Pays-Bas. M. Wilders quitte la coalition gouvernementale parce que ses partenaires ont refusé de signer un plan très strict sur l’immigration qu’il voulait imposer rapidement. Il n’est pas certain que cette stratégie renforce ou affaiblisse sa position en vue de nouvelles élections, raconte notre correspondant.
L’équipe de rêve de la droite néerlandaise, avec M. Geert Wilders comme Premier ministre fantôme, s’est écroulée après 11 mois et un jour de bisbilles internes interminables.
Mardi 3 juin, Geert Wilders a brusquement retiré les ministres de son Parti pour la Liberté (PVV) de la coalition gouvernementale quadripartite qui avait promis, menacé ont dit certains, de mener la politique d’immigration et d’asile la plus sévère que le pays ait jamais connue.
Les Pays-Bas de nouveau plongés dans l’incertitude
Wilders avait exigé la signature des trois dirigeants des partis « amis » au bas de son programme en dix points renforçant encore la politique migratoire. Et cela en envoyant l’armée aux frontières à la chasse aux clandestins, en rendant impossible toute réunification familiale et en fermant autant de foyers de demandeurs d’asile possible.
Quand les partenaires ainsi malmenés ont refusé de signer, M. Wilders a annoncé mardi matin le retrait de ses ministres, plongeant le pays dans l’incertitude. Visiblement sous le choc, les partenaires éconduits ont accusé M. Wilders de se comporter en kamikaze. Ou, pire, de préparer le retour de la gauche en cas d’élections anticipées…
Et dire que cela avait si bien commencé pour la droite quand, fin 2023, le PVV de M. Wilders était devenu de loin le plus grand parti aux législatives. Après de laborieuses négociations, le leader populiste avait conclu en juin 2024 un accord gouvernemental avec les libéraux du parti VVD, le Mouvement Citoyens-Paysans (BBB) et le Nouveau Contrat Social (NSC). Assurée d’une majorité confortable au Parlement, la coalition l’était également de dissensions internes. Le NSC, scission du parti chrétien démocrate, avait le plus hésité à rejoindre M. Wilders, accusé de racisme antimusulman après avoir exprimé le souhait de voir moins de Marocains aux Pays-Bas. Puisque grand vainqueur des élections, M. Wilders aurait dû être nommé ministre selon une tradition bien établie. Ce qui aurait posé un problème pour un homme qui, depuis 2004, vit sous des menaces de mort d’organisations islamistes, et sous stricte protection policière. En plus, on peut parier que le monde arabo-musulman ne l’aurait pas porté dans son cœur. Et que dire des réactions des « jeunes des quartiers », vus par M. Wilders comme de la racaille, tout comme d’ailleurs de celles des journalistes ?
Au revoir, M. Dick Schoof
En lieu et en place de M. Wilders, c’est donc M. Dick Schoof, ancien dirigeant de services de sécurité, sans étiquette, qui fut nommé Premier ministre. Le pauvre ! Au Parlement, M. Wilders n’a jamais manqué l’occasion de le rabrouer pour son inexpérience. Drôles de scènes parlementaires, où Wilders se comportait tantôt en Premier ministre fantôme, tantôt en adversaire du véritable et éphémère dirigeant du gouvernement.
En cas de probables élections législatives anticipées, comment jugeront les fans de M. Wilders son sabordage d’un gouvernement qui avait éveillé tant d’espoirs à droite ? Au sein de son parti, c’est le silence total ce mardi matin. Toute critique du chef omniscient y revient à un renvoi immédiat. Et même si M. Wilders devait connaître un second triomphe électoral, de potentiels partenaires gouvernementaux y réfléchiront cette fois à deux fois avant de lier leur sort à celui qui peut ainsi les lâcher sur un coup de tête.