Plenel donne une leçon de déontologie… dans Closer


Plenel donne une leçon de déontologie… dans Closer

edwy plenel closer philippot

 « Vous travaillez pour Closer ? », « Non, Causeur ». La scène s’est répétée mille fois et ne laisse pas d’amuser l’à-quoi-boniste qui écrit ces lignes. Bon, avouons-le, dans ces cas-là, j’ai tendance à rectifier le tir en précisant derechef  à mon interlocuteur que nous ne partageons ni la ligne éditoriale, ni le tirage, ni – hélas – les émoluments de nos confrères.

J’ignore si Edwy Plenel, en pleine promotion de son livre sur le Rainbow warrior, a sursauté lorsque Closer lui a demandé un entretien. Avec son art du faux contre-pied, le PDG de Mediapart vomit votre magazine préféré mais adresse un satisfecit en règle à son quasi-homonyme boulevardier. L’interview publiée il y a maintenant un mois (désolé pour le retard, il me reste une pile de Voici à feuilleter) a de quoi laisser pantois. Laurence Pieau et Maëlle Brun y passent le célèbre moustachu à la question, avec une impertinence qui a dû la lui défriser : « La vraie mission de la presse est de révéler ce que les pouvoirs voudraient garder caché. Hors Mediapart, qui le fait aujourd’hui ? ». Plus brave et irrévérencieux que la bande à Plenel-Arfi, tu meurs ! La preuve, « un de vos journalistes (…) est le seul à ne pas se lever lors d’une conférence de presse à l’arrivée du Président » : on n’avait pas admiré pareil courage depuis les provocations antibolchéviques de Boulgakov sous Staline…

Grâce à cette tribune, l’ancien patron du Monde pavoise son domaine aux couleurs de l’indépendance, partant du principe qu’« en France, le journalisme est trop souvent compromis avec les pouvoirs, politiques ou économiques ». Fort bien, mais quid du pouvoir des juges, de la brigade financière et des médias qui s’en font le relais, notamment au cours de ces coups de Jarnac dans lesquels Mediapart n’a, bien entendu, jamais trempé ? On aurait apprécié une question de relance mais ne rêvons pas, pour Plenel, l’occasion était trop belle de pourfendre le monarchisme français, comme si l’Elysée détenait autre chose que l’autorité, laquelle a de moins en moins à voir avec le (vrai) pouvoir.

Mais je suis mauvaise langue. Lorsqu’ils entrent dans le vif du sujet, nos deux Closer osent une pointe d’audace : « Où placez-vous le curseur entre privé et public ? »  En v’là une question qu’elle est bonne, et pas seulement parce que Mitterrand et Chirac ont longtemps caché leurs petits et gros bobos de santé. À cette interrogation essentielle, Edwy Plenel répond par une sentence aussi floue que définitive : « Tout ce qui est d’intérêt public doit être public. C’est notre loi fondamentale [Ndr : Qui l’a votée, en dehors du comité de rédaction de Mediapart ?] ». Sa sophistique fait rimer déontologie et tautologie (« la frontière est parfois brouillée, notamment quand on a du pouvoir, et que le pouvoir est utilisé au profit de la sphère privée ») mais souffre heureusement quelques exceptions, comme Mazarine, dont Plenel a tu l’existence du fait de son jeune âge. « Aujourd’hui encore, j’agirais de la même façon », jure-t-il. Ouf, on respire !

Logiquement, s’agissant des histoires de fesses, les mêmes causes devraient entraîner les mêmes effets. Peut-être doit-on imputer à l’extrême courtoisie de Plenel, qui n’aime rien tant qu’abonder dans le sens de son hôte – vilains réacs exceptés – la mansuétude dont il gratifie Closer. Car, reçu au cœur du temple de la paparazzade, le guide suprême de la République transparente creuse une nouvelle brèche dans sa morale : « Je cite souvent l’exemple de ce politique au discours officiel très homophobe [Ndr : Lequel ? des noms ! Les ratonneurs de folles ne courent pas la salle des quatre colonnes] » qui s’est avéré en être. « Que faire ? Jusqu’à récemment, je me disais que je ne le révélerais pas, car c’est sa part de contradiction intime. » Rassurez-vous, le vengeur démasqué a « évolué grâce à l’équipe de Mediapart, dont l’un des membres est cofondateur de l’association des journalistes LGBT : ils ont jugé légitimes vos révélations [Ndr : sur Florian Philippot, car les membres du Front national devraient être moins égaux que les autres.], s’étonnant que l’homosexualité soit automatiquement reléguée à la sphère privée, quand l’hétérosexualité, elle, est toujours publique » En cauchemar, un cheikh saoudien me faisait récemment la même remarque : pourquoi se priver d’une police des braguettes ? Sortons tous les homos de droite du placard. Cela mettrait Mediapart, Act up, Closer et Rivarol d’accord. Un petit miracle signé Plenel!

P.S : Vous vous demandez peut-être ce que je pense de Closer – le comité de salut public baptisé Mediapart, Causeur en disserte depuis belle lurette… Inutile d’épiloguer, notre ami Jean-Louis Murat a déjà tout dit, et fort éloquemment, il y a une dizaine d’années face à Laurence Pieau. Celle-ci semble avoir enfin trouvé son « signifiant » en la personne de Plenel. Loué soit-il.


Jean Louis MURAT (france2) par guillaume-s

*Photo: Sipa. N° reportage : 00708759_000106.



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est journaliste.

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