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DSK, Villepin : le business de l’innocence


Notre bestiaire politique national comporte désormais deux innocents estampillés par des juges au-dessus de tout soupçon : Dominique Strauss-Kahn et Dominique de Villepin. Tous deux ont retrouvé, jusqu’à nouvel ordre, une virginité judiciaire car il a été impossible de prouver « au-delà d’un doute raisonnable » qu’ils s’étaient rendus coupables d’agissements que les codes pénaux, américain pour le premier, français pour le second, enjoignent de punir.

C’est tant mieux pour eux, et aussi pour la bonne administration de la justice, car il est moins dommageable pour les libertés publiques de laisser filer un coupable que de condamner à tort un innocent.
Ceci dit, la prise de bénéfice politique d’une décision judiciaire favorable est peut-être de bonne guerre, mais n’est pas de nature à assainir le climat dans lequel se déroule la précampagne pour la présidentielle de 2012.

On sent bien que DSK (ou ses proches) cherchent la première ouverture pour se replacer dans la mêlée des primaires socialistes, par une intervention au 20h de l’ex-client de la suite 2806 du Sofitel de New York. Il existe en ce moment une armée de petites mains et de petites plumes qui peaufinent des éléments de langages destinés à réinstaller DSK dans le paysage politique français. Notons, pour le déplorer, que les excitées du féminisme radical l’aident puissamment dans son entreprise.

Quant à Galouzeau, son appel à la compassion nationale à l’issue du procès en appel qui l’exonérait de toute turpitude dans l’affaire Clearstream était plus que touchant. Il nous ferait presque oublier les manœuvres tordues de toutes sortes – et avérées – auxquelles il s’est livré en 2005 et 2006 pour écarter Nicolas Sarkozy de la présidentielle de 2002.

Les « investigateurs » ont beau s’agiter comme des malades et sortir des scoops en rafale, montrant que des Levantins interlopes ont transporté des valises d’avoine africaine pour telle ou telle écurie présidentielle en 1995 ou 2002, le peuple s’en bat l’œil. D’abord, ce sont de vieilles histoires, et la sagesse des familles enseigne que l’on n’a jamais intérêt à aller agiter le fond de la fosse septique, car les remontées risquent d’éclabousser tout le monde. Ensuite, parce que pour les non-initiés, ces
«affaires» sont totalement incompréhensibles. Pour qui bossent Jouhri, Bourgi ou Takieddine ? Faites le test auprès de vos proches et vous verrez le résultat.

En France, contrairement à l’Italie, la corruption au sommet est tolérée, pour autant qu’elle n’affecte pas la vie quotidienne des citoyens, car dans son immense majorité l’administration haute, moyenne et petite est préservée de ce fléau. L’innocence y est un métier d’autant plus facile à exercer que les Français ne sont pas trop exigeants envers leurs élites politiques, médiatiques, économiques ou littéraires.

C’est pourquoi les repris de justice politique, comme Juppé, Balkany, Emmanuelli et quelques autres moins connus, à gauche comme à droite, retrouvent sans problème la faveur du suffrage universel une fois leur purgatoire judiciaire achevé. Par ailleurs, la France est le paradis des «écrivains » plagiaires, des journalistes bidonneurs, qui s’auto-amnistient à tour de bras lorsqu’ils ont été pris la main dans le sac. Le Français est débonnaire, et pardonne pour autant que le pécheur présente des qualités professionnelles humaines suffisantes. Il pardonne d’autant plus facilement que lui-même est chaque jour tenté par la corruption des petites gens, cette fraude fiscale et sociale qui fait aujourd’hui l’objet d’une campagne de sensibilisation radiophonique. Alors, innocent ou coupable, quelle différence ?



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