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Hollande battu à Solferino


Photo : jmayrault

Ça commence à ressembler à un mauvais roman : en tête dans tous les sondages et pourtant à la ramasse dans sa famille politique. Je parle bien évidemment de François Hollande qui écraserait à plate couture le président sortant en cas de second tour avec 60% des voix, si l’on en croit les sondages et les augures autorisés.

Pourtant jour après jour, c’est le syndrome de la débâcle, au sens météorologique du terme, qui touche le candidat du PS. Ici, un baron râle sur toutes les antennes parce qu’on lui envoie dans les pattes un écolo hostile aux législatives (faut dire que Meirieu à Lyon et Duflot à Paris, y’a mieux comme cadeaux de Noël). Là c’est un autre éléphant – Jack Lang – qui refuse de se soumettre au vote des adhérents de son propre parti pour se représenter à l’Assemblée. Moyennant quoi, il risque de se voir offrir par Solferino une autre circo, en récompense de son inconduite. Bref, ça tangue. Comme un mauvais remake de 2007, quand la pauvre Madame Royal avait vaillamment fait campagne sans l’aide du parti (dirigé à l’époque, au cas où vous l’auriez oublié, par le père de ses enfants et futur candidat…)

Ne nous racontons pas d’histoires : ce qui cloche au PS et spécialement dans cette campagne prétendument gagnée d’avance, c’est que le parti et ses baronnies plombent le candidat. Qui a envie d’aller se cartonner frontalement à la droite pour la présidentielle alors qu’il règne sur une grande ville, un grand Conseil Général ou une Région ? La gauche règne sans partage sur la France girondine des strates intercommunales, de la clause générale de compétence, des dotations générales de fonctionnement et autres joyeusetés pour amateurs de droit public.

Une France pleine de chargés de mission, de chargés de com’ et d’experts appointés, d’élus locaux affidés – sans parler des associations voire des entreprises « amies ». Et franchement, tout le monde le sait : le risque est bien plus grand de perdre sa baronnie locale quand on est dans la majorité. Dans l’opposition, on gueule national (le méchant gouvernement qui veut du mal aux Français) mais on pense local (faisons-nous réélire sans interruption depuis 20 ans). Ces élus-là ne vivent pas pour le parti, se foutent de sa discipline, de son programme, ils pensent et agissent courant ou clan. Ils aiment sans doute bien Hollande mais n’iront pas se mettre les tripes à l’air pour ses beaux yeux.

Alors pourquoi Hollande ne remet-il pas à sa place tout ce beau monde qui rechigne à se bagarrer et au premier chef Martine Aubry qui, à la tête du PS, est censée diriger cette cohorte d’élus de terrain bordélogènes ? Parce que le même Hollande a été premier secrétaire du même parti pendant 11 ans sans toucher à ce même système. Vu de Solferino, ce gigantesque bazar ne doit pas avoir que des désavantages. Disons-le, un tel capharnaüm, ça assure même de se maintenir en place pendant longtemps alors que ses candidats à la présidentielle (Jospin, puis Royal) se vautrent en beauté. Une fois postulant à l’Elysée, on se rend compte que ça plombe un max. Mais sans doute aurait-il fallu y penser avant.

L’autre facteur qui tue un peu l’élan réformateur et victorieux de la campagne, c’est la présence, que dis-je, l’omniprésence des ténors de la gauche sociétale. Celle qui veut le vote des étrangers extra-communautaires aux élections locales, au point d’en faire un des premiers textes qu’elle soumet au vote du Sénat libéré de ses forces conservatrices.

Bon c’est la crise, les classes populaires qui bossent ou voudraient bosser trinquent, mais la question des questions, c’est l’octroi d’une citoyenneté de seconde zone à des résidents qui n’en veulent pas. Une urgence qui traîne depuis 1981, et dont Mitterrand s’était habilement servi pour valoriser le Front national. Là, pas de double ou de triple jeu. Les sénateurs Verts et PS en veulent tout de suite et maintenant. Un geste fort promis pour les 100 premiers jours de la présidence Hollande en attendant sans doute le mariage gay ou la dépénalisation du chichon. Bon courage.

Enfin, Martine Aubry n’aide pas non plus. En dépit de ses proclamations de loyauté répétées, on peut douter de son engagement à faire gagner le candidat socialiste. Pour mémoire, elle et ses amis ont négocié des accords lamentables avec les Verts, elle a réussi à imposer, et sans douceur, des candidats aux législatives contre des favoris hollandistes, etc. Ce qui accrédite que François Hollande est faible (léger problème) ou qu’il ne veut pas s’en mêler (autre léger problème). D’autant que la première secrétaire s’appuie sur les baronnies et la gauche sociétale pour mener la vie dure à son candidat.

Il se murmure aussi que les amis d’Aubry pourraient jouer la défaite à la présidentielle et la gagne aux législatives, notamment en cas en cas de second tour Marine le Pen-Nicolas Sarkozy. Avec Aubry à Matignon natürlich. C’est pas mignon, ça ?

On pourrait trouver ce scénario fantasque voire déconnant, à ceci près qu’il tient la route. Et on peut se demander comment, à cinq mois de l’élection, un candidat pétrifié par les sondages et coincé contre le mur par les barons qu’il a fait émerger dans son propre parti peut se sentir pousser des ailes. La magie de la présidentielle, sans doute…



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