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Valence: un conseiller municipal allié des islamistes?

Islamisme, le déni des élus locaux: l’exemple inquiétant de la préfecture de la Drôme


Valence: un conseiller municipal allié des islamistes?
Le maire de Valence (26), Nicolas Daragon, ici photographié en mai 2020, est embarrassé par des révélations sur son conseiller délégué aux sports Adem Benchelloug © JEFF PACHOUD / AFP

Le Journal du dimanche a révélé le contenu explosif d’une note du renseignement territorial de la Drôme. Elle évoque des liens entre Adem Benchelloug, conseiller municipal et le mouvement radical des Frères musulmans, interdit dans de nombreux pays mais pas en France. L’émotion est grande dans la ville, mais le maire LR préfère soutenir l’élu dont l’opposition réclame la démission.


Pourquoi n’arrive-t-on pas à lutter contre la progression de l’islamisme et l’entrisme de ses militants dans les institutions ? Peut-être est-ce en raison d’un manque de doctrine claire sur le sujet chez les différents partis politiques et au sommet de l’État, du manque de réactivité des services de l’État et d’une forme de connivence chez des élus locaux plus soucieux de conserver leur pouvoir que d’exercer une mission d’intérêt général.

Adem Benchelloug est conseiller municipal en charge des sports et des équipements des quartiers depuis 8 ans. Photo: D.R.

À Valence, ce flou conceptuel a favorisé les manipulations d’un élu et d’une association liée aux frères musulmans. L’affaire est assez classique : une association dont le leader est lié à la mouvance frériste souhaite ouvrir une école « musulmane ». Il trouve une écoute bienveillante de la part de la municipalité qui sait que construction d’une mosquée ou ouverture d’une école musulmane lui assure le soutien de leaders communautaires dont l’influence est grande sur la communauté musulmane. La municipalité accepte alors de lui vendre un terrain. En général, à partir de là, l’affaire est conclue et rien ne vient troubler cette nouvelle idylle.

La préfète entend utiliser la nouvelle loi « séparatisme »

Sauf qu’à Valence, l’État local a réagi et la préfète, par courrier, a prévenu cet été le maire que l’association qui porte le projet d’école est liée au mouvement islamiste et que, dans le cadre de la loi séparatisme, elle fera ce qui est en son pouvoir pour empêcher cette installation. Elle est ici parfaitement dans son rôle. Certes, on peut déplorer qu’au niveau national l’Etat n’interdise pas clairement l’organisation des frères musulmans et qu’au niveau local, il ait réagi bien tardivement, mais le pire eut été qu’il n’agisse pas aujourd’hui pour faire oublier qu’il n’avait pas agi hier.

La question de la longue cécité de la préfecture n’est pas une question rhétorique car elle explique aussi la dimension qu’a prise le conflit. En effet, l’école coranique, dont la préfète a fait capoter le projet d’achat d’un terrain municipal, existe au sein des locaux de la mosquée de Valence depuis 2012, elle a été contrôlée tous les ans par l’Éducation nationale selon les dires du maire et celle-ci n’aurait rien trouvé à redire à la situation. Or, si la préfecture n’envoie aucune alerte et si l’Éducation nationale valide ce qui se passe au sein de l’école, il devient compliqué pour l’élu local de mener une bataille qui peut être vue comme une croisade. Cependant, si une fois que l’État se mobilise et assume son rôle, il se fait tirer dans le dos par un édile dont le premier rôle est pourtant d’être aussi un garant de la loi, alors il va être difficile de combattre efficacement l’entrisme islamiste. Et c’est bien là que nous en sommes à Valence.

Une colère qui confine à l’aveuglement

Certes le maire s’est plié à la demande de la préfecture et a annulé la délibération prévoyant la vente du terrain litigieux à l’association, mais manifestement le simple fait d’avoir dû entendre une raison et un pouvoir différent du sien a plongé l’édile dans une telle colère qu’elle confine à l’aveuglement. Dépourvu de toute mesure, le voilà qui se fait le meilleur avocat des islamistes, accusant la préfecture d’incompétence, faisant des procès d’intention aux journalistes qui le contrarient et prenant fait et cause pour un de ses adjoints que la sécurité intérieure accuse d’être lié aux frères musulmans. Autant on pouvait comprendre l’agacement du premier magistrat de la commune à l’idée de devoir gérer une crise politique et entendre ses interrogations quant au temps que met l’État à se positionner sur ce type de dossier. Mais une fois la décision prise, on aurait attendu un peu plus de hauteur et de sens de l’intérêt général.

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Or quand le JDD sort l’information selon laquelle l’adjoint au maire de Valence, Adem Benchelloug est proche des islamistes canal frère musulman (un mouvement qui n’a rien à envier au nazisme et dont le leader récemment décédé El Qarawi prônait l’exécution des Juifs, des apostats et des « kouffars » et justifiait le jihad), au lieu de prendre acte de l’information, l’élu fait le procès des décisions locales de l’État. Tout ce qu’affirme son adjoint est parole d’évangile si l’on peut dire, tandis que les Renseignements généraux et la préfète sont ses cibles favorites. Tout cela ne dénotant pas d’une grande tenue ni du minimum de décence commune que l’on est en droit d’attendre entre représentants d’institutions. L’Etat local (la préfecture ici) est accusé de régler ses comptes, sauf qu’à part l’exaltation en forme de délire de persécution parfois perceptible dans la logorrhée du maire, il n’y a aucune réflexion autour de la réalité de l’entrisme islamiste dans les collectivités locales. Pourtant celle-ci est connue et passe souvent par l’installation de mosquées et d’écoles hors contrat. Quant à accuser la préfète et certains représentants de l’Etat de se dire « après moi le déluge » et de mener des « démarches indignes » [1], on se demande bien sur quelles argumentations le maire de Valence fonde de telles accusations. À moins que contrarier un élu local soit en soi un crime de lèse-majesté.

Petit à petit, l’oiseau fait son nid

La seule chose sur laquelle l’édile est tout à fait entendable, c’est lorsqu’il se demande pourquoi des associations convaincues de liens avec les frères musulmans ne sont pas empêchées ou interdites, ou pourquoi l’école musulmane dont il est question a pu rouvrir pour cette rentrée scolaire. Certes l’homme ne doit pas ignorer à quel point notre droit rend compliqué la dissolution d’associations, mais il est clair que si les frères musulmans étaient classifiés comme organisation terroriste en France, cela pourrait donner une plus grande latitude d’action à l’administration.

Et si le cas de Valence était emblématique de la somme des lâchetés qui conduit à ce que les représentants d’une idéologie totalitariste, et violente, soit devenue dans certaines villes un allié incontournable du pouvoir, même quand celui-ci pourrait s’en passer pour gagner les élections ? C’est le cas de Valence où le maire a été réélu au premier tour avec presque 60% des voix. Il n’en reste pas moins que l’absence de ligne claire sur la façon dont les islamistes et plus particulièrement les frères musulmans fonctionnent, l’absence de doctrine de l’État dans sa manière de combattre l’entrisme islamiste comme l’absence de sens des responsabilités d’un certain type d’élu sont une véritable mine d’or pour les sectes islamistes. Diviser pour mieux régner est une leçon que les frères musulmans maîtrisent, se faire instrumentaliser par eux pour in fine servir une cause contraire aux valeurs de notre république est une expérience à laquelle le maire de Valence devrait mettre un terme au plus vite.

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[1] France Bleu Drôme Ardèche, dimanche 8 janvier 2023 « Je suis laïc et républicain » dit l’élu de Valence Adem Benchelloug




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Ancienne conseillère régionale PS d'Île de France et cofondatrice, avec Fatiha Boudjahlat, du mouvement citoyen Viv(r)e la République, Céline Pina est essayiste et chroniqueuse. Dernier essai: "Ces biens essentiels" (Bouquins, 2021)

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