Accueil Politique La double contradiction du président Macron

La double contradiction du président Macron


La double contradiction du président Macron
La foule écoute l'intervention d'Emmanuel Macron sur l'écran géant de la cour du Louvre, 7 mai 2017.
La foule écoute l'intervention d'Emmanuel Macron sur l'écran géant de la cour du Louvre, 7 mai 2017. SIPA. AP22049578_000251

Emmanuel Macron a donc été élu avec une large majorité des votes exprimés le 7 mai. Avec 66% des « votants » il atteint un score impressionnant, mais en trompe l’œil. L’importance du nombre des abstentions et des votes « blancs ou nuls » ramène son score à 43% des inscrits. Ce niveau est à mettre en parallèle avec celui obtenu en 2002 par Jacques Chirac dans une élection présidentielle où, déjà, un candidat de Front national était au 2ème tour. Dans ce cas de figure très particulier, Jacques Chirac avait obtenu les suffrages de 62% des inscrits. L’écart de 19 points qui s’est creusé en 15 ans, entre l’élection de Jacques Chirac et celle d’Emmanuel Macron est hautement significatif. Il montre qu’il y a eu plus un vote par défaut : les sondages, à prendre avec précaution, indiquent que seuls 43% des personnes ayant choisi le vote Macron approuvent son programme.

Le succès d’Emmanuel Macron pourrait bien n’être qu’un trompe-l’œil. Le soutien de la presse quasi unanime, des grands médias qui se sont impliqués avec une rare indécence derrière ce candidat, n’a pas suffi pour qu’il retrouve un étiage correspondant à celui de Jacques Chirac. Les 19 points manquants en disent long sur la colère que ressentent les Français, une colère qui s’est largement exprimée durant cette campagne.

On marche seul

Lors des « festivités » organisées pour l’annonce des résultats, avec une mise en scène tellement étudiée et tellement dépourvue de spontanéité que même les journalistes des principales chaînes de télévision l’ont remarquée, on a assisté à la mise en place d’une double contradiction qui pourrait bien être celle de la présidence Macron.


La marche seul au Louvre: CNews révèle qu…

La première fut de présenter l’élu comme un homme seul, dégagé de toute attache, ainsi que voulait le faire entendre sa marche solitaire vers la scène du Louvre, alors qu’en réalité sa candidature est une immense entreprise de recyclage de politiciens faillis ou à bout de souffle, du Parti socialiste, du « centre », mais aussi de la droite.

La seconde réside dans la tonalité ouvertement « européenne » de la mise en scène du Carrousel du Louvre, avec le discours prononcé par Emmanuel Macron à la tribune, un discours ou la France fut largement présente. Il a même assuré, ce qu’il avait déjà dit devant des télévisions étrangères mais qu’il avait tu en France, qu’il voulait « refonder l’Europe ». Mais, tout projet de changement des institutions de l’Union européenne, car – politiquement et institutionnellement – l’Europe n’existe pas, passe par la case d’un affrontement explicite avec l’Allemagne. Emmanuel Macron aura à choisir entre une préférence européenne et une préférence française. A vouloir combiner les deux et ne pas choisir, il se mettra dans la main de Berlin et montrera à tous que sa prétendue volonté de « refonder l’Europe » n’était que le masque de la soumission, voulue ou subie.

 

Législatives, la revanche des partis faillis?

La défaite de Marine le Pen est indiscutable. Elle l’est d’autant plus que, dans les premiers jours de la campagne du second tour de la présidentielle, une dynamique s’était mise en place qui montrait que les intentions de votes passaient, dans les sondages, de 38% à 42%. Cette dynamique a été cassée et ce très largement du fait de la campagne qu’elle a menée. Si elle est passée de 42% à 34% elle ne peut s’en prendre ici qu’à elle-même. Les ambiguïtés et les confusions de sa campagne ont eu pour effet un véritable sabordage de cette dernière dont on ne sait s’il fut le produit d’une incompétence et de choix erronés ou par dessein.

La campagne des législatives qui s’ouvre verra les quatre partis qui désormais dominent la politique française s’affronter. Celui d’Emmanuel Macron vise la majorité absolue des sièges. Mais, ceci ne semble pas être le vœu des Français, qui n’ont pas envoyé à travers les urnes un tel message. Compte tenu du mode de scrutin traditionnel en France, il importera plus que jamais que les partis clarifient leurs positions. Les partisans de Jean-Luc Mélenchon peuvent espérer faire de beaux scores. Mais ils affrontent des difficultés considérables du fait même du mode de scrutin. Il conviendra de prendre garde à ce que cette élection ne permette à des partis faillis de reprendre la main, ni n’aboutisse à ce que tous les pouvoirs soient donnés à Emmanuel Macron.

Retrouvez tous les articles de Jacques Sapir sur son blog Russeurope



Vous venez de lire un article en accès libre.
Causeur ne vit que par ses lecteurs, c’est la seule garantie de son indépendance.
Pour nous soutenir, achetez Causeur en kiosque ou abonnez-vous !

Article précédent Le wahhabisme, un « Daech blanc »?
Article suivant Quinquennat Macron: le retour des vieilles badernes?
économiste, spécialiste de la Russie.

RÉAGISSEZ À CET ARTICLE

Le système de commentaires sur Causeur.fr évolue : nous vous invitons à créer ci-dessous un nouveau compte Disqus si vous n'en avez pas encore.
Une tenue correcte est exigée. Soyez courtois et évitez le hors sujet.
Notre charte de modération