Contre les féministes, osons le marquis de Sade!


Contre les féministes, osons le marquis de Sade!

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En 1993, j’étais peinard. Je cultivais mon jardin, c’est-à-dire que je m’occupais de mes gosses, de mes articles, et aussi des représentantes du sexe féminin dont certaines me voulaient du bien. En 1993, je regardais encore la télé, surtout à cause des enfants. Certes, je n’aimais pas les pubs. Mais, pour l’une d’elles, j’aurais donné tout l’or du monde. On y voyait un homme, genre jeune cadre élégant et moderne au volant d’une superbe automobile, une Audi je crois. Il roulait très lentement. Une fille regardait la voiture. Puis l’homme. Puis encore la voiture. Puis encore l’homme. Et, en fond sonore, il y avait une voix enveloppée dans un velours comminatoire : « Il a le pouvoir, il a l’argent, il a la voiture, il aura la femme ! » Fascinée, obéissante et soumise, la fille répétait en écho : « Il aura la femme ! » Et, conquise, elle montait dans la voiture.

La fille était bouleversante. Un mélange d’Anouk Aimée et de Fanny Ardant telles que les ont gardées Lola et La Femme d’à côté, jeunes et belles pour l’éternité. La pub fit aboyer les Chiennes de garde. Elle fut retirée. Jamais, moi qui ne demandais rien à personne, je n’avais été agressé avec une telle violence. Elles avaient tué la beauté d’Anouk Aimée et de Fanny Ardant, victimes expiatoires de la haine de féministes laides et repoussantes : laides et repoussantes dans leur tête, car pour le corps je ne sais pas, et je n’ai pas la moindre envie d’aller voir.[access capability= »lire_inedits »]

Oui, pour moi, le péché originel du féminisme date de 1993, annus horribilis. Depuis, c’est la guerre. Et ce n’est pas moi qui ai commencé. J’aime les filles, pas trop les femmes (ce mot est anxiogène) et pas du tout les féministes. J’aime Anouk Aimée et Fanny Ardant. Encore plus depuis qu’on les a assassinées. J’aime Vinca, 15 ans, jeune-fille en herbe, et aussi la Dame blanche, plus âgée et plus experte, qui aida Phil à faire ses premiers pas d’homme dans la vie. J’aime Yvonne de Galais, fragile comme un rêve, qui se donna au Grand Meaulnes avant de mourir. J’aime, je le répète, les filles et pas trop les femmes. Ce n’est pas une question d’âge. Il y en a qui à 18 ans portent toute la lourdeur accablante des femmes et d’autres qui, à 60 ans, ont la grâce juvénile des jeunes-filles.

Vous, les féministes, je ne vous aime pas du tout. D’Éros et Thanatos, vous n’avez gardé que Thanatos. Vous êtes de gauche. Il y a une gauche bien élevée et cultivée parfaitement fréquentable, mais minoritaire et timide. On ne l’entend jamais. C’est la gauche vulgaire, arrogante, obtuse et douillettement emmitouflée dans sa bêtise triomphante qui occupe le devant de la scène. C’est ainsi que vous êtes.

Vous êtes de gauche, et, bien naturellement, vous vous intéressez aux deux révolutions qui ont changé la face du monde. De 1789 et de 1917, vous avez pris ce qui vous a paru le meilleur. Le rasoir national, la guillotine des enragés hébertistes. La balle dans la nuque des tchékistes, vos amants virtuels. Vous détestez le catholicisme, et vous lui avez pris ce qu’il avait de pire : l’Inquisition et ses bûchers. Les Torquemada et les Savonarole en jupon sont chez vous légion.

À la guerre comme à la guerre. Par tous les moyens qui excluent tout respect de la Convention de Genève. Par tous les moyens, car vous le valez bien. Pourquoi vous ménagerait-on ? Vous avez ajouté à votre sinistre aigreur une hypocrisie sans nom qui vous disqualifie à jamais et qui autorise contre vous tous les procédés, même immoraux.

Vous a-t-on entendues quand Pierre Bergé a déclaré que « les femmes pouvaient bien louer leur ventre, puisqu’elles louaient déjà leurs bras » ? Rien. Pas un cri. Même pas un petit murmure de désapprobation. Parce que Pierre Bergé est millionnaire, de gauche et homosexuel. L’homme moderne, « in », « hype », comme vous l’aimez.

Quand on a inauguré dans les jardins du château de Versailles une structure (ça évite de dire sculpture) baptisée par son auteur « Le Vagin de la reine », vous vous êtes tues. Et pourtant le machin en question avait de quoi vous faire vomir. Un énorme entonnoir. Un gigantesque sonotone à l’ancienne. Un monstrueux schofar à rendre sourd Yahvé (si vous ne savez pas ce que c’est, demandez à un ami juif). Et vous n’avez rien dit. Pourquoi ? Parce que ladite structure a reçu la bénédiction de Fleur Pellerin et de tous les « artistes subversifs » qui sont de la même tribu politique que le bien-aimé Pierre Bergé.

Vous comprendrez donc que vous ne pouvez en aucun cas bénéficier de la protection des lois de la guerre. Contre vous tout est permis. Y compris les armes de destruction massive, y compris la plus redoutable, imparable effaceuse de conneries : « Français, encore un effort si vous voulez être républicains » est un chapitre d’un texte aussi fondamental à mes yeux que les deux Testaments ou le Manifeste du Parti communiste, La Philosophie dans le boudoir. Son auteur, le marquis de Sade, est un grand visionnaire méconnu (comme visionnaire, mais très connu par ailleurs).

Féministes, encore un effort si vous voulez être républicaines ! Écoutez le divin Marquis et baissez enfin la tête sous ce feu de napalm : « S’il devient donc incontestable que nous avons reçu de la nature le droit d’exprimer nos vœux indifféremment à toutes les femmes, il le devient de même que nous avons celui de l’obliger de se soumettre à nos vœux, non pas exclusivement, je me contrarierais, mais momentanément. Il est incontestable que nous avons le droit d’établir des lois qui la contraignent de céder aux feux de celui qui la désire ; la violence même étant un des effets de ce droit, nous pouvons l’employer légalement. Eh ! la nature n’a-t-elle pas prouvé que nous avions ce droit, en nous donnant la force nécessaire à les soumettre à nos désirs ? »

Le napalm ne vous suffit pas ? Voilà le vitriol ! « Tous les hommes ont donc un droit de jouissance égal sur toutes les femmes ; il n’est donc aucun homme qui, d’après les lois de la nature, puisse s’ériger sur une femme un droit unique et personnel. La loi qui les obligera de se prostituer, tant que nous le voudrons, aux maisons de débauche dont il vient d’être question, et qui les y contraindra si elles s’y refusent, qui les punira si elles y manquent, est donc une loi des plus équitables, et contre laquelle aucun motif légitime ou juste ne saurait réclamer»

Et pour conclure, un peu d’huile bouillante comme au bon vieux temps du Moyen Âge : « Un homme qui voudra jouir d’une femme ou d’une fille quelconque pourra donc, si les lois que vous promulguez sont justes, la faire sommer de se trouver dans l’une des maisons dont j’ai parlé ; et là, sous la sauvegarde des matrones de ce temple de Vénus, elle lui sera livrée pour satisfaire, avec autant d’humilité que de soumission, tous les caprices qu’il lui plaira de se passer avec elle, de quelque bizarrerie ou de quelque irrégularité qu’ils puissent être, parce qu’il n’en est aucun qui ne soit dans la nature, aucun qui ne soit avoué par elle»

Vous voyez ? Enfoncé !, ce pauvre timoré de Zemmour avec sa misogynie tiède comme un cataplasme. Sade, lui, avait une vision du monde. D’un monde meilleur, fait pour le bonheur de tous, et aussi, selon lui, de toutes. Un prophète mais, hélas ! pas un messie. Cette société de rêve qu’il appelait de ses vœux n’a pas vu le jour. Et le divin Marquis a fini enfermé à Charenton par Robespierre – un incorruptible, un pur, un puritain asexué. Vous êtes comme lui en pire. Lui coupait des têtes. Vous, vous voulez couper tout ce qui dépasse ! Et là, en tant qu’homme, je me sens concerné. Je ne veux pas être mutilé. Vous êtes des casse-couilles, vu l’ennui soporifique qui se dégage de vos litanies. Mais vous êtes aussi, pour les plus conséquentes et logiques d’entre vous, des coupe-couilles ! Et le marquis de Sade n’est pas de trop pour vous faire enfin plier.

Comme tout condamné à mort vous avez droit à un dernier mot. Sade, dites-vous, est vulgairement outrancier ? Certes. Mais, à tout prendre, je préfère ses outrances aux vôtres. Lui, au moins, il les fait avec la langue – une langue superbe et ambiguë dont vous ignorez décidément les délices.[/access]

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*Photo : Rue des Archives

Juillet-Aout 2015 #26

Article extrait du Magazine Causeur



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est journaliste et essayiste

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