Accueil Culture «Le guide indispensable de l’univers de J.R.R. Tolkien!» — mais oui!

«Le guide indispensable de l’univers de J.R.R. Tolkien!» — mais oui!

"Atlas de la Terre du Milieu" (Bragelonne, 2022)


«Le guide indispensable de l’univers de J.R.R. Tolkien!» — mais oui!
L'écrivain britannique J. R. R. Tolkien photographié dans les années 20. D.R.

Notre collaboratrice, férue de mythes et de récits merveilleux, a craqué pour l’Atlas de la Terre du Milieu, un « beau livre » — il, n’est pas trop tôt pour penser à Noël — qui vous dit tout sur l’univers de Tolkien et les paysages sombres du Seigneur des anneaux, qui ressemblent pour partie à la Nouvelle-Zélande où Peter Jackson a réalisé ses films, et pour le reste à notre monde.


Parfois, la quatrième de couverture ne ment pas. « Le guide indispensable de l’univers de J.R.R. Tolkien ! » dit celle de l’Atlas de la Terre du Milieu. Et c’est vrai.

Ce splendide album de presque 2 kilos est l’une des dernières parutions relatives à l’univers de Tolkien — et l’une des meilleures. Nous croulons, de fait, sous les articles estampillés « Terre du milieu », même si l’on a cru un moment que la mort de Christopher Tolkien, fils de l’immortel auteur du Seigneur des anneaux, signerait la fin du filon. Entre les recettes de cuisine elfique ou la série Amazon Prime, l’Atlas de la Terre du Milieu de Karen Wynn Fonstad nous préserve de l’indigestion et de toute dénaturation simpliste.

Karen Wynn Fonstad (décédée en 2005) était cartographe, spécialisée dans les mondes imaginaires. Paradoxe que la cartographie de l’imaginaire : pourquoi faire rêver sur les rivages de Tol Eressëa et la voix d’Annie Lennox, sur les jardins à la française de l’Isengard et à la bonne ambiance du Poney Fringant, si le lecteur enchanté ne peut dire à son agent de voyage : « C’est là que je veux aller » ? Pourtant, c’est bien notre monde que l’on retrouve dans les reliefs et les recoins de ces cartes fictives. Remercions Jean-Charles Pasquer, Stéphane Arson et Romulad Belzacq pour cette réactualisation d’un atlas de 1991. 

Les cartes — planisphères, exagérations verticales, coupes transversales — sont éclairées par les toponymes et leur traduction, qui donnent les clefs minimales pour s’initier au processus de création linguistique de Tolkien : chez lui, où l’on parle « Occidentalien », comme chez nous, « au commencement était le Verbe », dans « Kúma », le Vide.

Ce monde a ainsi « la cohérence interne de la réalité » et au-delà de la Faërie, c’est « la Terre telle qu’elle est, en particulier la terre à l’état naturel ». Tolkien a recentré l’Europe et notre monde, du point de vue du Comté, ce trou au fond duquel vivait un hobbit — ce que Jonathan Coe a parfaitement saisi avec son Middle England, paru en français en 2019 sous le titre Le Cœur de l’Angleterre

L’emblème choisi pour la couverture est plus subtil qu’il n’y paraît : le Grand Œil de Sauron, qui a tant inquiété la génération biberonnée aux films de Peter Jackson, trône au milieu d’une rose des vents ; c’est par lui que l’on arrive en Arda. On peut embrasser cette terre-là en prenant en compte seulement la chronologie de ses évènements, du Premier Âge au Quatrième Âge, ou la chronologie de ses fictions, du Silmarillion au Seigneur des Anneaux. C’est ce qu’invite à faire la planche introductive des Cercles du Monde qui, sur le modèle de ce qu’avait fait Dürer, refait découvrir la Pangée. Derrière la Montagne du Destin capricieuse et explosive, le Stromboli. Derrière l’absence de végétation en Mordor, le climat aride du Nevada : la Terre du Milieu est notre terre. C’est une relecture commentée des textes de Tolkien, les distances et les jours sont estimés et les itinéraires aident à appréhender les pérégrinations des personnages. 

Mais on peut aussi choisir de feuilleter simplement cet album et de se laisser appâter par tel ou tel nom, tel trajet fléché, tel assortiment de couleurs, pour découvrir à quoi il correspond. La Grande Marche, la Bataille des Cinq armées ou la Venue des Hommes sont autant d’éléments que l’on peut lire en parallèle d’un voyage dans la cosmogonie du Silmarillion, les aventures du Hobbit ou encore l’amour de Beren et Lúthien, pour mieux en saisir le lore — comme on ne dit pas en elfique mais en anglais. En sus, des cartes régionales et des cartes thématiques. 

Tout ! Vous saurez tout sur le climat de la Terre du Milieu, la froidure et l’inhospitalité des territoires de Morgoth et de Sauron, et sur l’historique des migrations des Hobbits et des Nains. Et pour tous ceux qui croient que la langue elfique ne se résume aux inscriptions sur l’anneau unique, ou au « Fernando » écrit en Tengwar sur l’avant-bras de Fernando Torres, le footballeur espagnol, le schéma diachronique sur « les langues de la Terre du milieu » vous montrera que le Noir parler du Mordor est aussi isolé en Terre du milieu, comparé au Sylvain ou au Sindarin, que le basque l’est au français et à l’espagnol. 

Alors oui, ce livre est pour les férus, les mordus, les Tolkiénistes jusqu’auboutistes, mais il est beau. Il ravira les fans et les joueurs de Krigpleaids, ceux qui peignent en vert la semoule sous les pieds d’une figurine en bronze pour parsemer un plateau d’une fiction de pelouse. Bref, pour ceux qui s’émerveillent encore de la beauté de l’Impossible où « la Terre du milieu est à la fois ronde et plate ».

Atlas de la Terre du Milieu

Price: 50,00 €

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Le Silmarillion illustré

Price: 44,90 €

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Beren et Luthien (français)

Price: 22,00 €

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Le cœur de l'Angleterre

Price: 9,90 €

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Agrégée des Lettres et Docteur ès Lettres des Universités d'Aix-Marseille et Autonome de Madrid.

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