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Noël Le Graët, la bévue de trop?

Et pourquoi encore Didier Deschamps ?


Noël Le Graët, la bévue de trop?
Noël Le Graët et Didier Deschamps, Clairefontaine, juin 2018 © HAMILTON-POOL/SIPA

Les propos du président de la Fédération française de football sur Zidane indignent. Noël Le Graët passe son temps à réparer ses bévues de toutes sortes! Les 14 membres du comité exécutif de la fédération se réunissent ce matin. En quoi la reconduction de Didier Deschamps est-elle évidente?


Non, Didier Deschamps n’a pas été et n’est pas un entraîneur « génial ». Non, ce n’est pas l’offenser que d’avoir pu envisager son départ et même de l’avoir souhaité. Oui, on a le droit de le critiquer, voire de s’étonner de sa reconduction quasi automatique à la tête de l’équipe de France jusqu’au mois de juillet 2026.

La Fédération française de football et Noël Le Graët ont validé cette prolongation avec le faux suspense de la prétendue hésitation du principal intéressé. On sait que le couple Noël Le Graët et Didier Deschamps, depuis quelques années, est dans une totale complicité. À tel point qu’il était convenu entre eux que le but serait déjà atteint avec la France en demi-finale.

Politique de la rhubarbe et du séné

Après l’échec au championnat d’Europe (avec Didier Deschamps cependant maintenu à son poste), pourquoi Noël Le Graët n’a-t-il pas poussé le maximalisme jusqu’à prescrire au moins l’obligation de la finale à la Coupe du monde et, pourquoi pas, de la victoire ? Cette exigence relative ne faisait pas peser la moindre pression sur Didier Deschamps qui était quasiment assuré de remplir son contrat.

Il suffisait d’observer la triste mine de Mbappé après la défaite et même sur le balcon du Crillon place de la Concorde pour mesurer à quel point ce compétiteur n’aspirant qu’à fêter la victoire se trouvait gêné devant cette multitude de personnes applaudissant une défaite.

D’emblée je me suis senti mal à l’aise avec cette politique de la rhubarbe et du séné entre Noël Le Graët et Didier Deschamps qui se soutenaient réciproquement et semblaient ne tenir aucun compte d’autres considérations que celles confortant à la fois le président et le sélectionneur. Se congratulant, ils bloquaient tout débat.

La polémique Zidane tombe mal

J’étais d’autant plus réservé face à cette entreprise – très longtemps à l’avance, on nous a annoncé que Didier Deschamps serait probablement prolongé et qu’il aurait carte blanche ! – que Noël Le Graët avait accumulé des griefs, des polémiques, des maladresses, des vulgarités et des indélicatesses qui pouvaient faire douter de sa fiabilité en tant que président de la FFF et du processus concernant Didier Deschamps qu’il avait fait valider par le comité exécutif.

Sa toute dernière saillie à l’encontre de Zidane pressenti comme sélectionneur au Brésil constituant un sommet de mépris et de vulgarité : « J’en ai rien à secouer, il peut aller où il veut […] je l’aurais même pas pris au téléphone… » Réaction immédiate et justifiée de Kylian Mbappé reprochant à Noël Le Graët d’avoir manqué de respect à « une légende ».

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À nouveau, Noël Le Graët a dû s’excuser pour sa « maladresse » et faire acte de repentance. Il téléphonera même à Zidane. Noël Le Graët passe son temps à réparer ses bévues de toutes sortes mais que ne ferait-on pas pour conserver une position aussi juteuse !

Noël Le Graët pourrait prendre exemple sur Lloris…

Le footballeur Christophe Dugarry, protégé par Zidane, malgré quelques exploits notamment bordelais, ne m’avait jamais ébloui mais l’analyste qu’il est devenu ensuite – une sorte de parler-vrai à la Ménès mais sans la grossièreté trop fréquente de ce dernier – a vu souvent juste et en particulier lorsqu’il a souligné, après la Coupe du monde et la finale manquée malgré l’étincelant Mbappé, qu’il serait normal voire souhaitable d’envisager la possible succession immédiate de Didier Deschamps par Zidane. On a crié au lèse-Deschamps alors que c’était tout simplement un propos de bon sens.

Noël Le Graët, âgé de 81 ans, s’accroche à sa fonction de président, a encore des ambitions mais, à considérer ces derniers mois, n’a-t-il pas perdu toute légitimité, y compris pour son opération programmée en faveur de Didier Deschamps, quand Zidane piaffe et apporterait du nouveau à cette équipe de France ?En dépit de l’excellent bilan de son sélectionneur et entraîneur actuels, elle serait sublimée par son successeur.

Hugo Lloris a annoncé sa retraite internationale. Pas le genre de NLG mais ce dernier pourra-t-il rester jusqu’en 2024 ? La ministre des Sports ne le « lâche » pas et il paraît que le président est lui aussi mécontent. La presse espagnole est indignée. Le « papy » en prend plein la tête ! Rien n’est plus agaçant que ce sentiment d’avoir été mis devant le Deschamps accompli !

Celui-ci va-t-il rester jusqu’en 2026 alors que maintenant il est clair que Didier Deschamps va être fragilisé par les « écarts de son président » et que, comme l’affirme Frank Leboeuf, « Noël Le Graët rend Didier Deschamps complice de ses bêtises sur Zizou »… ? La machine trop bien et trop vite programmée est en train de se dérégler. Le 11 janvier, à 11 heures, le Comex va se réunir avec Noël Le Graët et je ne sais quelle sera son issue en ce qui concerne ce dernier attaqué de toutes parts même pour des faits allégués très anciens (2014 !). La seule bonne nouvelle est qu’on envisage de réexaminer les conditions dans lesquelles la prolongation de Didier Deschamps a été effectuée, la durée de son contrat et son salaire.

En même temps, à un niveau modeste, j’ai conscience d’ajouter à une hypertrophie somme toute dérisoire par rapport à ce dont la France est réellement préoccupée et qui va en jeter une part dans la rue ! De cette effervescence enflée, quel gain pour le foot ? Quel gain pour Didier Deschamps ? Quel désastre pour Noël Le Graët ! Et Zidane attendra…




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Magistrat honoraire, président de l'Institut de la parole, chroniqueur à CNews et à Sud Radio.

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