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L’amour de l’Art chez nos contemporains


Une amie m’a informé que de sublimes dessins au fusain de Michel-Ange, retrouvés dans une salle secrète de la basilique de San Lorenzo à Florence, avaient été dévoilés lundi à la presse. Et elle tenait absolument à ce que j’en parle. J’ai dû lui opposer une fin de non-recevoir catégorique : l’actualité de l’art étant déjà assez riche comme ça…
Sur le front des arts de rue, il est à noter – à Niort – la tenue toute récente d’une tonitruante parade d’artistes-clowns. La Nouvelle République du Centre Ouest a titré « Le 6ème Très grand conseil mondial des clowns a investi la cité ». L’adjoint à la culture de cette ville de près de 60.000 habitants, Nicolas Mariault, a déclaré : « Des milliers, alertés par cette soudaine effervescence, mirent fin à leurs sommeils télévisuels pour chausser nez rouge et sortir en grandes pompes. Chers amis, clownez donc sans entraves ! » Tandis que le président socialiste du Conseil général des Deux-Sèvres, Éric Gautier, a plaidé « pour la sainte alliance universelle du clown et du politique ! » On parierait que c’est déjà fait… Qui osera dire que l’art de rue subventionné n’est pas l’avenir de l’art ? Une artiste-clown à temps partiel explique : « Avec la crise, les gens ont envie et besoin de se détendre. Ils vivent ce qu’on leur apporte comme une libération ». Ça ne rigole pas…
Nos confrères de La Croix nous signalent, quant à eux, l’initiative de deux artistes lillois qui ont dépêché en sol macédonien un âne équipé de panneaux solaires, qu’ils ont baptisé Pégase. Affublé de son équipement photovoltaïque, l’équidé artistique semble en effet posséder des ailes, tel l’animal fantastique de la mythologie grecque. Les deux artistes présentent leur création en Macédoine, dans la région de Kavadarci à de pauvres gens qui n’en demandaient pas tant… « l’âne et ses ailes solaires ont permis d’allumer des cigarettes, de distribuer de la lumière, de couper du bois avec une scie sauteuse ou de brancher une tondeuse… » Mais l’un des artistes tempère : « Notre objectif n’est pas à vocation écolo ou humanitaire, il est avant tout artistique et visuel… » Ouf ! La Croix précise que le projet Pégase « décalé et paradoxal (…) se veut polysémique et soulève des questions sur l’écologie, la place de l’animal dans la société, la géopolitique, la mythologie mais aussi l’hypermodernité et le rapport à la surconsommation ». Comprenne qui pourra.
Ne nous attardons pas sur la prolifération des canards gonflables géants qui a préoccupé très sérieusement les autorités chinoises il y a quelques semaines… « La présence dans le port de Hong Kong d’un canard en plastique géant, œuvre de l’artiste néerlandais Florentijn Hofman, n’est pas passée inaperçue en Chine continentale où deux copies du palmipède gonflable ont été mises à l’eau à quelques heures d’intervalle. », ni sur la « distribution de 10.000 ballons roses pour la paix après une attaque à Kaboul » préméditée par l’artiste américano-colombien Yazmany Arboleda. Évoquons plutôt la colossale initiative d’un artiste chypriote qui a exposé lundi une vingtaine de toilettes en plâtre devant la Banque centrale à Nicosie… « exprimant d’une façon inédite son mécontentement face à la crise économique et financière qui touche le pays » (AFP) « à travers cette installation artistique, je dénonce visuellement les mauvaises choses qui sont arrivées à Chypre », justifie l’artiste Andreas Efstathiou. Les sculptures en plâtre ont l’aspect de cabinets lorsque l’on passe devant, mais vues de derrière, elles ressemblent à des pierres tombales. L’artiste ajoute, plein de confiance : « Je pense que les gens qui passent devant la Banque centrale et voient cette rangée de toilettes vont comprendre le message ». L’artiste touchera-t-il une commission ? Les technocrates européens, à l’origine du plan de sauvetage dénoncé par l’installation, trembleront certainement devant cette initiative contestataire ultra-violente d’une grande laideur…
Les générations à venir seront assurément fières de tout cet héritage artistique et bouffon. À moins que non.



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Il est l’auteur de L’eugénisme de Platon (L’Harmattan, 2002) et a participé à l’écriture du "Dictionnaire Molière" (à paraître - collection Bouquin) ainsi qu’à un ouvrage collectif consacré à Philippe Muray.

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