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Face aux attentats, le «courage» des lâches


Face aux attentats, le «courage» des lâches
Sipa. Numéro de reportage : 00737354_000039 .
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Sipa. Numéro de reportage : 00737354_000039 .

« Le faux courage attend les grandes occasions, le courage véritable consiste chaque jour à vaincre les petits ennemis » disait Paul Nizan, ne se doutant pas que la lâcheté véritable pouvait, quant à elle, aller jusqu’à ne pas profiter non plus des grandes occasions pour faire preuve d’un peu de courage.

De bonnes raisons de s’indigner

Car si l’on a raison de se féliciter, comme l’a fait Régis de Castelnau, de l’absence de ratonnades, d’attaques de mosquées et d’amalgames en tout genre, que penser de l’absence de réactions politiques et médiatiques à la déclaration du directeur du collectif contre l’islamophobie en France (CCIF), qui, constatant qu’il n’y a pas eu d’explosion des actes islamophobes en France après les attentats de Nice, ne trouve pas mieux, pour saluer le courage de nos compatriotes, que de déplorer « l’émergence d’une islamophobie sécuritaire » dans un article paru sur le site de Libé.

Comment expliquer que tout le monde ne s’indigne pas qu’un Premier ministre lance « Nous voulons être plus volontaristes sur l’organisation de l’Islam de France » et que notre gouvernement puisse évoquer le risque d’une guerre de religion tout en continuant à clamer haut et fort que tous ces attentats n’ont rien à voir avec l’Islam ?

Jusqu’à quand va-t-on continuer à ne pas s’indigner sous le fallacieux prétexte de l’amour ? L’amour n’a jamais empêché le sentiment de révolte et l’on aimerait bien entendre davantage tous ceux qui hurlaient avec Stéphane Hessel qu’il fallait s’indigner, sans bien savoir contre qui ou contre quoi. Ils ont là une occasion unique de le faire.  « Beaucoup d’insensibilité prend parfois figure de courage » disait Pierre Reverdy sans même avoir connu ni Edwy Plenel ni Laurent Joffrin, ce qui en dit long sur ses talents prophétiques.

Jésus lui-même, qui était amour aussi bien avec les étrangers, les Samaritains, qu’avec les pécheurs, n’a pourtant pas hésité à traiter les fondamentalistes religieux de son époque de « race de vipères ». Ceux qui nous attaquent sont de cette race là. Et il serait temps que des voix s’élèvent pour le dénoncer. Non le danger qui nous menace n’est pas le manque d’amour, tous les Français ont prouvé maintes fois depuis le début des attentats qu’ils n’en manquaient nullement, le péril qui nous guette, c’est le manque de courage.

Sous la « décence », la lâcheté

Le courage d’oser montrer le corps inerte de cette petite fille à côté de son doudou après l’attentat de Nice, qu’on a préféré cacher au nom de la décence, un autre mot à la mode pour dissimuler la lâcheté. Pour le petit Aylan, la sensation de conscience tranquille avait rendu la photo acceptable. Ce n’était pas notre faute, c’était les gouvernants européens, ces sans-cœur, qui étaient responsables de la mort de cet enfant. A l’époque, tous ceux qui juraient leurs grands Dieux que, s’ils n’avaient pas encore accueilli de famille syrienne chez eux, c’était uniquement parce que, comme le disait Desproges, il n’y avait pas de place à cause du piano, s’en donnaient à cœur joie sur la cruauté des Européens.

Mais l’image de la petite fille de Nice nous renvoie à l’accumulation de toutes ces petites lâchetés qui a conduit notre pays à être l’une des cibles privilégiées des terroristes. Alors nous préférons, une fois encore, détourner la tête, plutôt que de regarder la réalité en face.

Oui, au soir des attentats de Nice, les journalistes ont parfois sombré dans l’indécence, en interviewant par exemple ce veuf devant la dépouille de sa femme quelques minutes après le drame. Mais l’image de la petite fille n’entrait pas dans cette catégorie-là..

Ce qui est indécent, c’est de penser que tous les musulmans parlent d’une seule voix, c’est de mettre en garde contre les amalgames tout en affirmant que les Français sont dans le camp des racistes, c’est de penser que le grand péril à venir est l’extrême droite alors que nos enfants se font écraser par des camions et tirer dessus à bout portant devant une école, c’est de chercher sans cesse à dédouaner les criminels mais de continuer à considérer les Blancs tous coupables de crimes que même leurs plus lointains ancêtres n’ont parfois pas commis.

Ce qui est indécent, c’est de renier son travail de journaliste en cachant des informations par idéologie. Ce qui est indécent, c’est d’être incapable d’envisager le monde autrement que par le prisme de l’ethnie, des origines tout en fustigeant le racisme supposé de ceux qui refusent de se prêter à ce jeu. C’est de penser comme Olivier Roy que, parce qu’on parle d’islamisation de la radicalité plutôt que de radicalisation de l’Islam, ça va changer quelque chose et garantir le vivre-ensemble, c’est de confondre, à dessein, fanatisme et folie, c’est de critiquer « ceux qui font commerce de la peur » en faisant commerce du compromis.

« Le courage c’est de chercher la vérité et de la dire » disait Jean Jaurès. Quand on ne cherche ni l’un ni l’autre…



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