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Les lycéens belges ont choisi: sauver le climat, pas les fins de mois

Quand les jeunes taxent les jaunes


Les lycéens belges ont choisi: sauver le climat, pas les fins de mois
"Marche pour le climat" de lycéens à Bruxelles (Belgique), 24 janvier 2019. ©Sierakowski/Isopix/SIPA / 00892272_000032

En Belgique, pendant que les gilets jaunes manifestent contre les taxes, des lycéens en réclament. L’enjeu: sauver le climat. C’est beaucoup plus important que les fins de mois.


Les enfants rois ont décidé que leur empire s’étendrait dorénavant aux astres et qu’il était grand temps qu’ils régulassent le climat. Et pour ce faire la méthode est tout indiquée : des manifs !

C’est ainsi que depuis plusieurs jours, la jeunesse belge bat le pavé bruxellois dans le but de faire chuter le mercure. Mieux encore : ces dizaines de milliers de jeunes gens décidés sèchent les cours afin de se rendre à ces manifs ! A côté de ça, franchement, la Carmagnole c’est risible ! Autant aller prendre le thé chez Louis XVI. Non, eux, ils sont carrément dans la rébellion farouche et indomptable ! Non, mais ! Les jacqueries, les frondes, les révolutions et les demi-mesures, ce n’est pas pour eux. Eux, c’est du sérieux, les enjeux sont fondamentaux, l’avenir de l’humanité et même de la planète, voire de la galaxie, en dépend !

Une révolution soutenue par le pouvoir

Certes, de nombreuses directions d’écoles se sont déclarées favorables à ce mouvement au nom de « l’éducation à la citoyenneté » et encouragent les collégiens à sécher les cours. Si j’étais prof, je ferais pareil, rien de plus reposant qu’une classe vide ! Mieux encore, certaines écoles engagent des sortes de « coachs » en manifs anti réchauffement pour driller leurs ouailles. Tant qu’à faire du lavage du cerveau, autant nettoyer dans les coins !

Encore plus fort, Marie-Martine Schyns, ministre de l’Enseignement, Marie Christine Marghen, ministre de l’Energie, et Jean-Luc Crucke, ministre du Climat (si, si !) ont déclaré soutenir cette jeunesse conscientisée. D’autant plus qu’elle a tendance à faire oublier les gilets jaunes et leurs luttes contre le matraquage fiscal. Ce soutien des autorités scolaires et gouvernementales ôte le côté Gavroche de la chose, hélas, et ça fait tout de suite moins insurrectionnel que Mai 68. C’est navrant, mais c’est peut-être le prix à payer pour sensibiliser les adultes, à commencer par les parents qui vont conduire leur progéniture à la manif en 4X4.

On veut des taxes !

Il faut dire que ces « millennials » sont, par excellence, la génération où le hasard n’existe pas et où il faut toujours un responsable à tout. Alors, les éruptions solaires incontrôlées ou les volcans qui pètent sans prévenir, on ne la leur fait pas ! L’alpha et l’oméga du problème, c’est l’humain, particulièrement s’il est Européen, et il convient de régenter ses moindres comportements. Pour cela, il existe une baguette magique : les taxes ! On ne s’étonnera plus que les autorités politiques applaudissent à tout-va ! Ces jeunes manifestants sont en train de grever le peu qu’il restera de leur héritage mais ça a l’air de leur plaire, alors pourquoi les en priver ?

Les lycéens, y en a des biens

Mais tandis qu’ils scandent leur chant des partisans climatiques avec une soumission à l’autorité qui épaterait Milgram, quelques irréductibles boutonneux font sécession. Ils assistent vaille-que-vaille aux cours de physique (tiens, tiens, des cycles solaires…), de géo (tiens, tiens, les vents se forment en mer…), d’histoire (tiens, tiens, le climat a déjà changé plusieurs fois depuis le Moyen-Âge…), de français (tiens, tiens, la climatologie et la météorologie, c’est pas du tout la même chose…), de chimie (tiens, tiens, les gaz à effet de serre c’est beaucoup plus compliqué qu’on le croyait il y a vingt ans…), de mathématique (tiens, tiens, les prévisions reprises par les médias sont fondées sur des calculs moins évidents qu’on ne le croit…) et de bien d’autres choses.

Ils sont, eux aussi, les « adultes de demain ». Peu nombreux, comme toutes les élites, instruits, ayant eu bien souvent l’occasion d’exercer leur esprit critique et d’observer avec quelle aisance les foules « conscientisées » sont manipulables, ils dirigeront dans quelques années le troupeau bêlant qui bat la semelle dans la capitale. Reste à souhaiter qu’ils n’aient pas omis d’apprendre au passage les vertus de l’indulgence et de l’humour.



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Romancière et scénariste belge, critique BD et chroniqueuse presse écrite et radio. Dernier roman: Sophonisbe.

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