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Il y a quelque chose de pourri dans le royaume de Belgique…

Flandre-Wallonie: une fête des voisins compliquée


Il y a quelque chose de pourri dans le royaume de Belgique…
16, rue de la Loi à Bruxelles, cabinet du Premier ministre du gouvernement fédéral. DR.

Dans Du fédéralisme au communisme ? Le carnage belge expliqué à un ami européen, l’essayiste Drieu Godefridi nous révèle le curieux tango que dansent la région flamande et la région wallonne, l’une économiquement florissante, l’autre fauchée comme les blés mais où le gauchisme a le vent en poupe.


Le Belge Drieu Godefridi, auteur libéral, docteur en philosophie, nous renseigne dans son dernier ouvrage sur le « carnage belge ». Belge, notre ami Drieu ? À la première page de son ouvrage, il se définit plus précisément comme un « Flamand francophone ». Élevé dans la langue de Molière et de Jacques Brel, les racines de son « arbre généalogique plongent, toutes, dans la Flandre profonde » nous apprend-il.

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En plus de nous éclairer sur le fonctionnement du fédéralisme belge, Godefridi analyse les raisons de la prospérité flamande et de la déroute économique wallonne. L’auteur s’essaie également à la prospective : à partir des données économiques actuelles, il présente plusieurs scénarios politiques probables pour l’avenir de la Belgique, à moyen et long terme. À commencer par la progression électorale des différents partis d’extrême gauche, et par conséquent,  la possible prise de pouvoir de ces derniers en Wallonie, dès 2024.

Quel avenir politique pour le plat-pays ? Une Wallonie indépendante ? Communiste ? Une révolte flamande ?

Comment en est-on arrivés là ? C’est à la fin des années 1960 que la Belgique se dote d’un système fédéral avec trois régions : la région Bruxelles-Capitale, la Wallonie qui dispose d’une autonomie économique, avec des régions, et la région flamande qui dispose d’une autonomie culturelle avec des communautés. Un système qui, au premier abord, peut paraître complexe – sans compter que Bruxelles est une ville historiquement flamande, qui se trouve en territoire flamand mais qui est majoritairement francophone.

De nombreuses réformes, qui ont dépouillé l’état fédéral de ses compétences au profit des Régions et des Communautés, ont été mises en place pour faciliter l’autonomie de ces dernières. Ces réformes n’ont rien arrangé aux difficultés économiques wallonnes, bien au contraire, la Wallonie étant de plus en plus dépendante de l’argent flamand pour maintenir son train de vie. Selon l’auteur, les Wallons ne travaillent pas assez et l’assistanat y est un véritable problème quand on sait par exemple qu’il n’y a pas de limite dans le temps à l’octroi d’allocations chômage, ce qui n’encourage pas les inactifs à chercher du travail. De plus, les Wallons n’hésitent pas à rabrouer les Flamands lorsque ces derniers leur demandent de faire preuve de rigueur budgétaire. Forcément, cela n’arrange rien aux relations des uns et des autres.

Bien que la Belgique francophone possède un brillant passé industriel, elle n’a pas été capable de le mettre en valeur et de le renouveler (ce qu’a brillamment réussi l’Allemagne voisine). Face à ses difficultés économiques, et face aux faibles recettes réalisées par la Wallonie, elle aurait dû réduire ses dépenses. Comme cela ne s’est jamais produit, la Wallonie est en déroute financière et budgétaire.

La formule du fédéralisme belge

Des compétences contre de l’argent. C’est de cette manière que Drieu Godefridi résume le fédéralisme belge. En effet, les Flamands désirent toujours plus de compétences pour parfaire leur autonomie culturelle et les Wallons désirent toujours plus d’argent flamand pour ne pas sombrer économiquement. Seulement, et c’est ici que le curieux tango entre les deux régions apparaît, pour que l’état fédéral accorde des compétences à la Flandre, celle-ci a besoin du soutien de la Wallonie. Soutien qui s’obtient par un transfert massif de liquidités de la Flandre vers la Wallonie. 6 milliards d’euros, c’est le montant annuel des transferts flamands vers la Wallonie. Sachant que les recettes fiscales wallonnes annuelles sont de 15 milliards, ces transferts représentent 40% des recettes wallonnes. Ils sont donc indispensables, la Wallonie ferait faillite sans, ce qui ne serait pas dans l’intérêt de la Flandre qui est toujours demandeuse de davantage de compétences. Depuis longtemps, de nombreux observateurs glosent sur la disparition de la Belgique. Bien au contraire, pour Drieu Godefridi, le fédéralisme belge n’est pas dans une phase d’épuisement mais connaît une accélération.

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Contrairement aux prêts qu’accorde le FMI à un État et qui sont soumis à des conditions drastiques, les prêts qu’accorde la Flandre à la Wallonie ne sont soumis à aucune condition économique. Cela aggrave le problème. Pour couronner le tout, la Wallonie semble connaître des difficultés lorsqu’il s’agit de dépenser son argent efficacement. Prenons l’exemple de l’enseignement : les Wallons dépensent plus que les Flamands et pourtant les classements internationaux PISA attestent que l’enseignement wallon est parmi les plus médiocres en résultats sur les 28 États membres de l’OCDE, tandis que l’enseignement flamand est supérieur à la moyenne ! Les avantages sociaux dont jouissent les enseignants wallons sont en outre considérables : alors qu’ils sont ceux qui travaillent le moins parmi les pays de l’OCDE, ils sont admissibles à la retraite à 55 ans. Selon Drieu Godefridi, dès qu’un responsable politique propose de revenir sur ces avantages, les syndicats socialistes wallons entrent dans un processus de blocage. Il n’y a pas à dire : les Wallons sont des cousins !

Difficile d’échapper à l’hégémonie culturelle de la gauche

Politiquement, médiatiquement, culturellement, économiquement, la Wallonie est sous influence socialiste. Grâce aux médias publics et à l’école, les socialistes wallons ont fait adhérer à leurs idées des générations entières.

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Drieu Godefridi pointe notamment du doigt le rôle joué par la RTBF (Radio-télévision belge de la Communauté française) et Le Soir, le quotidien francophone le plus important, qui sont, selon lui, de puissants relais de cette propagande socialiste. 80% des enseignants votent pour la gauche et l’extrême gauche : « on peut être en même temps un enseignant et un révolutionnaire marxiste » affirme un enseignant wallon cité dans le bouquin. Et désormais, le Parti Socialiste wallon a été dépassé sur sa gauche par deux partis politiques : ECOLO, le parti écologiste que Godefridi  nous présente comme le plus radical d’Europe et le PTB, un Parti communiste qui revendique « l’héritage marxiste dans son intégralité » !

Un pays sans opposition

Une des caractéristiques du système fédéral belge, enfin, est la neutralisation perverse d’une véritable opposition parlementaire.

Avec la proportionnelle, il y a d’une part une profusion de partis. D’autre part, en raison de la réalité territoriale et linguistique du pays, tout se retrouve multiplié par deux. Au Parlement fédéral, il y a ainsi deux partis libéraux (un francophone et un flamand), un parti socialiste francophone et son pendant flamand Vooruit. Ce sont des partis distincts politiquement, qui n’ont pas les mêmes programmes et se retrouvent concurrents lors des élections.

Les Wallons sont de plus en plus nombreux à envisager le communisme comme une solution. Drieu Godefridi dessine le paysage politique wallon actuel : 20% des voix vont aux communistes (PTB), 20% pour les socialistes (PS), et 15 à 20 % pour les écolos (ECOLO). Le PTB souhaite une sortie de la Wallonie des traités européens, mais pour cela il faudrait que la Belgique en sorte et les Flamands bien plus raisonnables s’y opposent évidemment. Restent deux possibilités : soit le PTB renonce à son marxisme révolutionnaire (inconciliable avec les traités européens), soit la Wallonie proclame son indépendance, sort de l’UE et de l’euro, ce qui entraînerait alors à coup sûr sa faillite. Comment va-t-elle renégocier le refinancement de ses emprunts sur les marchés sans monnaie propre ? « Avec un Wallécu ? » questionne ironiquement l’auteur. Ce dernier a abandonné l’idée que la Wallonie pourrait se réformer par la voie électorale et parlementaire. Cette impasse institutionnelle, cette absence de réforme structurelle fait que le changement viendra de l’extérieur, comme ce fut le cas pour la Grèce. Le réalisme économique s’imposera tôt ou tard et le retour de bâton pourrait être brutal. « Faut-il encore et toujours que des réalités vulgairement arithmétiques viennent casser l’ambiance » se désole Drieu Godefridi… Et certains se demandent pour quelles raisons le modèle du fédéralisme belge ne s’exporte pas ? Probablement parce que personne ne souhaite être le Flamand de la farce !

Du fédéralisme au communisme ? Le carnage belge expliqué à un ami européen, Texquis, juin 2022

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étudiant en journalisme

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