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13-Novembre / 7-Octobre: une cause, deux effets

Malgré les attentats de Paris de 2015, toute une jeunesse est désorientée face au conflit israélo-palestinien


13-Novembre / 7-Octobre: une cause, deux effets
Place de la République, Paris, 13 novembre 2025 © Gabrielle CEZARD/SIPA

Dans la fascination de nombreux jeunes Occidentaux pour Gaza, il y a quelque chose qui dépasse la politique, et même la raison.

Une sorte de fièvre, le mirage d’une génération en quête de sens qui croit le trouver dans les ruines d’une ville détruite par l’attaque insensée du Hamas. Ils voient dans la souffrance palestinienne un miroir, celui de toutes les injustices qu’ils portent confusément en eux. Privés d’horizon, ils cherchent dans la douleur de l’Autre une transcendance instantanée. C’est l’explication romantique.

Ils ne connaissent pourtant presque rien du Proche-Orient, de ses guerres, des refus arabes, du fanatisme qui y progresse comme un incendie. Ils n’ont pas besoin de savoir, une image suffit. Un enfant couvert de cendres et de poussière, un immeuble effondré, et l’histoire entière semble tenir dans ces clichés. Nous vivons un temps où l’on a troqué la connaissance pour l’émotion. De nos jours, l’indignation se consomme comme un divertissement, portée par de faux chiffres, de fausses photos, et quelques vraies manipulations.

Surjouée par les politiciens professionnels de l’agitprop, cette émotion a la mémoire courte. Les mêmes jeunes qui manifestent aujourd’hui pour Gaza ont presque oublié ce qui s’est passé chez eux, un soir de novembre 2015. Des bistros et une salle de concert parisiens transformées en abattoir parce qu’on y buvait en terrasse, ou qu’on y écoutait du rock metal. Personne n’avait alors cherché d’excuses aux tueurs, ni blâmé la coalition occidentale pour avoir rasé Mossoul.

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Huit ans plus tard, le 7 octobre 2023, des djihadistes du même acabit ont massacré, torturé, enlevé – avec la même haine du monde démocratique et ouvert. Mais cette fois, une partie de notre jeunesse n’a pas vu les victimes israéliennes, elle n’a vu qu’un récit binaire, des opprimés qui se rebiffent. Là où elle savait reconnaître un massacre, elle a trouvé des justifications.

Ce brouillage moral est le symptôme d’un temps qui préfère le symbole au réel. Le temps d’un racialisme renouvelé et d’un postféminisme paradoxal qui, à l’université, ont trouvé une synthèse dans une idéologie intersectionnelle, islamophile et antisioniste, cache-sexe de l’antisémitisme. Les Frères musulmans – généreusement financés par le Qatar – et les réseaux proches de Téhéran ont compris ce qu’ils pouvaient tirer d’une génération déboussolée. Ils lui offrent une cause prête-à-porter, une indignation low cost, un destin sans risque. Hier, le Che offrait l’aventure par procuration ; aujourd’hui, la Palestine offre l’illusion de la révolte sur Instagram, sans quitter son confort. Une révolte au service du patriarcat le plus archaïque, de l’asservissement des femmes, de la répression des homosexuels et de l’élimination des opposants.

On ne peut reprocher à personne d’aimer la justice. Mais la justice commence par un constat simple : la première victime de l’islamisme au pouvoir à Gaza n’est pas Israël mais la population de Gaza elle-même, prise en otage par une idéologie mortifère qui la dévore, la surveille, l’endoctrine, et transforme chaque mort en argument. Boucliers humains voués, contraints et forcés, au martyr.

Dans ce théâtre de la compassion sélective, l’Etat hébreu paie le prix d’être un pays trop moderne, trop techno, trop occidental, trop complexe. La Palestine, elle, est devenue un mythe commode. On oublie qu’il n’y a pas de justice dans les mythes. La justice commence là où s’arrête le mensonge.



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