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La croisière des Indignés

Flottille pour Gaza: le ridicule ne tue pas


La croisière des Indignés
Orly, 8 octobre 2025 © Cesar VILETTE/SIPA

En ce jour d’espoir, alors que le cessez-le-feu s’installe à Gaza et qu’une poignée d’otages survivants vont, après deux années en enfer, retrouver enfin leurs familles, offrons-nous un petit retour sur la dernière bouffonnerie en date.


Ils sont partis d’Espagne ou d’Italie, keffieh autour du cou, drapés dans la ferveur mystique de Croisés sans Dieu.

Les voiles gonflées d’aise, la « flottille pour Gaza » voguait vers le Levant chargée d’une petite armée de militants – dont les inévitables Greta et Rima – persuadés de servir le Bien en se précipitant vers les nouveaux « damnés de la Terre ». Les seuls qui vaillent qu’on prenne son baluchon et ses RTT.

Ces militants repus de bonne conscience ne défendent pas la justice, ils s’enivrent de leur imposture morale. Que pèsent pour eux les hécatombes africaines, la stérilisation des femmes ouïghoures, les pendaisons d’opposants iraniens ou le sort des jeunes filles sous les Talibans ?

Ces pèlerins ne sont ni des martyrs ni des apôtres, mais les produits d’une indignation subventionnée. En quête d’une auréole médiatique, ils ont foncé vers Gaza comme d’autres vers Compostelle. Non pour une cause, exploitée jusqu’à la corde par les djihadistes du Hamas, mais pour se contempler eux-mêmes.

Et quand ils pleurent, ce ne sont pas les pauvres Palestiniens qu’ils pleurent – ceux-là pouvaient bien crever du jusqu’au-boutisme de leurs chefs planqués dans les tunnels ou les hôtels de Doha -, mais leur propre impuissance.

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L’indignation réflexe est devenue leur profession de foi. Ils ont troqué l’Évangile pour le catéchisme de l’anticolonialisme et s’imaginent lutter contre le Mal parce qu’ils ont besoin d’un Mal pour exister. D’où leurs complaintes sur les prétendues maltraitances subies dans les geôles israéliennes, ultime rite d’une liturgie victimaire.

À bien y regarder, ces braves gens qui ont osé se dire « otages » pour avoir été retenus durant quelques heures avant d’être expulsés, détestent Israël non pour ce qu’il fait – sa riposte sans merci aux massacres effroyables du 7 octobre -, mais pour ce qu’il est. Non pour les fautes qui lui sont reprochées, mais pour sa force.

François Furet l’avait bien vu avant tout le monde : « La gauche européenne a cessé d’aimer Israël le jour où elle a cessé d’aimer la liberté. » Et ceux qui la défendent contre les tyrannies orientales.

Israël les offense par son existence même, parce qu’il dément leur rêve d’un monde où les vaincus resteraient vaincus, et les Juifs d’éternels soumis. Sa vitalité leur est un scandale car, malgré ses tensions internes et ses débats brûlants – ceux d’une démocratie en guerre -, ce n’est pas Israël qui a changé, c’est l’Occident qui a renoncé à ce qu’il est.

Gageons que la fin annoncée de la guerre à Gaza ne leur permettra pas de sortir si facilement du schéma moral binaire dans lequel les gauches européennes – particulièrement la française, hélas inféodée aux propagandistes – se sont enfermées.



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