Accueil Féminisme « Fraternité » et « droits de l’Homme » supprimés : la Constitution inclusive est née

« Fraternité » et « droits de l’Homme » supprimés : la Constitution inclusive est née

Et autres absurdités proposées par le Haut conseil à l'Egalité


« Fraternité » et « droits de l’Homme » supprimés : la Constitution inclusive est née
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Une instance officielle, le Haut conseil à l’Egalité entre les femmes et les hommes, a très sérieusement proposé le remplacement des termes « droits de l’Homme » et « fraternité » dans la Constitution. Mais ce n’est pas – et de loin – la seule absurdité de l’avis qu’il a publié…


La guerre des sexes lancée par l’affaire Weinstein a consacré l’existence d’un nouveau féminisme militant qui affiche un certain nombre de caractéristiques pouvant toutes se rattacher à une idéologie organisée autour d’une représentation du monde. Cette représentation en analyse la marche comme étant structurée par une « dictature patriarcale » dont l’objectif naturel est de maintenir la domination millénaire des créatures humaines de sexe masculin sur l’ensemble de la nature, en commençant bien sûr par les créatures humaines de sexe féminin. Marx pensait que le moteur de l’Histoire était la lutte des classes et que l’émancipation des hommes et des femmes étaient inséparables. Eh bien non, nous disent les tenants du néo-féminisme, dans un rapport au réel faussé par leur pensée magique et tournant le dos à toute rationalité. La dictature du patriarcat n’est due qu’à la nature des hommes à peu près tous prédateurs et violeurs, comme l’affirme tranquillement Caroline de Haas.

La République des femmes

La publication de l’avis du Haut conseil à l’Égalité entre les hommes et les femmes nous fait une nouvelle démonstration de la construction et de la prégnance dans certains milieux de cette idéologie qui maquille la réalité et engendre des comportements de sectes. Cette docte institution a décidé de se mêler de la révision de la Constitution que vient de décider Emmanuel Macron. Pauvre Constitution de la Ve République déjà en lambeaux après la vingtaine de révisions dont elle a été l’objet. Pour nos sommités, dont on pouvait peut-être attendre un peu plus de réflexion, il faut faire encore pire. J’invite à s’imposer l’épreuve de la lecture de cette pesante enfilade d’absurdités.

Nous n’examinerons ici que quelques-unes de ces propositions de révision présentées sans rire. En rappelant quand même à quoi sert une Constitution : organiser le fonctionnement des pouvoirs publics.

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Il faut, nous dit-on « consacrer l’égalité entre les femmes et les hommes dans la Constitution », en en modifiant ainsi l’alinéa 1 de l’article 1 : « La France assure l’égalité devant la loi de toutes les citoyennes et tous les citoyens sans distinction de sexe, d’origine, de race ou de religion, sans préjudice des mesures prévoyant des avantages spécifiques destinés à assurer concrètement une pleine égalité ou à compenser des désavantages subis par le sexe sous représenté ou discriminé. » Justement, l’avantage du concept de citoyen, c’est que, juridique, il englobe tout le monde et contient en lui-même, ce qui est décisif, le principe d’égalité. Comment ne pas voir que cette proposition de rajout ne fait que l’affaiblir ?

Le néo-féminisme contre les « droits de l’Homme »

Il y a aussi cette obsession à vouloir supprimer dans le préambule et à l’article 53-1, le terme « Droits de l’Homme ». Parce que « celui-ci désignerait étymologiquement, historiquement et juridiquement la moitié du peuple seulement ». C’est simplement une énormité, l’étymologie c’est le mot « Homo » qui désigne un « genre », en l’occurrence celui qui rassemble toutes les espèces humaines du genre Homo, qui sont aujourd’hui éteintes sauf Homo sapiens (nous). Qui peut considérer que cette formulation scientifique, traditionnelle et surtout très claire exclurait du peuple français les citoyennes femmes?

Venons-en à la revendication selon laquelle la Constitution devrait utiliser « une écriture égalitaire ». Au secours, revoilà le charabia inclusif ! Celui qui considère que c’est le langage qui forme la pensée et pas le contraire, parce que nous dit-on il faut « que la Constitution s’adresse autant aux femmes qu’aux hommes et les concerne également, en utilisant selon la forme la plus adaptée : soit la double flexion (« les ambassadeurs et ambassadrices ») soit des termes épicènes ou englobant (« l’électorat ») soit le point médian (« les député.e.s »). » Bien sûr, en ce moment, faute de termes épicènes les citoyennes françaises ne savent pas que la Constitution les concerne.

La République universelle, ça c’était avant…

Il y a pire, car ce cher Haut conseil invite à mener « une réflexion sur l’usage du terme « fraternité » dans la devise de la République, qui exclut les femmes de la communauté politique… Des alternatives pourraient, par exemple, être les termes « d’adelphité », de « solidarité », etc. ». Devrais-je considérer que femme, je me sens totalement exclue de la communauté politique à cause de cette devise adoptée en 1789 ? Je sais pourtant qu’elle est un formidable symbole d’universalité et un message envoyé au monde à ce moment-là avec les conséquences que l’on connaît. Comment ne pas être atterrée par tant de niaiserie et d’ignorance ?

Il y a aussi bien sûr les exigences antidémocratiques de constitutionnaliser « le partage du pouvoir (partage réel des postes et également des responsabilités) entre les femmes et les hommes dans toutes organisations politiques, professionnelles et sociales ». Vous avez bien lu, on veut imposer la parité dans toutes les organisations qu’elles soient publiques ou privées. Dans les institutions, cela a incontestablement permis un rééquilibrage souhaitable, quoique la féminisation du personnel politique n’ait pas, jusqu’à présent, produit des résultats ébouriffants. Mais dans les organisations privées ? Partis politiques, syndicats, sociétés commerciales, associations, clubs, parité obligatoire aussi ? A quand dans les familles ? Avec la PMA, ça devrait pouvoir le faire. Vous avez deux garçons, Madame ? Bien, maintenant il faut faire deux filles. Décidément, le néo-féminisme déteste les libertés et cultive la bêtise.

Ambassadeurs, ambassadrices, Belges, Belges

Dans le souci de « garantir un réel partage du pouvoir entre les femmes et les hommes » il faudrait aussi imposer la parité pour chacune des nominations prévues par la Constitution. Préfets, ambassadeurs, haute fonction publique, on va donc remplacer les critères de compétence, de pertinence, de dévouement, de diplômes, par le critère du sexe. De cette excellente idée retenons l’obligation qui serait faite au président de la République, au président de l’Assemblée nationale et à celui du Sénat de renoncer à leur liberté de choix pour le Conseil constitutionnel. La nomenclature, comme dans la défunte URSS, il n’y a que ça de vrai vous explique-t-on. À propos camarades, chaque promotion de l’École nationale de la Magistrature (ENM) comprend 80 % de femmes. Faudrait-il faire des concours séparés pour restaurer une parité dans l’autre sens ?

Ayant appris que certains clubs de football féminin recevaient proportionnellement moins de subventions que certains clubs masculins, notre Haut conseil, fort contrarié, veut que la gestion des budgets de la nation vise d’abord l’égalité des femmes et des hommes. Cet objectif devenant absolument principal et se retrouvant à tous les coins de phrases d’un texte déjà fort long. Devenant ainsi la raison d’être de la République. Et portant atteinte au passage à certains principes. Comme par exemple l’article 72, qui consacre la libre administration des collectivités territoriales. « Les collectivités territoriales bénéficient de ressources dont elles peuvent disposer librement dans les conditions fixées par la loi et en visant l’égalité des femmes et des hommes dans leur gestion budgétaire. » Nos idéologues ne perçoivent pas la contradiction qu’il y a à reconnaître une liberté d’administration tout en lui donnant à l’avance une contrainte directement politique. Les collectivités territoriales exercent leurs compétences par l’intermédiaire des élus, pour le compte des citoyens (hommes et femmes) qui les ont choisis. Cela s’appelle la démocratie.

Le droit à la vie « sans violence sexiste et sexuelle »

C’est justement de celle-ci dont la docte institution se méfie. Comme de la peste. Dans sa recommandation n°8, elle demande de « consacrer le droit à la contraception et à l’avortement ainsi que le droit à une vie sans violence sexiste et sexuelle ». Grosse ficelle, qui vise à sanctuariser dans le préambule le droit reconnu d’avoir recours à l’avortement dans des conditions organisées par la loi. La loi Veil et ses aménagements ont constitué un important progrès en permettant aux femmes de maîtriser leur maternité. Cet acte n’est cependant jamais anodin et pose, qu’on le veuille ou non, beaucoup des problèmes philosophiques ou moraux. Il a cependant fait l’objet d’une décision souveraine du Parlement français. Et heureusement, il n’y a aucune chance qu’on en revienne. Vouloir en faire de façon proclamatoire, un droit fondamental de l’Homme est d’abord une provocation. Ensuite, cette demande de sanctuarisation montre la défiance vis-à-vis de la souveraineté populaire. Pour faire bonne mesure et faire passer la pilule, on va enfoncer une porte ouverte et accoler dans la même phrase cette proposition : « Le droit à une vie sans violence sexiste et sexuelle ». Les violences autres que sexistes et sexuelles, on peut les infliger alors ?

Tout, dans ce rapport et ses propositions, caractérise une démarche idéologique et sectaire. Qui propose de dénaturer notre texte fondamental en le déséquilibrant, et en y incluant des choses qui n’ont rien à y faire si ce n’est de ramener obsessionnellement le fonctionnement de la société française à une forme de dictature violente dont 30 millions de citoyennes seraient les victimes. Et à laquelle il conviendrait de mettre fin. La Constitution de la République n’est pas un tract.

Cinq millions de chômeurs, neuf millions de citoyens sous le seuil de pauvreté, des territoires perdus où les femmes n’ont le droit de sortir que voilées, une société fracturée et violente, tout ceci n’a aucune importance, ce qui compte c’est de réécrire la Constitution avec des points milieu et de proclamer « l’adelphité ».

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Avocat à la Cour de Paris, spécialisée dans la protection de l’enfance et le traitement de la délinquance sexuelle

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