Nicolas Sarkozy a été condamné pour association de malfaiteurs dans le cadre de l’affaire du «financement libyen». «La démocratie est en danger», a déclaré dans les médias Jean-François Bohnert, procureur et directeur du Parquet national financier, préoccupé par les remises en cause de l’institution judiciaire qu’il dirige et par les discours évoquant l’existence d’un prétendu «gouvernement des juges». Le coup de gueule d’Ivan Rioufol.
L’ « association de malfaiteurs » est une trouvaille, précieuse pour les épurateurs éthiques. Cette accusation floue, qui va permettre aux juges du tribunal correctionnel de Paris de mettre Nicolas Sarkozy en prison, peut être déclinée contre ceux qui déplaisent aux vendeurs de vertu. Le malfaiteur est devenu, dans ce procès, celui qui contrarie une caste présumée infaillible. Ceux qui sont accusés d’être « d’extrême droite », par leur opposition à un progressisme sectaire et brutal, pourraient bien devenir à leur tour des délinquants. La loi des suspects (1793) avait inauguré la méthode, développée par l’URSS et la Chine communiste notamment.
Une meute ravie
Le crime politique devient envisageable quand un ancien président de la République va être incarcéré alors qu’aucune preuve n’a été retenue contre lui. La pente totalitaire de ce jugement, qui va s’appliquer en dépit de l’appel, est vertigineuse. Le délibéré ravit la gauche stalinienne et la meute lyncheuse. Les juges expliquent avoir opté pour l’exécution provisoire de la détention « en regard de l’importance du trouble à l’ordre public causé par l’infraction ». En l’espèce, il est reproché à Sarkozy des contacts noués en 2005 en Libye par ses collaborateurs, Brice Hortefeux et Claude Guéant, avec Ziad Takieddine, homme d’affaires véreux, et Abdallah Senoussi, proche de Kadhafi, criminel condamné par contumace à perpétuité pour son implication dans l’attentat de 1989 contre le DC 10 d’UTA (156 morts, dont 142 Français). De l’objet de ces contacts, les juges ne savent rien. Ils se contentent de considérer ces acteurs comme infréquentables. Mais cette intrusion morale dans la marche de l’exécutif est une violation de la séparation des pouvoirs.
État affaibli et PNF tout-puissant
Ce jugement n’a qu’un mérite : il illustre l’état de déliquescence de la démocratie. La politique paie son isolement du reste des citoyens. Ceux-ci, écartés par une caste méfiante de la plèbe, ont vidé le Pouvoir de sa substance humaine. La faiblesse de l’Etat, privé de son assise populaire, est devenue telle que la Justice se croit autorisée désormais à remplir les vides et à s’ériger en autorité de substitution. « La démocratie est en danger », a alerté ce lundi (RTL) Jean-François Bohnert, procureur qui dirige le Parquet national financier. Mais ce sont les nouveaux robespierristes qui la menacent. Après avoir participé à la chute de François Fillon, des juges se préparent à entraver la course présidentielle de Marine Le Pen.
Or cette corporation non élue, qui supporte mal la contradiction, a encore moins de légitimité démocratique que la classe politique déconnectée. La Justice n’est pas plus exemplaire que les puissants qu’elle entend humilier. L’affaire Sarkozy a été lancée en 2012 par un document de Mediapart dont le tribunal a reconnu qu’il est probablement faux. Or ce bidouillage n’a pas empêché le tribunal d’aller au bout de son intime conviction, en piétinant les prérogatives de la Cour de justice de la République, voire de la Haute Cour. La Justice sème le désordre public. Qui jugera les juges ?




