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Discriminations sexuelles: Drôle de genre à la Chancellerie


Discriminations sexuelles: Drôle de genre à la Chancellerie

On n’a pas bougé le procureur et le procureur général de Paris.
Le procureur général de Bordeaux a fait modifier, en réquisitions de non-lieu, celles initiales renvoyant Eric Woerth et Patrice de Maistre devant le tribunal correctionnel.
On pourrait penser qu’aucune chasse aux sorcières n’est opérée et que la hiérarchie judiciaire, avec le pouvoir socialiste, n’a rien à craindre.
Au ministère de la Justice, il y a cependant des changements effectifs ou programmés d’autant plus significatifs que l’inspiration politique vient du garde des Sceaux et des Directions qui, derrière une apparence technique, habillent idéologiquement ce qui leur est commandé.
Aussi, le changement annoncé à la tête de la Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) est préoccupant : Jean-Louis Daumas, d’une sensibilité de gauche dit-on, sous la pression du Syndicat des juges des enfants, annexe du Syndicat de la magistrature, aurait pour successeur Catherine Sultan dont toutes les prises de position sont marquées par un sulpicianisme dogmatique et volontiers donneur de leçons à ceux qui bêtement considèrent qu’à l’encontre des coupables, jeunes ou moins jeunes, la sanction n’est pas la mesure la moins appropriée. Donc sans doute un peu plus « progressiste » que Daumas, elle va amplifier le mouvement constituant la PJJ comme le lieu de toutes les mansuétudes et l’incarnation de l’humanisme faible (Le Figaro).
Là n’est pas l’essentiel.
Beaucoup de juridictions manquent de moyens au point que la justice au quotidien en est affectée et que des actions immédiates et urgentes devraient être menées.
C’est sans doute en pleine conscience de ces dysfonctionnements que deux cents procureurs et membres de leurs équipes sont convoqués au ministère de la Justice pour entendre la parole ministérielle et, ensuite, participer à un stage de deux jours à l’Ecole nationale de la magistrature.
Sur la politique pénale, les pratiques judiciaires, les prisons, l’exécution des peines ou les lenteurs insupportables du service public de la Justice ?
Non, pour débattre d’un sujet bien plus capital à la suite de la loi sur le mariage pour tous : sur les violences et discriminations à raison de l’orientation sexuelle.
Citoyen favorablement influencé par Christiane Taubira et Najat Vallaud-Belkacem, je comprends bien pourquoi il fallait, toutes affaires cessantes, mettre en train un appareil aussi somptuaire et important pour un thème évidemment prioritaire par rapport à l’ensemble des blocages et des misères judiciaires !
Les prisons, sur lesquelles le garde des Sceaux a presque autant parlé que sur le mariage pour tous, demeurent, pour beaucoup, dans un état indécent et appelleraient des mesures de restauration matérielle et humaine drastiques.
Attentif à la déréliction pénitentiaire, le gouvernement, avec nos deux ministres comme fer de lance de cette contribution impérative, après avoir vanté la loi sur le mariage pour tous, reconnaît qu’elle ne fera pas « reculer du jour au lendemain les expressions de peur, de rejet, d’intolérance et de violence vis-à-vis de la différence relative à l’orientation sexuelle et à l’identité de genre qui continuent de se manifester dans la société française » et a éprouvé le besoin de cette manifestation d’envergure et de ce stage pour mettre dans la tête des parquets que les homosexuels pouvaient dorénavant s’unir et que c’était merveilleux mais pas encore décisif.
Qui ne rendrait pas les armes devant une démonstration aussi éclatante de l’extraordinaire nécessité de ces charges supplémentaires imposées aux procureurs ? Pas un, je l’espère pour leur clairvoyance politique, ne songerait à remettre en cause l’immense progrès démocratique d’une telle massive convocation. Pas un, j’en suis sûr, n’oserait se prévaloir de tâches plus impérieuses et d’un temps à mieux exploiter face à l’incroyable évidence de « l’orientation sexuelle et de l’identité de genre » à explorer. Qu’on ne sache pas ce qu’est cette dernière notion et qu’on s’en moque ne doit pas arrêter les bonnes volontés : à force d’en parler, on finira bien par trouver le moyen de créer un problème !
Les mauvais esprits rétorqueraient que l’insécurité, la lutte contre la délinquance et la criminalité et les problèmes criants de la Justice ne seront pas concernés ni touchés mais ils auraient tort parce qu’ils manqueraient de cette utile lucidité idéologique qui fait comprendre que le dérisoire et l’inutile apparents sont profondément productifs. Ils occultent et, en même temps, distraient.
Dans le lot des protestataires rétifs, il y a encore Christophe Régnard, avec son caractère ronchon et indépendant, qui trouve que tout cela au fond est une mascarade chère en temps de crise et mobilisant trop de monde. Mais il ne préside que l’USM et il n’a pas eu l’habileté de fabriquer un « Mur des cons » seulement avec des personnalités de droite. Un U de trop. Un très mauvais point pour le garde des Sceaux.
Il y a surtout cet insupportable André Vallini qui, dans un entretien inséré dans une double page consacrée à l’absence de politique de Christiane Taubira, s’est permis, grâce à des réponses claires, nettes, cohérentes et équilibrées, acceptables par une gauche et une droite réalistes et humaines à la fois, de donner son avis sur des questions insignifiantes comme les prisons, l’utilité de la sanction, la philosophie pénale et l’état de la Justice (Le Figaro). S’il avait su ce qui se préparait sur « l’identité de genre », il ne se serait pas esclaffé, non, mais évidemment attristé! Ainsi le pire était donc sûr.
Trêve de plaisanteries !
Ce « drôle de genre » à la Chancellerie est une catastrophe. On n’a pas mieux à penser, à réparer et à accomplir ?

*Photo: campagne FIDL



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Magistrat honoraire, président de l'Institut de la parole, chroniqueur à CNews et à Sud Radio.

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