Assad, otage consentant du Hezbollah


(Avec AFP) Le président syrien Bachar Al-Assad a reconnu mercredi pour la première fois que son armée avait subi des revers mais assuré que la guerre contre les rebelles n’était pas perdue. L’armée syrienne a perdu en un peu plus d’un mois Idleb et Jisr al-Choughour, deux villes importantes dans le nord, sur la route de la région côtière de Lattaquié, et dans le sud le dernier poste frontière qu’elle contrôlait avec la Jordanie. En outre, ses tentatives pour avancer dans la région de Damas se sont soldées par un échec face une rébellion unifiée. Sans reconnaître officiellement la perte de Jisr al-Choughour, il a rendu hommage aux 150 soldats qui sont assiégés par les rebelles fidèles à Al-Qaïda dans un hôpital du sud de la ville.

La série de défaites que la rébellion islamiste a infligé aux forces loyalistes syriennes s’explique en partie par l’alliance entre la Turquie, l’Arabie Saoudite et le Qatar, parrains de l’opposition armée, y compris du Front Al-Nosra, qui est l’émanation locale d’Al-Qaïda, tantôt alliée tantôt adversaire de l’Etat islamique. En face, la coalition entre l’armée syrienne, le Hezbollah, des milices chiites irakiennes et des Gardiens de la Révolution iraniens redouble d’efforts pour expulser les rebelles de la région de Damas et du massif montagneux du Qalamoun, aux abords de la frontière libanaise.

Le discours d’Assad intervient le lendemain d’une allocution du secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, reprenant mot pour mot sa rhétorique gaullienne : « nous n’avons perdu une bataille mais nous n’avons pas perdu la guerre ». Symbole de la subordination du régime syrien à la milice libanaise, sans laquelle Damas serait tombé depuis longtemps, ce mimétisme rappelle la fragilité d’un régime aux abois qui ne compte plus que sur le repoussoir de l’État islamique pour se racheter une légitimité. Militairement, la messe n’est cependant pas dite et dépendra de l’issue des grandes batailles du printemps (Qalamoun, Lattaquié, etc.). Ce paysage de guerre brumeux s’avère si confus que la diplomatie américaine souffle le chaud et le froid, John Kerry faisant de Bachar Al-Assad une partie de la solution syrienne, avant d’expliquer que seule sa chute permettrait d’abattre l’Etat islamique.

Le grand échiquier proche-oriental ignore le manichéisme. Car si Assad a en effet besoin de l’épouvantail islamiste pour se maintenir au pouvoir, rien ne dit que son éviction faciliterait les choses. Il est même permis d’imaginer le pire, c’est-à-dire un scénario catastrophe à la libyenne si la dictature baasiste venait à tomber. Que disait De Gaulle ? Ah oui, « les grands problèmes n’ont pas de solution ».

 



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