre. Je résumerai son discours en une formule : chialerie + ingratitude = minorité dite victime. Rokhaya Diallo estime que les gens comme moi qui sont reconnaissants envers la France ne devraient pas l’être. Selon son discours, des chose que j’ai ici devraient aller de soi. La liberté d’expression, la liberté de travailler ou d’aller à l’école sont des droits qui, selon elle, devraient aller de soi et je ne devrait donc pas être reconnaissante envers la France. Je suis contre cette façon de penser. Pourquoi ? Parce que je viens d’un pays où il n’y a pas de liberté d’expression, où si tu tiens un discours qui va l’encontre de l’État, ta vie peut être en danger, pas forcément de la part de l’État mais de la part de personnes qui sont zélées. Quand on tient un discours qui va à l’encontre du discours populaire, ceux qui n’ont pas d’argument préfèrent t’agresser ou même te supprimer. Je viens d’un pays comme ça où de plus, l’éducation est très chère et n’est pas à la portée de tout le monde, d’un pays où pour avoir un travail décent, il faut souvent avoir du piston. En France, je suis rentrée sans piston dans des entreprises que je n’aurais jamais pu intégrer au Cameroun. Oui, je suis reconnaissante à la France de m’avoir montré que si on veut on peut. Je suis reconnaissante à la France car elle a un éventail de possibilités. Il suffit juste de choisir et d’être déterminé, ce qui n’est pas le cas dans mon pays d’origine. Je viens d’un pays où les gens n’ont pas le luxe de pouvoir se plaindre en permanence.

Vous parlez justement dans une de vos vidéos des Africains qui se plaignent de la police française alors qu’ils pourraient être tués par un policier pour une broutille dans leur pays d’origine. Par ailleurs, vous démontez bien le discours du suprémaciste noir Kemi Seba. Comment expliquez-vous que son discours ait autant de succès, du moins sur les réseaux sociaux ?

Beaucoup d’Africains sont réfractaires à la vérité. J’en parlerai plus en détails dans mon livre quand il sortira. Je mets en lumière ce que beaucoup veulent cacher. Les Africains veulent qu’on les caresse dans le sens du poil, ils veulent qu’on leur dise qu’ils ont raison tout le temps. Mon discours aime beaucoup l’Afrique, ne vous y méprenez pas, sauf que moi, j’aime l’Afrique d’une manière différente. Ma manière, c’est de pousser l’Afrique à se lever par elle-même et d’arrêter d’attendre à chaque fois l’aide des pays étrangers. Soixante ans après leur indépendance, l’Afrique demeure le continent qui a besoin d’aide, je trouve que c’est malheureux ! C’est pathétique de vivre éternellement comme ça ! Un homme comme Kemi Seba va distribuer des masques pour le coronavirus et ça y est, il est le héro de l’Afrique. Pour aider les Africains, il faut leur apprendre à cultiver eux-mêmes, il faut leur offrir l’accès à la connaissance, pas leur offrir l’amour de Dieu.

Les discours comme ceux de Kemi Seba ou Rokhaya Diallo sont des discours victimaires qui à chaque fois encouragent les Africains à se reposer sur leurs lauriers et à penser que le coupable c’est la France. Le problème des Africains ce n’est pas la France, c’est leur mentalité et leurs dirigeants. Quand il y a un coup d’État, ils savent très bien que le seul pays qui est capable des les aider c’est la France. Ceux qui disent qu’il faut sortir du franc CFA sans proposer de véritable solution alternative le font car ils savent très bien que c’est ce que les Africains veulent entendre. Les Africains aiment entendre ce discours qui dit que tous leurs malheurs viennent de la France. Aujourd’hui pourtant, qui détient la dette africaine ? La Chine. La Chine détient 70 % de la dette africaine ! Les Africains restent aveuglés par ce discours qui rend la France responsable de leurs malheurs alors qu’aujourd’hui le véritable colon en Afrique ce n’est pas la France mais la Chine.

Après la diffusion de vos vidéos, avez-vous reçu des menaces ?

Évidemment. Un grand nombre d’Africains de la diaspora est réfractaire à la vérité. Pour eux, dès qu’on dit une idée qui est contraire à leur croyance, beaucoup sombrent dans les menaces de mort, dans les menaces de viol et tout ce qui va avec. Mais je continuerai. Tant qu’ils ne s’arrêteront pas, je ne m’arrêterai pas. Tout dépend d’eux. J’estime que les gens qui pensent comme moi devraient aussi prendre la parole. Cela est très important pour qu’on marque la différence entre-nous et ces personnes-là. Moi je suis pour envoyer ses enfants à l’école et leur faire faire leurs devoirs. Je suis pour les personnes qui veulent vraiment réussir et qui ne portent pas un discours victimaire à chaque fois. La vie ne fait de cadeaux à personnes. Je préférerais entendre des personnes qui portent un discours de volonté d’aller de l’avant que d’entendre à chaque fois des gens qui veulent des aides, qui pensent qu’on ne les apprécie pas ou qu’on veut même les tuer. Cela est un discours de paranoïa et on ne peut pas vivre dans un monde en étant paranoïaque.



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Enseignant, auteur du roman "Grossophobie" (Éditions Ovadia, 2022).

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