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Une école sacrificielle

Il n'y a pas que des mauvais élèves... Une tribune libre de Cécile Chabaud, auteur de Prof !: Ce que vos ados ne vous ont pas dit (L'Archipel, 2021)


Une école sacrificielle
Elie Semoun et Joséphine de Meaux, "L'élève Ducobu" © SIPA

Coup de gueule contre ces professeurs dysfonctionnels de l’Éducation nationale, qui, non contents de discréditer la profession, font surtout souffrir les élèves sans être jamais inquiétés !


Certains professeurs ont une chance infinie que notre système scolaire soit ce qu’il est. Une pomme pourrie.
En collège, lui prolonge son arrêt maladie sans être malade, et ses élèves n’ont pas cours depuis trois mois. Il est payé bien sûr.
Lui fait remarquer quotidiennement à des Noirs qu’ils sont noirs, à des Arabes qu’ils ont un nom imprononçable, voire pire. Mille fois signalé, jamais inquiété.
Elle, accuse les gamins d’être nuls : en véritable Cassandre, elle décrète qu’ils seront au mieux caissiers ou éboueurs. Ou livreurs.
Pour elle, les Noirs sentent. Encore eux. Pas de problème, à la suite de cela, on l’a nommée dans un lycée prestigieux, plus clair. Moins peuple.
Elle (car l’école n’est pas épargnée), profite de s’occuper de tout petits enfants pour les molester. Les bébés ça pleure de toute façon, alors qui saura?
Lui, et lui, et elle… Inutile de continuer à faire son Pétain. L’idée est là, d’ailleurs connue de tous.
Des profs sévères, très sévères, trop sévères voire parfaitement injustes sont légion. C’est le jeu, après tout. Ça forge. La vie n’est pas un bonbon et l’autorité est nécessaire. Mais ceux-là, non. Comment peut-on continuer à tolérer leurs pratiques?
Est-ce parce qu’il n’y a plus de profs en réserve que l’on doit garder tout le monde, coûte que coûte ? Des enfants souffrent. On brandit les cours d’empathie sur les apprentissages, pour se donner bonne conscience, et on laisse sévir des adultes qui n’ont pour eux ni la vocation, ni le respect. Que transmettent-ils ? Et que génèrent-ils ? De l’insolence, de la violence, un sentiment d’humiliation, d’abandon, une méfiance permanente envers l’adulte.
Peut-être ces profs souffrent-ils eux-mêmes. Un divan de psy fera l’affaire alors. Pas une classe de jeunes en devenir, à qui l’on doit montrer l’exemple, que l’on doit instruire, accompagner et aider à grandir.
Le fonctionnariat est un état confortable, que beaucoup de pays nous envient. C’est surtout dans l’Éducation nationale un système qui, lorsqu’il dérive, peut se révéler sacrificiel et éhontément verrouillé. Un professeur dysfonctionnel, violent, raciste y est protégé. En tout cas jamais renvoyé. On le change d’établissement tout au plus. Le ver reste dans le fruit, indéboulonnable.
De nombreux professeurs ont vraiment besoin d’être soutenus. Ils vont mal : pas de vague.
D’autres sont la honte de notre métier. Ils vont bien : pas d’inquiétude.

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Cécile Chabaud est professeur de lettres à Paris. Elle se fait connaître avec « Prof ! (ce que vos ados ne vous ont pas dit) », un témoignage drôle et cash sur le collège d’aujourd’hui. L’année suivante, elle publie « Rachilde, homme de lettres », roman primé qui exhume de l’oubli une romancière scandaleuse de la Belle Epoque. La dernière rentrée littéraire a vu la sortie d’« Indigne », histoire vraie d’un secret de famille, le procès de Georges Despaux, collaborationniste puis déporté à Auschwitz et à Buchenwald.

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