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Corée : la péninsule des frères ennemis


La Corée est un vaste territoire amusant, coupé en deux par une frontière avec laquelle on ne badine pas, qui divise la péninsule en deux pays. Au nord de cette frontière on trouve la Corée du Nord où vivent de malheureux coréens soumis à une famille d’hiérarques tyranniques à grosses lunettes bouffonnes, et de surcroit communistes ; au sud on trouve la Corée du Sud, où vivent des Coréens libres comme vous et moi, qui mangent des hamburgers gorgés de ketchup et roulent dans des pickup Ford. Des gardes armés veillent, de part et d’autre de cette frontière, à la continuité subtile de cette gracieuse harmonie entre frères ennemis.

Lorsque le dirigeant de la Corée du Nord, le Grand Kim Jong-Il a rendu son ticket de retour, il y a quelques semaines de cela, l’émotion fut immense. On a vu la tristesse submerger des foules impressionnantes, au sein desquelles les Coréens du Nord pleuraient consciencieusement (et sans aucune mise en scène politico-théâtrale cela va de soi !) leur cher leader communiste disparu. On apprend même – de l’agence officielle Nord-Coréenne KCNA, rapportée il y a quelques jours par l’AFP – que des « phénomènes surnaturels » se sont produits à l’ambassade nord-coréenne en Allemagne peu après la mort du dirigeant Kim Jong-Il… Une mésange est restée une heure à l’entrée de l’ambassade, donnant des petits coups de bec à la fenêtre, tandis qu’une plante a fleuri pendant la période de deuil, malgré les températures hivernales. « Il semble qu’en entendant la triste nouvelle de la fin de notre grand homme, l’oiseau a volé vers ce lieu de deuil pour exprimer ses condoléances, et est reparti après une veillée funèbre », déclare l’agence officielle. Quant à la plante, cela va de soi : « elle a fleuri malgré le froid, pour participer au deuil ». Des phénomènes assez peu troublants, finalement, au regard de la légende selon laquelle, à la naissance du grand Kim Jong-Il, il y a 69 ans de cela, une étoile et un double arc-en-ciel sont apparus sur le Mont Pektu, devenu illico montagne sacrée.

Quand le Grand Kim Jong-Il est parti jouer de la harpe d’or au paradis du rock n’roll, entre ses semblables, Elvis Presley, Charles Bukowski et Léon Zitrone, il a bien fallu le remplacer… c’est Kim Jong-Un qui a été officiellement désigné – au grand dam de son frère Kim Jong-Nam. Précisons – pour éviter les procès populaires à grand spectacle – que les deux frères ennemis sont en réalité des demi-frères ennemis, mais cela ne gâche rien. Le fils ainé déchu du Grand défunt, 40 ans, publie ces prochains jours – à destination des lecteurs japonais – un pamphlet à charge contre la Corée du Nord, prophétisant dans un avenir proche l’effondrement du pays dirigé par son demi-frère honnis, et remettant en cause le principe même d’une transmission héréditaire du pouvoir. Kim Jong-Nam – en exil à Macao depuis 2003 – déclare notamment, sans ambages : « La Corée du Nord est très instable. Sans réforme, l’économie va s’effondrer et si la succession échoue, l’armée prendra le pouvoir ». Dont acte. Espérons plutôt une sorte de « printemps coréen ». Au printemps les fleurs et les mésanges sont assez touchantes. Et les champignons ne sont pas toujours atomiques.
Encore heureux qu’il n’y ait que deux Corées…



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Il est l’auteur de L’eugénisme de Platon (L’Harmattan, 2002) et a participé à l’écriture du "Dictionnaire Molière" (à paraître - collection Bouquin) ainsi qu’à un ouvrage collectif consacré à Philippe Muray.

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