La discrétion estivale de l’ancien président de la République, pourtant très friand des combinaisons politiques les plus sophistiquées, est étrange. En juin, en campagne pour les législatives, il demandait à l’Insoumis Jean-Luc Mélenchon de «se taire» pour «vraiment rendre service au Nouveau Front populaire». Alors que de nombreux sujets de fond les opposent, et alors que la plus proche conseillère de Jean-Luc Mélenchon Sophia Chikirou a depuis comparé le hollandisme à des «punaises de lit», bizarrement, le socialiste n’intervient pas dans le débat politique agité de la rentrée.
Loin de moi l’idée d’offenser François Hollande, que j’avais beaucoup apprécié aussi bien lors de l’entretien qu’il avait bien voulu m’accorder dans « Bilger les soumet à la question » que dans sa périphérie aimable et spirituelle. Toutefois je ne voudrais pas qu’on s’interrogeât sur lui en doutant non seulement de son rôle présidentiel – avec le constat amer tiré par lui seul qu’il ne pouvait pas se représenter – mais de l’importance de sa nouvelle fonction de député au sein du groupe socialiste. Celui-ci, inséré dans le Nouveau Front populaire (NFP), se montre alternativement dans la soumission à Jean-Luc Mélenchon puis dans sa détestation. J’avoue qu’au cours des péripéties de ces dernières semaines concernant le président de la République, ses rapports avec le NFP, les tensions entre LFI et les socialistes, toutes les éventualités pour la désignation d’un nouveau Premier ministre et, plus globalement, le rôle d’Emmanuel Macron lui-même, j’aurais aimé l’entendre. Il n’a pas dit un mot et son étrange discrétion peut s’expliquer de plusieurs manières.
– Laisser passer un peu de temps après son élection comme député et sa validation d’une alliance où LFI semblait occuper la part du lion. Alors que beaucoup espéraient de sa part, et pas seulement à gauche, une parole forte et exemplaire en raison de ses prises de position nettes à l’encontre de Jean-Luc Mélenchon.
– Faire preuve de modestie et presque d’effacement de peur de se voir reprocher au contraire une omniprésence, presque une arrogance qu’on aurait imputées à l’exercice de son mandat présidentiel même défaillant.
– Ne pas risquer de faire surgir publiquement une voix discordante au sein du groupe socialiste, ce qui n’aurait pas manqué d’aggraver les relations notoirement mauvaises qu’il a avec Olivier Faure.
Je ne crois pas qu’avec sa personnalité aux antipodes de celle que des médiocres sans discernement se plaisent à tourner en dérision, il ait eu pour ambition seulement la fonction de député, même si son bonheur conjugal l’a peut-être rendu moins réactif à l’égard de ce qu’une existence partisane exige. La gloire, alors, non pas le deuil éclatant du bonheur selon la formule magnifique de Madame de Staël mais son contraire : le bonheur comme un adoucissement consenti et bienfaisant des combats partisans.
Il n’est pas impossible pourtant, quand le paysage politique se sera décanté, que François Hollande réapparaisse dans sa subtilité, son intelligence, sa passion des compromis et d’une modération qu’il voudrait toujours vigoureuse. Député pour rien, après avoir eu le courage de revenir d’une humiliation qui aurait pu être irréversible, ce n’était vraiment pas l’hypothèse la plus plausible ! Je ne l’imagine pas se priver, à sa manière, avec une douceur acide, de tout ce qu’il pourra accomplir à titre personnel pour se venger d’Emmanuel Macron qui n’a cessé, avant de devenir président, de lui mentir et de le faire tomber dans une naïveté voire un aveuglement qui n’étaient pourtant pas son genre. Je constate, en écrivant ce billet, que Michel Richard, que j’apprécie, a traité dans Le Point le même sujet : l’apparente passivité de François Hollande. L’ancien président mérite bien de susciter ce double intérêt. À quoi sert-il ? Ayons de la patience.
Trois ans après leur retour au pouvoir, les talibans promulguent une nouvelle loi pour « promouvoir la vertu » et interdisent notamment aux femmes de chanter en public.
C’est le chœur tragiquement silencieux des femmes afghanes. Ces femmes désormais condamnées au silence. C’est le chœur des esclaves asservies par les talibans, mâles fanatiques, débiles, perdus d’âme et d’esprit, coupables d’abyssales folies mystiques, dont la plus pernicieuse de toutes : enchaîner la divinité à leur propre délire.
Ils interdisent désormais aux femmes – leurs mères, leurs épouses, leur sœurs, leurs filles – de faire entendre le son de leur voix en public. Ailleurs donc que dans la sphère carcérale du logis. Un pas de plus – un pas de trop ? – dans l’effroyable entreprise de négation de la femme en tant qu’être, en tant que personne, en tant que membre à part entière de l’humanité.
Que serait un monde où l’on n’entendrait plus la musique de la voix féminine ? Un asile immonde à peu près aussi peu vivable que celui dont on aurait éradiqué le chant des oiseaux.
Avec cet interdit, un stade suprême est atteint dans le registre de la barbarie. On se demande quel prodige nihiliste rend possible la conception et la mise en acte d’une telle haine. Haine qui, au fond, n’est sans doute que la réponse pitoyable à une peur viscérale, névrotique, psychotique de la femme, l’inaccessible femme, la femme nimbée de mystère. La femme dont tout mâle sent bien de quelle force d’âme elle est riche.
Mais qu’importe le diagnostic face à la monstruosité du fait.
Cette fois plus que jamais, il ne faudrait pas que seul le silence de la lâcheté occidentale réponde au silence de la barbarie. Oui, cette fois plus que jamais, on attend que les femmes d’ici, les femmes musulmanes en premier, évidemment, mais aussi toutes les autres (Parmi elles les féministes d’estrade, enfin! Se déroberont-elles comme si souvent ?), descendent par milliers, par millions dans la rue et fassent entendre leur voix ! Qu’elles chantent assez fort pour que, là-bas, à Kaboul et partout où c’est nécessaire, résonne le chœur des femmes libres…
Ou alors faudra-t-il attendre l’étape suivante dans l’escalade monstrueuse, à savoir couper la langue des petites filles dès le berceau pour être bien certain qu’on n’aura pas à affronter la peur d’entendre leur voix ? Tout comme, ailleurs, sous d’autres cieux et d’autres mœurs qu’on voudrait parfois nous présenter comme aussi dignes de respect que les nôtres, on excise les fillettes pour les priver du bonheur de jouir. Les priver de voix, les priver de plaisir. Autrement dit, réduire la femme à un objet, à une chose tout juste bonne à servir le mâle et à mettre bas. Qu’on n’aille pas se raconter d’histoires. Au point où nous en sommes, l’enjeu, pas si loin de chez nous, est bel et bien celui-là.
Devant la recrudescence des actes antisémites dans le pays, des juifs se demandent s’il ne faut pas partir. Les discours républicains volontaristes de nos hommes politiques semblent inopérants et un peu creux pour contrer le phénomène.
Chère Elisabeth, Ce n’est qu’aujourd’hui que j’ai entendu les propos que tu as tenus avant-hier sur CNews au micro de Thierry Cabannes face à Julien Dray dans l’émission « Face à face »[1]. Des propos forts, émouvants, qui m’ont retourné l’esprit et les tripes au point de me pousser à t’écrire cette lettre. Une lettre que j’aurais aimé ne jamais écrire mais, vu la gravité de la situation pour toi et tous les Français juifs, je n’ai pas pu m’empêcher de l’écrire. « Cela fait des mois que je me dis que je ne finirais pas ma vie dans mon pays ». Tel est le propos que tu as tenu, un propos qui m’a révolté et mis hors de moi. Un propos qui est malheureusement la triste réalité pour nombre de Français juifs, et ce depuis des années, les alyas, l’émigration vers Israël, se multipliant vu le climat subi par nos compatriotes juifs (je ne parle pas de communauté puisque la République ne reconnait que des citoyens).
Climat nauséabond
Un climat nauséabond qui a empiré depuis des années avec nombre d’attentats antisémites, de la rue Copernic à La Grande-Motte en passant par Toulouse, la rue Rosiers ou l’Hyper Cacher. Des attentats ayant pour dénominateur commun le conflit au Proche-Orient et l’islamisme – un conflit au Proche-Orient dans lequel nos compatriotes juifs n’ont aucune responsabilité et un islamisme qui sème la mort partout où il passe.
Un conflit au Proche-Orient dans lequel les Français juifs ont toujours été exemplaires, puisqu’ils n’ont jamais commis le moindre acte hostile contre une mosquée ou des musulmans après les nombreux actes terroristes commis dans l’État hébreu. Une réalité qui ne marche pas dans l’autre sens, Merah ayant tué de sang-froid des enfants pour « venger les enfants palestiniens » comme le terroriste de la Grande-Motte a mis le feu à une synagogue pour Gaza qu’il ne sait probablement pas situer sur une carte… Mais pour certains, les juifs sont fautifs, même si le 7 octobre ils ont été victimes du plus grand pogrom depuis la Seconde Guerre mondiale. Les mêmes qui parlent de génocide à Gaza alors que le Hamas, s’il le pouvait, ferait une solution finale saison 2 aux Israéliens pour faire la Palestine « de la rivière à la mer », un génocide qu’ils ont commencé le 7 octobre dernier et contre lequel Israël est en état de légitime défense.
Mais les juifs sont responsables et coupables alors que les Français juifs ne demandent, comme toi Elisabeth, qu’à vivre en paix et en sécurité en France, ce qui est un dû pour tous les membres de la communauté nationale, en particulier les plus menacés.
Une présence bimillénaire en France
Alors Elisabeth, sache que tu es française et que ta place, comme celle de tous tes coreligionnaires et compatriotes est ici. La France a une histoire juive bimillénaire puisque les premiers juifs sont arrivés en France alors que celle-ci s’appelait encore la Gaule. Les juifs alsaciens ou les juifs du comtat Venaissin font partie de notre histoire ancienne avant d’être rejoints dans notre histoire plus récente par les ashkénazes d’Europe de l’est fuyant les pogroms et les sépharades chassés après les indépendances en Afrique du nord. Des Français juifs qui se sont illustrés dans les arts, la culture, les sciences, l’entrepreneuriat sans jamais ou presque faire de revendications communautaristes. Des Français juifs qui se sont illustrés aussi les armes à la main, en défendant la France. Il y aura 110 ans le 29 août, le rabbin Abraham Bloch mourait sous les tirs allemands alors qu’il portait un crucifix à un poilu mourant qui le suppliait de lui donner l’extrême-onction alors qu’aucun aumônier n’était présent. Un moment de fraternité française unique, très peu de temps après que la lèpre antisémite ait frappé la France lors de l’affaire Dreyfus. Alfred Dreyfus qui faisait partie d’une famille juive d’Alsace ayant choisi « l’option française » après l’annexion de l’Alsace-Moselle, preuve de son patriotisme incontestable. Alors chère Elisabeth ne pars pas et je profite de cette lettre pour dire à nos compatriotes juifs que leur place est ici, que la France a besoin d’eux et qu’on les aime. Je t’embrasse et te dis à très vite.
«Cela fait des mois que je me dis que je ne finirais pas ma vie dans mon pays» à cause de la multiplication des actes antisémites en France, déplore Elisabeth Lévy, dans #FaceafaceETEpic.twitter.com/bdEWH4BZci
Pendant que la chanteuse un peu mièvre Angèle chante « Bruxelles, je t’aime », jusqu’au paysage politique de la capitale belge change du tout au tout…
L’irruption sur la scène politico-médiatique de Fouad Ahidar, autrefois socialiste flamand, pourrait être un tournant politique majeur en Belgique. Aux dernières élections de juin, son parti a obtenu trois députés bruxellois (et un élu au Parlement flamand) après une campagne menée à destination de la communauté arabo-musulmane. L’homme, qui est l’objet d’une plainte après avoir qualifié les juifs de « psychopathes » et qui a décrit les événements du 7 octobre comme une « petite réponse d’une partie du Hamas », est le nouvel étendard du vote communautaire. À terme, il pourrait s’accaparer une part grandissante des suffrages dans une capitale où se côtoient toutes les nuances d’un islamo-gauchisme plus que jamais soudé par les événements au Proche-Orient.
Inquiétant contexte
Remettons-nous dans le contexte bruxellois. Plus que nulle part ailleurs, l’antisionisme et la dénonciation d’Israël y sont souvent le cache-sexe de sentiments bien plus fangeux. La recrudescence de l’antisémitisme dans la capitale belge a ainsi été clairement mise au jour par un récent sondage à l’occasion duquel 22 % des « Bruxellois » ont déclaré leur aversion pour les Juifs ; 41 % que ceux-ci contrôlent la finance et 40 % qu’ils dirigent les médias – pourtant plutôt complaisants à l’égard la cause palestinienne, sans oublier le boycott par la chaîne publique flamande de la chanteuse israélienne à l’eurovision.
Tel un symbole, le professeur israélien Elie Barnavi, partisan de la création d’un Etat palestinien et peu suspect de sympathies politiques à droite, fut empêché, peu avant la trêve des confiseurs, de tenir une conférence à l’Université libre de Bruxelles : lui, l’allié de la cause palestinienne, était donc déclaré persona non grata, en raison de sa nationalité et de ses origines, soit la définition même du racisme. S’il n’y avait pas eu ça et là quelques drapeaux LGBT, on pourrait écrire que le campus de l’ULB fut alors devenu, pendant plusieurs semaines, une mini-bande de Gaza : les drapeaux palestiniens pendirent aux fenêtres de bâtiments dégradés par les activistes ; le keffieh fut porté avec ostentation ; les slogans, jusqu’aux plus nauséabonds, fusèrent comme autrefois les chants estudiantins ; on y utilisa davantage le terme « génocide » que l’expression « libération des otages » ; la violence n’était jamais loin, jusqu’à l’agression de deux étudiants portant le drapeau israélien ; le rectorat mit fin aux accords de recherche avec les universités israéliennes et les professeurs se mirent au diapason : pour soutenir « la cause », certains ont déclaré vouloir faire la « grève de la surveillance » lors des examens (« étudiants, trichez, c’est pour la bonne cause ! »).
La lutte des races supplante la lutte des classes
Il n’est dès lors pas étonnant de constater que l’islamo-gauchisme se transforme toujours plus clairement en gaucho-islamisme ; autrement dit, la lutte des classes passe au second rang, derrière l’affirmation religieuse. Bruxelles avait été la pionnière en faisant élire, il y a quinze ans, la première femme voilée dans un Parlement en Europe : Mahinur Özdemir, représentante du Centre démocrate humaniste (aujourd’hui Les Engagé-e-s) et présentée alors comme parangon de la diversité heureuse, a depuis été écartée de la vie politique en raison de son abnégation à refuser de reconnaître le génocide arménien et a rejoint le gouvernement… turc de Recep Tayyip Erdogan. À la même époque, les Loups gris turcs faisaient déjà de l’entrisme sur les listes, et certains députés militaient pour la libération d’Oussama Attar qui deviendrait plus tard le cerveau des attentats de Paris.
Entretemps, de nouvelles figures, toujours plus nombreuses, ont émergé. C’est le cas notamment de Ridouane Chahid, bourgmestre (= maire) socialiste d’Evere, une des dix-neuf communes bruxelloises, à la Tabaâ tamponnée sur le front (marque indiquant une grande assiduité religieuse), qui a fait hisser un drapeau palestinien au fronton de sa maison communale. Mais on n’est plus à cela près : l’ancienne co-présidente d’Ecolo fut maintenue en place après avoir relayé sur ses réseaux sociaux une comptine appelant à « tuer les fils de Sion » ; elle ne fut poussée que récemment vers la sortie en raison des… mauvais résultats de sa formation politique (dus entre autres à un wokisme délirant et une politique de mobilité désastreuse).
Les autres élus ne semblent pas s’en alarmer outre mesure et se complaisent dans le rôle d’idiots utiles. Ainsi en est-il, par exemple, de l’écologiste Alain Maron : dans une interview surréaliste, celui qui était encore ministre a déclaré, sans nuance, que l’ « islam est pour l’égalité hommes-femmes et le droit à l’avortement ». Et que dire de Défi, parti ouvertement laïc qui, pour rester dans le précédent gouvernement, ferma les yeux sur une affaire de port du hijab dans une société publique ? Tout ce petit monde tente aujourd’hui de former un gouvernement régional bruxellois : face au blocage, il se murmure que les socialistes flamands pourraient vouloir y intégrer la formation de Fouad Ahidar. Ce dernier sait que le temps, à court et à long terme, joue en sa faveur. Dans tous les cas, il a déjà annoncé vouloir présenter des listes aux élections communales qui se tiendront en octobre. Il reste à voir si celles-ci connaîtront la voie de l’éphémère parti Islam qui avait eu pour vocation d’instaurer la charia en Belgique ou celle de leurs homologues qui, au Royaume-Uni commencent à faire de l’ombre aux travaillistes. Quoi qu’il en advienne, les partis « du système » commenceront peut-être alors à se mordre les doigts d’avoir longtemps joué une carte communautaire qui commence à leur échapper.
Elections présidentielles américaines. Personne ne pensait que la convention démocrate de Chicago qui a vu Kamala Harris officiellement investie candidate du parti à la présidentielle de novembre se déroulerait aussi bien. Une vraie « parenthèse enchantée » ! Récit et réflexions.
L’image d’unité joyeuse et déterminée, la chorégraphie réglée au cordeau avec le public qui agite la bonne banderole et l’orateur la bonne intonation au bon moment. Le changement de «pitch» de la voix, la plaisanterie apparemment spontanée, l’évocation d’un passé forcément émouvant, le rappel de la grandeur des Etats Unis et c’est le tonnerre d’applaudissements au moment prévu.
Place aux professionnels
Il y avait bien sûr sur la scène de grands professionnels de la communication tels les époux Obama ou Clinton, Oprah Winfrey ou Alesandria Ocasio-Cortez (AOC) mais les «spin doctors» du spectacle politique américain sont remarquables et de nouveaux venus dans ce showbiz particulier ont appris les codes avec dextérité. Rien d’ennuyeux dans le discours de Tim Walz, le candidat à la vice-présidence, ce gouverneur du Minnesota qui ne nous dit rien de son travail de gouverneur, mais qui est parfait comme représentant de l’Amérique rurale, comme professeur d’école, comme soldat dans la Garde Nationale et encore plus comme coach sportif, cochant ainsi toutes les cases du bon sens, de la solidarité et du goût de l’effort.
Quant à Douglas Emhoff, il a été parfait dans la tâche qui lui était assignée de présenter de son épouse Kamala Harris l’image la plus chaleureuse possible. Ce n’est pas en France que le conjoint d’une femme politique aurait détaillé à son auditoire la « blind date » qui lui a permis de faire la conquête de sa future épouse. Maniant l’autodérision (« ma mère est la seule personne au monde qui pense que c’est Kamala qui a eu de la chance de m’avoir pour époux ») et assumant joyeusement sa position subordonnée, il a probablement beaucoup fait pour gagner le vote féminin. Nul doute que tel était l’objectif de son discours.
Il y avait dans ces quatre journées de Convention Démocrate à Chicago une impression d’alignement des planètes qui fait penser aux Jeux Olympiques de Paris. Qui aurait imaginé que cela se déroulerait aussi bien ? Mais une fois les Jeux finis, la France reste embourbée dans le marécage post-électoral de notre microcosme. Le Parti Démocrate, lui, semble sortir des oubliettes et les conséquences pour le monde peuvent être majeures.
Il y a cinq semaines, Joe Biden annonçait sa décision de ne pas se représenter à l’élection présidentielle américaine à la surprise générale. Il était alors largement donné perdant face à un Donald Trump qui, une semaine avant cette décision, avait échappé à un attentat de façon que beaucoup de ses partisans étaient disposés à considérer comme miraculeuse et qui, trois jours avant, avait été triomphalement désigné comme candidat républicain.
Biden a exprimé son soutien à la candidature de sa vice-présidente, mais cela apparaissait comme un soutien par défaut: aucun candidat démocrate ne s’était présenté contre le président en exercice et il était politiquement suicidaire d’écarter la candidature de la vice-présidente, une femme originaire de la diversité. Cependant, le travail spécifique qui lui avait été assigné par Biden, réduire l’afflux vers les Etats-Unis d’immigrants illégaux en provenance de l’Amérique centrale, avait largement été considéré comme un échec et n’avait pas généré non plus beaucoup de sympathie chez ses interlocuteurs d’Amérique latine. Quant au reste, la part de Kamala Harris dans les choix de la présidence Biden semble minime, en dehors du hasard qui a fait que son vote au Sénat, qu’elle présidait statutairement, avait été décisif pour le passage de plusieurs lois importantes dans une assemblée précisément divisée en deux.
Le terme de «administration Biden Harris », largement utilisé par les orateurs lors de la convention démocrate parait donc quelque peu exagéré…..
Les classes moyennes et les libertés choyées
Joe Biden, comme tous les orateurs de la convention, s’est félicité du bilan économique de sa présidence, auquel ont contribué des investissements massifs réalisés par l’Etat, une hérésie évidemment pour les libertariens tels Robert Kennedy Jr, qui en difficulté financière après une candidature personnelle absurde, vient de se rallier logiquement à Trump (lire à ce sujet l’analyse signée Pierre Clairé sur notre site NDLR). Mais les faits sont là, le chômage est résorbé, l’inflation sous contrôle et la production augmente. Sur le plan économique, les Etats-Unis ne sont pas en déclin et le terme de grande présidence, que beaucoup ont prononcé, n’était peut-être pas seulement une flatterie accordée au président sortant.
Les orateurs, s’ils ont peu parlé d’économie, ont beaucoup honoré la classe moyenne, qui serait mise en danger par le programme républicain de soutien aux « gros »: big Pharma, big Oil, big Tech… sous le mantra de la liberté d’entreprendre.
C’est là le noyau des oppositions entre démocrates et républicains, et les préoccupations de l’électorat démocrate relèvent aussi des « libertés » : liberté de se soigner, d’habiter sous un toit, de ne pas être victime d’une fusillade, de manger à sa faim, d’éduquer ses enfants, de choisir ses amours et sa vie reproductive et de ne pas être discriminé par son origine.
La convention a été un immense succès pour le parti démocrate, donné perdant à la suite des moments confusionnels de Joe Biden dans son débat avec Donald Trump. Il parvient à rallier sans fausse note tous les élus et tous les partisans autour d’une candidate jusque-là considérée comme une vice présidente plutôt falote, et qui réapparait soudain comme une femme forte (« tough ») devant laquelle Poutine et les autres n’auront qu’à bien se tenir. Et Biden, qui a pourtant de quoi être amer, met lui-même les rieurs de son côté en constatant qu’il avait commencé sa carrière politique en étant un « trop » jeune sénateur (29 ans) et qu’il l’achèvera en étant un « trop » vieux président. Et du coup, Trump perd son meilleur ennemi…
Au cours de la convention, les allusions à la politique étrangère n’étaient pas fréquentes: Chine, Russie (hormis le dictateur Poutine), Iran, Europe, islamisme ou Otan étaient absentes si ce n’est, à petite dose, chez Joe Biden et Kamala Harris. Il y eut néanmoins deux exceptions.
La première, omniprésente, était la référence patriotique. Dans ce parti démocrate dont on pensait qu’il était grignoté par le wokisme, la déconstruction des grands discours et la repentance tous azimuts, la fierté de vivre dans un pays « particulier », le « plus grand pays du monde », était constamment rappelée et passionnément applaudie. Il ne s’agissait pas, bien entendu, de l’Amérique du Mayflower ou des Wasp, mais de ce peuple bigarré, dont Kamala Harris, de père jamaïquin et de mère indienne, mariée à un Juif de Brooklyn, est particulièrement représentative.
La seconde, c’est Gaza. Peu d’orateurs ont cité Israël, beaucoup ont parlé de Gaza et pratiquement dans les mêmes termes, de Joe Biden à Bernie Sanders : à savoir, il faut libérer les otages et parvenir à un cessez le feu. Les plus optimistes – ou les plus ignorants – ont prétendu que la paix s’ensuivrait, et après des paroles aussi profondes, le tonnerre d’applaudissements était garanti.
Pour la plupart des orateurs, c’est sous son aspect humanitaire (otages et victimes civiles) que la situation au Moyen Orient a été évoquée et non pas sous son aspect politique, avec le combat existentiel d’Israël, la menace iranienne et le danger islamiste. Cette présentation permettait un consensus en neutralisant les oppositions. Elle correspond de plus à ces « bons » sentiments populaires optimistes, confortables et naïfs : si nous voulons vraiment la paix, les « autres » finiront par la vouloir également… Comme si l’histoire du XXe siècle n’avait rien appris…
Pour qui voteront les amis d’Israël ?
Beaucoup d’amis d’Israël vont, pour leur vote, mettre dans la balance ce qu’ils croiront être l’orientation du candidat ou de la candidate vis-à-vis de ce pays. Trump a dit qu’un Juif qui voterait démocrate devrait se faire examiner le cerveau, ce à quoi certains ont répondu que c’était au Juif qui voterait pour Trump de faire cet examen. Je reprendrai ce débat psychiatrique lié à Trump, passionnant et accablant, une autre fois, mais la convention de Chicago donne l’occasion de réfléchir sur le positionnement actuel du parti démocrate
Une première constatation: Joe Biden est un véritable ami d’Israël. On sait que ses relations avec Benjamin Netanyahu, qu’il connait depuis 40 ans, ne sont pas toujours au beau fixe. C’est une litote, et les exemples ne manquent d’ailleurs pas d’Israéliens auxquels on pourrait appliquer la même remarque dans leurs relations avec leur Premier Ministre. La stratégie militaire israélienne a pu être impactée par les réticences américaines. Il n’en reste pas moins que les Etats-Unis ont fourni à Israël une aide en matière d’armement, un déploiement préventif de forces, un soutien diplomatique et une coordination sécuritaire exceptionnelle.
Un tel soutien a provoqué des réactions hostiles chez certains électeurs démocrates dits progressistes, certains universitaires, beaucoup d’étudiants, ainsi que dans la communauté arabo-musulmane et plus généralement chez ceux qui font des Palestiniens le parangon des opprimés de ce monde. Cette hostilité a conduit à l’intérieur du parti démocrate à un mouvement de désapprobation de Joe Biden, avec une nouvelle catégorie d’électeurs envoyés à la Convention, les non-engagés (« non-committed »), venus sans mandat de vote pour Joe Biden. Il s’agit d’environ 700 électeurs sur 15 000, donc moins de 5%.
La « Squad » est un petit groupe très médiatisé de représentants élus (et surtout de représentantes) démocrates progressistes et propalestiniens : OAC est la plus célèbre mais elle n’est pas la plus agressive envers Israël (elle est même critiquée pour cela), bien qu’elle utilise sans honte et en toute ignorance le terme de « génocide ». Deux des membres les plus connus de la Squad viennent de perdre leur campagne pour la nomination du parti aux prochaines élections législatives. Le groupe n’est pas en croissance.
La palme de la haine anti-israélienne va à deux députées de la Squad bien installées dans leur circonscription. Ilhan Omar, née réfugiée somalienne est élue à Saint Paul (Minnesota) où s’est installée une importante communauté somalienne. Rashida Tlaib, fille de réfugiés palestiniens est l’élue de Daerborn Michigan. Daerborn, dans la banlieue de Detroit, est la ville de Henry Ford dont le Daerborn Independant avait été entre 1919 et 1927 le pire brûlot antisémite de l’histoire américaine. Aujourd’hui, c’est la capitale de l’islam américain. Rashida Tlaib a été une des organisatrices de la grande marche pour la Palestine où 2000 manifestants sur les 30 000 espérés ont défilé à Chicago au début de la Convention. Bien que Joe Biden ait dit que les manifestants avaient eux aussi des arguments à faire valoir (le nombre de victimes gazaouies), cette manifestation fut un échec et n’a pas influencé le déroulement de la Convention.
Au cours de cette Convention, les parents d’un otage isralo-américain, Hersh Goldberg Polin, ont prononcé un discours qui a amené les larmes aux yeux de nombreux délégués. Il ne faut pas se tromper: l’assistance aurait pleuré de la même façon en écoutant les plaintes d’un gazaoui, lequel aurait certainement omis de signaler la responsabilité du Hamas dans le calvaire de la population. Mais il faut constater que les organisateurs de la Convention démocrate ont refusé de faire venir des Palestiniens au micro. Les cadres démocrates restent dans leur très grande majorité des soutiens d’Israël, comme le confirment les votes bipartisans au Congrès et les sondages dans la population, contrairement à ce que pourraient faire penser des medias américains le plus souvent critiques d’Israël. Cet air nous est connu…
Qu’en est-il, enfin et surtout, de la candidate démocrate et de son colistier? Tim Walz, gouverneur d’un Etat dont la capitale a une forte présence musulmane, a tissé des liens avec des responsables musulmans locaux. Il a pris la parole lors de manifestations contre l’islamophobie. Mais il entretient également des liens étroits avec les représentants locaux de la communauté juive. De 2007 à 2019, alors qu’il était membre du Congrès américain, il a constamment voté en faveur d’Israël.
Quant à Kamala Harris, elle a déclaré lors de son discours d’acceptation à Chicago: « Je défendrai toujours le droit d’Israël à se défendre, car le peuple d’Israël ne doit jamais plus faire face à l’horreur qu’une organisation terroriste appelée Hamas a causée le 7 octobre ». Ces paroles sont en phase avec toutes ses déclarations antérieures, notamment son discours de 2017 à l’AIPAC où elle affirmait qu’en aucun cas Israël ne devait être une question partisane et qu’il avait le droit à l’autodéfense. Elle s’était opposée au BDS ainsi qu’à la résolution du Conseil de Sécurité de l’ONU de 2016 qui condamnait la construction de colonies israéliennes en Cisjordanie (résolution qui avait été votée par le Conseil, car sous la présidence de Obama, la délégation américaine s’était simplement abstenue, sans mettre de veto). On peut bien entendu ajouter à cela l’ambiance familiale avec un mari dont tout indique que non seulement il est actif en matière de lutte contre l’antisémitisme, mais qu’il exprime envers Israël les sentiments positifs qui sont ceux de la grande majorité des Juifs de ce monde.
Tout cela ne préjuge pas de l’avenir. Les complexités géopolitiques, les modes intellectuelles, et surtout les réactions émotionnelles sont utilisées aujourd’hui avec habileté par les ennemis d’Israël et même un chef d’Etat surinformé peut y être sensible. Par ailleurs, la conception de l’avenir, des compromis à effectuer et des risques à prendre pour avancer vers une coexistence pacifique n’a jamais fait consensus en Israël même. On peut parier que Ben Gvir ne serait pas l’interlocuteur rêvé de Kamala Harris…
Enfin, la menace iranienne existentielle pour Israël est plus lointaine pour Washington et il n’y manque pas de diplomates qui n’attendent qu’un signal pour reprendre du service et chercher à apaiser les mollahs. Il n’en reste pas moins que dans son discours de Chicago, Kamala Harris a dit que pour défendre les intérêts des USA, elle n’hésiterait pas à décider de toute action nécessaire, quelle qu’elle soit, contre l’Iran et les terroristes soutenus par l’Iran.
Certains présentent de façon très sombre les conséquences d’une présidence de Kamala Harris en ce qui concerne l’avenir d’Israël et considèrent que ceux qui la soutiennent sont des naïfs inguérissables. Pour ceux qui pensent que les relations entre Israël et les Etats-Unis sont trop importantes pour dépendre des foucades d’un président narcissique et lunatique, sa candidature donne tout de même aujourd’hui matière à soulagement.
Celle qui est passée de la musique pop au « prog rock », et ensuite à la chanson engagée, est partie le 23 août. L’anarchiste de gauche qui, après un période yéyé et après avoir voulu « détruire complètement la chanson classique, avec refrain et couplets réguliers » en chantant avec des cris et des onomatopées, restera aussi dans les mémoires comme une des grandes interprètes du répertoire français. L’hommage de Patrick Eudeline.
Les Carabiniers ? Qui se souvient de ce Godard somme toute mineur ? 1964. Notre homme tourne. Beaucoup, peut-être trop. Entre indispensable et anecdotique. Les Carabiniers vaut pour son « engagement », son air du temps. C’est le premier film ouvertement politique du Jean-Luc. Et pour le visage de Catherine Ribeiro. Comme Chantal Goya, comme Anna Karina, on la remarque. Godard a le chic pour les actrices brunes, pour les dénicher de nulle part.
Patrice Moullet (sous pseudo) joue aussi dans le film : il est un des deux héros. Il a cinq ans de moins que la dame ; elle est Portugaise, née à Lyon en 1941 dans un milieu ouvrier. Lui est un Parisien, presque un branché du Drugstore. Avec Catherine, c’est le début d’une histoire qui durera quinze ans. Il sera le partenaire absolu, l’unique. Lui et Jean Van Parys la poussent à chanter. C’est l’évidence. Beauté du Diable, voix différente et indiscutable, héritée d’une mère qui aimait le fado… Comme Marie Laforêt ou Valérie Lagrange, comme Zouzou, elle sera chanteuse/actrice.
Elle signe chez Barclay. Une flopée de singles suit. Succès d’estime, comme on dit pudiquement, mais pas de hits. Les compositions originales (« Dieu me pardonne », « Rien n’y fait, rien n’y fera ») voisinent les reprises de classiques folk ou de Dylan en version française. C’est charmant, pop, éphémère et éternel. Elle pose pour Jean-Marie Périer… C’est la fameuse photo Salut les Copains. 1966. Un aréopage, un Olympe yéyé en centerfold. De Monty à Gainsbourg, de Johnny à Ronnie.
Mais les beatniks sont là, comme les premiers Maos. Tout va très vite, gronde et rue dans les brancards. Catherine fréquente la scène d’avant-garde. Kalfon, Clementi et les autres. Elle se rebelle. Pouvait-il en être autrement ? Non, elle ne sera pas une cover-girl, une autre poupée de cire et de son. Elle ne fera pas « le jeu du showbiz ».
Avec Moullet, elle fonde Alpes, un groupe de « rock progressif »… Un album suit, chez Festival. Comme Magma, le Manset de « La mort d’Orion » ou même le Vangelis de « 666 » – tous sortis la même année, 1970 – Catherine refuse le verbe et les mots, le sens. Elle rêve d’onomatopées, d’expression libre, d’indicible, d’un art free et abstrait. Et c’est ce qu’elle nous donne. Elle hurle, murmure ou susurre comme, justement, Irene Papas avec Vangelis.
Derrière elle, ou plutôt à ses côtés, Patrice Moullet s’illustre sur des instruments de l’espace qu’il fabrique lui-même. Des gaffophones ! Des percuphones ! Des cosmophones !
Mais tel qu’il est, à côté des suscités, ou des oubliés Catharsis ou Moving Gélatine Plates, l’album devient un des incontournables de l’époque. Et Alpes emmène son « prog rock » dans tous les festivals.
Bientôt, les seventies chassent ce clou. Gauchisme comme hippies ou « pop music » laissent place au rock décadent, aux seventies, au rétro. Nous sommes en 73. On en revient aux chansons, à l’attitude, on en revient au rock and roll. À tout ce que Alpes n’est pas.
Le groupe stagne. Catherine, alors, poussée par sa maison de disques, enregistre un album de reprises de Piaf. Une réussite artistique et critique, mais un échec commercial. « Le blues de Piaf »… Oh le beau concept, la belle évidence ! Quelques années plus tard, l’Américain Willie de Ville allait le clamer haut et fort. Piaf ! C’est le blues…. Le blues de Paris.
Peu après, elle tourne dans Né de Jacques Richard, avec Lonsdale et Luchini.
Comme d’autres – tant -, elle sera de gauche. Férocement. Du gauchisme swag en pull shetland façon La Chinoise, elle passera au communisme le plus austère, le plus… renfrogné ? Elle est très tôt engagée avec l’Organisation communiste internationaliste (OCI). La petite fille des sixties devient une passionaria rouge. Palestine, usines en lutte, Vietnam, Pinochet, elle est de toutes les causes. Sa beauté, cette voix, énorme, lyrique et immense : elle avait tout. Elle refuse le star système, la moindre compromission. Énervée, même, quand Mitterrand vient la voir en concert.
Sa discographie, néanmoins, est riche et elle aura parcouru toutes les scènes françaises, inlassablement. Bobino, Francofolies, Printemps de Bourges. Elle devient une des plus grandes interprètes du répertoire, de Brel à Barbara. Reconnue, bientôt culte.
Sa fin de vie sera difficile, avec une fille tox et nombre de morts autour d’elle.
Elle est partie peu de temps après Delon. Deux France qui s’en vont, que tout, quasi, opposait. Il est permis de pleurer les deux.
Chatherine Ribeiro reprend Ferrat chez Pascal Sevran.
Voyant la disparition d’Alain Delon lui voler la vedette dans les médias, Jean-Luc Mélenchon revient avec un coup diabolique, et prend de court la classe politique avec l’idée d’un gouvernement de gauche sans ministre issu de la France insoumise…
« La mort a des rigueurs à nulle autre pareilles », écrivait François de Malherbe dans sa Consolation à M. Du Périer pour le décès de sa fille.
Ces jours-ci, le camarade Mélenchon aurait pu reprendre cet amer constat à son compte. Il se voyait en prince des médias, en imperator des plateaux de TV et des studios radio. Il s’imaginait en triomphateur sans égal de la rentrée médiatico-politique avec son coup d’éclat mâtiné coup d’Etat, j’entends par là la sommation adressée au président de la République de bien vouloir déguerpir de là où il trône. Le camarade s’était en effet préparé – nous rapportent des personnes très au fait de ces choses – à devoir courir les rédactions les plus diverses pour un marathon en solitaire d’au moins quarante-huit heures, donnant ainsi le « la » de la reprise et grillant la politesse à ses rivaux dans la piaffante corporation des bateleurs d’estrade. Tout était calé, policé, huilé, orchestré.
Las, badaboum ! Voilà bien que la camarde vient s’en mêler. Elle frappe. Et elle frappe haut, très haut. Elle emporte le Samouraï, le jeune frère Rocco, M. Klein, l’icône Alain Delon. Tout le bel agencement mélenchonien réduit à rien à l’instant même, laminé par la force dramatique, dramaturgique, de l’événement, écrasé sous la déferlante médiatique qu’il génère. Le défunt célébrissime – plus grand encore mort que vivant tel un certain Guise de notre histoire – occupe l’intégralité de l’espace journalistique disponible. Les critiques se font thuriféraires, qui trempent leur plume dans ce qui, en la circonstance, tient autant de l’encensoir que de l’encrier. Mais au fond, ce n’est que justice quand l’émoi populaire atteint un tel degré.
Il faut savoir choisir sa mort, disait, espiègle, Jean d’Ormesson chez Thierry Ardisson. Et de citer celle de Jean Cocteau que le trépas d’Édith Piaf avait passablement occultée. Ironie du destin. Autre illustration de la Faucheuse et de ses rigueurs à nulle autres pareilles, ce même Jean d’Ormesson devait quitter ce monde dans le moment où Johnny – le Taulier – sortait de scène. Pas de chance. Tout pour Johnny, la pleine lumière post-mortem. De pâles éclats pour le malchanceux du trépas qui, en son for intérieur, devait espérer beaucoup mieux pour la fin de l’immortel qu’il était.
Choisir sa mort, conseillait-il. Le camarade Mélenchon devrait y penser. Rien ne presse, naturellement. Et puis, pour tout dire, on ne voit plus très bien quels grands, très grands, pourraient à présent, dans ce domaine si particulier de la gloire posthume, rivaliser avec les Piaf, les Delon, les Belmondo, les Johnny ? Mais si, il en reste un ! Un de ces spécimens hors norme, un de ces monstres sacrés aimés des gens. B.B. Brigitte Bardot. Personnellement, je la crois pour de bon immortelle, alors ce qui est évoqué ici ne saurait la concerner : elle ne mourra jamais. Jamais.
Le président Macron termine ses consultations en recevant ce lundi Marine Le Pen, Jordan Bardella et Éric Ciotti, ainsi que les présidents des deux chambres, Yaël Braun-Pivet et Gérard Larcher. Mais, il ne semble toujours pas avoir identifié un Premier ministre pour gouverner.
Ubu roi loge à l’Élysée. Emmanuel Macron y a arrêté les horloges, croyant ainsi figer le temps. Esseulé en son palais, il vomit les esprits tristes qui ne se contentent pas de ses JO réussis. L’adversité le pousse à l’immobilité : il s’est juré de tenir encore trois ans, terme de son mandat. Quitte à tordre la démocratie et à ignorer les grondements du peuple.
Ce lundi matin, Macron sait-il quel Premier ministre il va désigner ? Le château a fait savoir, selon Libération, que le vote des Français ne l’engageait pas. Depuis vendredi, il a reçu tour à tour les formations parlementaires, pour clore aujourd’hui ses consultations avec Marine Le Pen et Éric Ciotti. Cela fait plus de 40 jours – un record jadis détenu par la IVe République (38 jours) – que la France n’a plus de gouvernement et que le chef de l’État n’a toujours pas pris la mesure de son propre rejet par des législatives qu’il croyait gagnables. Personne ne se précipite pour camper si précairement à Matignon, hormis Xavier Bertrand pour la droite, Lucie Castets pour la gauche et quelques intermittents prêts à se dévouer. Pourquoi pas François Baroin, devenu banquier plan-plan ?
En attendant, chacun se ment à lui-même en s’attribuant l’échec du RN comme un trophée. Relatant l’entrevue avec le NFP, Le Monde de samedi raconte : « Devant ses hôtes, Emmanuel Macron a reconnu la victoire du Nouveau Front populaire dans les urnes et il a admis que, avec ce vote, les Français avaient exprimé la volonté d’un changement d’orientation politique ». Or, si le NFP a décroché une majorité de députés (193), il n’a totalisé que 7 millions de voix, contre près de 11 millions pour le RN allié à Ciotti (126 députés). Ce ne sont pas les urnes qui lui ont donné la victoire, mais une logique de répartition des sièges dont a pâti le RN. Macron a banalisé l’absurde. La démocratie est une farce.
Sous le règne d’Ubu, tout est ubuesque. À commencer par les agitations loufoques de Jean-Luc Mélenchon et de ses apôtres. Ils ont réussi à faire croire aux médias envoutés que LFI était le gagnant des législatives avec…73 sièges ! Mais désormais, malgré sa participation active au front républicain contre le RN, La France Insoumise se retrouve à son tour, ces jours-ci, rejetée par ses alliés macronistes d’hier : ils feignent de découvrir son jeu incendiaire, dont les juifs deviennent la cible.
Dans la confusion intellectuelle illustrée par le chef de l’État, de prétendus démocrates inclusifs, récusés par les électeurs, en viennent à soutenir que le pays devrait être gouverné en excluant LFI et le RN, soit une bonne partie des citoyens en colère.
C’est cette position anti-démocratique qu’a tranquillement défendue Gabriel Attal le 13 août en appelant à un « pacte d’action » écartant ces deux formations. Le 18 juillet, le même Premier ministre démissionnaire et 16 autres membres du gouvernement avaient fait réélire Yaël Braun-Pivet à la présidence de l’Assemblée en violation de la séparation des pouvoirs qui aurait dû interdire aux ministres-députés de participer aux votes. Mais que vaut la démocratie pour ces « élites » accrochées à leurs rentes ? Samedi, les obsèques d’Alain Delon ont respecté son choix de ne pas recevoir d’hommage national au profit d’une cérémonie intimiste. Cette défiance vis-à-vis de la classe politique est largement partagée. La France pleure Delon, symbole d’une virilité devenue suspecte. Elle ne versera pas une larme pour ce vieux monde agonisant, conduit par un monarque capricieux qui s’amuse à dégoupiller des grenades pour voir l’effet produit.
L’attentat de samedi à la Grande-Motte, dont le caractère islamiste et antisémite ne fait pas de doute, n’a heureusement pas fait de victime. Certains éditorialistes comme Laurent Joffrin ou Yves Thréard, et certains politiques comme le ministre de l’Intérieur, se risquent aujourd’hui à faire un lien entre l’islamo-gauchisme prêté à l’extrême gauche et les passages à l’acte antisémites.
Devant la gravité des évènements, le ministre de l’Intérieur a ressorti la cravate ! Finies les galéjades un peu démagogiques sur le mode « je ne mets plus de cravate, le petit peuple n’aime pas cette distance entre les élites et lui ». L’heure est grave : le terrorisme islamiste frappe de nouveau en France, et il ne faudrait pas faire une faute de goût.
Grande peur à la Grande-Motte
Samedi 24 août, un homme de nationalité algérienne âgé de 33 ans, en situation régulière sur le territoire national, a incendié deux véhicules dans l’enceinte de la synagogue Beth-Yaacov, à La Grande-Motte (34). Il a également provoqué l’explosion d’une bouteille de gaz, et blessé un policier municipal. L’enquête commence. Des images de vidéosurveillance le montrent quittant les lieux de l’incident, keffieh sur la tête et drapeau palestinien autour de la taille, portant ce qui semble être des bouteilles d’eau minérale dans les mains. Le soir, le suspect a été arrêté à Nîmes (30) dans la cité de Pissevin, gangrénée par le trafic de drogue, après un échange de tirs avec la police. Lors de cette confrontation, il a été blessé au visage et est depuis hospitalisé, mais ses jours ne sont pas en danger.
La police n’a pas pu encore l’interroger, mais deux autres personnes de son entourage ont été placées en garde à vue après son interpellation. Alors que la cité balnéaire de l’Hérault est stupéfaite et inquiète, et que la communauté juive nationale est saisie d’effroi, le Parquet national antiterroriste a ouvert une enquête pour tentative d’assassinats en relation avec une entreprise terroriste, destructions par moyen dangereux en relation avec une entreprise terroriste et association de malfaiteurs terroriste en vue de préparer des crimes d’atteintes aux personnes.
Mais, ailleurs en France, il faut bien reconnaitre que ce n’est pas franchement l’effroi. Heureusement, il n’y a pas eu de morts, observe-t-on. Ouf ! il n’était pas fiché S et même pas clandestin, se rassure-t-on. Les Français auront-ils à regretter demain de ne pas d’avantage s’émouvoir des périls qui menacent en permanence leurs concitoyens de confession juive et poussent même certains à l’émigration ? On peut le craindre.
Une montée inquiétante de l’antisémitisme
Depuis les tueries de Mohammed Merah, et singulièrement depuis les attaques terroristes du Hamas en Israël le 7 octobre, nos compatriotes juifs voient les violences qui s’abattent sur eux augmenter. L’attentat de samedi intervient dans un contexte de tension extrême au Proche-Orient, laquelle a pour conséquence de les voir pris pour cibles par beaucoup d’adversaires d’Israël. Quant à l’extrême gauche, elle met sans arrêt de l’huile sur le feu. Pourtant, nos compatriotes juifs ne sont en rien comptables de la politique du gouvernement israélien – faut-il encore le rappeler ?
Le ministère de l’Intérieur recense déjà 1114 faits antisémites en 2024. 42% concernent des atteintes aux biens, et 58% des attaques aux personnes. Sur les six premiers mois de l’année, les actes antisémites sont en hausse de 73% par rapport à l’année dernière dans l’hexagone. L’année 2023 comptabilisait un total de 1676 actes antisémites commis ; le double par rapport à il y a dix ans.
L’historique des attaques antisémites depuis le 7 octobre est éloquent : le 1er mars, à Paris, Marco, un sexagénaire, a été roué de coups par un Guadeloupéen de 31 ans dans le 20e arrondissement. Il sortait d’une synagogue et portait une kippa. Le 17 mai, un individu armé d’un couteau et d’une barre de fer incendie la synagogue de Rouen (76) avant de s’en prendre aux policiers. Le 15 juin, à Courbevoie (92), une collégienne juive de 12 ans a été injuriée, menacée de mort puis violée par trois autres mineurs. Non loin de là, le 22 juin, six jeunes juifs ont été pris à partie, battus et injuriés dans le centre commercial So Ouest de Levallois-Perret (92). Le 1er juillet, des écoliers étaient à leur tour injuriés et menacés à proximité de leur école élémentaire à Nice (06). Le surveillant qui les accompagnait recevait des coups au visage. Le 6 août, à Montpellier (34), un passager était violemment agressé dans le tramway. Le 14 août, dans le métro parisien, un homme crachait sur une jeune fille et traitait sa famille de « bâtards, salauds » et de « youpins »…
Recherche de coupables
« Nous avons échappé à un drame absolu » a déclaré, samedi, le Premier ministre Gabriel Attal, dépêché dans l’Hérault. L’assaillant de la Grande Motte avait semble-t-il une hache, et il se pourrait que le sinistre individu ait en fait raté son action, laquelle semble ne pas du tout relever du coup de folie et avoir été bien préméditée. Le terroriste pourrait s’être trompé sur les horaires de l’office, et avoir prévu de s’en prendre physiquement aux personnes présentes… On aurait ainsi échappé à une véritable hécatombe, selon le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, qui a expliqué à la télévision dimanche soir que le suspect attendait la sortie des personnes présentes dans l’édifice religieux avec sa hache, mais que l’intervention rapide des gendarmes l’avait heureusement fait fuir.
Si la classe politique a heureusement unanimement condamné les faits, le débat s’est rapidement porté sur ce contexte particulier de montée de l’antisémitisme dans lequel est survenue l’attaque.
« Ce qui s’est passé ici choque et scandalise tous les républicains de notre pays. Une fois encore, des Français juifs ont été attaqués en raison de leur croyance et cela nous révolte et nous indigne. Tous ensemble, par-delà les clivages politiques, nous devons nous mobiliser et nous dresser contre ces actes, être intraitables » a martelé le Premier ministre démissionnaire. « S’en prendre à un Français juif, c’est s’en prendre à tous les Français » a-t-il ajouté. « Pensées pour les fidèles de la synagogue de La Grande-Motte et tous les juifs de notre pays. (…) La lutte contre l’antisémitisme est un combat de chaque instant, celui de la nation unie », a écrit Emmanuel Macron sur Twitter. Il est notable de constater que dans ses premières réactions, l’exécutif n’évoque pas l’islamisme, alors que le suspect portait pourtant keffieh et drapeau palestinien lorsqu’il a commis ses méfaits… Marine Le Pen a de son côté déclaré que « tout doit être fait pour protéger nos compatriotes de confession juive, pris pour cible tous les jours en France. Je leur adresse tout mon soutien et ma solidarité. » Jean-Luc Mélenchon, lui, a dénoncé un « incendie criminel contre la synagogue de La Grande-Motte », un « intolérable crime », avant d’adresser ses « pensées pour les fidèles et les croyants ainsi agressés ». Semblant ménager la partie antisémite de son électorat, il n’évoque évidemment ni l’islamisme ni l’antisémitisme de l’attaque, qui semblent pourtant immédiatement évidents pour tout le monde. Et en parlant de « fidèles », l’extrême gauche semble avoir pour objectif de tracer un signe égal entre antisémitisme et « islamophobie », et évidemment de nier la dimension raciste contenue dans la haine antijuive des terroristes pro-palestiniens. Interrogée hier sur RTL, son alliée dans le Nouveau Front populaire, Marine Tondelier, a reproché l’ambiguïté du vieux chef de l’extrême gauche. « C’est plus clair quand on le fait (de qualifier l’acte d’antisémite) et sûrement faut-il toujours le faire pour qu’il n’y ait plus aucune ambiguïté. Il y a eu beaucoup d’actes antisémites ces derniers mois et sur certains, le mot “antisémitisme” est à poser très clairement. Quand quelqu’un pose une bombe dans une synagogue, il n’y a aucun débat à avoir sur le caractère antisémite », a sermonné la chef des écolos. On apprécie ce pas de côté, mais au bout d’un moment, championne, il serait peut-être plus clair de couper les ponts avec un tel allié dont l’islamo-gauchisme des troupes est désormais tellement documenté !
« Il y a des discours politiques haineux envers les juifs de France et il faut le dénoncer. On voit bien qu’une partie de la gauche, malheureusement, tient ce discours d’encouragement de haine envers nos compatriotes juifs », a estimé le ministre de l’Intérieur lors de son intervention télévisée hier soir. Dans la presse non plus, certains ne s’embarrassent plus à prendre de gants, et chargent l’extrême gauche. L’éditorialiste Laurent Joffrin a ainsi dénoncé ce week-end un « air du temps antisémite », et estimé que l’extrême-gauche portait sa part de responsabilité1. « En adhérant sans ambages aux thèses décoloniales, en passant des alliances tactiques avec tel ou tel groupe proche des islamistes, elle a rangé les Juifs dans la catégorie honnie des « dominants » et l’État d’Israël dans celle des nations coloniales » écrit le journaliste. Pourtant, parler d’impérialisme concernant Israël, quand on voit la taille du tout petit Etat hébreu, isolé, et entouré par un océan de pays musulmans, de l’Afrique à l’Asie, sur un planisphère, c’est tout de même ironique ! « Certes il s’agit de mots et non d’actes. Mais ces mots fournissent un cadre idéologique à la fois cohérent et pervers à la haine antijuive », estime M. Joffrin. Yves Thréard a estimé de son côté dans Le Figaro, que « sous couvert d’antisionisme, [Jean-Luc Mélenchon] porte une immense responsabilité dans la montée des périls », a observé que le leader des Insoumis était incapable d’employer le mot « juif » pour déplorer l’incendie criminel de La Grande-Motte, a rappelé qu’il avait par le passé qualifié l’antisémitisme en France de « résiduel » et voyait avec sa clique insoumise dans le Hamas un simple mouvement de « résistance »2…
Des questions gênantes
Au-delà de ces polémiques politiciennes autour de l’islamo-gauchisme de la France insoumise, des questions que personne n’ose vraiment poser restent en suspens. Et sauf à apporter la preuve que l’assaillant de la Grande-Motte avait sa carte de militant à LFI, il faudrait peut-être se pencher sur ces dernières, plutôt que d’accuser un peu facilement les complaisances du mouvement de Jean-Luc Mélenchon de tous nos maux.
Si l’individu était inconnu des services de renseignements, il était semble-t-il connu des services de police pour usage de stupéfiants et délits routiers. Pourquoi la France accepte-t-elle toujours ce type d’individus sur son sol ? Le ministre de l’Intérieur a révélé que le suspect prévenu était arrivé en France en 2016, et que grâce à sa nouvelle loi immigration, on aurait pu expulser ce genre de ressortissant étranger s’étant rendu coupable de délits sur notre sol. Pourquoi ne l’a-t-il pas été ?
L’individu incriminé est de nationalité algérienne. Il sera intéressant aussi de voir ce que les autorités françaises disent à l’Algérie, ou ce que nos amis algériens racontent autour de cette affaire. Car au-delà de l’antisémitisme, il s’agit bien là d’un attentat commis par un Algérien sur le sol français, ce qui n’est pas de nature à améliorer les relations diplomatiques déjà mal en point des deux côtés de la mer Méditerranée. L’absence de victimes exonère les chancelleries étrangères d’avoir à formuler des messages de condoléances ou de soutien au peuple français, certes. En France comme à l’étranger, on semble s’habituer à ce que l’islamisme nous frappe ces dernières années… Une terrible habitude, malheureusement.
Le prévenu était sur notre sol malgré des délits, car il aurait eu un enfant en France. Une règle qui devrait de nouveau ulcérer tous ceux qui dénoncent une invasion migratoire du pays en provenance d’Afrique et du Maghreb. Dans l’Hérault, à l’exception de Montpellier et de Lunel, la droite nationale a fait un carton dans toutes les circonscriptions aux dernières législatives. Plus au sud, les grandes villes de Perpignan et de Béziers lui sont acquises. L’islamisation du territoire n’est pas pour rien dans ces résultats électoraux. Et en toute logique, la droite nationale pourrait ne pas tarder à s’emparer de nouveau des sujets sensibles entourant l’immigration maghrébine. L’inactivité (on parle de 40%) ou la proportion dans la délinquance ou dans nos prisons des Algériens ou des citoyens ayant là-bas des origines sont des sujets que la terrible affaire de la Grande-Motte pourrait une nouvelle fois soulever.
Les éditorialistes du Monde ou de France inter auront beau nous reparler de « parenthèse enchantée » cette semaine, reste que les Jeux paralympiques vont s’ouvrir dans un pays où une synagogue a été incendiée. Drôle d’ambiance… En Allemagne, après la terrible attaque terroriste de Solingen (Rhénanie-du-Nord-Westphalie), perpétrée par un Syrien et revendiquée par l’Etat islamique, le gouvernement réfléchit à restreindre le port de couteaux dans l’espace public… En France, alors que l’islamisme d’atmosphère devient étouffant dans de nombreux quartiers, on n’ose jamais vraiment regarder en face l’antisémitisme très répandu dans les pays maghrébins, et sa diffusion dans notre population via l’immigration… Etude après étude, les études de l’IFOP démontrent pourtant que non contents de contester certains fondamentaux républicains, près de la moitié de nos compatriotes musulmans souscrit aux clichés antisémites.
La Convention nationale démocrate à Chicago vient de compléter la transformation de Kamala Harris de Vice-présidente mal connue en candidate sérieuse à la présidence des Etats-Unis. Le Parti démocrate semble avoir le vent en poupe. Reste que Mme Harris a toujours besoin de convaincre une majorité des électeurs qu’elle sera compétente sur les dossiers de l’immigration et de l’économie. Analyse de Gabriel Robin.
Au mois de janvier dernier, désabusée, Nikki Haley déclarait devant ses militants aux primaires républicaines : « Le premier parti à se débarrasser de son candidat gériatrique gagnera ». Les démocrates ont tiré les premiers en poussant Joe Biden à se retirer de la course à sa propre succession. Fragilisé, considéré comme trop âgé, Joseph Robinette Biden Jr a dû se résoudre à abandonner le combat pour la première fois de sa longue et riche vie politique. Et il faut bien admettre que les premiers effets de ce retournement spectaculaire de situation se font déjà sentir. Une vague médiatique semble pousser Kamala Harris depuis lors, ainsi que la convention nationale du Parti démocrate l’a encore montré en cette fin de mois d’août. Pour autant, peut-on dire que l’élection soit déjà jouée et que Donald Trump connaîtra de nouveau le sort de l’élection de 2020 ? Rien n’est encore moins sûr.
Une « Democratic National Convention » réussie mais sans éclat particulier
Les Américains ont, on le sait bien, le sens du spectacle. Organisée au United Center de Chicago, où joue la célèbre équipe de basket des Bulls, la convention nationale du Parti démocrate a réuni tous les ingrédients nécessaires pour une formation politique en ordre de bataille. La ville de Michael Jordan et d’Al Capone, fief historique des époux Obama, est un bastion du parti à l’âne qui a servi d’écrin aux ambitions d’une femme aussi exposée que finalement toujours méconnue. Kamala Harris a beau avoir été pendant quatre ans la vice-présidente des Etats-Unis, elle est restée ce temps-là dans l’ombre de Joe Biden, ne se distinguant guère. Bénéficiant d’un charisme indéniable et de l’aura de son ancienne fonction de procureure générale de Californie de 2011 à 2017, Kamala Harris a tout du personnage dont raffole Hollywood. Métisse d’un père d’origine caribéenne et d’une mère indo-américaine, elle pourrait aussi devenir la première femme à accéder à la fonction suprême.
Elle est désormais soutenue par tout son parti. Peu enchantés à l’idée de la voir entrer à la Maison-Blanche, les Obama se sont pliés à la réalité et sont apparus souriants pour encourager leur candidate. Ils n’étaient d’ailleurs pas les seuls, puisque la plupart des caciques du parti sont montés sur la scène du United Center pour appeler à la mobilisation générale. Bill Clinton a ainsi pu amuser en se moquant de l’âge de Donald Trump… Peu élégant, mais de bonne guerre après ce que Biden a subi en la matière. Depuis un mois, les dons affluent aussi. Pour le seul mois écoulé, les Démocrates ont reçu plus de 100 millions de dollars de contributions, investis majoritairement dans des spots publicitaires épiques et manichéens. Des chiffres supérieurs à ceux de Trump qui donneront le tournis à des esprits français habitués à des campagnes électorales bien moins dispendieuses.
Le discours de clôture de Kamala Harris aura été globalement réussi, mais il ne restera pas dans les annales. À dire vrai, les observateurs auront surtout été surpris par la qualité de celui dont Joe Biden a gratifié l’audience bien plus que par celui de Mme Harris. Sans être empruntée, cette dernière est apparue assez mécanique, sans idées fortes majeures. Obama avait prospéré avec des propositions chocs, comme l’Obamacare, et sur le slogan « Yes we can », qui ne l’était pas moins. On se souvient tous aussi de la force de Donald Trump en 2016 qui multipliait les saillies et cris de ralliement, tels que « Build the wall » qui est resté dans les mémoires. Le sujet de l’immigration clandestine sera, notons-le, toujours au cœur de cette campagne 2024, alors que les Etats-Unis ont subi une vague impressionnante d’entrées ces dernières années. Les Démocrates ont été fortement critiqués pour leur gestion du problème et Donald Trump entend bien capitaliser dessus. On le constate, la partie n’est pas finie et les Démocrates sont toujours, comme l’a rappelé Kamala Harris elle-même, les « underdogs » de ce scrutin. Reste néanmoins qu’une vague médiatique les porte. La candidature de Kamala Harris a ressuscité un enthousiasme qui était absent pour Joe Biden. Le merchandising se vend énormément et Kamala Harris paraît extrêmement déterminée. Elle doit accomplir un exploit au terme d’une campagne express. Moins clivante que Donald Trump, candidat bénéficiant d’une forte adhésion auprès de sa base et d’un fort rejet dans d’autres segments de la population, elle est aussi perçue comme moins crédible sur des items extrêmement importants pour les électeurs indécis : l’économie et l’immigration.
Élargir la base : des choix de vice-présidents débattus
Les choix des vice-présidents étaient déterminants cette année. Donald Trump a fait le pari de partir avec JD Vance, ancien républicain « never Trumper » qui a tourné casaque. Auteur d’un livre de mémoires intitulé Hillbilly Elégie, qui a notamment été adapté sur Netflix, JD Vance vient de cette Amérique « périphérique » et déclassée de la Rust belt anciennement démocrate mais qui avait aidé Trump à l’emporter en 2016, soumise aux tourments des opiacés et de la vie en caravanes. Son autobiographie touchante, narrant l’ascension d’un jeune homme né dans la difficulté, la pauvreté et la toxicomanie familiale, a fait de lui un célèbre personnage public. Avec l’aide du milliardaire « transhumaniste » Peter Thiel, pour qui il a travaillé et qui a financé sa carrière politique, il a ensuite été élu plus jeune sénateur des Etats-Unis dans la circonscription de l’Ohio.
Sur le papier, son profil semblait donc idoine pour Donald Trump, cumulant deux qualités utiles à son élection : un lien avec les financiers de la Silicon Valley et un fort ancrage populaire dans l’Amérique du Midwest où se trouvent plusieurs « États pivots » indispensables à l’obtention d’un nombre suffisant de grands électeurs. La réalité s’est montrée bien plus décevante. Peu à l’aise, JD Vance est la cible de moqueries pour ses discours souvent jugés ratés. Il est aussi perçu comme ambigu politiquement. Sa saillie sur les femmes célibataires vivant avec leurs chats a ainsi été très mal reçue. En outre, son passé d’ancien marine de la « Génération Z » traumatisé par la guerre d’Irak lui a donné une vision sûrement biaisée des réalités géopolitiques de son temps. Fasciné par les milieux conservateurs européens, singulièrement hongrois, il donne à penser que Donald Trump ne cherchera pas à aider le peuple ukrainien dans la défense de sa souveraineté contre l’armée de Poutine. Le retrait de Robert Kennedy Junior, fils de Bobby, en faveur du ticket Trump–Vance, ne démentira pas ce sentiment… En réponse, Kamala Harris a désigné Tim Walz. Le gouverneur du Minnesota, tenant de l’aile gauche du Parti démocrate, grand défenseur du droit à l’avortement, sujet qui sera aussi capital dans plusieurs « swing states », incarne aussi cette Amérique « moyenne » et populaire. Issu du monde de l’éducation, il est aussi renommé pour son franc-parler et ses facilités de communication sur le terrain. On a d’ailleurs pu le constater lors de la DNC, où il a déclaré « être un meilleur tireur que la grande majorité » des élus républicains mais vouloir protéger les enfants contre la prolifération des armes et les tueries en milieu scolaire.
Un élan et une campagne qui peinent à retrouver un second souffle
S’il est toujours difficile d’établir des parallèles historiques sans commettre d’anachronismes, cette élection accuse quelques ressemblances avec l’élection présidentielle de 1968. Outre le contexte international et les questions de société qui divisaient alors l’Amérique et la divisent encore aujourd’hui, comme si la parenthèse des « civil rights » n’en avait jamais été une mais bien plutôt une révolution permanente, les « faits de jeux » sont proches. En 1968, Lyndon Johnson, qui fut le vice-président de John Fitzgerald Kennedy, avait fini par se retirer au profit de son vice-président Hubert Humphrey finalement battu par le républicain Richard Nixon devançant sur le fil lors des primaires un certain Ronald Reagan. L’élection avait aussi été marquée par l’assassinat de Bobby Kennedy à qui la victoire était promise.
De quel côté penchera le balancier cette fois-ci ? Donald Trump n’est pas comme Nixon une surprise. Il en est à sa troisième campagne d’affilée. La première fut triomphale. La seconde s’acheva par un scandale qui faillit mettre un terme à son aventure politique. Pour gagner, les démocrates doivent être très au-dessus dans le vote populaire. De fait, l’élection de 2020 fut extrêmement serrée, se jouant à quelques milliers de voix dans plusieurs « swing states », alors que Biden jouissait d’une avance de 7 millions de voix dans le vote populaire. Entre 1992 et nos jours, aucun Républicain n’a eu le vote populaire hormis Bush en 2004 contre John Kerry. La répartition du collège électoral favorise les Républicains. Il faudra donc que Kamala Harris bombarde les 7 « swing states » où l’élection se jouera : l’Arizona, le Nevada, le Wisconsin, le Michigan, la Géorgie, la Pennsylvanie et la Caroline du Nord. En 2020, Biden avait créé la surprise en Géorgie. Elle pourrait se répéter. Il l’avait aussi emporté dans le Michigan, en Pennsylvanie et dans le Wisconsin, alors que Trump y avait battu Clinton en 2016.
La différence est que l’attrait de la nouveauté semble bénéficier aux Démocrates. Axée plutôt sur le « bashing », la campagne de Donald Trump risque de mobiliser les siens mais pourrait effrayer l’électorat indécis. Un pronostic : si Harris rassure sur l’économie et l’immigration, elle gagnera avec une large avance. Réponse en novembre.
La discrétion estivale de l’ancien président de la République, pourtant très friand des combinaisons politiques les plus sophistiquées, est étrange. En juin, en campagne pour les législatives, il demandait à l’Insoumis Jean-Luc Mélenchon de «se taire» pour «vraiment rendre service au Nouveau Front populaire». Alors que de nombreux sujets de fond les opposent, et alors que la plus proche conseillère de Jean-Luc Mélenchon Sophia Chikirou a depuis comparé le hollandisme à des «punaises de lit», bizarrement, le socialiste n’intervient pas dans le débat politique agité de la rentrée.
Loin de moi l’idée d’offenser François Hollande, que j’avais beaucoup apprécié aussi bien lors de l’entretien qu’il avait bien voulu m’accorder dans « Bilger les soumet à la question » que dans sa périphérie aimable et spirituelle. Toutefois je ne voudrais pas qu’on s’interrogeât sur lui en doutant non seulement de son rôle présidentiel – avec le constat amer tiré par lui seul qu’il ne pouvait pas se représenter – mais de l’importance de sa nouvelle fonction de député au sein du groupe socialiste. Celui-ci, inséré dans le Nouveau Front populaire (NFP), se montre alternativement dans la soumission à Jean-Luc Mélenchon puis dans sa détestation. J’avoue qu’au cours des péripéties de ces dernières semaines concernant le président de la République, ses rapports avec le NFP, les tensions entre LFI et les socialistes, toutes les éventualités pour la désignation d’un nouveau Premier ministre et, plus globalement, le rôle d’Emmanuel Macron lui-même, j’aurais aimé l’entendre. Il n’a pas dit un mot et son étrange discrétion peut s’expliquer de plusieurs manières.
– Laisser passer un peu de temps après son élection comme député et sa validation d’une alliance où LFI semblait occuper la part du lion. Alors que beaucoup espéraient de sa part, et pas seulement à gauche, une parole forte et exemplaire en raison de ses prises de position nettes à l’encontre de Jean-Luc Mélenchon.
– Faire preuve de modestie et presque d’effacement de peur de se voir reprocher au contraire une omniprésence, presque une arrogance qu’on aurait imputées à l’exercice de son mandat présidentiel même défaillant.
– Ne pas risquer de faire surgir publiquement une voix discordante au sein du groupe socialiste, ce qui n’aurait pas manqué d’aggraver les relations notoirement mauvaises qu’il a avec Olivier Faure.
Je ne crois pas qu’avec sa personnalité aux antipodes de celle que des médiocres sans discernement se plaisent à tourner en dérision, il ait eu pour ambition seulement la fonction de député, même si son bonheur conjugal l’a peut-être rendu moins réactif à l’égard de ce qu’une existence partisane exige. La gloire, alors, non pas le deuil éclatant du bonheur selon la formule magnifique de Madame de Staël mais son contraire : le bonheur comme un adoucissement consenti et bienfaisant des combats partisans.
Il n’est pas impossible pourtant, quand le paysage politique se sera décanté, que François Hollande réapparaisse dans sa subtilité, son intelligence, sa passion des compromis et d’une modération qu’il voudrait toujours vigoureuse. Député pour rien, après avoir eu le courage de revenir d’une humiliation qui aurait pu être irréversible, ce n’était vraiment pas l’hypothèse la plus plausible ! Je ne l’imagine pas se priver, à sa manière, avec une douceur acide, de tout ce qu’il pourra accomplir à titre personnel pour se venger d’Emmanuel Macron qui n’a cessé, avant de devenir président, de lui mentir et de le faire tomber dans une naïveté voire un aveuglement qui n’étaient pourtant pas son genre. Je constate, en écrivant ce billet, que Michel Richard, que j’apprécie, a traité dans Le Point le même sujet : l’apparente passivité de François Hollande. L’ancien président mérite bien de susciter ce double intérêt. À quoi sert-il ? Ayons de la patience.
Trois ans après leur retour au pouvoir, les talibans promulguent une nouvelle loi pour « promouvoir la vertu » et interdisent notamment aux femmes de chanter en public.
C’est le chœur tragiquement silencieux des femmes afghanes. Ces femmes désormais condamnées au silence. C’est le chœur des esclaves asservies par les talibans, mâles fanatiques, débiles, perdus d’âme et d’esprit, coupables d’abyssales folies mystiques, dont la plus pernicieuse de toutes : enchaîner la divinité à leur propre délire.
Ils interdisent désormais aux femmes – leurs mères, leurs épouses, leur sœurs, leurs filles – de faire entendre le son de leur voix en public. Ailleurs donc que dans la sphère carcérale du logis. Un pas de plus – un pas de trop ? – dans l’effroyable entreprise de négation de la femme en tant qu’être, en tant que personne, en tant que membre à part entière de l’humanité.
Que serait un monde où l’on n’entendrait plus la musique de la voix féminine ? Un asile immonde à peu près aussi peu vivable que celui dont on aurait éradiqué le chant des oiseaux.
Avec cet interdit, un stade suprême est atteint dans le registre de la barbarie. On se demande quel prodige nihiliste rend possible la conception et la mise en acte d’une telle haine. Haine qui, au fond, n’est sans doute que la réponse pitoyable à une peur viscérale, névrotique, psychotique de la femme, l’inaccessible femme, la femme nimbée de mystère. La femme dont tout mâle sent bien de quelle force d’âme elle est riche.
Mais qu’importe le diagnostic face à la monstruosité du fait.
Cette fois plus que jamais, il ne faudrait pas que seul le silence de la lâcheté occidentale réponde au silence de la barbarie. Oui, cette fois plus que jamais, on attend que les femmes d’ici, les femmes musulmanes en premier, évidemment, mais aussi toutes les autres (Parmi elles les féministes d’estrade, enfin! Se déroberont-elles comme si souvent ?), descendent par milliers, par millions dans la rue et fassent entendre leur voix ! Qu’elles chantent assez fort pour que, là-bas, à Kaboul et partout où c’est nécessaire, résonne le chœur des femmes libres…
Ou alors faudra-t-il attendre l’étape suivante dans l’escalade monstrueuse, à savoir couper la langue des petites filles dès le berceau pour être bien certain qu’on n’aura pas à affronter la peur d’entendre leur voix ? Tout comme, ailleurs, sous d’autres cieux et d’autres mœurs qu’on voudrait parfois nous présenter comme aussi dignes de respect que les nôtres, on excise les fillettes pour les priver du bonheur de jouir. Les priver de voix, les priver de plaisir. Autrement dit, réduire la femme à un objet, à une chose tout juste bonne à servir le mâle et à mettre bas. Qu’on n’aille pas se raconter d’histoires. Au point où nous en sommes, l’enjeu, pas si loin de chez nous, est bel et bien celui-là.
Les journalistes Elisabeth Lévy et Philippe David. DR.
Devant la recrudescence des actes antisémites dans le pays, des juifs se demandent s’il ne faut pas partir. Les discours républicains volontaristes de nos hommes politiques semblent inopérants et un peu creux pour contrer le phénomène.
Chère Elisabeth, Ce n’est qu’aujourd’hui que j’ai entendu les propos que tu as tenus avant-hier sur CNews au micro de Thierry Cabannes face à Julien Dray dans l’émission « Face à face »[1]. Des propos forts, émouvants, qui m’ont retourné l’esprit et les tripes au point de me pousser à t’écrire cette lettre. Une lettre que j’aurais aimé ne jamais écrire mais, vu la gravité de la situation pour toi et tous les Français juifs, je n’ai pas pu m’empêcher de l’écrire. « Cela fait des mois que je me dis que je ne finirais pas ma vie dans mon pays ». Tel est le propos que tu as tenu, un propos qui m’a révolté et mis hors de moi. Un propos qui est malheureusement la triste réalité pour nombre de Français juifs, et ce depuis des années, les alyas, l’émigration vers Israël, se multipliant vu le climat subi par nos compatriotes juifs (je ne parle pas de communauté puisque la République ne reconnait que des citoyens).
Climat nauséabond
Un climat nauséabond qui a empiré depuis des années avec nombre d’attentats antisémites, de la rue Copernic à La Grande-Motte en passant par Toulouse, la rue Rosiers ou l’Hyper Cacher. Des attentats ayant pour dénominateur commun le conflit au Proche-Orient et l’islamisme – un conflit au Proche-Orient dans lequel nos compatriotes juifs n’ont aucune responsabilité et un islamisme qui sème la mort partout où il passe.
Un conflit au Proche-Orient dans lequel les Français juifs ont toujours été exemplaires, puisqu’ils n’ont jamais commis le moindre acte hostile contre une mosquée ou des musulmans après les nombreux actes terroristes commis dans l’État hébreu. Une réalité qui ne marche pas dans l’autre sens, Merah ayant tué de sang-froid des enfants pour « venger les enfants palestiniens » comme le terroriste de la Grande-Motte a mis le feu à une synagogue pour Gaza qu’il ne sait probablement pas situer sur une carte… Mais pour certains, les juifs sont fautifs, même si le 7 octobre ils ont été victimes du plus grand pogrom depuis la Seconde Guerre mondiale. Les mêmes qui parlent de génocide à Gaza alors que le Hamas, s’il le pouvait, ferait une solution finale saison 2 aux Israéliens pour faire la Palestine « de la rivière à la mer », un génocide qu’ils ont commencé le 7 octobre dernier et contre lequel Israël est en état de légitime défense.
Mais les juifs sont responsables et coupables alors que les Français juifs ne demandent, comme toi Elisabeth, qu’à vivre en paix et en sécurité en France, ce qui est un dû pour tous les membres de la communauté nationale, en particulier les plus menacés.
Une présence bimillénaire en France
Alors Elisabeth, sache que tu es française et que ta place, comme celle de tous tes coreligionnaires et compatriotes est ici. La France a une histoire juive bimillénaire puisque les premiers juifs sont arrivés en France alors que celle-ci s’appelait encore la Gaule. Les juifs alsaciens ou les juifs du comtat Venaissin font partie de notre histoire ancienne avant d’être rejoints dans notre histoire plus récente par les ashkénazes d’Europe de l’est fuyant les pogroms et les sépharades chassés après les indépendances en Afrique du nord. Des Français juifs qui se sont illustrés dans les arts, la culture, les sciences, l’entrepreneuriat sans jamais ou presque faire de revendications communautaristes. Des Français juifs qui se sont illustrés aussi les armes à la main, en défendant la France. Il y aura 110 ans le 29 août, le rabbin Abraham Bloch mourait sous les tirs allemands alors qu’il portait un crucifix à un poilu mourant qui le suppliait de lui donner l’extrême-onction alors qu’aucun aumônier n’était présent. Un moment de fraternité française unique, très peu de temps après que la lèpre antisémite ait frappé la France lors de l’affaire Dreyfus. Alfred Dreyfus qui faisait partie d’une famille juive d’Alsace ayant choisi « l’option française » après l’annexion de l’Alsace-Moselle, preuve de son patriotisme incontestable. Alors chère Elisabeth ne pars pas et je profite de cette lettre pour dire à nos compatriotes juifs que leur place est ici, que la France a besoin d’eux et qu’on les aime. Je t’embrasse et te dis à très vite.
«Cela fait des mois que je me dis que je ne finirais pas ma vie dans mon pays» à cause de la multiplication des actes antisémites en France, déplore Elisabeth Lévy, dans #FaceafaceETEpic.twitter.com/bdEWH4BZci
Pendant que la chanteuse un peu mièvre Angèle chante « Bruxelles, je t’aime », jusqu’au paysage politique de la capitale belge change du tout au tout…
L’irruption sur la scène politico-médiatique de Fouad Ahidar, autrefois socialiste flamand, pourrait être un tournant politique majeur en Belgique. Aux dernières élections de juin, son parti a obtenu trois députés bruxellois (et un élu au Parlement flamand) après une campagne menée à destination de la communauté arabo-musulmane. L’homme, qui est l’objet d’une plainte après avoir qualifié les juifs de « psychopathes » et qui a décrit les événements du 7 octobre comme une « petite réponse d’une partie du Hamas », est le nouvel étendard du vote communautaire. À terme, il pourrait s’accaparer une part grandissante des suffrages dans une capitale où se côtoient toutes les nuances d’un islamo-gauchisme plus que jamais soudé par les événements au Proche-Orient.
Inquiétant contexte
Remettons-nous dans le contexte bruxellois. Plus que nulle part ailleurs, l’antisionisme et la dénonciation d’Israël y sont souvent le cache-sexe de sentiments bien plus fangeux. La recrudescence de l’antisémitisme dans la capitale belge a ainsi été clairement mise au jour par un récent sondage à l’occasion duquel 22 % des « Bruxellois » ont déclaré leur aversion pour les Juifs ; 41 % que ceux-ci contrôlent la finance et 40 % qu’ils dirigent les médias – pourtant plutôt complaisants à l’égard la cause palestinienne, sans oublier le boycott par la chaîne publique flamande de la chanteuse israélienne à l’eurovision.
Tel un symbole, le professeur israélien Elie Barnavi, partisan de la création d’un Etat palestinien et peu suspect de sympathies politiques à droite, fut empêché, peu avant la trêve des confiseurs, de tenir une conférence à l’Université libre de Bruxelles : lui, l’allié de la cause palestinienne, était donc déclaré persona non grata, en raison de sa nationalité et de ses origines, soit la définition même du racisme. S’il n’y avait pas eu ça et là quelques drapeaux LGBT, on pourrait écrire que le campus de l’ULB fut alors devenu, pendant plusieurs semaines, une mini-bande de Gaza : les drapeaux palestiniens pendirent aux fenêtres de bâtiments dégradés par les activistes ; le keffieh fut porté avec ostentation ; les slogans, jusqu’aux plus nauséabonds, fusèrent comme autrefois les chants estudiantins ; on y utilisa davantage le terme « génocide » que l’expression « libération des otages » ; la violence n’était jamais loin, jusqu’à l’agression de deux étudiants portant le drapeau israélien ; le rectorat mit fin aux accords de recherche avec les universités israéliennes et les professeurs se mirent au diapason : pour soutenir « la cause », certains ont déclaré vouloir faire la « grève de la surveillance » lors des examens (« étudiants, trichez, c’est pour la bonne cause ! »).
La lutte des races supplante la lutte des classes
Il n’est dès lors pas étonnant de constater que l’islamo-gauchisme se transforme toujours plus clairement en gaucho-islamisme ; autrement dit, la lutte des classes passe au second rang, derrière l’affirmation religieuse. Bruxelles avait été la pionnière en faisant élire, il y a quinze ans, la première femme voilée dans un Parlement en Europe : Mahinur Özdemir, représentante du Centre démocrate humaniste (aujourd’hui Les Engagé-e-s) et présentée alors comme parangon de la diversité heureuse, a depuis été écartée de la vie politique en raison de son abnégation à refuser de reconnaître le génocide arménien et a rejoint le gouvernement… turc de Recep Tayyip Erdogan. À la même époque, les Loups gris turcs faisaient déjà de l’entrisme sur les listes, et certains députés militaient pour la libération d’Oussama Attar qui deviendrait plus tard le cerveau des attentats de Paris.
Entretemps, de nouvelles figures, toujours plus nombreuses, ont émergé. C’est le cas notamment de Ridouane Chahid, bourgmestre (= maire) socialiste d’Evere, une des dix-neuf communes bruxelloises, à la Tabaâ tamponnée sur le front (marque indiquant une grande assiduité religieuse), qui a fait hisser un drapeau palestinien au fronton de sa maison communale. Mais on n’est plus à cela près : l’ancienne co-présidente d’Ecolo fut maintenue en place après avoir relayé sur ses réseaux sociaux une comptine appelant à « tuer les fils de Sion » ; elle ne fut poussée que récemment vers la sortie en raison des… mauvais résultats de sa formation politique (dus entre autres à un wokisme délirant et une politique de mobilité désastreuse).
Les autres élus ne semblent pas s’en alarmer outre mesure et se complaisent dans le rôle d’idiots utiles. Ainsi en est-il, par exemple, de l’écologiste Alain Maron : dans une interview surréaliste, celui qui était encore ministre a déclaré, sans nuance, que l’ « islam est pour l’égalité hommes-femmes et le droit à l’avortement ». Et que dire de Défi, parti ouvertement laïc qui, pour rester dans le précédent gouvernement, ferma les yeux sur une affaire de port du hijab dans une société publique ? Tout ce petit monde tente aujourd’hui de former un gouvernement régional bruxellois : face au blocage, il se murmure que les socialistes flamands pourraient vouloir y intégrer la formation de Fouad Ahidar. Ce dernier sait que le temps, à court et à long terme, joue en sa faveur. Dans tous les cas, il a déjà annoncé vouloir présenter des listes aux élections communales qui se tiendront en octobre. Il reste à voir si celles-ci connaîtront la voie de l’éphémère parti Islam qui avait eu pour vocation d’instaurer la charia en Belgique ou celle de leurs homologues qui, au Royaume-Uni commencent à faire de l’ombre aux travaillistes. Quoi qu’il en advienne, les partis « du système » commenceront peut-être alors à se mordre les doigts d’avoir longtemps joué une carte communautaire qui commence à leur échapper.
Elections présidentielles américaines. Personne ne pensait que la convention démocrate de Chicago qui a vu Kamala Harris officiellement investie candidate du parti à la présidentielle de novembre se déroulerait aussi bien. Une vraie « parenthèse enchantée » ! Récit et réflexions.
L’image d’unité joyeuse et déterminée, la chorégraphie réglée au cordeau avec le public qui agite la bonne banderole et l’orateur la bonne intonation au bon moment. Le changement de «pitch» de la voix, la plaisanterie apparemment spontanée, l’évocation d’un passé forcément émouvant, le rappel de la grandeur des Etats Unis et c’est le tonnerre d’applaudissements au moment prévu.
Place aux professionnels
Il y avait bien sûr sur la scène de grands professionnels de la communication tels les époux Obama ou Clinton, Oprah Winfrey ou Alesandria Ocasio-Cortez (AOC) mais les «spin doctors» du spectacle politique américain sont remarquables et de nouveaux venus dans ce showbiz particulier ont appris les codes avec dextérité. Rien d’ennuyeux dans le discours de Tim Walz, le candidat à la vice-présidence, ce gouverneur du Minnesota qui ne nous dit rien de son travail de gouverneur, mais qui est parfait comme représentant de l’Amérique rurale, comme professeur d’école, comme soldat dans la Garde Nationale et encore plus comme coach sportif, cochant ainsi toutes les cases du bon sens, de la solidarité et du goût de l’effort.
Quant à Douglas Emhoff, il a été parfait dans la tâche qui lui était assignée de présenter de son épouse Kamala Harris l’image la plus chaleureuse possible. Ce n’est pas en France que le conjoint d’une femme politique aurait détaillé à son auditoire la « blind date » qui lui a permis de faire la conquête de sa future épouse. Maniant l’autodérision (« ma mère est la seule personne au monde qui pense que c’est Kamala qui a eu de la chance de m’avoir pour époux ») et assumant joyeusement sa position subordonnée, il a probablement beaucoup fait pour gagner le vote féminin. Nul doute que tel était l’objectif de son discours.
Il y avait dans ces quatre journées de Convention Démocrate à Chicago une impression d’alignement des planètes qui fait penser aux Jeux Olympiques de Paris. Qui aurait imaginé que cela se déroulerait aussi bien ? Mais une fois les Jeux finis, la France reste embourbée dans le marécage post-électoral de notre microcosme. Le Parti Démocrate, lui, semble sortir des oubliettes et les conséquences pour le monde peuvent être majeures.
Il y a cinq semaines, Joe Biden annonçait sa décision de ne pas se représenter à l’élection présidentielle américaine à la surprise générale. Il était alors largement donné perdant face à un Donald Trump qui, une semaine avant cette décision, avait échappé à un attentat de façon que beaucoup de ses partisans étaient disposés à considérer comme miraculeuse et qui, trois jours avant, avait été triomphalement désigné comme candidat républicain.
Biden a exprimé son soutien à la candidature de sa vice-présidente, mais cela apparaissait comme un soutien par défaut: aucun candidat démocrate ne s’était présenté contre le président en exercice et il était politiquement suicidaire d’écarter la candidature de la vice-présidente, une femme originaire de la diversité. Cependant, le travail spécifique qui lui avait été assigné par Biden, réduire l’afflux vers les Etats-Unis d’immigrants illégaux en provenance de l’Amérique centrale, avait largement été considéré comme un échec et n’avait pas généré non plus beaucoup de sympathie chez ses interlocuteurs d’Amérique latine. Quant au reste, la part de Kamala Harris dans les choix de la présidence Biden semble minime, en dehors du hasard qui a fait que son vote au Sénat, qu’elle présidait statutairement, avait été décisif pour le passage de plusieurs lois importantes dans une assemblée précisément divisée en deux.
Le terme de «administration Biden Harris », largement utilisé par les orateurs lors de la convention démocrate parait donc quelque peu exagéré…..
Les classes moyennes et les libertés choyées
Joe Biden, comme tous les orateurs de la convention, s’est félicité du bilan économique de sa présidence, auquel ont contribué des investissements massifs réalisés par l’Etat, une hérésie évidemment pour les libertariens tels Robert Kennedy Jr, qui en difficulté financière après une candidature personnelle absurde, vient de se rallier logiquement à Trump (lire à ce sujet l’analyse signée Pierre Clairé sur notre site NDLR). Mais les faits sont là, le chômage est résorbé, l’inflation sous contrôle et la production augmente. Sur le plan économique, les Etats-Unis ne sont pas en déclin et le terme de grande présidence, que beaucoup ont prononcé, n’était peut-être pas seulement une flatterie accordée au président sortant.
Les orateurs, s’ils ont peu parlé d’économie, ont beaucoup honoré la classe moyenne, qui serait mise en danger par le programme républicain de soutien aux « gros »: big Pharma, big Oil, big Tech… sous le mantra de la liberté d’entreprendre.
C’est là le noyau des oppositions entre démocrates et républicains, et les préoccupations de l’électorat démocrate relèvent aussi des « libertés » : liberté de se soigner, d’habiter sous un toit, de ne pas être victime d’une fusillade, de manger à sa faim, d’éduquer ses enfants, de choisir ses amours et sa vie reproductive et de ne pas être discriminé par son origine.
La convention a été un immense succès pour le parti démocrate, donné perdant à la suite des moments confusionnels de Joe Biden dans son débat avec Donald Trump. Il parvient à rallier sans fausse note tous les élus et tous les partisans autour d’une candidate jusque-là considérée comme une vice présidente plutôt falote, et qui réapparait soudain comme une femme forte (« tough ») devant laquelle Poutine et les autres n’auront qu’à bien se tenir. Et Biden, qui a pourtant de quoi être amer, met lui-même les rieurs de son côté en constatant qu’il avait commencé sa carrière politique en étant un « trop » jeune sénateur (29 ans) et qu’il l’achèvera en étant un « trop » vieux président. Et du coup, Trump perd son meilleur ennemi…
Au cours de la convention, les allusions à la politique étrangère n’étaient pas fréquentes: Chine, Russie (hormis le dictateur Poutine), Iran, Europe, islamisme ou Otan étaient absentes si ce n’est, à petite dose, chez Joe Biden et Kamala Harris. Il y eut néanmoins deux exceptions.
La première, omniprésente, était la référence patriotique. Dans ce parti démocrate dont on pensait qu’il était grignoté par le wokisme, la déconstruction des grands discours et la repentance tous azimuts, la fierté de vivre dans un pays « particulier », le « plus grand pays du monde », était constamment rappelée et passionnément applaudie. Il ne s’agissait pas, bien entendu, de l’Amérique du Mayflower ou des Wasp, mais de ce peuple bigarré, dont Kamala Harris, de père jamaïquin et de mère indienne, mariée à un Juif de Brooklyn, est particulièrement représentative.
La seconde, c’est Gaza. Peu d’orateurs ont cité Israël, beaucoup ont parlé de Gaza et pratiquement dans les mêmes termes, de Joe Biden à Bernie Sanders : à savoir, il faut libérer les otages et parvenir à un cessez le feu. Les plus optimistes – ou les plus ignorants – ont prétendu que la paix s’ensuivrait, et après des paroles aussi profondes, le tonnerre d’applaudissements était garanti.
Pour la plupart des orateurs, c’est sous son aspect humanitaire (otages et victimes civiles) que la situation au Moyen Orient a été évoquée et non pas sous son aspect politique, avec le combat existentiel d’Israël, la menace iranienne et le danger islamiste. Cette présentation permettait un consensus en neutralisant les oppositions. Elle correspond de plus à ces « bons » sentiments populaires optimistes, confortables et naïfs : si nous voulons vraiment la paix, les « autres » finiront par la vouloir également… Comme si l’histoire du XXe siècle n’avait rien appris…
Pour qui voteront les amis d’Israël ?
Beaucoup d’amis d’Israël vont, pour leur vote, mettre dans la balance ce qu’ils croiront être l’orientation du candidat ou de la candidate vis-à-vis de ce pays. Trump a dit qu’un Juif qui voterait démocrate devrait se faire examiner le cerveau, ce à quoi certains ont répondu que c’était au Juif qui voterait pour Trump de faire cet examen. Je reprendrai ce débat psychiatrique lié à Trump, passionnant et accablant, une autre fois, mais la convention de Chicago donne l’occasion de réfléchir sur le positionnement actuel du parti démocrate
Une première constatation: Joe Biden est un véritable ami d’Israël. On sait que ses relations avec Benjamin Netanyahu, qu’il connait depuis 40 ans, ne sont pas toujours au beau fixe. C’est une litote, et les exemples ne manquent d’ailleurs pas d’Israéliens auxquels on pourrait appliquer la même remarque dans leurs relations avec leur Premier Ministre. La stratégie militaire israélienne a pu être impactée par les réticences américaines. Il n’en reste pas moins que les Etats-Unis ont fourni à Israël une aide en matière d’armement, un déploiement préventif de forces, un soutien diplomatique et une coordination sécuritaire exceptionnelle.
Un tel soutien a provoqué des réactions hostiles chez certains électeurs démocrates dits progressistes, certains universitaires, beaucoup d’étudiants, ainsi que dans la communauté arabo-musulmane et plus généralement chez ceux qui font des Palestiniens le parangon des opprimés de ce monde. Cette hostilité a conduit à l’intérieur du parti démocrate à un mouvement de désapprobation de Joe Biden, avec une nouvelle catégorie d’électeurs envoyés à la Convention, les non-engagés (« non-committed »), venus sans mandat de vote pour Joe Biden. Il s’agit d’environ 700 électeurs sur 15 000, donc moins de 5%.
La « Squad » est un petit groupe très médiatisé de représentants élus (et surtout de représentantes) démocrates progressistes et propalestiniens : OAC est la plus célèbre mais elle n’est pas la plus agressive envers Israël (elle est même critiquée pour cela), bien qu’elle utilise sans honte et en toute ignorance le terme de « génocide ». Deux des membres les plus connus de la Squad viennent de perdre leur campagne pour la nomination du parti aux prochaines élections législatives. Le groupe n’est pas en croissance.
La palme de la haine anti-israélienne va à deux députées de la Squad bien installées dans leur circonscription. Ilhan Omar, née réfugiée somalienne est élue à Saint Paul (Minnesota) où s’est installée une importante communauté somalienne. Rashida Tlaib, fille de réfugiés palestiniens est l’élue de Daerborn Michigan. Daerborn, dans la banlieue de Detroit, est la ville de Henry Ford dont le Daerborn Independant avait été entre 1919 et 1927 le pire brûlot antisémite de l’histoire américaine. Aujourd’hui, c’est la capitale de l’islam américain. Rashida Tlaib a été une des organisatrices de la grande marche pour la Palestine où 2000 manifestants sur les 30 000 espérés ont défilé à Chicago au début de la Convention. Bien que Joe Biden ait dit que les manifestants avaient eux aussi des arguments à faire valoir (le nombre de victimes gazaouies), cette manifestation fut un échec et n’a pas influencé le déroulement de la Convention.
Au cours de cette Convention, les parents d’un otage isralo-américain, Hersh Goldberg Polin, ont prononcé un discours qui a amené les larmes aux yeux de nombreux délégués. Il ne faut pas se tromper: l’assistance aurait pleuré de la même façon en écoutant les plaintes d’un gazaoui, lequel aurait certainement omis de signaler la responsabilité du Hamas dans le calvaire de la population. Mais il faut constater que les organisateurs de la Convention démocrate ont refusé de faire venir des Palestiniens au micro. Les cadres démocrates restent dans leur très grande majorité des soutiens d’Israël, comme le confirment les votes bipartisans au Congrès et les sondages dans la population, contrairement à ce que pourraient faire penser des medias américains le plus souvent critiques d’Israël. Cet air nous est connu…
Qu’en est-il, enfin et surtout, de la candidate démocrate et de son colistier? Tim Walz, gouverneur d’un Etat dont la capitale a une forte présence musulmane, a tissé des liens avec des responsables musulmans locaux. Il a pris la parole lors de manifestations contre l’islamophobie. Mais il entretient également des liens étroits avec les représentants locaux de la communauté juive. De 2007 à 2019, alors qu’il était membre du Congrès américain, il a constamment voté en faveur d’Israël.
Quant à Kamala Harris, elle a déclaré lors de son discours d’acceptation à Chicago: « Je défendrai toujours le droit d’Israël à se défendre, car le peuple d’Israël ne doit jamais plus faire face à l’horreur qu’une organisation terroriste appelée Hamas a causée le 7 octobre ». Ces paroles sont en phase avec toutes ses déclarations antérieures, notamment son discours de 2017 à l’AIPAC où elle affirmait qu’en aucun cas Israël ne devait être une question partisane et qu’il avait le droit à l’autodéfense. Elle s’était opposée au BDS ainsi qu’à la résolution du Conseil de Sécurité de l’ONU de 2016 qui condamnait la construction de colonies israéliennes en Cisjordanie (résolution qui avait été votée par le Conseil, car sous la présidence de Obama, la délégation américaine s’était simplement abstenue, sans mettre de veto). On peut bien entendu ajouter à cela l’ambiance familiale avec un mari dont tout indique que non seulement il est actif en matière de lutte contre l’antisémitisme, mais qu’il exprime envers Israël les sentiments positifs qui sont ceux de la grande majorité des Juifs de ce monde.
Tout cela ne préjuge pas de l’avenir. Les complexités géopolitiques, les modes intellectuelles, et surtout les réactions émotionnelles sont utilisées aujourd’hui avec habileté par les ennemis d’Israël et même un chef d’Etat surinformé peut y être sensible. Par ailleurs, la conception de l’avenir, des compromis à effectuer et des risques à prendre pour avancer vers une coexistence pacifique n’a jamais fait consensus en Israël même. On peut parier que Ben Gvir ne serait pas l’interlocuteur rêvé de Kamala Harris…
Enfin, la menace iranienne existentielle pour Israël est plus lointaine pour Washington et il n’y manque pas de diplomates qui n’attendent qu’un signal pour reprendre du service et chercher à apaiser les mollahs. Il n’en reste pas moins que dans son discours de Chicago, Kamala Harris a dit que pour défendre les intérêts des USA, elle n’hésiterait pas à décider de toute action nécessaire, quelle qu’elle soit, contre l’Iran et les terroristes soutenus par l’Iran.
Certains présentent de façon très sombre les conséquences d’une présidence de Kamala Harris en ce qui concerne l’avenir d’Israël et considèrent que ceux qui la soutiennent sont des naïfs inguérissables. Pour ceux qui pensent que les relations entre Israël et les Etats-Unis sont trop importantes pour dépendre des foucades d’un président narcissique et lunatique, sa candidature donne tout de même aujourd’hui matière à soulagement.
Catherine Ribeiro au Palais de Chaillot, PARIS. Le 9 octobre 1996. SIMON ISABELLE/SIPA
Celle qui est passée de la musique pop au « prog rock », et ensuite à la chanson engagée, est partie le 23 août. L’anarchiste de gauche qui, après un période yéyé et après avoir voulu « détruire complètement la chanson classique, avec refrain et couplets réguliers » en chantant avec des cris et des onomatopées, restera aussi dans les mémoires comme une des grandes interprètes du répertoire français. L’hommage de Patrick Eudeline.
Les Carabiniers ? Qui se souvient de ce Godard somme toute mineur ? 1964. Notre homme tourne. Beaucoup, peut-être trop. Entre indispensable et anecdotique. Les Carabiniers vaut pour son « engagement », son air du temps. C’est le premier film ouvertement politique du Jean-Luc. Et pour le visage de Catherine Ribeiro. Comme Chantal Goya, comme Anna Karina, on la remarque. Godard a le chic pour les actrices brunes, pour les dénicher de nulle part.
Patrice Moullet (sous pseudo) joue aussi dans le film : il est un des deux héros. Il a cinq ans de moins que la dame ; elle est Portugaise, née à Lyon en 1941 dans un milieu ouvrier. Lui est un Parisien, presque un branché du Drugstore. Avec Catherine, c’est le début d’une histoire qui durera quinze ans. Il sera le partenaire absolu, l’unique. Lui et Jean Van Parys la poussent à chanter. C’est l’évidence. Beauté du Diable, voix différente et indiscutable, héritée d’une mère qui aimait le fado… Comme Marie Laforêt ou Valérie Lagrange, comme Zouzou, elle sera chanteuse/actrice.
Elle signe chez Barclay. Une flopée de singles suit. Succès d’estime, comme on dit pudiquement, mais pas de hits. Les compositions originales (« Dieu me pardonne », « Rien n’y fait, rien n’y fera ») voisinent les reprises de classiques folk ou de Dylan en version française. C’est charmant, pop, éphémère et éternel. Elle pose pour Jean-Marie Périer… C’est la fameuse photo Salut les Copains. 1966. Un aréopage, un Olympe yéyé en centerfold. De Monty à Gainsbourg, de Johnny à Ronnie.
Mais les beatniks sont là, comme les premiers Maos. Tout va très vite, gronde et rue dans les brancards. Catherine fréquente la scène d’avant-garde. Kalfon, Clementi et les autres. Elle se rebelle. Pouvait-il en être autrement ? Non, elle ne sera pas une cover-girl, une autre poupée de cire et de son. Elle ne fera pas « le jeu du showbiz ».
Avec Moullet, elle fonde Alpes, un groupe de « rock progressif »… Un album suit, chez Festival. Comme Magma, le Manset de « La mort d’Orion » ou même le Vangelis de « 666 » – tous sortis la même année, 1970 – Catherine refuse le verbe et les mots, le sens. Elle rêve d’onomatopées, d’expression libre, d’indicible, d’un art free et abstrait. Et c’est ce qu’elle nous donne. Elle hurle, murmure ou susurre comme, justement, Irene Papas avec Vangelis.
Derrière elle, ou plutôt à ses côtés, Patrice Moullet s’illustre sur des instruments de l’espace qu’il fabrique lui-même. Des gaffophones ! Des percuphones ! Des cosmophones !
Mais tel qu’il est, à côté des suscités, ou des oubliés Catharsis ou Moving Gélatine Plates, l’album devient un des incontournables de l’époque. Et Alpes emmène son « prog rock » dans tous les festivals.
Bientôt, les seventies chassent ce clou. Gauchisme comme hippies ou « pop music » laissent place au rock décadent, aux seventies, au rétro. Nous sommes en 73. On en revient aux chansons, à l’attitude, on en revient au rock and roll. À tout ce que Alpes n’est pas.
Le groupe stagne. Catherine, alors, poussée par sa maison de disques, enregistre un album de reprises de Piaf. Une réussite artistique et critique, mais un échec commercial. « Le blues de Piaf »… Oh le beau concept, la belle évidence ! Quelques années plus tard, l’Américain Willie de Ville allait le clamer haut et fort. Piaf ! C’est le blues…. Le blues de Paris.
Peu après, elle tourne dans Né de Jacques Richard, avec Lonsdale et Luchini.
Comme d’autres – tant -, elle sera de gauche. Férocement. Du gauchisme swag en pull shetland façon La Chinoise, elle passera au communisme le plus austère, le plus… renfrogné ? Elle est très tôt engagée avec l’Organisation communiste internationaliste (OCI). La petite fille des sixties devient une passionaria rouge. Palestine, usines en lutte, Vietnam, Pinochet, elle est de toutes les causes. Sa beauté, cette voix, énorme, lyrique et immense : elle avait tout. Elle refuse le star système, la moindre compromission. Énervée, même, quand Mitterrand vient la voir en concert.
Sa discographie, néanmoins, est riche et elle aura parcouru toutes les scènes françaises, inlassablement. Bobino, Francofolies, Printemps de Bourges. Elle devient une des plus grandes interprètes du répertoire, de Brel à Barbara. Reconnue, bientôt culte.
Sa fin de vie sera difficile, avec une fille tox et nombre de morts autour d’elle.
Elle est partie peu de temps après Delon. Deux France qui s’en vont, que tout, quasi, opposait. Il est permis de pleurer les deux.
Chatherine Ribeiro reprend Ferrat chez Pascal Sevran.
Assurant qu'il ne serait "jamais du côté du problème, mais de la solution", Jean-Luc Mélenchon a demandé à ses opposants s'ils laisseraient le NFP appliquer son programme s'il n'y avait pas de ministre Insoumis dans un futur gouvernement... JT de TF1 du 24 août 2024. Capture TF1+
Voyant la disparition d’Alain Delon lui voler la vedette dans les médias, Jean-Luc Mélenchon revient avec un coup diabolique, et prend de court la classe politique avec l’idée d’un gouvernement de gauche sans ministre issu de la France insoumise…
« La mort a des rigueurs à nulle autre pareilles », écrivait François de Malherbe dans sa Consolation à M. Du Périer pour le décès de sa fille.
Ces jours-ci, le camarade Mélenchon aurait pu reprendre cet amer constat à son compte. Il se voyait en prince des médias, en imperator des plateaux de TV et des studios radio. Il s’imaginait en triomphateur sans égal de la rentrée médiatico-politique avec son coup d’éclat mâtiné coup d’Etat, j’entends par là la sommation adressée au président de la République de bien vouloir déguerpir de là où il trône. Le camarade s’était en effet préparé – nous rapportent des personnes très au fait de ces choses – à devoir courir les rédactions les plus diverses pour un marathon en solitaire d’au moins quarante-huit heures, donnant ainsi le « la » de la reprise et grillant la politesse à ses rivaux dans la piaffante corporation des bateleurs d’estrade. Tout était calé, policé, huilé, orchestré.
Las, badaboum ! Voilà bien que la camarde vient s’en mêler. Elle frappe. Et elle frappe haut, très haut. Elle emporte le Samouraï, le jeune frère Rocco, M. Klein, l’icône Alain Delon. Tout le bel agencement mélenchonien réduit à rien à l’instant même, laminé par la force dramatique, dramaturgique, de l’événement, écrasé sous la déferlante médiatique qu’il génère. Le défunt célébrissime – plus grand encore mort que vivant tel un certain Guise de notre histoire – occupe l’intégralité de l’espace journalistique disponible. Les critiques se font thuriféraires, qui trempent leur plume dans ce qui, en la circonstance, tient autant de l’encensoir que de l’encrier. Mais au fond, ce n’est que justice quand l’émoi populaire atteint un tel degré.
Il faut savoir choisir sa mort, disait, espiègle, Jean d’Ormesson chez Thierry Ardisson. Et de citer celle de Jean Cocteau que le trépas d’Édith Piaf avait passablement occultée. Ironie du destin. Autre illustration de la Faucheuse et de ses rigueurs à nulle autres pareilles, ce même Jean d’Ormesson devait quitter ce monde dans le moment où Johnny – le Taulier – sortait de scène. Pas de chance. Tout pour Johnny, la pleine lumière post-mortem. De pâles éclats pour le malchanceux du trépas qui, en son for intérieur, devait espérer beaucoup mieux pour la fin de l’immortel qu’il était.
Choisir sa mort, conseillait-il. Le camarade Mélenchon devrait y penser. Rien ne presse, naturellement. Et puis, pour tout dire, on ne voit plus très bien quels grands, très grands, pourraient à présent, dans ce domaine si particulier de la gloire posthume, rivaliser avec les Piaf, les Delon, les Belmondo, les Johnny ? Mais si, il en reste un ! Un de ces spécimens hors norme, un de ces monstres sacrés aimés des gens. B.B. Brigitte Bardot. Personnellement, je la crois pour de bon immortelle, alors ce qui est évoqué ici ne saurait la concerner : elle ne mourra jamais. Jamais.
Le président Macron termine ses consultations en recevant ce lundi Marine Le Pen, Jordan Bardella et Éric Ciotti, ainsi que les présidents des deux chambres, Yaël Braun-Pivet et Gérard Larcher. Mais, il ne semble toujours pas avoir identifié un Premier ministre pour gouverner.
Ubu roi loge à l’Élysée. Emmanuel Macron y a arrêté les horloges, croyant ainsi figer le temps. Esseulé en son palais, il vomit les esprits tristes qui ne se contentent pas de ses JO réussis. L’adversité le pousse à l’immobilité : il s’est juré de tenir encore trois ans, terme de son mandat. Quitte à tordre la démocratie et à ignorer les grondements du peuple.
Ce lundi matin, Macron sait-il quel Premier ministre il va désigner ? Le château a fait savoir, selon Libération, que le vote des Français ne l’engageait pas. Depuis vendredi, il a reçu tour à tour les formations parlementaires, pour clore aujourd’hui ses consultations avec Marine Le Pen et Éric Ciotti. Cela fait plus de 40 jours – un record jadis détenu par la IVe République (38 jours) – que la France n’a plus de gouvernement et que le chef de l’État n’a toujours pas pris la mesure de son propre rejet par des législatives qu’il croyait gagnables. Personne ne se précipite pour camper si précairement à Matignon, hormis Xavier Bertrand pour la droite, Lucie Castets pour la gauche et quelques intermittents prêts à se dévouer. Pourquoi pas François Baroin, devenu banquier plan-plan ?
En attendant, chacun se ment à lui-même en s’attribuant l’échec du RN comme un trophée. Relatant l’entrevue avec le NFP, Le Monde de samedi raconte : « Devant ses hôtes, Emmanuel Macron a reconnu la victoire du Nouveau Front populaire dans les urnes et il a admis que, avec ce vote, les Français avaient exprimé la volonté d’un changement d’orientation politique ». Or, si le NFP a décroché une majorité de députés (193), il n’a totalisé que 7 millions de voix, contre près de 11 millions pour le RN allié à Ciotti (126 députés). Ce ne sont pas les urnes qui lui ont donné la victoire, mais une logique de répartition des sièges dont a pâti le RN. Macron a banalisé l’absurde. La démocratie est une farce.
Sous le règne d’Ubu, tout est ubuesque. À commencer par les agitations loufoques de Jean-Luc Mélenchon et de ses apôtres. Ils ont réussi à faire croire aux médias envoutés que LFI était le gagnant des législatives avec…73 sièges ! Mais désormais, malgré sa participation active au front républicain contre le RN, La France Insoumise se retrouve à son tour, ces jours-ci, rejetée par ses alliés macronistes d’hier : ils feignent de découvrir son jeu incendiaire, dont les juifs deviennent la cible.
Dans la confusion intellectuelle illustrée par le chef de l’État, de prétendus démocrates inclusifs, récusés par les électeurs, en viennent à soutenir que le pays devrait être gouverné en excluant LFI et le RN, soit une bonne partie des citoyens en colère.
C’est cette position anti-démocratique qu’a tranquillement défendue Gabriel Attal le 13 août en appelant à un « pacte d’action » écartant ces deux formations. Le 18 juillet, le même Premier ministre démissionnaire et 16 autres membres du gouvernement avaient fait réélire Yaël Braun-Pivet à la présidence de l’Assemblée en violation de la séparation des pouvoirs qui aurait dû interdire aux ministres-députés de participer aux votes. Mais que vaut la démocratie pour ces « élites » accrochées à leurs rentes ? Samedi, les obsèques d’Alain Delon ont respecté son choix de ne pas recevoir d’hommage national au profit d’une cérémonie intimiste. Cette défiance vis-à-vis de la classe politique est largement partagée. La France pleure Delon, symbole d’une virilité devenue suspecte. Elle ne versera pas une larme pour ce vieux monde agonisant, conduit par un monarque capricieux qui s’amuse à dégoupiller des grenades pour voir l’effet produit.
Le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin sur France 2, 25 août 2024. DR.
L’attentat de samedi à la Grande-Motte, dont le caractère islamiste et antisémite ne fait pas de doute, n’a heureusement pas fait de victime. Certains éditorialistes comme Laurent Joffrin ou Yves Thréard, et certains politiques comme le ministre de l’Intérieur, se risquent aujourd’hui à faire un lien entre l’islamo-gauchisme prêté à l’extrême gauche et les passages à l’acte antisémites.
Devant la gravité des évènements, le ministre de l’Intérieur a ressorti la cravate ! Finies les galéjades un peu démagogiques sur le mode « je ne mets plus de cravate, le petit peuple n’aime pas cette distance entre les élites et lui ». L’heure est grave : le terrorisme islamiste frappe de nouveau en France, et il ne faudrait pas faire une faute de goût.
Grande peur à la Grande-Motte
Samedi 24 août, un homme de nationalité algérienne âgé de 33 ans, en situation régulière sur le territoire national, a incendié deux véhicules dans l’enceinte de la synagogue Beth-Yaacov, à La Grande-Motte (34). Il a également provoqué l’explosion d’une bouteille de gaz, et blessé un policier municipal. L’enquête commence. Des images de vidéosurveillance le montrent quittant les lieux de l’incident, keffieh sur la tête et drapeau palestinien autour de la taille, portant ce qui semble être des bouteilles d’eau minérale dans les mains. Le soir, le suspect a été arrêté à Nîmes (30) dans la cité de Pissevin, gangrénée par le trafic de drogue, après un échange de tirs avec la police. Lors de cette confrontation, il a été blessé au visage et est depuis hospitalisé, mais ses jours ne sont pas en danger.
La police n’a pas pu encore l’interroger, mais deux autres personnes de son entourage ont été placées en garde à vue après son interpellation. Alors que la cité balnéaire de l’Hérault est stupéfaite et inquiète, et que la communauté juive nationale est saisie d’effroi, le Parquet national antiterroriste a ouvert une enquête pour tentative d’assassinats en relation avec une entreprise terroriste, destructions par moyen dangereux en relation avec une entreprise terroriste et association de malfaiteurs terroriste en vue de préparer des crimes d’atteintes aux personnes.
Mais, ailleurs en France, il faut bien reconnaitre que ce n’est pas franchement l’effroi. Heureusement, il n’y a pas eu de morts, observe-t-on. Ouf ! il n’était pas fiché S et même pas clandestin, se rassure-t-on. Les Français auront-ils à regretter demain de ne pas d’avantage s’émouvoir des périls qui menacent en permanence leurs concitoyens de confession juive et poussent même certains à l’émigration ? On peut le craindre.
Une montée inquiétante de l’antisémitisme
Depuis les tueries de Mohammed Merah, et singulièrement depuis les attaques terroristes du Hamas en Israël le 7 octobre, nos compatriotes juifs voient les violences qui s’abattent sur eux augmenter. L’attentat de samedi intervient dans un contexte de tension extrême au Proche-Orient, laquelle a pour conséquence de les voir pris pour cibles par beaucoup d’adversaires d’Israël. Quant à l’extrême gauche, elle met sans arrêt de l’huile sur le feu. Pourtant, nos compatriotes juifs ne sont en rien comptables de la politique du gouvernement israélien – faut-il encore le rappeler ?
Le ministère de l’Intérieur recense déjà 1114 faits antisémites en 2024. 42% concernent des atteintes aux biens, et 58% des attaques aux personnes. Sur les six premiers mois de l’année, les actes antisémites sont en hausse de 73% par rapport à l’année dernière dans l’hexagone. L’année 2023 comptabilisait un total de 1676 actes antisémites commis ; le double par rapport à il y a dix ans.
L’historique des attaques antisémites depuis le 7 octobre est éloquent : le 1er mars, à Paris, Marco, un sexagénaire, a été roué de coups par un Guadeloupéen de 31 ans dans le 20e arrondissement. Il sortait d’une synagogue et portait une kippa. Le 17 mai, un individu armé d’un couteau et d’une barre de fer incendie la synagogue de Rouen (76) avant de s’en prendre aux policiers. Le 15 juin, à Courbevoie (92), une collégienne juive de 12 ans a été injuriée, menacée de mort puis violée par trois autres mineurs. Non loin de là, le 22 juin, six jeunes juifs ont été pris à partie, battus et injuriés dans le centre commercial So Ouest de Levallois-Perret (92). Le 1er juillet, des écoliers étaient à leur tour injuriés et menacés à proximité de leur école élémentaire à Nice (06). Le surveillant qui les accompagnait recevait des coups au visage. Le 6 août, à Montpellier (34), un passager était violemment agressé dans le tramway. Le 14 août, dans le métro parisien, un homme crachait sur une jeune fille et traitait sa famille de « bâtards, salauds » et de « youpins »…
Recherche de coupables
« Nous avons échappé à un drame absolu » a déclaré, samedi, le Premier ministre Gabriel Attal, dépêché dans l’Hérault. L’assaillant de la Grande Motte avait semble-t-il une hache, et il se pourrait que le sinistre individu ait en fait raté son action, laquelle semble ne pas du tout relever du coup de folie et avoir été bien préméditée. Le terroriste pourrait s’être trompé sur les horaires de l’office, et avoir prévu de s’en prendre physiquement aux personnes présentes… On aurait ainsi échappé à une véritable hécatombe, selon le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, qui a expliqué à la télévision dimanche soir que le suspect attendait la sortie des personnes présentes dans l’édifice religieux avec sa hache, mais que l’intervention rapide des gendarmes l’avait heureusement fait fuir.
Si la classe politique a heureusement unanimement condamné les faits, le débat s’est rapidement porté sur ce contexte particulier de montée de l’antisémitisme dans lequel est survenue l’attaque.
« Ce qui s’est passé ici choque et scandalise tous les républicains de notre pays. Une fois encore, des Français juifs ont été attaqués en raison de leur croyance et cela nous révolte et nous indigne. Tous ensemble, par-delà les clivages politiques, nous devons nous mobiliser et nous dresser contre ces actes, être intraitables » a martelé le Premier ministre démissionnaire. « S’en prendre à un Français juif, c’est s’en prendre à tous les Français » a-t-il ajouté. « Pensées pour les fidèles de la synagogue de La Grande-Motte et tous les juifs de notre pays. (…) La lutte contre l’antisémitisme est un combat de chaque instant, celui de la nation unie », a écrit Emmanuel Macron sur Twitter. Il est notable de constater que dans ses premières réactions, l’exécutif n’évoque pas l’islamisme, alors que le suspect portait pourtant keffieh et drapeau palestinien lorsqu’il a commis ses méfaits… Marine Le Pen a de son côté déclaré que « tout doit être fait pour protéger nos compatriotes de confession juive, pris pour cible tous les jours en France. Je leur adresse tout mon soutien et ma solidarité. » Jean-Luc Mélenchon, lui, a dénoncé un « incendie criminel contre la synagogue de La Grande-Motte », un « intolérable crime », avant d’adresser ses « pensées pour les fidèles et les croyants ainsi agressés ». Semblant ménager la partie antisémite de son électorat, il n’évoque évidemment ni l’islamisme ni l’antisémitisme de l’attaque, qui semblent pourtant immédiatement évidents pour tout le monde. Et en parlant de « fidèles », l’extrême gauche semble avoir pour objectif de tracer un signe égal entre antisémitisme et « islamophobie », et évidemment de nier la dimension raciste contenue dans la haine antijuive des terroristes pro-palestiniens. Interrogée hier sur RTL, son alliée dans le Nouveau Front populaire, Marine Tondelier, a reproché l’ambiguïté du vieux chef de l’extrême gauche. « C’est plus clair quand on le fait (de qualifier l’acte d’antisémite) et sûrement faut-il toujours le faire pour qu’il n’y ait plus aucune ambiguïté. Il y a eu beaucoup d’actes antisémites ces derniers mois et sur certains, le mot “antisémitisme” est à poser très clairement. Quand quelqu’un pose une bombe dans une synagogue, il n’y a aucun débat à avoir sur le caractère antisémite », a sermonné la chef des écolos. On apprécie ce pas de côté, mais au bout d’un moment, championne, il serait peut-être plus clair de couper les ponts avec un tel allié dont l’islamo-gauchisme des troupes est désormais tellement documenté !
« Il y a des discours politiques haineux envers les juifs de France et il faut le dénoncer. On voit bien qu’une partie de la gauche, malheureusement, tient ce discours d’encouragement de haine envers nos compatriotes juifs », a estimé le ministre de l’Intérieur lors de son intervention télévisée hier soir. Dans la presse non plus, certains ne s’embarrassent plus à prendre de gants, et chargent l’extrême gauche. L’éditorialiste Laurent Joffrin a ainsi dénoncé ce week-end un « air du temps antisémite », et estimé que l’extrême-gauche portait sa part de responsabilité1. « En adhérant sans ambages aux thèses décoloniales, en passant des alliances tactiques avec tel ou tel groupe proche des islamistes, elle a rangé les Juifs dans la catégorie honnie des « dominants » et l’État d’Israël dans celle des nations coloniales » écrit le journaliste. Pourtant, parler d’impérialisme concernant Israël, quand on voit la taille du tout petit Etat hébreu, isolé, et entouré par un océan de pays musulmans, de l’Afrique à l’Asie, sur un planisphère, c’est tout de même ironique ! « Certes il s’agit de mots et non d’actes. Mais ces mots fournissent un cadre idéologique à la fois cohérent et pervers à la haine antijuive », estime M. Joffrin. Yves Thréard a estimé de son côté dans Le Figaro, que « sous couvert d’antisionisme, [Jean-Luc Mélenchon] porte une immense responsabilité dans la montée des périls », a observé que le leader des Insoumis était incapable d’employer le mot « juif » pour déplorer l’incendie criminel de La Grande-Motte, a rappelé qu’il avait par le passé qualifié l’antisémitisme en France de « résiduel » et voyait avec sa clique insoumise dans le Hamas un simple mouvement de « résistance »2…
Des questions gênantes
Au-delà de ces polémiques politiciennes autour de l’islamo-gauchisme de la France insoumise, des questions que personne n’ose vraiment poser restent en suspens. Et sauf à apporter la preuve que l’assaillant de la Grande-Motte avait sa carte de militant à LFI, il faudrait peut-être se pencher sur ces dernières, plutôt que d’accuser un peu facilement les complaisances du mouvement de Jean-Luc Mélenchon de tous nos maux.
Si l’individu était inconnu des services de renseignements, il était semble-t-il connu des services de police pour usage de stupéfiants et délits routiers. Pourquoi la France accepte-t-elle toujours ce type d’individus sur son sol ? Le ministre de l’Intérieur a révélé que le suspect prévenu était arrivé en France en 2016, et que grâce à sa nouvelle loi immigration, on aurait pu expulser ce genre de ressortissant étranger s’étant rendu coupable de délits sur notre sol. Pourquoi ne l’a-t-il pas été ?
L’individu incriminé est de nationalité algérienne. Il sera intéressant aussi de voir ce que les autorités françaises disent à l’Algérie, ou ce que nos amis algériens racontent autour de cette affaire. Car au-delà de l’antisémitisme, il s’agit bien là d’un attentat commis par un Algérien sur le sol français, ce qui n’est pas de nature à améliorer les relations diplomatiques déjà mal en point des deux côtés de la mer Méditerranée. L’absence de victimes exonère les chancelleries étrangères d’avoir à formuler des messages de condoléances ou de soutien au peuple français, certes. En France comme à l’étranger, on semble s’habituer à ce que l’islamisme nous frappe ces dernières années… Une terrible habitude, malheureusement.
Le prévenu était sur notre sol malgré des délits, car il aurait eu un enfant en France. Une règle qui devrait de nouveau ulcérer tous ceux qui dénoncent une invasion migratoire du pays en provenance d’Afrique et du Maghreb. Dans l’Hérault, à l’exception de Montpellier et de Lunel, la droite nationale a fait un carton dans toutes les circonscriptions aux dernières législatives. Plus au sud, les grandes villes de Perpignan et de Béziers lui sont acquises. L’islamisation du territoire n’est pas pour rien dans ces résultats électoraux. Et en toute logique, la droite nationale pourrait ne pas tarder à s’emparer de nouveau des sujets sensibles entourant l’immigration maghrébine. L’inactivité (on parle de 40%) ou la proportion dans la délinquance ou dans nos prisons des Algériens ou des citoyens ayant là-bas des origines sont des sujets que la terrible affaire de la Grande-Motte pourrait une nouvelle fois soulever.
Les éditorialistes du Monde ou de France inter auront beau nous reparler de « parenthèse enchantée » cette semaine, reste que les Jeux paralympiques vont s’ouvrir dans un pays où une synagogue a été incendiée. Drôle d’ambiance… En Allemagne, après la terrible attaque terroriste de Solingen (Rhénanie-du-Nord-Westphalie), perpétrée par un Syrien et revendiquée par l’Etat islamique, le gouvernement réfléchit à restreindre le port de couteaux dans l’espace public… En France, alors que l’islamisme d’atmosphère devient étouffant dans de nombreux quartiers, on n’ose jamais vraiment regarder en face l’antisémitisme très répandu dans les pays maghrébins, et sa diffusion dans notre population via l’immigration… Etude après étude, les études de l’IFOP démontrent pourtant que non contents de contester certains fondamentaux républicains, près de la moitié de nos compatriotes musulmans souscrit aux clichés antisémites.
Kamala Harris à la fin de la Convention nationale démocrate, Chicago, le 22 août 2024. Erin Hooley/AP/SIPA
La Convention nationale démocrate à Chicago vient de compléter la transformation de Kamala Harris de Vice-présidente mal connue en candidate sérieuse à la présidence des Etats-Unis. Le Parti démocrate semble avoir le vent en poupe. Reste que Mme Harris a toujours besoin de convaincre une majorité des électeurs qu’elle sera compétente sur les dossiers de l’immigration et de l’économie. Analyse de Gabriel Robin.
Au mois de janvier dernier, désabusée, Nikki Haley déclarait devant ses militants aux primaires républicaines : « Le premier parti à se débarrasser de son candidat gériatrique gagnera ». Les démocrates ont tiré les premiers en poussant Joe Biden à se retirer de la course à sa propre succession. Fragilisé, considéré comme trop âgé, Joseph Robinette Biden Jr a dû se résoudre à abandonner le combat pour la première fois de sa longue et riche vie politique. Et il faut bien admettre que les premiers effets de ce retournement spectaculaire de situation se font déjà sentir. Une vague médiatique semble pousser Kamala Harris depuis lors, ainsi que la convention nationale du Parti démocrate l’a encore montré en cette fin de mois d’août. Pour autant, peut-on dire que l’élection soit déjà jouée et que Donald Trump connaîtra de nouveau le sort de l’élection de 2020 ? Rien n’est encore moins sûr.
Une « Democratic National Convention » réussie mais sans éclat particulier
Les Américains ont, on le sait bien, le sens du spectacle. Organisée au United Center de Chicago, où joue la célèbre équipe de basket des Bulls, la convention nationale du Parti démocrate a réuni tous les ingrédients nécessaires pour une formation politique en ordre de bataille. La ville de Michael Jordan et d’Al Capone, fief historique des époux Obama, est un bastion du parti à l’âne qui a servi d’écrin aux ambitions d’une femme aussi exposée que finalement toujours méconnue. Kamala Harris a beau avoir été pendant quatre ans la vice-présidente des Etats-Unis, elle est restée ce temps-là dans l’ombre de Joe Biden, ne se distinguant guère. Bénéficiant d’un charisme indéniable et de l’aura de son ancienne fonction de procureure générale de Californie de 2011 à 2017, Kamala Harris a tout du personnage dont raffole Hollywood. Métisse d’un père d’origine caribéenne et d’une mère indo-américaine, elle pourrait aussi devenir la première femme à accéder à la fonction suprême.
Elle est désormais soutenue par tout son parti. Peu enchantés à l’idée de la voir entrer à la Maison-Blanche, les Obama se sont pliés à la réalité et sont apparus souriants pour encourager leur candidate. Ils n’étaient d’ailleurs pas les seuls, puisque la plupart des caciques du parti sont montés sur la scène du United Center pour appeler à la mobilisation générale. Bill Clinton a ainsi pu amuser en se moquant de l’âge de Donald Trump… Peu élégant, mais de bonne guerre après ce que Biden a subi en la matière. Depuis un mois, les dons affluent aussi. Pour le seul mois écoulé, les Démocrates ont reçu plus de 100 millions de dollars de contributions, investis majoritairement dans des spots publicitaires épiques et manichéens. Des chiffres supérieurs à ceux de Trump qui donneront le tournis à des esprits français habitués à des campagnes électorales bien moins dispendieuses.
Le discours de clôture de Kamala Harris aura été globalement réussi, mais il ne restera pas dans les annales. À dire vrai, les observateurs auront surtout été surpris par la qualité de celui dont Joe Biden a gratifié l’audience bien plus que par celui de Mme Harris. Sans être empruntée, cette dernière est apparue assez mécanique, sans idées fortes majeures. Obama avait prospéré avec des propositions chocs, comme l’Obamacare, et sur le slogan « Yes we can », qui ne l’était pas moins. On se souvient tous aussi de la force de Donald Trump en 2016 qui multipliait les saillies et cris de ralliement, tels que « Build the wall » qui est resté dans les mémoires. Le sujet de l’immigration clandestine sera, notons-le, toujours au cœur de cette campagne 2024, alors que les Etats-Unis ont subi une vague impressionnante d’entrées ces dernières années. Les Démocrates ont été fortement critiqués pour leur gestion du problème et Donald Trump entend bien capitaliser dessus. On le constate, la partie n’est pas finie et les Démocrates sont toujours, comme l’a rappelé Kamala Harris elle-même, les « underdogs » de ce scrutin. Reste néanmoins qu’une vague médiatique les porte. La candidature de Kamala Harris a ressuscité un enthousiasme qui était absent pour Joe Biden. Le merchandising se vend énormément et Kamala Harris paraît extrêmement déterminée. Elle doit accomplir un exploit au terme d’une campagne express. Moins clivante que Donald Trump, candidat bénéficiant d’une forte adhésion auprès de sa base et d’un fort rejet dans d’autres segments de la population, elle est aussi perçue comme moins crédible sur des items extrêmement importants pour les électeurs indécis : l’économie et l’immigration.
Élargir la base : des choix de vice-présidents débattus
Les choix des vice-présidents étaient déterminants cette année. Donald Trump a fait le pari de partir avec JD Vance, ancien républicain « never Trumper » qui a tourné casaque. Auteur d’un livre de mémoires intitulé Hillbilly Elégie, qui a notamment été adapté sur Netflix, JD Vance vient de cette Amérique « périphérique » et déclassée de la Rust belt anciennement démocrate mais qui avait aidé Trump à l’emporter en 2016, soumise aux tourments des opiacés et de la vie en caravanes. Son autobiographie touchante, narrant l’ascension d’un jeune homme né dans la difficulté, la pauvreté et la toxicomanie familiale, a fait de lui un célèbre personnage public. Avec l’aide du milliardaire « transhumaniste » Peter Thiel, pour qui il a travaillé et qui a financé sa carrière politique, il a ensuite été élu plus jeune sénateur des Etats-Unis dans la circonscription de l’Ohio.
Sur le papier, son profil semblait donc idoine pour Donald Trump, cumulant deux qualités utiles à son élection : un lien avec les financiers de la Silicon Valley et un fort ancrage populaire dans l’Amérique du Midwest où se trouvent plusieurs « États pivots » indispensables à l’obtention d’un nombre suffisant de grands électeurs. La réalité s’est montrée bien plus décevante. Peu à l’aise, JD Vance est la cible de moqueries pour ses discours souvent jugés ratés. Il est aussi perçu comme ambigu politiquement. Sa saillie sur les femmes célibataires vivant avec leurs chats a ainsi été très mal reçue. En outre, son passé d’ancien marine de la « Génération Z » traumatisé par la guerre d’Irak lui a donné une vision sûrement biaisée des réalités géopolitiques de son temps. Fasciné par les milieux conservateurs européens, singulièrement hongrois, il donne à penser que Donald Trump ne cherchera pas à aider le peuple ukrainien dans la défense de sa souveraineté contre l’armée de Poutine. Le retrait de Robert Kennedy Junior, fils de Bobby, en faveur du ticket Trump–Vance, ne démentira pas ce sentiment… En réponse, Kamala Harris a désigné Tim Walz. Le gouverneur du Minnesota, tenant de l’aile gauche du Parti démocrate, grand défenseur du droit à l’avortement, sujet qui sera aussi capital dans plusieurs « swing states », incarne aussi cette Amérique « moyenne » et populaire. Issu du monde de l’éducation, il est aussi renommé pour son franc-parler et ses facilités de communication sur le terrain. On a d’ailleurs pu le constater lors de la DNC, où il a déclaré « être un meilleur tireur que la grande majorité » des élus républicains mais vouloir protéger les enfants contre la prolifération des armes et les tueries en milieu scolaire.
Un élan et une campagne qui peinent à retrouver un second souffle
S’il est toujours difficile d’établir des parallèles historiques sans commettre d’anachronismes, cette élection accuse quelques ressemblances avec l’élection présidentielle de 1968. Outre le contexte international et les questions de société qui divisaient alors l’Amérique et la divisent encore aujourd’hui, comme si la parenthèse des « civil rights » n’en avait jamais été une mais bien plutôt une révolution permanente, les « faits de jeux » sont proches. En 1968, Lyndon Johnson, qui fut le vice-président de John Fitzgerald Kennedy, avait fini par se retirer au profit de son vice-président Hubert Humphrey finalement battu par le républicain Richard Nixon devançant sur le fil lors des primaires un certain Ronald Reagan. L’élection avait aussi été marquée par l’assassinat de Bobby Kennedy à qui la victoire était promise.
De quel côté penchera le balancier cette fois-ci ? Donald Trump n’est pas comme Nixon une surprise. Il en est à sa troisième campagne d’affilée. La première fut triomphale. La seconde s’acheva par un scandale qui faillit mettre un terme à son aventure politique. Pour gagner, les démocrates doivent être très au-dessus dans le vote populaire. De fait, l’élection de 2020 fut extrêmement serrée, se jouant à quelques milliers de voix dans plusieurs « swing states », alors que Biden jouissait d’une avance de 7 millions de voix dans le vote populaire. Entre 1992 et nos jours, aucun Républicain n’a eu le vote populaire hormis Bush en 2004 contre John Kerry. La répartition du collège électoral favorise les Républicains. Il faudra donc que Kamala Harris bombarde les 7 « swing states » où l’élection se jouera : l’Arizona, le Nevada, le Wisconsin, le Michigan, la Géorgie, la Pennsylvanie et la Caroline du Nord. En 2020, Biden avait créé la surprise en Géorgie. Elle pourrait se répéter. Il l’avait aussi emporté dans le Michigan, en Pennsylvanie et dans le Wisconsin, alors que Trump y avait battu Clinton en 2016.
La différence est que l’attrait de la nouveauté semble bénéficier aux Démocrates. Axée plutôt sur le « bashing », la campagne de Donald Trump risque de mobiliser les siens mais pourrait effrayer l’électorat indécis. Un pronostic : si Harris rassure sur l’économie et l’immigration, elle gagnera avec une large avance. Réponse en novembre.